Parlement: Ahoussou-Kouadio comme Guillaume Soro ?

Par L'Inter - Parlement. Ahoussou-Kouadio comme Guillaume Soro ?

Ahoussou-Kouadio sera-t-il remercié comme Guillaume Soro ?

On peut tout reprocher à Adama Bictogo sauf d'être un vil hâbleur. Ses propos, entre décembre 2018 et janvier 2019, sur Guillaume Soro qui devait démissionner du perchoir en cas de refus du parti unifié, avaient suscité une vaste polémique.

Par dessus-tout, ils avaient provoqué l'ire du député de Ferké. Nous étions en pleins préparatifs du premier congrès ordinaire du parti unifié Rhdp. A une conférence de presse, jeudi 6 décembre 2018, Adama Bictogo invitait, pour la première fois, et de manière explicite, Guillaume Soro à rendre le tablier s'il refusait d'adhérer au Rhdp : « c'est clair aussi au niveau des institutions. Évidemment, si vous êtes président de l'Assemblée nationale, que vous n’adhérez pas au Rhdp, il y a une certaine honnêteté avec soi-même.

On ne peut pas tricher en permanence avec le peuple. Si vous avez décidé de ne pas être Rhdp, n'attendez pas qu'on vous demande de partir. Posez le tablier parce que ce n'est plus votre tablier, désormais. Laissez-nous assumer notre bilan et notre histoire. La politique, c'est aussi le respect de ses engagements. Ce n'est pas le petit calcul ». Courroucé d'avoir été ainsi apostrophé par le député d'Agboville, Guillaume Soro décidait de répliquer, mardi 1er janvier 2019, dans le village de Lafopko (Ferké) : « J’ai entendu quelqu’un dire qu’il va me chasser… Il veut m’humilier ou il veut m’insulter ? Il peut me chasser, moi ? Bon, comme je le dis, les temps ont changé. Comme les temps ont changé, même tous les gringalets peuvent parler aussi, sinon, ce n’est pas comme ça. Le destin d’un homme n’est pas dans la main d’un autre homme » (in L'inter du 3 janvier 2019).

Quatre jours après la sortie de Guillaume Soro dans son fief de Ferké, Adama Bictogo, à une cérémonie au palais de la culture de Treichville, en rajoutait une couche. Ce 5 janvier, le président du comité d'organisation du congrès du Rhdp, utilisait, pour la toute première fois, l'image du « tabouret », introduite depuis, dans le lexique politique ivoirien : « Après le 26 janvier (2019), si tu es ministre et que tu n’es pas Rhdp, tu libères le tabouret. Tu es député mais dès lors que tu es président d’institution, si après le congrès tu n’es pas Rhdp, tu libères le tabouret. Si tu es sénateur et que tu n’es pas Rhdp, tu quittes le tabouret. Si tu es conseiller économique et social et que tu n’es pas Rhdp, tu quittes le tabouret» (in L'inter du 7 janvier 2019).

Vendredi 8 février, à l'occasion d'une session extraordinaire de l'Assemblée nationale, Guillaume Soro a annoncé qu'il démissionnait de la présidence de l'institution. Depuis, l'ancien Premier ministre a multiplié les sorties médiatiques, expliquant presqu'anaphoriquement, qu'il a été contraint de démissionner. En fait, la machine du Rhdp a eu raison de Guillaume Soro. Adama Bictogo, lui, n'avait pas tenu des paroles en l'air. Que le même acteur, avec un raisonnement identique- à savoir que le président d'une institution doit être issu de la majorité- interpelle, aujourd'hui, aussi directement Jeannot Ahoussou-Kouadio, ne saurait être fortuit. « La politique se nourrit de courage et d’autres valeurs.

On ne peut être Pdci la nuit et Rhdp le jour. Allez-y leur dire que notre patience a atteint ses limites (...) Nous disons ici depuis le Bafing que, conformément aux règlements du Sénat, le président de cette institution doit refléter la majorité politique. Le président du Sénat doit être Rhdp et c'est tout », dit Bictogo.

Le jeu d'équilibriste du sénateur du Bélier- qui ne se détermine pas clairement entre Pdci et Rhdp- insupporte la hiérarchie du parti unifié. Cette dernière voit dans l'attitude de Jeannot Ahoussou-Kouadio ni plus ni moins que de la « ruse ».

Samedi 13 avril 2019, à la cérémonie inaugurale du Festival international de la culture et des arts de Daoukro (Ficad), le président du Sénat s'expliquait sur son positionnement politique de l'heure : « je suis fidèle au président Henri Konan Bédié, fidèle à toute épreuve (...) Je suis loyal à notre nation, je suis loyal au président Alassane Ouattara, je suis loyal au gouvernement. Souvent, la loyauté et la fidélité se confrontent mais quand la loyauté et la fidélité se retrouvent, alors c’est l’homme dans toute sa dimension, dans toute sa splendeur » (in L'inter du 15 avril 2019).

Manifestement, les explications un peu philosophiques de Jeannot Ahoussou-Kouadio, sont loin, très loin, de satisfaire la direction du Rhdp. Aujourd'hui, les jeux sont clairs : soit l'avocat adhère au Rhdp, soit il est contraint de démissionner par la majorité au Sénat.

Kisselminan Coulibaly

SOURCE: L'inter