Côte d'Ivoire: Blé Goudé est en résidence ‘`protégée``, selon Hamed Bakayoko

Le 01 février 2013 par AFP - Blé Goudé est en résidence ‘`protégée``.

Charles Blé Goudé, proche de l`ex-président ivoirien Laurent Gbagbo, arrêté récemment et inculpé de "crimes de guerre" pour son implication présumée dans la crise de 2010-2011, est en "résidence protégée", a annoncé jeudi le ministre de l`Intérieur, Hamed Bakayoko.

"Il n`est pas détenu de façon clandestine, il est en résidence - on va dire - protégée", a-t-il déclaré lors d`une réunion avec des responsables du Congrès panafricain pour la justice et l`égalité des peuples (Cojep), mouvement politique de Charles Blé Goudé.

Vu la "personnalité" de l`ex-chef des "jeunes patriotes" pro-Gbagbo, "ce n`est pas évident d`assurer sa sécurité dans une maison d`arrêt ordinaire", a justifié le ministre, sans précision sur son lieu de "résidence".

Les avocats de Charles Blé Goudé ont vivement dénoncé mercredi le fait de ne pas connaître son lieu de détention et affirmé que leur client subissait une "torture morale".

Aux responsables du Cojep qui ont réclamé sa libération et une amnistie pour tous les détenus du camp Gbagbo, le ministre de l`Intérieur a demandé de
"faire confiance à la justice". "La loi d`amnistie est un processus qui ne peut pas faire l`économie de la justice, de la repentance et du pardon", a-t-il dit.

Arrêté le 17 janvier au Ghana après plus d`un an et demi de cavale et extradé dès le lendemain, l`ancien ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo a été inculpé le 21 janvier notamment de "crimes de guerre", en lien avec les violences postélectorales de décembre 2010-avril 2011 qui ont fait environ 3.000 morts.

Arrêtée à la fin de la crise, l`ex-Première dame Simone Gbagbo est également détenue dans une résidence, dans le nord du pays, comme l`avait été Laurent Gbagbo avant son transfert fin 2011 à La Haye à la Cour pénale internationale (CPI), qui le soupçonne de crimes contre l`humanité.

Sous sanctions de l`ONU depuis 2006 et considéré par des ONG internationales comme responsable de nombreuses violences, Charles Blé Goudé, surnommé "général de la rue" pour sa capacité de mobilisation, a été régulièrement cité comme une cible possible de la CPI.

L`un de ses avocats internationaux avait déclaré à l`AFP avoir appris que la justice ghanéenne avait arrêté son client dans le cadre d`un mandat d`arrêt de la CPI, mais la Cour n`en a ni confirmé ni infirmé l`existence.

AFP

Enlevé au Ghana et interné au secret en Côte d’Ivoire : Blé Goudé subit un traitement inhumain

Publié le vendredi 1 fevrier 2013 | Notre Voie
Le lieu de détention et les conditions de sa détention tels que décrites par le président du Cojep constituent manifestement une menace pour la vie de Blé Goudé. Et pourtant la communauté internationale se tait. Notamment la Cellule des Droits de l’Homme de l’Onuci. Demain sera certainement trop tard. Et on versera des larmes de crocodile.

Il y a plusieurs façons de conduire un homme à la mort. On peut le fusiller à bout portant. On peut le tuer à l’arme blanche. On peut l’empoisonner. Mais on peut aussi le tuer à petit feu en le soumettant à une torture qui, même douce, peut lui causer à court ou à long terme la mort. Ceux qui ont enlevé le président du Cojep, Charles Blé Goudé, et qui le gardent en un lieu secret ont certainement choisi la dernière stratégie pour le mettre définitivement « hors d’état de nuire ».

En effet, présenté avant-hier mercredi 29 janvier à un juge au tribunal d’Abidjan-Plateau, Charles Blé Goudé a refusé d’aborder la question de fond tant qu’il n’aura pas été transféré dans une prison de la place. Notamment la Maca. En Côte d’Ivoire, en matière de justice, la place de tout citoyen placé sous mandat de dépôt se trouve dans l’une des prisons du pays. Dans le cas de Blé Goudé, bien que placé sous mandat de dépôt, il est gardé dans un lieu tenu secret par ses ravisseurs. Ce lieu est même inconnu de ses avocats. Pire, Blé Goudé lui-même affirme ne pas être en mesure de situer géographiquement le lieu où il est gardé au secret. Cela signifie qu’au moment où on le conduit dans ce lieu ou au moment où l’extrait de là pour le conduire devant le juge, il est encagoulé. Et une fois à l’intérieur de son lieu de détention, il n’a aucun contact avec l’extérieur. Et donc, comme c’était le cas pour le président Laurent Gbagbo à Korhogo, Blé Goudé ne voit ni le soleil, ni la lueur du jour. Pour tout dire, Blé Goudé ne voit pas la couleur du temps. C’est donc à juste titre que son avocat insinue que son client est soumis à une torture morale. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Blé Goudé subit une véritable torture morale qui peut le conduire à une mort lente.

