Diaspora - France: Christine Zekou, présidente du CODESCI, écrit au Président François Hollande l'interpeller sur la situation en Côte d'Ivoire

Par IVOIREBUSINESS - Christine Zekou, présidente du CODESCI, écrit au Président François Hollande l'interpeller sur la situation de la Côte d'Ivoire.

Madame Christine Zekou
Porte Parole du CODESCI
Paris le 11 Février 2014

A Monsieur François Hollande,
Président de la République française
Excellence Monsieur le Président,

Votre prédécesseur, monsieur Nicolas Sarkozy, en apportant une solution militaire à une question politique lors de la crise postélectorale en Côte d’ivoire, votre prédécesseur Nicolas Sarkozy a œuvré à installer une dictature au pouvoir avec ses conséquences inimaginables. Les nombreuses tueries, les arrestations arbitraires, les viols collectifs, les disparitions et exécutions sommaires qui ont lieu en Côte d’ivoire, témoignent du fait qu’aucune solution militaire ne saurait résoudre une crise à caractère politique, économique voire sociétale. Les exemples du Mali avec le coup d’état du 22 mars 2012 qui a porté le capitaine Hamadou Haya Sanogo au pouvoir , de la Centrafrique , bourbier dans lequel la France s’enlise depuis le coup d’état du 24 mars 2013, coup de force qui a porté la coalition rebelle l’alliance « Séléka »au pouvoir, le renversement du régime de la Jamahiriya libyenne, avec ses conséquences en Afrique sub-saharienne en proie au péril AL QAIDA, montrent que de pires exactions peuvent être commises suite à des renversements du pouvoir par la force et donner lieu à des atrocités inimaginables. Il est de notoriété publique à reconnaitre qu’aujourd’hui, la première puissance est l’opinion publique. A travers elle, se répandent des idées souvent fausses qui sévissent au détriment de la vérité. Tout en admettant la pensée selon laquelle « rien n’est plus dangereux qu’une idée quand on a une idée », nous admettons que la pensée unique fait le lit des totalitarismes en préparant les foules à obéir aveuglement, en dehors de toute critique. C’est pourquoi, nous pensons que dire le vrai est sacré, car la véracité est un devoir qui doit être considéré comme la base de tous les devoirs. C’est en respectant un tel principe que nous nous permettons de vous interpeller s’agissant de la dictature qui sévit aujourd’hui en Côte d’ivoire, dictature à laquelle vous semblez apporter une caution certaine. Nous soutenons un tel propos dans la mesure où, lors d’une récente tournée des préfectures, Monsieur Manuel Valls, votre Ministre de l’intérieur a remis à Hamed Bakayoko, le sulfureux Ministre de l’intérieur de la Côte d’ivoire aux accents despotiques d’Alassane Dramane Ouattara, 500 revolvers. Cette image relayée par la presse nous a d’autant plus choqués, qu’aujourd’hui en Côte d’ivoire, sévit dans la plus grande indifférence une dictature, dont les atrocités, les nombreuses bavures et autres injustices ainsi que les victimes qui se comptent par milliers, sont ignorées de l’opinion. Déjà, le désarmement des rebelles n’a jusqu’à ce jour pu se faire.

