Anne Désirée Ouloto écrit à la Conférence épiscopale: “Pourquoi cachez-vous la vérité”
Publié le lundi 10 janvier 2011 | Le Patriote - Excellence,
C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu le message à la Nation de nos Seigneurs, les Evêques de Côte d’Ivoire, paru dans la presse du
jeudi 06 janvier 2011 ; message qui je dois le souligner, était très attendu par tous les Ivoiriens, toutes appartenances religieuses confondues, depuis le début de la crise postélectorale qui nous est imposée.
Publié le lundi 10 janvier 2011 | Le Patriote - Excellence,
C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu le message à la Nation de nos Seigneurs, les Evêques de Côte d’Ivoire, paru dans la presse du
jeudi 06 janvier 2011 ; message qui je dois le souligner, était très attendu par tous les Ivoiriens, toutes appartenances religieuses confondues, depuis le début de la crise postélectorale qui nous est imposée.
Vos propositions pertinentes et objectives s’imposaient en fin de compte, après la sortie ratée de son Eminence Bernard AGGRE, Cardinal Emérite.
En effet, ses propos paradoxalement “pas du tout Catholiques“ à relent
ultranationaliste et dignes de discours trop souvent rabâchés sur la célèbre et triste télé LMP, ont malheureusement eu pour effet de troubler les Ivoiriens qui l’ont lu ou écouté.
Aussi, en raison de son statut d’“Ancien’’ de l’Eglise aujourd’hui à la retraite, du respect dû à son rang et de l’amour profond que nous avons pour Mère Eglise, avons-nous exhorté les uns et les autres à attendre avec confiance le message officiel de l’Eglise, message de la Conférence Episcopale.
J’étais convaincue Excellence, que mon Eglise, l’Eglise de Jésus Christ qui est aussi celle de Jean-Paul II et de Benoît XVI, recentrerait le débat en parlant en vérité à deux frères, Laurent GBAGBO et Alassane OUATTARA, tous deux fils de Dieu et frères de Jésus Christ ; leur parlerait en dignes Apôtres de Jésus Christ Seigneur et Sauveur du monde, Dieu d’Amour, de Justice et de Vérité.
Un Evêque que je ne citerai pas, dans une adresse à ses fidèles au sujet de l’élection présidentielle ne disait-il pas ceci : « Ceux qui ont quelque responsabilité à quelque niveau que ce soit, ont un devoir de vérité et d’intelligence de la situation pour ne pas plonger les populations dans la panique, la crainte et la peur ».
Prêtres de Jésus Christ, Evêques de l’Eglise Catholique de Côte d’Ivoire, votre responsabilité dans l’Eglise et dans notre pays est donc très grande.
Aussi, en ma modeste qualité de fidèle, et après avoir lu et relu votre message tant attendu, je me permets de dire mon sentiment profond, par “Devoir de vérité et d’intelligence…’’, en souvenir des riches enseignements du thème de l’année pastorale écoulée : « Avec nos Prêtres, témoignons de Jésus Christ le Prêtre Eternel ».
Dès lors, je ne doute pas un seul instant que vous compreniez le sens de ma démarche d’amour et de vérité, en union avec vous nos prêtres, afin de contribuer modestement à l’édification de Mère Eglise, notre maison commune et notre héritage.
Excellence, après lecture et relectures de votre message que j’aurais pu au demeurant, continuer à lire encore et encore, je finis à la vérité, prise de panique et plongée dans une peur indescriptible, par me poser une seule question : Qu’aurait dit le Christ s’il s’était lui-même adressé à la Nation ivoirienne?
C’est alors que je compris qu’à l’évidence, ce message n’avait pas pris en compte deux leviers fondamentaux de la Souveraineté de notre Seigneur Jésus Christ, qui était et qui est à jamais Dieu de Justice et de Vérité.
