La Grande interview - Affi N'guessan parle: "C'est ridicule de penser qu'on peut tourner la page Gbagbo". "La crise a été un test de vitalité du parti"."Je condamne l'attaque du siège du parti" (1ère Partie)

Par Notre Voie - Affi N'guessan parle "C'est ridicule de penser qu'on peut tourner la page Gbagbo". "La crise a été un test de vitalité du parti"."Je condamne l'attaque du siège du parti"

Affi N'guessan, président du FPI.

Le 4 juillet 2014, par la décision n° 005-2014/pp/FPI, le président du Front populaire ivoirien (FPI), a rendu publique la composition
de la nouvelle de direction du parti à la rose. Une décision qui a fait des mécontents qui n’ont pas hésité à le faire savoir.
Alors que son organisation était encore dans la tourmente, Pascal Affi Nguessan n’a pas hésité à nommer un représentant du
FPI à la nouvelle Commission Electorale Indépendante (CEI). Il n’en fallait pas plus pour déclencher le courroux de ses adversaires
internes. Ainsi, Affi a-t-il été couvert de tous les péchés d’Israël.
Plusieurs fois sollicité par votre quotidien préféré, le leader du FPI a toujours voulu réserver la primeur de sa version des faits
aux structures de son parti qu’il n’a eu de cesse de rencontrer ces dernières semaines. Aujourd’hui, actualité oblige, au terme de
ses échanges avec toutes les instances de son organisation, le président Affi a accepté de nous faire partager ses commentaires
et analyses de la situation. Interview.

De façon générale, et quasiment
toute la presse ont vu dans les conclusions
de la médiation une défaite d’Affi…

p.a.N : Je ne mène pas un
combat personnel ; mais le
combat pour le renforcement
du fPi en vue des grandes
batailles qui nous attendent
dont celle de la libération du
président Laurent Gbagbo. Si ma « défaite » peut contribuer
à cet objectif et au renforcement du fPi, tant
mieux.

N.V : Quelle urgence y
avait-il concrètement à
procéder à ce réaménagement
?

p.a.N : C’est l’urgence de la
restauration du fPi, l’urgence
de la libération du président
Laurent Gbagbo. Il faut savoir qu’il y a beaucoup
de nos camarades qui sont encore en prison ; que cela
va faire bientôt quatre ans que des camarades sont en exil ; qu’il y a eu la confirmation
des charges contre le Président Laurent Gbagbo ;
qu’on s’achemine vers un procès. Il faut faire vite, ne
pas perdre de temps. Ce secrétariat Général nous dote
d’une vice-présidence chargée de coordonner les actions
pour la libération du président Gbagbo. Aujourd’hui,
il est urgent de
faire rapidement le bilan de tout ce que nous avons engagé
depuis 2011, en terme
d’actions pour la libération
du président Gbagbo, afin
d’identifier et de mettre en
place une stratégie pertinente
pour la suite du dossier.

N.V. : Vous parlez de libération
du président
Gbagbo, pourtant vos adversaires
vous accusent
de vouloir tourner la page
Gbagbo !

p.a.N : Ce sont des messages
d’intoxication dont le
seul motif réside dans la lutte
de positionnement que j’ai
évoquée plus haut. Sinon
aucun fait ne peut accréditer cette thèse ni avant la crise
ni après ma sortie de prison. Au demeurant, je peux dire
que la question de la libération
du président Gbagbo a connu une intensité supplémentaire
avec toutes les tournées que j’ai effectuées
à l’intérieur du pays. Partout,
les populations ont eu l’occasion
d’exprimer à haute voix
leur attachement à Laurent
Gbagbo et ont réclamé sa libération.
La question
Gbagbo n’avait pas l’ampleur
actuelle dans l’opinion. Les films de mes meetings et
autres sorties sont là. J’ai
demandé qu’une compilation de ces films soit à la disposition
de tous ceux qui souhaiteraient
en savoir davantage.

N.V. : Comment expliquezvous
alors ces accusations
?

p.a.N : Stratégie de disqualification,
lutte de positionnement,
combat de leadership.

