Affaire Bourgi : Karim Wade, le fils du président sénégalais, porte plainte pour diffamation

Le 13 septembre 2011 par Rfi.fr - Robert Bourgi a continué le 12 septembre à distiller ses accusations sur le financement d'une partie du monde politique français par plusieurs

Karim Wade, fils du Président sénégalais Abdoulaye Wade.

Le 13 septembre 2011 par Rfi.fr - Robert Bourgi a continué le 12 septembre à distiller ses accusations sur le financement d'une partie du monde politique français par plusieurs

dirigeants africains. L'homme de l'ombre de la Françafrique, affirme notamment dans le journal sénégalais L'Observateur, que Karim Wade, le fils du président sénégalais, a remis de l'argent à Dominique de Villepin, quand celui-ci était secrétaire général de l'Elysée. Karim Wade a aussitôt annoncé qu'il allait porter plainte. Au même moment de l’annonce de cette contre-attaque sur le terrain judiciaire, l’opposition sénégalaise demande des comptes aux autorités du pays dans cette affaire.
Avec de notre correspondant à Dakar,
Dans l’interview qu’il avait accordée au Journal du Dimanche, Robert Bourgi ne citait Karim Wade que de manière incidente. Il affirmait simplement que le fils du président sénégalais avait participé à un déjeuner au cours duquel Théodoro Obiang Nguéma, le président équato-guinéen, aurait remis une mallette à Dominique de Villepin.
Interrogé le 12 septembre par le quotidien sénégalais L’Observateur, le conseiller occulte de Nicolas Sarkozy a cette fois-ci décrit une transaction qui, selon lui, aurait impliqué Karim Wade. Il a dit avoir vu le fils du président sénégalais remettre « en personne » à Dominique de Villepin un million de dollars.
Karim Wade a réagi dans la soirée par un communiqué dans lequel il a démenti « catégoriquement » ce qu’il qualifie d’ « accusations extrêmement graves, mensongères et hallucinantes ». « Je jure sur mon honneur, écrit le fils du président sénégalais, n’avoir à aucun moment, ni directement, ni indirectement, donné la moindre somme d’argent à un homme politique français. »
Karim Wade rappelle que depuis le mois de juillet, un différend l’oppose à Robert Bourgi au sujet d’un entretien téléphonique qui aurait eu lieu entre les deux hommes la nuit des émeutes de l’électricité. « Depuis le mois de juillet, estime-t-il, Robert Bourgi s’est dressé contre ma personne ».
Le fils du président sénégalais explique donc avoir demandé à ses avocats de déposer immédiatement une plainte « auprès des tribunaux compétents » contre Robert Bourgi pour diffamation, injures par imputation de faits attentatoires à son honneur et à sa considération.
Interpellations de l’opposition
L’annonce de cette plainte est intervenue alors que, dans la journée, plusieurs partis de l’opposition sénégalaise ont appelé les autorités à rendre des comptes sur cette affaire, sans pour autant prendre les déclarations de Robert Bourgi pour argent comptant…
« Le chef de l’Etat est interpelé, il doit aux Sénégalais des réponses précises », a ainsi déclaré Seydou Gueye, le porte-parole de l’APR Yakaar (le parti de Macky Sall).
L’ancien Premier ministre Idrissa Seck a demandé, dans un communiqué, que « le couple Abdoulaye [Wade]/Karim s’explique directement et publiquement sur cette nouvelle affaire. » qui intervient, écrit-il « au moment où les Sénégalais sont dans le noir du fait des délestages et dans les eaux nauséabondes du fait des inondations. »
Pour Aïssata Tall Sall, du parti socialiste sénégalais « Un simple démenti comme celui qui a été fourni ne saurait suffire ». « Le président sénégalais, a-t-elle estimé, doit expliquer au peuple ce qui s’est passé avec ces valises d’argent. »
Hélène Tine de l’Alliance des Forces de Progrès a souhaité pour sa part qu’on aille plus loin que les déclarations de Robert Bourgi : « Les versements, s’est elle interrogée, ont-ils continué sous Sarkozy ? Et que signifie l’apparition du nom de Karim Wade dans cette affaire franco-sénégalaise… Y a-t-il un lien avec le projet de dévolution monarchique du pouvoir ? »

Par Laurent Correau

Qui est celui qui appelait Omar Bongo Odimba «Papa»?

Les propos de l'avocat franco-libanais Robert Bourgi continuent de provoquer beaucoup d'interrogation. L'interssé affirme qu'il veut tourner la page du passé, un passé dont il dit qu'il n'est pas très fier. Une explication qui ne convainc pas tout le monde. Alors, qu'elle est cette vie passée que Bourgi veut oublier ? Et qu'en disent ceux que l'avocat franco-libanais accuse aujourd'hui , notamment en Afrique ?
« Je me pose des questions sur sa crédibilité, son sens moral, son équilibre psychologique ». Pour Alain-Edouard Traoré, porte-parole du gouvernement burkinabé, Robert Bourgi n'est qu' « un fantaisiste, un fou qui fait des déclarations. ».

D'origine libanaise, né à Dakar, cet avocat de formation parle couramment l'arabe et le wolof. C'est aussi un musulman chiite qui boit de l'alcool et mange du porc, et qui affirme avoir « géré le côté obscur de la Françafrique de 1997 à 2005 ». « Je travaille à la fois pour les présidents africains et pour le président français », disait Robert Bourgi en 2009, poursuivant l'oeuvre de son « maître » Jacques Foccart, chargé des Affaires africaines auprès du Général de Gaulle et fondateur de ce qu'on a ensuite appelé la Françafrique.
Robert Bourgi, lui, est passé du clan de Jacques Chirac à celui de Nicolas Sarkozy en 2005. Bonne pioche : deux ans plus tard, Sarkozy devient président et décore Bourgi de la légion d'honneur. Aujourd'hui, les déclarations du toujours conseiller officieux de l'Elysée mettent mal à l'aise.
« Qui est derrière lui, qui le paye ? », s'interroge Moustapha Guérassi, porte-parole du gouvernement sénégalais. « Comme toute l'opinion, je me demande ce que vaut sa parole », attaque Sérigne Mbacké Ndiaye, porte-parole de la présidence sénégalaise.
Il fut un temps où Robert Bourgi, qui appelait Omar Bongo « papa », donnait aussi du « tonton » à Abdoulaye Wade. Pas sûr qu'il en ait à nouveau l'occasion.