Par conséquent, l’absence de ces dimensions essentielles et indissociables du “Verbe’’ explique ma profonde déception, ainsi que celle de nombreux fidèles et lecteurs qui pourtant, attendaient votre déclaration avec beaucoup d’espoir.
Dois-je en déduire Excellence, comme de nombreux fidèles chrétiens, que notre société ivoirienne est à l’évidence malade parce que notre Eglise est elle-même très malade ?
Sinon, comment comprendre que jamais vous ne vous soyez prononcés dans votre message sur la sincérité du scrutin, alors même que vous connaissez parfaitement les causes profondes de cette crise postélectorale ?
Témoins privilégiés de l’organisation et du déroulement des deux tours du scrutin (présence de Prêtres et d’Evêques sur toute l’étendue du territoire national), vos différentes rencontres avec la CEI, le Conseil Constitutionnel, les “camps’’ OUATTARA et GBAGBO, ainsi qu’avec le certificateur auraient pu en vérité, vous permettre de vous prononcer quant à la sincérité du scrutin, « en toute responsabilité et intelligence de la situation».
Cette approche méthodique et objective que je n’ai pas la prétention de vous apprendre, vous aurait assurément mis à l’abri de tout soupçon quant à votre impartialité et à votre objectivité.
Dites-nous Monseigneur, avez-vous un problème avec la sincérité du scrutin dont les résultats ont été proclamés par la CEI et validés par le certificateur? Après vos rencontres avec les différents acteurs du processus électoral, quelles sont les conclusions que vous en avez tirées ? Les Prêtres et Evêques qui, j’en suis convaincue, ont observé le déroulement du scrutin dans leurs localités respectives, vous ont-ils adressé des rapports ?
Que disent ces rapports de ce qui s’est effectivement passé dans les sept (07) départements dont les votes ont été annulés par monsieur Paul YAO N’DRE, président du Conseil Constitutionnel, ami et complice de l’ex-président Laurent GBAGBO?
Que vous ont-ils dit aussi du déroulement du scrutin dans les régions du centre-ouest, de l’ouest et du sud-ouest?
Pardonnez-moi pour toutes ces questions qui en fait, sont l’expression de la peur panique que je ressens après lecture de votre message.
En fin de compte, quel est l’objectif que vous recherchiez en vous adressant à nous, Ivoiriennes et Ivoiriens?
Excellence, j’ai très mal que l’Eglise de Jésus Christ, par la voie de ses Evêques, n’ait pas été capable de parler au nom de Jésus Christ de Nazareth, le Verbe, Dieu d’Amour, de Justice et de Vérité.
Quel problème avez-vous avec la sincérité du scrutin ?
Revenons-en brièvement aux faits si vous le voulez bien.
A l’issue du second tour de l’élection présidentielle, la CEI a tant bien que mal fini par annoncer les résultats tant attendus, en dépit des menaces et autres entraves à la proclamation de ces résultats orchestrés par les représentants de l’ex-président Laurent GBAGBO. Alassane OUATTARA fut déclaré vainqueur avec 54,10% des suffrages.
Le Conseil Constitutionnel a aussitôt rejeté ces résultats en invalidant le scrutin dans sept départements du centre et du nord, avant de proclamer à son tour Laurent GBAGBO vainqueur.
Le certificateur, l’ONU, commis par tous les acteurs politiques a pour sa part certifié les résultats proclamés par la CEI.
La certification de l’ONUCI n’empêcha pas Paul YAO N’DRE d’investir son ami et complice Laurent GBAGBO, devant des Ivoiriens confus et une communauté internationale scandalisée.
Pour moi laïque, l’absence du Nonce Apostolique et du corps diplomatique est le signe qu’il y a véritablement problème ; le Saint Siège et la quasi-totalité de la communauté internationale n’ayant pas répondu à cette tragique pièce de théâtre.