Dans la perspective des élections de 2015, le pouvoir d’Alassane Dramane Ouattara se prépare à mater dans le sang toute velléité d’opposition. A travers ce geste, vous venez de participer à la probable commission de crimes contre l’humanité et diverses atrocités sur d’innocentes gens. Après le renversement du Président Laurent Gbagbo, l’incarcération de son fils Michel Gbagbo citoyen français, son épouse Simone Ehivet Gbagbo, et ses plus proches collaborateurs, une véritable dictature s’est installée en Côte d’ivoire. Devant une telle situation, le vertige qui saisit le peuple de Côte d’ivoire est fait d’angoisse et d’inquiétude face à la mort qui plane sur les individus au quotidien, sans oublier la justice des vainqueurs aujourd’hui en vigueur en Côte d’ivoire. Comme nous l’enseigne l’histoire des peuples, nous savons que le fanatisme peut donner naissance aux plus grandes dérives et s’avère incompatible avec la sécurité. Il est probable que l’absence de pensée libre ait rendu possible l’opinion, et fait triompher par la force, certaines idées au sujet de la Côte d’ivoire. En effet, il a été admis à partir du 11 avril 2011 que la démocratie avait été rétablie dans ce pays, ce, par la force des canons et non par la force du droit ni par la volonté du peuple de Côte d’ivoire. Mais pour cette majorité de personnes dont la voix est aujourd’hui inaudible, la réalité est beaucoup plus cruelle que vous ne l’imaginiez. Nous sommes dans une société totalement oligarchique, société qui entre en contradiction avec certaines lois supérieures de l’humanité, tel que le droit à la vie et la liberté de pensée. Aujourd’hui, la classe politique est muselée, l’opposition inexistante. Dans un régime qui bafoue les droits de l’Homme, les membres de l’opposition sont embastillés dans des goulags contrôlés par des marchands de guerre devenus par la bénédiction des armes des préfets de région : Sacrilège!!!. Ce régime d’Alassane Dramane Ouattara que vous soutenez, symbolise jusqu’à l’outrance le despotisme par sa conduite de négation des droits élémentaires de la personne, et par la mise en évidence d’une justice arbitraire. Aujourd’hui, c’est une justice des vainqueurs ainsi que le fanatisme qui ont droit de cité en Côte d’ivoire, fanatisme incompatible avec la sécurité des personnes. C’est Pierre Vidal Naquet qui soulignait qu’ « il n’y a pas d’histoire possible, là où un Etat, une église, une communauté, même respectable impose une orthodoxie ». Le socialisme que nous avons en héritage de Jaurès, ce pacifiste dont la mémoire traverse toujours cette tragique journée du 31 juillet 1914, nous a offerts comme legs la loi du pardon, de la justice et le refus de toute sorte d’exclusion en promouvant une universelle fraternité en dépit de nos différences. Ce sont ces valeurs que vous défendiez dignement qui nous ont conduits à croire et espérer en vous, en vous élisant à la magistrature suprême. Cette victoire à laquelle nous avons donné un élan populaire est aussi notre ouvrage, car elle était la victoire du pardon sur celle de la stigmatisation, celle de la République, une, indivisible, laïque, plurielle et multiséculaire comme construction fraternelle, qui prenait le pas sur les germes de la division et des stigmates, de la haine , celle d’une politique de saine coopération internationale à visage humain, sur l’ingérence belliciste et la volonté de puissance et de soutien aux dictatures . Mais ces nombreuses promesses tenues sous le sceau d’une « présidence normale » rencontrent aujourd’hui très peu d’écho au sein des populations dont la grogne se fait de plus en plus entendre. Aujourd’hui, l’ex-Première dame de Côte d’ivoire, madame Simone Ehivet Gbagbo, ex- députée de la commune d’Abobo est détenue en prison. Son supplice de même que ceux des collaborateurs du Président Laurent GBAGBO est dû à des motifs essentiellement politiques. Vous ne pouvez restez indifférent devant une telle injustice.
C’est pourquoi à travers cette lettre ouverte que nous vous adressons, nous vous interpellons devant la tragédie du peuple de Côte d’ivoire et demandons par la même occasion d’œuvrer à la libération
de tous les prisonniers politiques dans ce pays. Car comme le souligne Sénèque dans sa Lettre à Lucilius, le bien doit commander l’ensemble de la conduite de l’homme en société, pour ne pas dire de tout homme politique.

AMPLIATION A :
Mme Segolene Royale
Mme Martine Aubry
Mr. Harlem Desir
Mr. Claude Bartelone
Mr. Jean Marc Ayralt
Mr. Manuel Valls