Exclusif/Abel Naki, président du Cri panafricain, de retour de La Haye: « Ce que Gbagbo m’a dit ». « Le Président m’a donné des consignes ». « Il m’a donné mandat »
Le 31 mars 2012 par IVOIREBUSINESS - Le 26 mars dernier, Abel Naki, président du Cri-panafricain, était reçu en audience par le Président Laurent Gbagbo au quartier VIP de la prison de Scheveningen à La Haye. Aussi incroyable que cela puisse paraître,
Le 31 mars 2012 par IVOIREBUSINESS - Le 26 mars dernier, Abel Naki, président du Cri-panafricain, était reçu en audience par le Président Laurent Gbagbo au quartier VIP de la prison de Scheveningen à La Haye. Aussi incroyable que cela puisse paraître,
c’était la première fois qu’il rencontrait le Président Gbagbo. Selon Abel Naki, il a fait le point de la mobilisation au Président Gbagbo, qui lui a donné des consignes et des conseils, comme un père. C’est donc un mandat qu’Abel Naki a reçu du Président Gbagbo, ce qui est une tâche très lourde.
Ce dernier a insisté pour que la diaspora, surtout celle de France mette en place un comité central pour la mobilisation. Il nous livre en exclusivité, le contenu de son entretien avec le Président Laurent Gbagbo. Il parle avec émotion du mandat qu’il a reçu par ce dernier pour travailler à l’union de la résistance. Tâche à laquelle il a commencé à s’atteler sans délai, et dans la plus grande humilité.
Christian Vabé
IvoireBusiness : Pourquoi êtes-vous allé voir le Président Laurent Gbagbo ?
Abel Naki: Je suis allé voir le Président parce que la CPI m’a convoqué pour me donner rendez-vous avec le Président. C’est une visite qui m’a permis de faire le point de la mobilisation, parce que c’est de ça qu’il s’agit, et de lui faire part de toutes nos actions que nous avons menées peu avant le 11 avril 2011 et juste après le 11 avril, jusqu’à aujourd’hui.
IvoireBusiness: Est-ce pour vous une reconnaissance que le Président ait accepté de vous recevoir ?
Abel Naki: Ce n’est pas une reconnaissance pour moi en tant que Abel Naki, mais c’est une reconnaissance pour toute la diaspora, pour chaque leader, pour chaque responsable d’association, pour chaque responsable de mouvement. Pour tous ceux qui de près ou de loin ont pu apporter leur pierre à l’édifice de la résistance. Je pense que c’est une reconnaissance du Président au combat que nous avons commencé à mener au niveau de la diaspora.
IvoireBusiness : A la veille de cette visite au Président Laurent Gbagbo, vous avez été arrêté. Pourquoi ?
Abel Naki: J’ai été arrêté parce que les forces de l’ordre, sinon les services de police ont estimé que j’avais eu des propos antisémites, des propos terroristes. Ils ont dit que je faisais l’apologie du terrorisme et que je soutenais Mohamed Berah, celui qui a perpétré les tueries de Montauban et de Toulouse.
C’est pour ces raisons que j’ai été arrêté. J’ai dit ici que mes propos ont été mal interprétés et mal compris parce que c’est dans un cheminement, dans un raisonnement que le nom de Mohamed Berah est sorti. Ce n’était peut-être pas le bon exemple à choisir. C’était dans un cheminement bien précis et cela a été mal interprété par les services secrets français qui étaient présents à la manifestation.
IvoireBusiness : Est-ce à dire que vous ne soutenez pas les actions de Mohamed Berah ?
Abel Naki: Je ne peux pas soutenir les actions de Mohamed Berah parce que je ne suis pas un terroriste. Mohamed Berah a été qualifié de terroriste. Je ne suis pas un antisémite. Je ne peux pas soutenir et je ne peux pas louer les actions de Mohamed Berah. Les services secrets français nous connaissent parce que ça fait plus d’un an que nous sommes dans les rues de Paris. Et nous travaillons avec eux car ce sont eux qui coordonnent nos marches. Ce sont eux qui sont avec nous dans les marches, nous les connaissons, ils nous connaissent, on n’a jamais tenus de tels propos. Il est arrivé que cette fois le nom de quelqu’un qui est l’objet d’actes terroristes et d’actes antisémites est sorti dans mes propos. Mes propos ont été mal interprétés tout simplement parce que nous sommes dans une période très sensible où il y a des noms qu’il ne faut pas prononcer.
IvoireBusiness : Est-ce vous avez évoqué cette question avec le Président ?
Abel Naki : Avec le Président, j’ai évoqué cette question mais je ne suis pas rentré dans les détails.
IvoireBusiness : Que lui avez-vous dit ?