Le traitement inhumain infligé au président du Cojep tend finalement à accréditer la thèse défendue par la défense selon laquelle Blé Goudé n’a pas passé de deal avec le pouvoir pour rentrer en Côte d’Ivoire. Quel est ce deal dans lequel celui qui devrait en être le bénéficiaire accepterait de subir un tel traitement inhumain ? A moins que Blé Goudé ne soit un maso. Par contre, le traitement inhumain qui lui est fait met de l’eau au moulin de ceux qui soutiennent que Blé Goudé a été victime d’un enlèvement.

Mais ce qui est inquiétant, c’est le silence complice de la communauté internationale face à la torture qu’on fait subir à Blé Goudé. On ne comprend surtout pas le silence de la Cellule des Droits de l’Homme de l’Onuci. Et pourtant ancien président de la jeunesse patriotique et ancien ministre, Blé Goudé est aujourd’hui un leader politique. C’est donc une personnalité qui compte dans ce pays. Et c’est quand le pire va arriver qu’on va demander la mise sur pied d’une commission d’enquête dont on ne connaîtra d’ailleurs jamais les résultats. C’est peut-être la meilleure manière d’amener les Ivoiriens à se réconcilier.

Boga Sivori

Justice ivoirienne: Blé Goudé prend de gros risques (Soir Info)

Passé l’âge d’or. Place, aujourd’hui, à la cage prison…Comparaissant avant-hier mercredi 30 janvier 2013, devant la doyenne des juges d’instruction, Delphine Cissé Makouéni, dans l’affaire de multiples crimes de sang qui l’oppose au ministère public ivoirien, Charles Blé Goudé a choisi de jouer au chat et à la souris avec la justice ivoirienne.
Le captif, l’ancien « phare » du régime déchu de Laurent Gbagbo, à qui, il est reproché, entre autre, d’avoir fait « griller vif » des Ivoiriens, s’est catégoriquement refusé « de répondre aux questions de fond » de la juge d’instruction, se barricadant derrière des préalables. Il a notamment, invoqué « une torture morale » dont il dit être victime. Ce sont ses avocats qui, à leur sortie d’audience, ont fait part à la presse, du refus de leur client d’aborder ces questions particulièrement sensibles. « Nous avons tenu à parler avec notre client, il nous est revenu qu’il subit une véritable injustice, une véritable entorse à la loi, parce que la réglementation ivoirienne prévoit qu’en cas de mandat de dépôt, il faut conduire la personne concernée dans une maison d’arrêt.

Charles Blé Goudé se trouve aujourd’hui dans une maison quelque part comme il nous l’a dit lui-même. Il n’arrive pas encore, géographiquement à identifier le lieu où il est détenu. Il nous a dit qu’il est dans une maison. En tout cas, sachez-le, il n’est pas dans une maison d’arrêt. D’où son refus d’aborder toutes les questions de fond. Nous en sommes restés là, malgré l’insistance du juge d’instruction qui voulait aborder le fond des choses… Il a dit, je suis là, je suis en Côte d’Ivoire, je veux, lorsqu’on me reproche quelque chose, qu’on soit respectueux de la loi » a dit son conseil, Me N’Dri Claver.

Des sources proches de la justice ivoirienne révèlent que ce refus de Blé Goudé est vite perçu, comme « une manière de se soustraire », sinon, une approche dilatoire pour ne pas affronter la justice ». Les quelques juges avec qui nous avons échangé hier, soutiennent, à tort ou à raison, que « Blé Goudé ruse avec la justice et qu’il finira par se faire prendre au piège de sa désinvolture ». Le « général de la rue » qui a imposé, aux Ivoiriens, un patriotisme « étroit » et de « fer » implacable, a exigé, de la justice, un bon traitement, avant qu’il ne s’avise de répondre aux questions des juges enquêteurs. Après six heures, d’interrogatoire, il est resté cramponné à ses préalables, refusant de répondre aux questions.

En refusant de coopérer, Blé Goudé agit de manière très dangereuse pour la suite du procès… « Il s’expose, de fait, à un danger dont les conséquences pourront lui être fatales » assure un magistrat. Là où il pourrait, par exemple bénéficier « de circonstances atténuantes » ou même d'une clémence, il vient de saborder toutes ses chances par « son attitude pour le moins outrageante » à l’endroit de celle qui tient entre ses mains, son sort », renchérit son collègue. Il devrait, dès lors, « le jour du procès, assumé, pleinement, les conséquences, qu’on imagine négatives, des préalables qu’il a soulevés pendant l’instruction », a poursuivi notre interlocuteur. Comment expliquer l’option de l’omerta derrière laquelle s’est retranché Charles Blé Goudé, d’ordinaire très bavard ?

S’agit-il d’une fuite en avant pure et simple ou alors nargue-t-il le peule à travers la justice ? Dans un cas comme dans l’autre, l’ex-leader des jeunes patriotes s’expose à des risques énormes. Disons qu’il se met en danger face à la justice… Alors qu’il n’a de cesse de clamer son innocence, se disant même prêt à affronter « la Cpi », Blé Goudé avait là, une bonne occasion de s’expliquer sur son rôle réel ou supposé, dans l’exacerbation de la crise post-électorale. En tout état de cause, peut-être qu’il joue à qui risque gagne.

Armand B. DEPEYLA in Soir Info