Faillite programmée de l’Etat sous Ouattara: La Coordination Fpi en exil prend position

Le 07 juillet 2011 par Notre voie - Depuis le Ghana voisin où ils sont contraints à l’exil, les Ivoiriens, hauts cadres du pays et membres de la direction du FPI suivent l’évolution de la société

Assoa Adou. De Notre voie.

Le 07 juillet 2011 par Notre voie - Depuis le Ghana voisin où ils sont contraints à l’exil, les Ivoiriens, hauts cadres du pays et membres de la direction du FPI suivent l’évolution de la société

ivoirienne sous le régime du président imposé par la Communauté internationale, Alassane Ouattara. Dans la déclaration qui suit, ils mettent à nu les actes posés par le nouveau président, s’inquiètent fortement de la dégradation de la situation politique, économique, sociale et culturelle. Ils exigent la libération du président Gbagbo, de son épouse, du président du FPI, Pascal Affi N’Guessan et de tous leurs collaborateurs en prison. Une déclaration responsable à retenir.
Nos constats
Depuis le 11 avril 2011, date de l’arrestation du Président Laurent Gbagbo par les forces spéciales françaises, épilogue de la tentative de coup d’Etat de septembre 2002, transformée en rébellion armée, la Côte d’Ivoire vit sous un régime d’exception, marqué par une dislocation de l’Etat.
Sur le plan sécuritaire, la guerre s’est soldée par la destruction de tout l’armement de l’armée régulière et la dissolution des forces de défense et de sécurité du pays, remplacées par les forces rebelles rebaptisées FRCI (Forces Républicaines de Côte d’Ivoire), créées par une ordonnance d’Alassane Ouattara prise le 17 mars 2010. Les commissariats, les brigades de gendarmerie, ainsi que les camps militaires sont désormais occupés par les FRCI. Il est à noter que les FRCI intègrent en leur sein des éléments disparates enrôlés à travers le pays et à Abidjan ; généralement des personnes désœuvrées, des délinquants et des criminels libérés des prisons au cours de l’offensive des forces pro-Ouattara, composées de rebelles, de mercenaires, principalement libériens, sierra léonais, sénégalais, burkinabés, nigérians, appuyées par les forces françaises et onusiennes. La dislocation de l’Etat ivoirien observée depuis la rébellion s’est accélérée. L’organisation en zones de la partie centre nord ouest (CNO) de la Côte d’Ivoire depuis la rébellion, s’est généralisée à toute l’étendue du territoire. On assiste à l’irruption d’hommes en armes, sans aucune formation, dans la vie quotidienne des Ivoiriens. Cela se traduit par des exactions, des pillages et tueries ciblées qui continuent encore aujourd’hui. C’est le règne de l’arbitraire et de la force brutale des armes.
Sur le plan politique, malgré sa prestation de serment le 6 mai 2011, Alassane Ouattara continue de s’attaquer aux fondements de l’Etat de droit par :
i) décision de suspension de l’Assemblée nationale ;
ii) ii) remplacement arbitraire et illégal de deux membres du Conseil constitutionnel dont les mandats courent encore ;
iii) nomination illégale du Président du Conseil économique et social, qui devrait être membre de l’institution et élu par ses pairs ; iv) remplacement des maires par des personnes nommées.
Tous ces faits ci-dessus cités traduisent la volonté du Président Ouattara de liquider tous les contre-pouvoirs au profit d’une dictature personnelle. Fait plus grave, pour la première fois en Côte d’Ivoire, nous assistons à une épuration ethnique et politique : c’est le cas de Duékoué (plus de 800 morts), de Yopougon (149 jeunes exécutés sommairement) pour leur appartenance ethnique ou leur opinion politique (cf. rapports d’Amnesty International et de Human Rights Watch) ; de persécution et assassinats massifs des Wès, Akyés, Abeys, Bétés, Didas et Ebriés (majoritairement pro-Gbagbo).
