Koffi Kouadio Simplice (procureur de la République) face à la presse, hier : “Des mandats d`arrêt ont été décernés contre Blé Goudé, Attey Philippe, Koudou Kessié Raymond, Ahoua Don Mello”

Publié le samedi 2 juillet 2011 | Le Nouveau Réveil - Le Procureur de la République, avant des échanges avec la presse nationale et internationale a fait l'état des lieux des procédures

engagées. Ci-dessous son propos liminaire.

Ahoua Don Mello, porte-parole du gouvernement Gbagbo.

Publié le samedi 2 juillet 2011 | Le Nouveau Réveil - Le Procureur de la République, avant des échanges avec la presse nationale et internationale a fait l'état des lieux des procédures

engagées. Ci-dessous son propos liminaire.

Mesdames et Messieurs, je vous salue avant toute chose, je voudrais présenter vos interlocuteurs de ce jour. A ma gauche, M. Youssouf Ouattara, Procureur de la République adjoint. A ma droite Mme Coulibaly Abibata, substitut du procureur, porte-parole du Parquet. Au nom de Monsieur le ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la Justice, au nom de Monsieur le Procureur général, près la cour d'Appel d'Abidjan, je vous remercie de votre présence à ce point de presse qui est le premier d'une série que nous entendons animer régulièrement pour informer sur les procédures ouvertes à la suite de la crise post-électorale à l'effet de vous permettre, vous aussi, à votre tour d'informer utilement d'une part le peuple ivoirien au nom duquel la justice est rendue et d'autre part la communauté internationale dont le rôle dans la sortie de crise a été salué par tous les Ivoiriens.
Pour ce qui est du point de presse de ce matin, il s'intéressera aux procédures ouvertes récemment à la suite de la crise post-électorale. Pour cela, je peux vous dire ceci : suite aux évènements douloureux qui ont secoué la Côte d'Ivoire, après le second tour de l'élection présidentielle, mon parquet a, sur instruction du garde des Sceaux, ouvert une enquête préliminaire depuis le 29 avril 2011. L'enquête elle-même a été subdivisée en trois (3) volets. Le premier volet concerne les infractions contre les biens. Ou si vous voulez, les infractions à caractère économique commises au préjudice de l'Etat, de ses démembrements, de certaines institutions communautaires comme la BCEAO, les institutions aux structures para-publiques et purement privées comme les banques.
Le deuxième volet concerne les infractions relatives à la sûreté de l'Etat.
Et le troisième volet concerne, ce qu'on appelle communément les crimes de sang.
Pour ce qui est du premier volet de l'enquête, c'est-à-dire les infractions à caractère économique commises au préjudice de l'Etat, ses démembrements, des institutions communautaires comme la BCEAO et certaines structures para-publiques ou purement privées comme les banques, ce volet dis-je, l'enquête commencée le 29 avril 2011 s'est achevée le 15 juin 2011. Au cours de cette enquête, nous avons pu entendre 78 personnes composées essentiellement de mises en cause et de représentants légaux des personnes morales, victimes des actes de prédation. Le 16 juin 2011, une information judicaire a été ouverte pour des faits de vols aggravés, détournements de deniers publics, pillages, concussions et atteintes à l'économie publique. De ce fait, 15 personnes ont été inculpées et placées en détention préventive. Des mandats d'arrêt ont été décernés contre des suspects en fuite. Il s'agit notamment de M. Blé Goudé Charles, de Attey Philippe, de Koudou Kessié Raymond, Ambassadeur en Israël et de Ahoua Don Mello, ex porte-parole du gouvernement de Laurent Gbagbo. Pour ce qui est du deuxième volet, de l'enquête c'est-à-dire les infractions relatives à la sûreté de l'Etat. Les investigations commencées le 29 avril 2011 se sont achevées le 21 juin 2011. Les enquêteurs ont pu entendre 82 personnes et au terme de leur enquête, une information judiciaire a été ouverte pour les infractions d'attentat contre l'autorité de l'Etat, constitution de bandes armées, direction ou participation à une bande armée, participation à un mouvement insurrectionnel, atteinte à l'ordre public, coalition de fonction, tribalisme et xénophobie. L'information a été ouverte le 22 juin et à ce jour, 21 personnes ont été inculpées et placées en détention préventive.