N.V. : Le limogeage de personnalités
comme Laurent Akoun du poste de secrétaire
général et le dépouillement
du portefeuille de vice-président de Simone
Gbagbo ne constituaientils pas un gros risque ?

p.a.N : Le problème est de
savoir si le fPi a besoin de
réformes ou pas. S’agissant
de simone Gbagbo, c’est
moi-même qui l’ai proposée.
elle n’était pas dans le secrétariat
général d’avant ma sortie de prison. Je l’ai fait
pour donner un message politique.
Pour dire que simone
Gbagbo n’est pas en prison
à odiénné uniquement en
tant que simone Gbagbo ou
en tant qu’épouse du président
Laurent Gbagbo, mais surtout en tant que militante
; en tant que responsable
politique du fPi. Elle est
donc détenue en tant que
prisonnier politique. Voilà le message que je voulais faire passer en l’intégrant dans la direction du parti dès ma sortie de prison. mais en même temps, j’ai dû affecter ses attributions à deux autres vice-présidents qui les ont
assumées par intérim. Quand il a fallu refaire le secrétariat général, j’ai jugé qu’il était plus simple de
confier directement les attributions
de simone à d’autres
personnes et de la
maintenir en tant que viceprésidente,
puisqu’elle ne
pouvait pas exercer ces responsabilités.
dans la situation
actuelle, c’est son statut
symbolique de personnalité
politique qui est important,
et non le contenu du portefeuille.
Les camarades ont
estimé qu’il fallait mettre un
contenu, on l’a fait.

N.V. : Comment avez-vous
apprécié la réaction de la
Première Dame qui a saisi
le comité de contrôle à cet
effet ?

p.a.N : Je préfère ne pas
m’étendre sur la question
puisque la crise est passée.

N.V : Comme illustration
des accusations, vos adversaires
évoquent la célébration de la Fête de la liberté à Bongouanou où la
ville aurait été inondée de vos posters à l’exclusion
de ceux du président Gbagbo…

p.a.N : C’est ridicule et affligeant
de penser que c’est
avec des posters ou des affiches qu’on peut tourner la
page Gbagbo. Gbagbo ce
n’est même pas une page,
c’est un livre. et ce livre d’actions
politiques et de contributions
à l’histoire de la Côte d’ivoire, c’est dans la
conscience des ivoiriens que ces données se trouvent, mais surtout dans le coeur de ceux qui l’ont suivi dans son combat. Ce ne sont pas dix posters disposés, ou même mille, dans un coin perdu de
la Côte d’ivoire qui vont permettre de tourner la page Gbagbo. Au demeurant, je
n’étais pas le président du comité d’organisation de la fête de la liberté. Ce que j’ai
observé pour ma part, c’est que la fête de la liberté à
Bongouanou a été une occasion
pour le peuple du fPi, à
travers les pancartes venues
de toutes les contrées du
pays, de témoigner son soutien
et son affection au président
Gbagbo. Donc Laurent
Gbagbo était bel et bien présent
à la fête de la liberté de
Bongouanou.

N.V. : Monsieur le président,
il y a aussi cette
phrase d’un chef de
M’Batto qui vous a prédit
un destin présidentiel qui
alimente les polémiques.

p.a.N: Les ivoiriens sont libres
d’apprécier les hommes
politiques comme ils l’entendent.
Je ne vois pas le
drame qu’il y a à ce qu’un
chef de village prête un destin
à X ou Y. En quoi cette
opinion peut-elle constituer
une menace pour l’image du
président Gbagbo ? il ne faut
pas être paranoïaque.
Gbagbo n’a pas besoin de
ça.

N.V : D’aucuns parlent de
règlement de compte à
Laurent Gbagbo, parce
que vous n’auriez pas digéré
votre limogeage de la
Primature…