A Sassandra, Issia, Gagnoa et Lakota, des villages entiers ont été détruits pour leur sympathie supposée à Laurent Gbagbo. Les populations de ces régions, surtout les jeunes, ont été massacrées, les survivants se sont refugiés dans la brousse. Plus généralement, tout jeune du pays ou étudiant non RHDP est systématiquement assimilé à un milicien et court le risque d’être sommairement exécuté. Etre sympathisant de Laurent Gbagbo aujourd’hui est devenu un crime, et donc passible d’arrestation ou d’exécution. Le choix qui lui reste est de faire allégeance, se taire ou aller en exil. Les forces onusiennes et françaises, présentes sur tout le territoire national, avec mandat de protéger les populations civiles, se font complices de ces crimes (cf rapports d’Amnesty International et de Human Rights Watch).
Les sièges des journaux d’opposition ont été dévastés, certains sont même occupés encore aujourd’hui par les FRCI. Quelques titres sortent au prix de moult difficultés, des journalistes ont été agressés, d’autres assassinés. Dans le même temps la presse proche du pouvoir et la télévision s’érigent en indicateurs et en délateurs comme du temps de l’inquisition en France. C’est un véritable recul d’un pilier essentiel de la démocratie, la liberté de la presse. Nous assistons aujourd’hui à une liquidation des acquis démocratiques et des libertés individuelles et collectives, résultat de plusieurs années de lutte.
Sur le plan de l’Administration c’est une chasse aux sorcières sans précédent qui se déroule en Côte d’Ivoire. Toute personne soupçonnée d’avoir de la sympathie pour Laurent Gbagbo est évincée de son poste de responsabilité pouvant aller jusqu’à son licenciement. Les nominations, les remplacements et les promotions se font désormais principalement sur des bases ethniques, mettant en péril la construction de la Nation.
Au cours de leur offensive meurtrière et génocidaire, et encore aujourd’hui, les forces pro-Ouattara ont détruit des bâtiments administratifs, des documents et des équipements, notamment du matériel roulant, du mobilier et du matériel informatique. La France et ses alliés ont décidé de faire de la Côte d’Ivoire un pays inorganisé et sans mémoire (destruction de la Bibliothèque Nationale et du Musée des Civilisations et des Arts). Le fait que l’Administration soit en ruine et non fonctionnelle ne semble pas préoccuper Alassane Ouattara et son équipe. Tout est à recommencer.
Au plan économique, l’avènement de l’ère Ouattara s’est traduit par la liquidation des régies financières et le détournement des recettes au profit de com-zones et com-secteurs comme c’est le cas dans les zones CNO depuis septembre 2002. La conséquence immédiate est la chute libre des recettes publiques. Le ministre de l’Economie et des Finances du gouvernement de Ouattara annonce 1216 milliards de FCFA de recettes fiscales sur toute l’étendue du territoire pour 2011, tandis que le gouvernement du Président Gbagbo faisait près de 2000 milliards de recettes fiscales uniquement sur la partie sud du pays. Le pouvoir Ouattara a décidé de recourir à un ré endettement massif et irresponsable, pour assombrir davantage l’avenir de la Côte d’Ivoire tel qu’il était en 2000 à l’avènement de Laurent Gbagbo (stock de la dette extérieure de 6500 milliards). Le service de la dette publique montera en 2011 à plus de 1281 milliards contre seulement 437 milliards d’annonces de financements extérieurs. L’appareil de production (usines, entrepôts, commerces, engins, etc.) est démantelé du fait du pillage systématique des équipements de production et d’un désinvestissement rapide avec l’insécurité généralisée dans le pays. Les grands chantiers de l’Etat, notamment le transfert de la capitale à Yamoussoukro, l’extension du Port Autonome d’Abidjan, et le Grand Abidjan sont à l’arrêt.