S'agissant du troisième volet de l'enquête, c'est-à-dire ce qu'on appelle communément les crimes de sang, qui regroupe toutes les atrocités commises çà et là par les bandes armées, l'enquête a débuté le 29 avril également et à ce jour, nous avons pu procéder à, l'audition de 118 personnes. Mais les investigations se poursuivent et l'enquête ne peut valablement être bouclée au bout de deux mois en raison du nombre élevé de personnes à entendre. Souvenez-vous que les évaluations faites çà et là par des organisations non gouvernementales estiment à au moins 3000 morts pendant la crise. Ce qui suppose qu'il y ait au moins 3000 ayant droits à entendre et un nombre plus important de blessés, de simples sachants et de mises en cause. Mais je pense que nous pourrons tenir le délai raisonnable d'à peu près 2 mois à 3 mois. Une chose est certaine, les choses avancent bien et les enquêtes pourraient être bouclées dans un délai vraiment raisonnable. Par ailleurs, il convient de souligner que parallèlement à cette enquête préliminaire ouverte, le Parquet a dû ouvrir trois (3) informations judiciaires pour des cas spécifiques. Il s'agit de l'enlèvement de M. Yves Lamblin et de trois autres personnes. Il s'agit également de l'enlèvement du colonel major Adama Dosso et de la mort du ministre de l'intérieur Désiré Tagro.
Pour ce qui est du cas de l'enlèvement de M. Yves Lamblin et de ses trois compagnons, une information judiciaire a été ouverte le 28 avril 2011 contre X des chefs d'enlèvement, séquestration et assassinat. Les investigations rondement menées par le magistrat instructeur ont permis à ce jour d'identifier, d'inculper et de mettre en détention préventive, 9 personnes dont 4 appartenaient aux bandes armées appelées milices. Quatre (4) appartiennent à l'armée nationale à savoir 3 officiers supérieurs et 1 sous officier tous en service à la Garde républicaine et un commissaire de police. Je peux vous dire, sans trahir le secret de l'instruction, qu'en l'état actuel des procédures, on peut aisément affirmer que M. Yves Lamblin, le directeur général du Groupe Sifca, M. Stéphane Diripen, directeur de Novotel Côte d'Ivoire et deux autres collaborateurs de M. Yves Lamblin ont été enlevés dans la mi-journée du lundi 4 avril 2011 par un commando armé qui s'est introduit à l'hôtel Novotel. Ces gens armés les ont enlevés du Novotel pour les conduire tour à tour à la Primature et à la présidence de la République où ils ont été séquestrés, torturés, tués et jetés en pâture aux animaux aquatiques de la lagune Ebrié. Comme je l'ai dit, l'information a permis de remonter la filière des tueurs et 9 personnes sont actuellement en détention préventive.
Pour ce qui est du colonel Major à la retraite Adama Dosso, l'information a été ouverture le 5 mai contre X des chefs d'enlèvement, séquestration et assassinat. Là encore, grâce au travail remarquable du juge d'instruction, nous avons jusque-là identifié 4 personnes. Ces 4 personnes ont été identifiées et mises en détention préventive. Il s'agit de 3 sous officiers de la Garde républicaine et d'un officier supérieur de la même Garde républicaine. Là aussi, sans trahir le secret de l'instruction préventive, ce militaire à la retraite a été enlevé dans le mois de mars, non loin de l'ambassade américaine, à proximité de la résidence de la veuve du premier président de la République de Côte d'Ivoire. Il a été conduit à la Garde républicaine puis au point kilomètre 40 de l'autoroute du Nord où il a été assassiné. Comme je l'ai dit pour le moment, les investigations se poursuivent et 4 militaires de l'armée ivoirienne ont été inculpés et placés en détention préventive.
S'agissant du cas du ministre Désiré Tagro, depuis le 29 avril, une information judiciaire a été ouverte en vue de rechercher les causes de sa mort. Et ce sur la base de l'article 73 du code de procédure pénale. Mesdames, mesdemoiselles et messieurs, tel est l'état des différentes procédures ouvertes à la suite de ce qu'on a appelé la crise poste électorale.

Propos recueillis par Diarrassouba Sory