p.a.N : Là encore, il n’y a
aucun élément qui puisse
accréditer cette thèse. mon
départ de la Primature date
de 2003. Cela fait plus de dix
ans. Au contraire, depuis
cette date, je n’ai fait que travailler
aux côtés du président
Gbagbo. Pour la campagne
électorale 2010, il m’a choisi
comme son porte-parole. s’il
y avait un contentieux, il ne
l’aurait pas fait. Avant cela, à
tous les moments importants,
j’ai été aux côtés du
président Gbagbo. Aux négociations
d’Accra iii. Je l’ai
représenté aux négociations
d’Accra ii. Au plus fort de la
crise, c’est moi que le président
Gbagbo a choisi pour le
représenter à Addis-Abeba
pour les conclusions du
Panel des chefs d’etat africains
sur la crise postélectorale.
Après Addis-Abeba, il
m’a envoyé en Afrique du
sud pour rencontrer le président
Zuma pour avoir l’opinion
de l’Afrique du sud sur
l’issue de la crise ; il m’a envoyé
en Guinée-equatoriale
auprès du président obiang
nguema. Ce sont là des
actes qui prouvent que mes
rapports avec le président
Gbagbo étaient des rapports
de confiance. C’est ce que je
retiens. tout autre propos
n’est que mensonger et diffamatoire.

N.V : Que la plupart de vos
décisions soient peu comprises
ou suscitent des
mécontentements n’est-ce
pas la preuve que quelque
part vous avez pêché
dans la méthode ?

p.a.N: La mise en place du
secrétariat Général a suscité
des réactions diverses et
des mécontentements de la
part de ceux qui se sont sentis
défavorisés ou dévalorisés.
L’évolution du parti
l’exigeait. Diriger, c’est aussi
prendre des risques.

N.V : Les questions de
stratégie et de légitimé ont
été à l’ordre du jour du comité
central du 30 août.
N’était-ce pas une façon
de faire le Congrès avant
le Congrès ?

p.a.N :Iil appartient au comité
central de savoir
jusqu’où il va dans ce débat.
il est évident que le débat de
fond revient au congrès qui
doit trancher sur la question
de la ligne et peut-être sur
les autres questions. La ligne
est connue. Elle ne change
pas au gré des événements.
nous avons fait le choix de la
transition pacifique à la démocratie.
il est peu probable
que même le congrès décide
d’une autre ligne. Par contre
sur la stratégie, je pense que
le comité central peut être informé
de ce que fait la direction et apprécier cette
stratégie ou faire des recommandations par rapport à
cette stratégie.

N.V : Pensez-vous que la
crise née depuis le 4 juillet
est derrière nous ?

p.a.N : Oui, on peut considérer
que la crise est derrière nous après la médiation. Maintenant il s’agit de gérer les conclusions qui sont ressorties de
cette médiation.

N.V : On a quand même
senti une sorte de doublon avec le rapport du comité
de contrôle qui vous accable.
Peut-on savoir les relations
que vous avez eues
avec cette instance pendant
la crise ?

p.a.N : Le comité de
contrôle a été associé à
toutes les étapes de la médiation. Il a donné son accord
à ce que la crise soit
gérée dans ce cadre de conciliation. donc, nous
avions les quatre acteurs :
Les pétitionnaires, le comité
de contrôle, la médiation et le président du parti. nous
avons tous accepté qu’étant donné la tournure que les
événements avaient prise et
les initiatives qui sont venues
spontanément d’un certain
nombre de personnalités de la société civile ou même du
parti, que cette question soit
examinée dans ce cadre de recherche de consensus plutôt
que sur la base des
textes. Et c’est ce que nous
avons tous admis et que
nous avons accompagné.

N.V : Il y a quand même eu
un rapport du comité de
contrôle…

p.a.N : On aurait pu faire
l’économie de ce rapport
étant donné que la question
avait été réglée par la médiation.
Personnellement, je ne
me suis pas prononcé làdessus
pour ne pas relancer
le débat sur la crise. Au demeurant,
j’observe que ce
même comité de contrôle
avait adressé au président
du parti ses vives félicitations
lors de la dernière convention
du parti.

N.V : Vous dites que la
crise est derrière alors que
ce n’est pas exactement le
sentiment qu’on a eu à
l’occasion du Comité central
du 14 août où l’un des
acquis de la médiation a
failli être remis en cause…

p.a.N : C’est aussi cela la
vie démocratique à l’intérieur
du fpi. Ce n’est pas parce
qu’il y a la médiation qui est
un organe non statutaire que
les militants sont obligés de
s’incliner. Avant de l’adopter,
ils ont quand même tenu à
faire connaitre leur opinion. Y compris sur le contenu de
la médiation et c’est leur
droit. Ce qui est important c’est qu’en fin de compte, ils
ont endossé l’ensemble des conclusions de la médiation.