En 2011 le taux de croissance attendu est de -6.3%. C’est une contreperformance record dans toute l’histoire de l’économie ivoirienne. Pour mémoire, le taux de croissance était de près de 4% en 2009 et de 2.4% en 2010. C’est la faillite économique. Cette situation désastreuse se traduit déjà par des difficultés sociales de toute sorte, qui assaillent les populations : difficultés d’approvisionnement des marchés, inflation galopante (racket féroce et généralisé des FRCI), paupérisation des masses paysannes, le cacao acheté aujourd’hui à moins de 200 FCFA le kg contre 1000 FCFA avant la prise du pouvoir par Alassane Ouattara, mise au chômage de milliers de travailleurs.
Sur le plan scolaire, universitaire et culturel, on observe la destruction d’établissements de formation générale et technique, d’universités, de laboratoires, de centres de recherche. Même les centres hospitaliers universitaires et les hôpitaux n’ont pas été épargnés. Les universités et les grandes écoles sont toujours fermées et les campus sont affectés aux FRCI. On observe la « vandalisation » des lieux culturels : la Bibliothèque nationale, le Musée des Civilisations et des Arts, le Palais de la Culture. Ainsi après avoir liquidé la formation des jeunes et les valeurs culturelles dans les régions CNO depuis 2002, Alassane Ouattara et son équipe ont décidé de liquider la formation de la jeunesse sur l’ensemble du pays. L’avenir de notre pays est donc gravement compromis.
Au total, la Côte d’Ivoire se trouve dans un état désastreux et les Ivoiriens vivent dans l’angoisse depuis la prise du pouvoir par Alassane Ouattara. L’Etat se désagrège, l’insécurité est généralisée, l’Administration est détruite, bref, tout est à refaire. C’est dans cette situation chaotique que le Président Ouattara engage des poursuites contre le Président Laurent Gbagbo, les cadres LMP et des citoyens ivoiriens ayant travaillé pour leur pays sous Gbagbo, en protégeant les vrais responsables du chaos créé en Côte d’Ivoire, c’est-à-dire lui et ses collaborateurs. C’est dans cette situation qu’il se propose d’organiser des élections locales.
Notre position
face à ce désastre :
-Le FPI reste toujours fidèle à sa ligne de lutte pacifique. Il demeure ferme sur sa conviction de l’accession au pouvoir par les élections. Nous condamnons par conséquent la prise du pouvoir par la force armée ;
- Nous continuons de dire qu’Alassane Ouattara n’est pas le vainqueur des élections de novembre 2010. Un recomptage des voix, comme préconisé par le Président Gbagbo, aurait vidé le contentieux électoral et établi définitivement la vérité électorale en Côte d’Ivoire. Au lieu de cela, Alassane Ouattara a été imposé à la tête de la Côte d’Ivoire par un coup de force. Le Président Gbagbo n’a pas perdu les élections, il a été évincé du pouvoir par la guerre ;
- Le FPI est pour la paix, pour le rétablissement de la sécurité des biens et des personnes, pour le rétablissement de l’Etat et de l’Etat de droit, pour la relance rapide des activités économiques et sociales. Le peuple ivoirien a trop souffert. Le sang des Ivoiriennes et des Ivoiriens a trop coulé depuis ce funeste 19 septembre 2002. Mais, la sortie de ce désastre ne peut se faire qu’à travers une solution politique acceptable par tous ;
- C’est pourquoi nous sommes d’accord avec le processus de Vérité, Dialogue et Réconciliation, initié par Alassane Ouattara. Mais, ce processus ne peut se dérouler qu’entre les grands sachants qui détiennent l’essentiel de la vérité. Du côté de La Majorité Présidentielle (LMP), le plus grand sachant est Laurent Gbagbo. Sa vérité ne peut être exprimée qu’en étant libre. Et toute la vérité du côté LMP ne peut être exprimée que par tous les collaborateurs du Président Gbagbo qui, pour certains, sont en prison, ou pour d’autres, en exil. Le cas de l’Afrique du sud est là pour nous instruire. Le dialogue s’est déroulé entre Nelson Mandela libre et Frederik de Klerk pour aboutir à la paix dans ce pays ;