Le même Laurent GBAGBO, avec la complicité de la Garde républicaine et du CECOS, fait recruter des miliciens au Libéria et en Angola pour mater les actions pacifiques du gouvernement OUATTARA et des Ivoiriens qui tentent de protéger la victoire du candidat du RHDP.
L’ONU dénombre à ce jour plus de 200 morts, de nombreux enlèvements, un charnier, des arrestations et de graves violations de droits de l’homme.
Excédée par une telle attitude de l’ex-président, la communauté internationale multiplie les sanctions pour le contraindre à respecter la souveraineté du peuple et à quitter le pouvoir de façon pacifique ; elle va même jusqu’à menacer de le faire partir par la force légitime s’il s’entête.
C’est alors que vous réagissez pour faire avec tous le constat de la triste situation que vit le pays, mais surtout pour mettre en garde cette communauté internationale et la rendre responsable de ce qui adviendrait de la Côte d’Ivoire, avant d’inviter Laurent et Alassane, vos frères, à un dialogue pour nous faire sortir de la crise.
Dois-je comprendre, excellence, que vous n’avez rien à dire du scrutin et des résultats annoncés par la CEI ?
Que dites-vous de la mascarade organisée par le Conseil Constitutionnel et de l’attitude inhumaine de l’ex-Président Laurent GBAGBO ?
Auriez-vous la même attitude si les rôles devaient être inversés avec Alassane OUATTARA jouant le président sortant, dictateur, refusant de se soumettre au verdict des urnes, recrutant des miliciens, organisant le massacre d’une frange de la population, défiant le monde entier et exposant ainsi dangereusement son pays à l’isolement et au chaos ?
Excellence, j’ai très mal.
Pourquoi choisissez-vous de vous laver les mains comme Ponce Pilate, avant de renvoyer Alassane et GBAGBO à leur propre sort et au sort de la Nation?
Pourquoi ?
Souhaitez-vous que la postérité retienne que c’est sous Joseph AKE que la Côte d’Ivoire a souffert, comme Jésus sous Ponce Pilate ?
Qu’est-ce qui vous empêche de parler en vérité, en disant à Laurent GBAGBO de se retirer parce qu’il a perdu ?
Vous savez tous pourtant qu’il a perdu.
Pourquoi choisissez-vous alors de laisser crucifier la Vérité, comme Pilate laissa le peuple crucifier Jésus Christ, en vous taisant sur le mensonge et la manipulation de Laurent GBAGBO ?
Je continue de me poser des questions parce que je vous aime, j’aime Jésus Christ, j’aime mon Eglise.
Je vous en conjure, pensez à tous ces fidèles qui comme moi, se sentent aujourd’hui trahis par notre Eglise, par nos Evêques, par nos prêtres, et qui n’ont pas du tout l’intention de se retrouver dans une aventure incertaine, dans d’autres Eglises.
Et pourtant, le Nonce n’était pas à l’investiture du dictateur ! Etes-vous sûr d’être en phase avec le Saint Siège ?
Mon cœur est en peine, et mon âme triste.
Avant de terminer mon propos, si ma si petite voix peut encore compter pour vous, je voudrais vous rassurer : le Président Alassane OUATTARA sitôt installé n’a pas le funeste dessein d’islamiser notre pays. Il aime la Côte d’Ivoire dans sa diversité ethnique et religieuse.
Il nous aime tous, nous ses collaborateurs.
Il respecte nos différentes confessions religieuses.
Il aime toujours et encore son épouse, votre fille Dominique qu’il a épousée sous dispense, parce qu’il respecte sa religion, la religion catholique, et a par-dessus tout la crainte de Dieu.
De grâce, ne vous laissez pas abuser par l’esprit malin qui rôde partout, y compris dans l’Eglise de Jésus Christ.
Pardon si j’ai offensé.
Que Dieu notre Père qui voit tout et sonde les cœurs, vous accorde une très bonne année 2011 pleine de sagesse pour une Eglise Forte et Unie.
Anne OULOTO, Fidèle catholique