Youssouf Bakayoko, président de la Cei sur Rfi :/ “Il n`y avait pas de sécurité pour les membres de la Cei et les journalistes à la Cei”

Publié le lundi 3 janvier 2011 | Le Nouveau Réveil - “Notre institution a été envahie par des hommes en armes qui je ne sais d`où ils venaient”//Le président de la Commission électorale indépendante ivoirienne, Youssouf Bakayoko, est enfin sorti du long

silence qu`il observait depuis l`annonce des résultats du second tour de l`élection présidentielle. Il était samedi dernier l`invité de Rfi. Le président de la Cei a expliqué les circonstances dans lesquelles il s`est vu obliger de proclamer les résultats au Golf Hôtel.
Youssouf Bakayoko, bonjour.
Bonjour madame.

Youssouf Bakayoko, président de la CEI.

Publié le lundi 3 janvier 2011 | Le Nouveau Réveil - “Notre institution a été envahie par des hommes en armes qui je ne sais d`où ils venaient”//Le président de la Commission électorale indépendante ivoirienne, Youssouf Bakayoko, est enfin sorti du long

silence qu`il observait depuis l`annonce des résultats du second tour de l`élection présidentielle. Il était samedi dernier l`invité de Rfi. Le président de la Cei a expliqué les circonstances dans lesquelles il s`est vu obliger de proclamer les résultats au Golf Hôtel.
Youssouf Bakayoko, bonjour.
Bonjour madame.

Est-ce que vous pouvez nous raconter très précisément ce qui s`est passé pendant les journées du 29, du 30 novembre et du 1er décembre au sein de la Cei à Abidjan ?
Nous avons à partir du 29 (novembre), commencé par recevoir de l`intérieur du pays, des bureaux de vote, les différents P V. Une part partait en direction du Conseil constitutionnel, l`autre en direction du représentant du Secrétaire général des Nations Unies. Et une troisième enveloppe adressée au représentant du Facilitateur. La Commission centrale s`est réunie pour examiner ces différents P V et les valider. Nous examinons si les chiffres qui ont été communiqués, ont été véritablement bien calculés, s`il n`y a pas de différence.

Qu`est-ce qui s`est passé au niveau des représentants du président sortant Laurent Gbagbo ? Est-ce qu`il y a eu de l`obstruction pendant ces deux jours ?
Il se trouve que pour certaines régions, notamment les régions dont l`invalidation a été demandée par le candidat Gbagbo Laurent, certains membres de la Commission ont demandé qu`il y ait un débat sur la question. En ce moment-là, la Commission a décidé que cela ne relevait pas de sa compétence.

Et, est-ce qu`à ce moment là, il y a eu des menaces de la part de ceux qui représentaient le candidat Gbagbo ?
Oui, certains ont exprimé le souhait que cette question soit examinée. Les membres de la Commission ont dit que nous pouvons prendre note de cette demande. Mais, que nous devons la transmettre à l`autorité qui a mandat de l`examiner. Bien entendu, ceux qui l`ont demandé, ont continué de le demander.

Alors, vous êtes mis sous pression. Comment vous gérez les heures qui viennent après que le porte-parole soit effectivement empêché de donner les résultats ?
Nous revenons dans la salle. Nous demandons aux uns et aux autres de savoir garder raison. Et nous poursuivons l`examen des différents résultats. Tout le monde a siégé jusqu`à la fin.

Ça, c`est le mercredi soir ?
C`est le mercredi soir.

Est-ce que les membres de la Cei se sentent en insécurité à ce moment-là ?
Oui, vous savez qu`à un moment donné, notre institution, notre maison a été envahie par des personnes en tenue. Je ne sais pas à quel camp ils appartenaient et je ne sais qui leur a demandé de venir. Je ne sais pas d`où ils venaient. Et évidemment, cela a créé une grande panique compte tenu de ce que nous avons vu la veille avec notre porte-parole. Et compte tenu de ce que tous les journalistes, qui étaient là, avaient été mis dehors de la Cei sans que l`on m`ait consulté.

Qui les a mis dehors ?
Ceux qui sont venus, n`est-ce pas ?

Les forces de sécurité ?
Les forces de sécurité qui sont venues, les ont mis dehors, nous a-t-on dit. A partir de ce moment-là, il n`y avait pas de sécurité pour les journalistes et encore moins pour les membres de la Cei. Tout le monde a pris peur, et les gens se sont dit que la sécurité n`existait plus.

Et donc, vous vous apprêtez à proclamer les résultats. Est-ce que vous avez des menaces pour ne pas proclamer ces résultats ?
Je savais que j`allais proclamer les résultats le lendemain. Bien entendu, je voulais bien venir à la Cei pour procéder à cette proclamation, quand j`ai vu autour de la Cei des gens, les corps habillés dont je venais de parler. Je me suis dit que la sécurité n`était pas encore tout à fait au point. Et qu`il ne fallait prendre le risque de venir là. Donc qu`est-ce que j`ai fait ? J`ai demandé quel est l`endroit le plus sécurisé ; on m`a dit au Golf, il y a les forces impartiales.

Pourquoi pas l`Onuci ?
Non, parce que l`Onuci n`est pas un territoire ivoirien. L`Onuci est un territoire que l`on peut considérer comme extraterritorial.

Mais pourquoi choisir l`endroit où se troue le quartier général d`un des candidats, Alassane Ouattara ?
Ecoutez, moi je l`ai su par la suite. Je ne savais pas qu`il habitait là.

Mais, tout le monde le savait quand même. Pourquoi vous, vous ne le saviez pas ?
Parce que je n`ai pas à savoir ce que tout le monde sait parfois.

Mais est-ce que ce n`est pas une erreur d`aller proclamer les résultats à cet endroit ? Qui vous l`a demandé ? Est-ce que Guillaume Soro vous a demandé d`aller les proclamer à l`Hôtel du Golf ?
Non, Guillaume Soro n`a pas à me demander. Nous sommes une Commission électorale indépendante. Ce n`est pas du tout une erreur. Je ne suis pas allé parler sous l`emprise de Monsieur Ouattara. Personne ne me dit que vous n`avez pas le droit de proclamer les résultats à tel ou tel endroit. C`est par commodité, parce que les conditions de sécurité étaient tout à fait réunies.
Propos recueillis par Paul Koffi