De manière spécifique la Coordination FPI en exil :
-demande la libération sans condition du Président Laurent Gbagbo, de la camarade Simone Ehivet-Gbagbo, député, présidente du groupe parlementaire FPI, du camarade Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, du camarade Abou Drahamane Sangaré, vice-président, du Premier ministre Gilbert Aké N’Gbo et des membres du gouvernement, de tous les camarades du FPI, des camarades et sympathisants LMP, ainsi que de tous les éléments des Forces de défense et de sécurité (FDS) détenus arbitrairement ;
- exige que la sécurité de chacune et de chacun en Côte d’Ivoire, ainsi que la sécurité de leurs biens, soit assurée par des Forces de défense et de sécurité véritablement républicaines, non partisanes et non ethniques;
-demande la reprise des activités de l’Assemblée nationale, le fonctionnement normal des tribunaux, l’égalité de tous les citoyens devant la loi, le fonctionnement normal et inclusif de l’administration. Il faut mettre immédiatement un terme à la chasse aux sorcières et au tribalisme affligeant pour revenir à des pratiques à même de consolider l’unité de la Nation. Pour nous, tous ces éléments permettront de rétablir les acquis démocratiques tels que projetés et mis en œuvre par Laurent Gbagbo durant sa longue carrière politique et auxquels les Ivoiriens sont attachés ;
- demande la libération immédiate des locaux des sièges des journaux occupés par les FRCI et exige des garanties pour le libre exercice de la profession de journaliste, l’arrêt des tracasseries et l’application stricte de la loi sur la presse adoptée en 2004 ;
-demande au Président Ouattara de créer les conditions d’un retour rapide en Côte d’Ivoire des exilés civils et militaires, notamment les conditions sécuritaires, le dégel des avoirs et la restitution des biens volés ;
-estime que la tenue des assises de la Commission Vérité, Dialogue, Réconciliation, ainsi que des élections locales ne seront à l’ordre du jour qu’après la réalisation des conditions préalables ci-dessus énumérées ;
-apporte sa compassion et son réconfort à tous ces Ivoiriens et Ivoiriennes qui ont perdu des êtres chers, qui ont été blessés, qui ont tout perdu, qui ont souffert et continuent de souffrir de la situation désastreuse de notre pays. Elle leur demande de garder espoir et de continuer à œuvrer pour l’avènement d’une Côte d’Ivoire prospère et démocratique ;
-exprime sa compensation aux opérateurs économiques et aux travailleurs de Côte d’Ivoire, victimes des exactions et de la furia des FRCI pour avoir servi de fer de lance à la politique économique judicieuse de Laurent Gbagbo. Ils sont les premières victimes de l’effondrement actuel de notre économie. Nous vous apportons tout notre soutien ;
-félicite les FDS, notamment les unités combattantes, pour leur engagement, leur bravoure, leur professionnalisme et leur loyauté envers l’Etat. S’incline devant tous ceux qui sont tombés, apporte sa compassion aux blessés, à ceux qui ont perdu des biens, ou qui ont été contraints à l’exil. Vos sacrifices ne seront pas vains ;
-félicite les camarades du FPI, les sympathisants et les camarades LMP pour leur résistance courageuse et leur lucidité face la répression barbare qui s’abat sur eux. Elle leur demande de rester mobilisés pour la libération de tous nos camarades injustement emprisonnés et pour la libération du pays. Le combat dans lequel ils se sont engagés aux côtés de Laurent Gbagbo est juste et noble et ne s’arrêtera pas. Elle les assure de sa détermination à demeurer fermement engagé dans cette ligne. Elle les assure de toute sa solidarité militante.
Pour la Coordination FPI en exil Le Coordonnateur Assoa Adou