N.V : Monsieur le président,
avez-vous déjà envisagé
de démissionner ?

p.a.N : Non ! Je ne peux pas
envisager cela dans la mesure
où une crise est une situation qui arrive dans toutes
les organisations ; Et qu’on
peut même considérer comme une opportunité pour
réajuster les structures et le
fonctionnement de l’organisation.
moi, j’ai une attitude positive vis-à-vis de ce qui
se produit pour voir quelles
sont les opportunités que
ces situations offrent pour
améliorer l’existant, pour dynamiser et pour avancer.
C’est dans cette logique que
je situe la crise.

N.V : Et vous pensez avoir
la marge de manoeuvre nécessaire
pour réaliser ce
que vous souhaitez ?

p.a.N : Bien sûr ! etant
donné que l’objectif à court
terme, c’est la tenue du
congrès, je pense qu’il n’y a
pas d’obstacle, particulièrement,
en ce qui me concerne
pour l’organiser dans les
mois à venir. Etant donné
que, au-delà de la médiation,
l’appareil tel que je le concevais
a été renforcé. Je tiens
toujours à rappeler que mon
objectif, c’était un secrétariat
général qui me permette
d’avancer et je l’ai eu. C’est
avec cet appareil que nous
allons organiser la vie du
parti et préparer le congrès.

N.V : Monsieur le président,
comment envisagezvous
votre avenir avec le
FPI ?

p.a.N : (Rires) mon avenir
ce n’est rien par rapport à
l’avenir du fPi. Ce qui est
important, c’est l’avenir du
fPi. Ce n’est pas l’avenir
d’Affi en tant qu’individu.
C’est la libération du président
Gbagbo qui nous
préoccupe ainsi que celle de
tous nos camarades qui sont
en prison, le retour des exilés.
Je ne cesserai jamais de
le dire, ce sont ces problèmes-
là qui nous préoccupent.
La restauration de la
Côte d’ivoire, de la démocratie
et des libertés, la sécurité,
la bonne gouvernance, la
lutte contre la pauvreté de
nos compatriotes etc. Comment
le fPi peut participer à
ce travail de refondation de
la Côte d’ivoire, c’est cela
qui me parait essentiel.

N.V : Et pourtant Monsieur
le président, vous êtes accusé
de vouloir vendre le
parti au régime en place.

p.a.N : Je ne sais pas ce
que ça veut dire vendre un
parti. est-ce que c’est quand
je vais sur le terrain à travers
les meetings que je vends le
parti ? Est-ce que c’est le dialogue politique pour que
nos camarades soient libérés ? Je ne vois pas par quel
acte on peut considérer que je vends le parti. et pour
quelle raison quelqu’un
achèterait un parti qui lutte contre lui ? Est-ce que ouattara
achèterait le fPi pour
que celui-ci organise un boycott de son recensement général ? il y a des actes qui
montrent qu’à la tête du
parti, nous sommes dans la dynamique de la lutte pour
atteindre tous les objectifs
que nous nous sommes
fixés. Maintenant, des gens peuvent ne pas comprendre
la stratégie que j’adopte, mais ça ne veut pas dire que
nous sommes dans une autre chose.

N.V : Monsieur le président,
au moment où vous
dites cela, la presse annonce
avec insistance que vous vous apprêtez à entrer au gouvernement.
Qu’en dites-vous ?

p.a.N : Je le dis à tous ceux
à qui j’ai l’occasion de le dire,
depuis que je suis sorti de
prison jusqu’à ce jour, personne
ne m’a parlé d’entrer au gouvernement. A titre
privé ou officiel, personne ne
m’a parlé de l’entrée du fPi
dans un gouvernement. Personne.
Le parti lui-même n’a jamais abordé cette question
dans ces instances ; ce n’est
pas à l’ordre du jour.

N.V : Il y a un cadre du Fpi,
membre du secrétariat général
qui a fait une tribune dans un journal pour vous
interpeller sur la question.

p.a.N : Comme je n’ai pas
l’occasion de lire toutes les
tribunes, je le dis et il faut
que tous les militants
sachent qu’à ce jour, ni au
Pdci, ni au rdr, ni à quelque
niveau que ce soit, personne
ne nous a parlé d’entrer
dans un quelconque gouvernement.

