Débats et opinions: A quel(s) clan(s) appartiendrait Laurent Gbagbo ? (suite et fin), par le Professeur Dédy Séri
Par Correspondance particulière - A quel(s) clan(s) appartiendrait Laurent Gbagbo ? (suite et fin), par le Professeur Dédy Séri.
Rappel. Le président Laurent Gbagbo n’appartient à aucun clan, aucune chapelle. Sa famille, c’est le socialisme démocratique qui repose sur le socle de la liberté, de l’égalité, de la justice, de la tolérance et du respect mutuel. On l’appelle, pour cette raison, le Fils du Peuple africain. Et vouloir s’approprier égoïstement cette icône de stature planétaire, c’est la rabaisser, diviser son parti et faire reculer son combat de “décastisation“ de la Côte d’Ivoire et du monde.
«… Fait remarquable, les récentes statistiques des massacres et autres exactions infligés au peuple de Côte d’Ivoire par la coalition des forces franco-onusiennes de la CEDEAO et des FRCI/Dozo, montrent que la violence des occupants n’a épargné aucune région donc aucune ethnie. Normal dans la mesure où Laurent Gbagbo est véritablement l’enfant du peuple, le leader africain le plus accepté de tous : il n’a exclu personne et personne ne l’a exclu. Il n’appartient donc à aucun clan et nul clan ne peut le revendiquer, sans le rapetisser.
En outre il faut savoir qu’en accédant au pouvoir d’Etat le 26 Octobre 2000, Laurent Gbagbo a mis en application sa vision du social : la démocratisation des services de santé et d’éducation, la décentralisation administrative, l’électrification rurale sans considération régionale ou ethnique. Soyons encore plus concret : outre cela, la présidence de la République sous Laurent Gbagbo fut le creuset de l’unité nationale en tant qu’elle reflétait la diversité ethnique ivoirienne ; elle était un vaste centre hospitalier en termes de prises en charge de cas souvent désespérés. Enfin, Laurent Gbagbo ne peut appartenir à aucun clan en dehors du socialisme démocratique, son crédo ; il n’a jamais heurté la conscience collective ni violé la Constitution en revendiquant un certain rattrapage qui n’est rien d’autre qu’un tribalisme primaire. En d’autres termes, la proximité qui compte aux yeux de Laurent Gbagbo, c’est la proximité idéologique, celle qui accorde le primat au socialisme démocratique et rejette la domination intérieure et extérieure. Plus fondamentalement, peut et doit être considéré comme proche du président Gbagbo, tout acteur (membre ou non du Fpi, noir, blanc ou jaune, riche ou pauvre), qui contribue à l’enracinement et au triomphe du socialisme démocratique en Afrique et dans le monde.
Mais n’oublions pas que le capitalisme néolibéral a toujours combattu et combat le socialisme démocratique partout et par tous les moyens. Ainsi s’explique la guerre de la France contre la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo que nous subissons depuis le 19 Septembre 2002 jusqu’à nos jours. Ceux des militants du Fpi qui n’ont pas voulu aller jusqu’au bout et qui voulaient tourner la page de Laurent Gbagbo, ont quitté le Fpi. Immense est la multitude de ceux qui n’ont pas franchi le Rubicon de la trahison et de la perfidie. Non seulement ils n’ont pas déserté l’idéal du socialisme démocratique malgré les affres de la prison, de l’exil et de l’humiliation, mais encore et surtout, ils continuent le combat de Laurent Gbagbo sous la houlette de dignes fils de l’Afrique tels que Obiang N’guema, Thabo M’beki, Jerry Rawlings et d’éminents intellectuels de par le monde.
En revanche, la poignée des Juda politiques qui ont tourné le dos à Laurent Gbagbo et à son parti dès le 11 Avril 2011, sont connus et visibles. Parmi eux certains ont poussé la déloyauté jusqu’à créer des partis politiques. Faisons remarquer que ces nouvelles familles ont une particularité qui fait sourire l’observateur : elles s’opposent au Fpi au lieu de s’opposer au régime Ouattara. En tout état de cause, ces militants ont cessé d’être des proches de Laurent Gbagbo. Voilà ce que veut dire “tourner la page de Gbagbo“.
