11 avril 2011 - Assassinat de Désiré Tagro, bombardement de la résidence de Gbagbo: Les révélations de Christine Adjobi

Par Notre Voie - Christine Adjobi "L'Ambassadeur de France riait..."

Désiré Tagro.

Je voudrais rendre grâce à Dieu parce que si Aboudramane Sangaré , Yanon Yapo, Laurent Gbagbo, Simone Gbagbo et plusieurs autres sont vivants aujourd’hui c’est grâce à sa miséricorde. En effet, Laurent Gbagbo n’a pas préparé la guerre, il s’est attelé à chercher la paix, à travers les différents accords qu’il a signés. Alors que l’intérieur de la Côte d’Ivoire était en train d’être annexé par les
forces coalisées de l’ONUCI, Licorne , rebelles et Dozo, lui travaillait. Comment je me suis retrouvée à la résidence de Laurent Gbagbo ? Le 31 mars 2011, je m’apprêtais à aller au Plateau pour prendre part à un conseil des ministres. C’est là que ma fille m’a dit que le Plateau est vide. Pour me rassurer, j’ai appelé le secrétariat du gouvernement
qui me l’a confirmé avant de me dire que le conseil des ministres de ce jour-là est reporté à une date ultérieure. Pour occuper la journée, j’ai décidé d’aller rendre visite à une connaissance. De là, ma fille qui voulait voir sa tante, madame Gbagbo, a demandé qu’on se rende chez elle. J’ai donc appelé à la résidence pour signaler notre arrivée. Après le déjeuner avec le couple présidentiel, nous nous apprêtions ma fille et moi à regagner notre domicile quand des gardes du corps nous ont déconseillé de rentrer chez nous parce que, disent- ils, la résidence est encerclée par les rebelles. Il était 18h. Nous y restâmes avec seule arme mon chapelet. Au coucher, nous nous sommes retrouvés dans la chambre du président Gbagbo pour prier avec lui Dieu. Les jours passaient et se ressemblaient. Des tirs nourris à l’extérieur de la résidence. Impossible de sortir. Puis vient à manquer la nourriture.
Nous nous arrangions pour nous ravitailler autant que faire se peut. Le 5 avril 2011, l’infirmerie et la cuisine sont détruites sous l’effet des bombes. Nous étions restés toujours en prière sans manger. Le 11 avril 2011, le président Gbagbo a demandé aux militaires de ne pas combattre parce qu’il voulait éviter un bain de sang. Après le bombardement de la cuisine et de l’infirmerie, je suis monté pour regarder dehors. J’y ai vu des snipers qui ont tenté de m’abattre. Heureusement Dieu m’a protégée. Mais en descendant l’escalier avec la peur au ventre et tout mon corps tremblant, je suis tombée dans l’escalier. Dans la foulée le ministre Desiré Tagro que l’ambassadeur de la France avait chargé de dire au président de sortir avec un linge blanc, symbole de paix, est sorti avec ce linge mais rapidement reconnu par les rebelles, ce dernier a rebroussé chemin sur la pointes des pieds. Oubliant derrière lui son téléphone portable. Pour faire donc le point de la situation à monsieur Jean Marc Simon, alors ambassadeur de la France en Côte d’Ivoire, le ministre Désiré Tagro a dû utiliser le mien pour l’appeler. Au téléphone, le diplomate
français qui, peut-être se réjouissant de la tournure que prenait la situation s’est mis à rire. Entre temps, dans notre cachette, ils avaient réussi à y mettre du gaz lacrymogène. Ne pouvant plus résister à la fumée de ce gaz, nous nous sommes retrouvés dans une autre
pièce. C’est là que les rebelles sont arrivés pour mettre la main sur nous. ‘’Où est Gbagbo disent-t-il et lui de dire courageusement me voici. C’est ainsi que nous avions tous été arrêtés puis transportés à l’hôtel du Golf. Mais avant de partir au Golf, ils ont pillé et mis sens dessus-dessous la résidence. Mon alliance, a été prise. Là-bas, nous avons essuyé toutes sortes de frustrations et de tortures. Nous avons été bastonnés. J’y suis restée du 11 au 19 avril. Le 19 avril, j’ai été conduite à la pergola avec d’autres camarades, coincés dans un pick-up. Aujourd’hui (NDLR : hier) nous commémorons la mort de la démocratie, mais nous commémorons
la vie des démocrates. »

Christine Adjobi

Retranscris par P.Kalou