N.V : Ce sont donc des rumeurs
qui sont relayées ?
Affi à nos reporters : «La ligne du Fpi est connue. elle ne change pas au gré des événements. C’est la transition pacifique à la démocratie».

p.a.N : Ce sont des rumeurs.
mais il faut aussi savoir
que ce sont des rumeurs
qui peuvent être distillées
par le pouvoir pour diviser
les militants. elles peuvent
être distillées à dessein pour
susciter des débats, des polémiques
et diviser les militants
du Fpi. Il faut donc que
les militants soient vigilants
et ne se laissent pas distraire.

N.V : Toutefois, êtes-vous
favorable à un gouvernement
d’ouverture ou
d’union ?

p.a.N : Ce que nous voulons,
c’est que nos camarades
qui sont en prison soient libérés, que le président
Gbagbo soit libéré, que
les comptes de nos militants
soient dégelés, que tous
ceux qui sont en exil rentrent
et qu’il y ait la démocratie. Le
fPi est un parti qui s’est toujours
battu pour conquérir le
pouvoir d’etat par les urnes
et non pour participer aux
gouvernements des autres.
nous sommes toujours dans
cette dynamique.
Je ne vois pas la raison que
le fPi aurait aujourd’hui à
entrer dans un gouvernement
qui a échoué et dont on
attend de sanctionner la gestion
à l’occasion des prochaines
élections.

N.V : Quand on regarde les
crises en Afrique, on se
rend compte que c’est
souvent les gouvernements
d’union qui sont proposés. Alors que diriezvous si cela vous était proposé
?

p.a.N : Ce n’est pas un gouvernement
d’ouverture qui
va régler les problèmes de la
Côte d’ivoire. ma conviction
est que ce sont les etats Généraux
de la république qui
peuvent permettre à la Côte d’ivoire de solder le passé, de résoudre tous les problèmes liés aux crises à répétition que connait le pays depuis une vingtaine d’années, et de fonder un nouveau consensus national.
mieux qu’un gouvernement,
Il faut organiser les etats Généraux de la république.
C’est la solution pour que la Côte d’ivoire s’en sorte. C’est un passage obligé. Qu’on le veuille ou pas et
quel que soit le nom qui sera
donné, les états Généraux
de la république s’imposeront. C’est vrai qu’à ce jour,
notre discours n’a pas encore
reçu l’écho souhaité,
mais je persiste à penser
que seuls les etats Généraux
de la république peuvent
permettre à la Côte
d’ivoire de sortir véritablement
de la crise et de se propulser
en avant.
N.V : Votre rencontre avec
le président Hollande a fait
couler beaucoup d’encre
et de salive dans vos
rangs. Avec le recul aujourd’hui,
pensez-vous
que cette rencontre était
opportune ?

p.a.N : C’est une rencontre
éminemment importante. un
message politique clair que
le fPi n’est plus ostracisé,
qu’il jouit de la considération
de la communauté internationale
et qu’il est un interlocuteur
crédible. Ce repositionnement
est capital pour
la résolution des problèmes
du parti.

N.V : Où en êtes-vous
alors avec la réintégration
du FPI dans l’Internationale
Socialiste ?

p.a.N : La posture du président
Hollande vis-à-vis du
fPi est un signe d’un retour
prochain du fPi à l’internationale
socialiste. De son
côté, le Comité Afrique de
l’is présidé par mon ami emmanuel
Golou du PsB du
Bénin, s’active pour accélérer
ce retour.

N.V : Dans un récent numéro
de Jeune Afrique,
Laurent Akoun a déclaré
que la tendance que vous
représentez au FPI est minoritaire.
Quel commentaire
?
p.a.N : Allons au congrès
pour que les militants décident.
Il ne sert à rien de spéculer.