Cette interprétation s’est fait jour suite au dernier réaménagement du Secrétariat général du parti (04 Juillet 2014). Certains observateurs ont vu là un conflit associé à la ligne du parti ; d’autres ont parlé d’une guéguerre pour le contrôle du Fpi qui ne dit pas son nom ; d’autres encore ont expliqué le malaise par l’ampleur et la durée de la répression. En tout état de cause, la ligne du parti ne saurait être la pomme de discorde dans la mesure où le moyen d’accès au pouvoir est et demeure la voie pacifique au sens de luttes démocratiques et dialogue politique. Autrement dit, le débat n’a rien à voir avec une plus ou moins grande proximité des uns et des autres avec Laurent Gbagbo. Il s’agit plutôt de la question de l’adéquation entre les moyens et la fin du socialisme démocratique, aujourd’hui. Un problème d’approche ou de méthodologie, le comment de la lutte. Là-dessus, la sagesse africaine nous aide à inventer des solutions pertinentes : « C’est celui qui a le bras tordu qui sort le pangolin géant d’un tronc d’arbre tordu ». Le pangolin géant représente, ici, un bien précieux et d’importance stratégique : la fin, c’est-à-dire la libération de Laurent Gbagbo, la réconciliation nationale et la reconquête du pouvoir d’Etat en vue de la refondation de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique. Le tronc d’arbre tortueux qui abrite le pangolin géant désigne, quant à lui, la complexité-sinuosité de l’adversité. Autrement dit, c’est parce que l’adversité est immense, pluridimensionnelle, qu’elle mérite qu’on lui applique une thérapie tout aussi complexe qui prend la figure du ‘’bras tordu’’. En effet, la réalité (sociopolitique) s’apparente à une savonnette : si vous la prenez par un bout, c’est l’autre bout qui vous échappe. Pourquoi ne pas la prendre par les deux bouts ? Pourquoi ne pas mener le combat pour la libération de Laurent Gbagbo, de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique par tous les moyens démocratiques y compris le raffermissement de l’unité du Fpi?
Faire baisser la tension avant le congrès de Décembre 2014. Après les rumeurs dont parlait le président Dadié le 20 Septembre dernier, voici que le Fpi est confronté à un autre climat de vives tensions, alors que les militants s’activent à l’élaboration d’importants documents du congrès. Une rencontre d’autant plus attendue qu’elle a lieu plus d’une décennie après celle de Juillet 2001 et qu’elle est placée sous le signe de l’unité et de la remobilisation : « Un Fpi uni et remobilisé pour la libération du président Gbagbo, indispensable à la réconciliation nationale et pour la reconquête démocratique du pouvoir d’état ». Avec ce thème, la crise de Juillet paraissait relever du passé. Que non. Les rumeurs se sont dissipées certes mais au profit de propos et d’actes susceptibles d’attiser la tension et de faire accoucher le congrès d’un plus grave déficit de cohésion.
En effet, il n’y a pas si longtemps, le Fédéral de Gagnoa avait proposé Laurent Gbagbo comme candidat pour briguer la présidence du Fpi lors du prochain congrès. Cette proposition qu’on crue solitaire, a été amplifiée le Dimanche 05 Septembre, par la déclaration du porte-parole des Secrétaires généraux de Fédération, monsieur Soro Kelogohouo : « Nous proposons solennellement la candidature de Laurent Gbagbo à la présidence du Fpi(…) afin qu’il soit élu pour le bonheur, l’unité et la cohésion du Fpi » (Notre Voie, No 4832 du 07 Octobre 2014, p.3). Cette proposition signifie-t-elle que les Fédéraux ruminent toujours les reproches faits à Affi N’guessan lors des précédents comités centraux alors même que ce dernier avait présenté ses excuses publiques à propos de l’entrée du Fpi à la Cei ?
Mais dans le même temps, le président du parti, profitant d’une tournée dans l’Est du pays a dit : « Les militants du Fpi se comportent comme cette femme dont le mari est décédé et qui, par émotion, s’accroche au cercueil pour ne pas qu’on l’enterre. C’est la Communauté Internationale qui fait et défait les hommes politiques en Afrique. Par exemple Houphouët, Bozizé, Ben Ali. Même le président Gbagbo fut libéré en 1982 sous la pression du vice-président américain Al Gore » (L’Expression, No 1537 du 02 Octobre 2014, P.4). Si l’on rapporte la métaphore du défunt mari à la réalité concrète du Fpi, on est tenté de désigner le décès en question par l’éloignement définitif du président Gbagbo ; et la veuve qui se débat malgré l’évidence du départ, par les militants du Fpi. Une telle analogie, au lieu de créer une nouvelle espérance en liaison avec la vocation unitaire et rédemptrice du congrès en perspective, fragilise le moral de la quasi-totalité des militants. D’autant plus que ces derniers sont en proie à une certaine émotivité. Celle-ci, doit du reste être relativisée et comprise comme la conséquence d’un déficit de formation politique : le Fpi n’a jusqu’ici pas eu le temps de former ses militants et donc de réduire significativement cette charge émotive. Le point de vue du président, parce que publiquement exprimé et en dehors des instances du parti, semble avoir attisé la tension au lieu de la faire baisser. La situation ainsi créée est certes délicate mais non irréparable. Que faire ?
Écarter la proposition faisant du président Gbagbo le candidat d’un clan à la présidence du Fpi. Car dans cette hypothèse, et quels que soient les résultats du scrutin du 13 Décembre, il est peu probable que la cohésion et la remobilisation reviennent parmi les militants. Dans tous les cas ils doivent éviter de faire intervenir le président Gbagbo dans leurs querelles de “quartier“ qui sont la preuve de la vitalité du parti (Affi N’guessan). Une démarche d’intérêt pédagogique s’impose, à mon humble avis : le président Affi et ses camarades (pétitionnaires) devraient “entrer en brousse“, sans délai et présenter d’ici quelques jours, une proposition consensuelle de candidature. Ce sera la préfiguration de l’unité et de la concorde attendues. Car il s’agit de revitaliser le Fpi et de lui permettre d’arracher la libération du président Gbagbo et la réconciliation nationale.
Une contribution Professeur Dédy Séri