N.V : Monsieur le président,
l’un des sujets de
discorde, c’est la question
de la Commission électorale
indépendante (CEI).
Vous êtes accusé d’avoir
désigné de façon unilatérale
un représentant du
FPI dans cette commission.
Y avait-il urgence ?

p.a.N : La question de la
Cei est un sujet délicat. La
Cei renvoie à des souvenirs
douloureux, aux meurtrissures
de la crise postélectorale,
à l’arrestation du
président Laurent Gbagbo et
au drame que vivent à
l’heure actuelle les militants,
le parti et des millions d’ivoiriens.
C’est un sujet sensible
et je comprends l’émotion
qu’il suscite et les réactions
de certains camarades. Parler
de Cei, c’est ouvrir des
plaies, des blessures. Mais
nous sommes un parti politique
sur lequel comptent
des millions d’ivoiriens. La
frustration, le ressentiment,
la colère ne doivent pas
nous aveugler et nous égarer.
ensuite, il y a le contexte de
crise interne dans lequel se
trouvait le parti. Cela n’a pas
permis au fPi de s’impliquer
fortement dans la question
de la Cei. Mais cette défaillance
a été quelque peu suppléée
par l’Alliance. Au
niveau de l’Alliance dans laquelle
nous assumons la
présidence, nous avons eu
suffisamment de débats sur
la loi, sur la posture que
nous devions adopter et
nous sommes arrivés à la
conclusion qu’à défaut d’une
révision de la loi, il fallait exiger
un bureau consensuel.
et que ce serait la moins
mauvaise façon de participer
à cette institution sans être
marginalisé, sans faire de la
figuration ou avoir un rôle
d’accompagnement.
nous avons donc exigé que
le poste de président de la
Cei nous soit accordé et que
nous ayons un poste de
vice-président et un des
postes de secrétaire. nous
avons hésité pendant longtemps,
je dirais même résisté.
Puisque, entre le
moment où il nous a été demandé
de proposer nos représentants
et le moment où
nous avons dû le faire, il
s’est passé près de deux
mois. A un moment donné, il
fallait se décider. Nous
l’avons fait à titre conservatoire
et en toute responsabilité
pour quatre raisons.

N.V : Lesquelles ?

p.a.N : Premièrement, parce
que la question de la Cei
n’est pas seulement une
question électorale. Elle est
d’abord politique. il s’agit de
savoir si le fpi et les différents
partis membres de l’Alliance,
acceptaient et se
décidaient à entrer dans le
jeu politique ou à rester en
dehors du jeu politique. depuis
la crise, c’est la première
fois qu’une place est
offerte à l’opposition dans
une institution qui n’est pas
une institution de l’exécutif,
qui n’est donc pas compromettante.
rentrer dans la Cei, c’est
d’abord affirmer une option.
L’option du jeu politique, du
dialogue politique, de la participation aux institutions politiques
de la démocratie,
pour résoudre tous les problèmes
auxquels le parti est
confronté. C’est une option
stratégique : la stratégie de
l’action politique, de la négociation
politique, du lobbying
pour dénouer toutes les inimitiés
accumulées contre le
fPi depuis plusieurs années,
pour nouer des amitiés et tisser
des alliances qui vont
nous permettre de renverser
le rapport des forces et de
gagner toutes nos batailles,
en particulier la bataille pour
la libération du président
Laurent Gbagbo. Tout le
monde s’accorde à dire que la question de la libération du président Gbagbo est politique.
Comment résoudre un problème politique si on n’est pas dans le jeu politique?
L’on sait que pour soutenir ses demandes de mise en liberté provisoire du président Laurent Gbagbo, Me Emmanuel Altit s’est essentiellement
appuyé, notamment en février 2014 puis en juin 2014, sur les résultats de notre stratégie de l’action politique,
en mettant en exergue « le rôle central du FPI dans le processus politique ivoirien actuel », « la volonté partagée du FPI et du gouvernement ivoirien de surmonter leurs différends », « la légitimation
du FPI comme interlocuteur incontournable du dialogue démocratique en Côte d’Ivoire », pour conclure que « (…) la question de la libération provisoire du président Laurent Gbagbo est un élément important du dialogue engagé par les deux camps
», qu’elle « s’inscrit pleinement dans le processus de réconciliation nationale » et que « le président Gbagbo, conscient des responsabilités qui lui incombent vis-à-vis de la Cour et vis-à-vis de la Côte d’Ivoire, n’a aucune intention de se soustraire à la justice. Il poursuit le même
objectif que les membres
de son parti : la réconciliation
entre les Ivoiriens ».
Nous devons continuer à
donner des arguments politiques
à la défense pour sortir
le président Gbagbo de
cet enfer. Le président
Gbagbo lui-même a dit que
la phase de la violence est
finie et qu’il faut faire place à
la phase civile, c’est-à-dire
les négociations. evidemment,
le jeu politique n’exclut
pas des manifestations
politiques - bien au contraire
- pour appuyer les négociations
politiques. toute autre
stratégie assise sur des logiques
de vengeance, de
violence, d’épreuve de force
compromet la libération du
président Gbagbo. Être à la
Cei est un message que
nous voulons donner à la
fois à l’opinion nationale et
internationale. Nous
sommes dans le jeu politique,
quel que soit ce que
nous allons faire par la suite
au niveau électoral.
La deuxième raison qui motive
notre présence à la Cei,
c’est qu’une place à la Cei
peut être un instrument de
lutte, un moyen de pression
supplémentaire. etant donné
que nous sommes dans le
jeu politique, il faut que les
conditions du jeu soient réunies
; que la question de la libération
des prisonniers
politiques soit réglée. On ne
peut pas être dans le jeu politique
et avoir ses comptes
gelés, avoir ses camarades
de lutte en exil. etre à la Cei,
être dans le jeu politique,
renforce la crédibilité de nos
revendications pour le dégel
des comptes. C’est donc un
moyen de pression pour la libération
des prisonniers,
pour la libération des maisons,
pour la sécurité, l’encasernement
des frCi, le
démantèlement des dozos,
etc. Si on veut que le jeu politique
soit transparent, il faut
que la sécurité soit garantie
pour tous, que la liberté d’expression,
la liberté de meeting
soit garantie. Si on est
dans le jeu politique on doit
avoir accès à toutes les localités
de Côte d’ivoire pour
nous exprimer. si vous êtes
dans le jeu politique, ça vous
ouvre plus de perspectives.
Si on est en dehors du jeu,
on risque d’être hors-jeu.
La troisième raison, c’est
que cette Cei n’est pas là
seulement pour organiser les
élections présidentielles de
2015. Elle va organiser les
législatives, les municipales
et les régionales qui vont suivre.
ne pas y être, c’est être
en dehors de tout le processus
; c’est être en dehors du
processus de recensement
électoral, du découpage des
circonscriptions électorales.
Cela comporte un risque important
pour l’avenir du parti.
Donc au-delà de ce que
nous pourrons décider pour
les élections, il est bon que
nous y soyons.
Quatrièmement, si nous
sommes en dehors du processus
électoral et si nous
donnons ce message dès
maintenant, quelles peuvent
en être les conséquences
sur le parti ? si les militants
savent dès maintenant que
le fpi n’est pas dans le processus
électoral, pourquoi
les cadres dans les instances
et dans les fédérations
se mobiliseraient-ils
particulièrement ? Pourquoi
vont-ils se dépenser pour
faire vivre un parti qui a déjà
fait l’option de ne pas participer
aux élections ? s’il n’y a
aucune perspective électorale,
les cadres vont relâcher
leurs efforts sur le terrain. et
certains peuvent même être
amenés à penser à des solutions
alternatives. Ça peut
susciter des réactions pouvant
aller jusqu’à des défections
au profit d’autres partis
qui sont, eux, dans le processus
politique et électoral.
Ce serait un élément d’affaiblissement
du parti ; une
stratégie de déclin.
Le message que nous allons
donner à travers la Cei est
un message important qui a
de lourdes implications.
Nous avons fixé des conditions.
C’est que le bureau de
la Cei soit consensuel. Donc
nous y sommes pour pouvoir
participer à la négociation
sur un bureau consensuel.
si nous devons en sortir, ce
sera parce qu’on n’aura pas eu un bureau consensuel. si on a un bureau consensuel, on y reste et on utilise la Cei comme un instrument pour poursuivre notre lutte. donc notre présence à la Cei est politique et d’ordre tactique…

(A suivre)
La suite dans la 2e partie.