Abel Naki: J’ai dit au Président que je venais de sortir juste d’une garde-à-vue et le Président m’a dit, on t’a encore arrêté? J’ai un peu tiqué et je me suis rendu compte que le Président était informé de tout. Que j’aie parlé de cette affaire ou pas, je me suis rendu compte que le Président était informé de tout. Je lui ai simplement dit que j’ai été arrêté par rapport à la manifestation que nous avons faite et que mes propos avaient été mal interprétés.
IvoireBusiness: Comment avez-vous trouvé le Président ?
Abel Naki: J’ai trouvé le Président en tout cas serein, en très bonne forme, en bonne santé, et jovial. C’est en tout cas le Laurent Gbagbo que nous avons toujours connu et courtois. J’ai trouvé en tout cas un Président de la République droit dans ses bottes, avec toutes ses facultés en place. Il y a même pendant notre entretien, de petites anecdotes qu’il ressortait et qui me faisaient penser à quand il était encore aux affaires en Côte d’Ivoire.
IvoireBusiness : De quelles anecdotes s’agit-il ?
Abel Naki: En tout cas je vais me garder de ne pas dire certaines choses que j’ai eu à évoquer avec le Président. Tout ce qu’on doit savoir, c’est que le Président se porte très bien et qu’il est en bonne santé.
IvoireBusiness : Que vous a dit le Président Gbagbo ?
Abel Naki: Le Président a insisté sur l’union de la mobilisation parce que moi Abel Naki, résistant à Paris avec tous mes camarades ayant fait le point de la mobilisation et de tout ce qui entre en ligne de compte, le Président a souligné que c’est l’union dans la mobilisation qui est essentiel. Le Président a donc insisté sur le fait que nous soyons unis parce que les divisions entre nous, il est au courant et ça l’a beaucoup affecté. Son plus grand souhait, c’est que tous ses enfants, tous les ivoiriens, en tout cas tous les leaders soient unis pour pouvoir gagner ce combat-là.
IvoireBusiness : Vous-a-t-il donné mandat pour travailler à cette union ?
Abel Naki: On ne peut pas dire que j’ai eu mandat. Mais je pense que j’ai eu un mandat par le fait d’y aller et que le Président mette l’accent sur l’union, je pense que j’ai eu mission pour œuvrer à ce qu’effectivement, il y ait union dans toutes nos activités, dans tout ce que nous faisons.
Je m’attèle à cela. Quand je suis revenu, j’ai appelé tous mes camarades, tous ceux avec qui on pouvait peut-être ne pas s’entendre, je les ai tous appelés pour leur faire part de ma visite au Président et leur faire un compte-rendu. Je pense qu’il faut que nous nous inscrivions dans cette dynamique unitaire pour pouvoir gagner le combat.
IvoireBusiness: Alors ce mandat du Président, comment comptez-vous l’utiliser? Allez-vous écraser vos adversaires ?
Abel Naki: On ne pas revenir de chez le Président Laurent Gbagbo et avoir un air hautain ou alors vouloir écraser les autres! Parce que vous-même, quand vous le voyez et quand vous le rencontrez, vous vous dites que vous n’êtes rien par rapport à lui. Donc ça permet à ceux qui le rencontrent de pouvoir se maintenir dans leur position d’humilité. C’est donc vraiment avec humilité que je prends ce mandat. Je ne suis pas le chef de quelqu’un, je ne suis pas le patron de quelqu’un. Je suis allé voir notre chef à nous, la phrase ou le mot d’ordre qui est sorti, c’est l’union dans la mobilisation, je l’ai bien compris et je voudrais bien le transmettre à mes camarades pour que nous puissions tous travailler à cette union-là. Chacun peut avoir son groupe, chacun peut avoir son association, son mouvement, mais quand il s’agit des grands rassemblements, quand il s’agit des grandes plateformes, il est important et impératif que nous soyons sur la même longueur d’onde et que nous puissions travailler de façon unitaire.
IvoireBusiness : Avez-vous parlé de Miaka Ouretto, car ce dernier, lorsqu’il est allé voir le Président a dit que Koné Katinan n’était pas le porte-parole de Laurent Gbagbo ?
Abel Naki: Vous savez, cette visite au Président, ça a été une surprise pour moi. C’est avec honneur que je l’ai rencontré. Nous n’avons pas parlé de ces choses, parce que j’estime que je ne suis pas allé le voir pour parler de ça. Et je n’ai pas évoqué ce problème parce que je considère que ce n’est pas un problème qui me concerne moi. Ce qui me concerne et qui concerne mes camarades de lutte, c’est la mobilisation. Alors j’ai fait le point et le Président nous a donnés des consignes. Il nous dit d’être unis dans la mobilisation. Donc, je n’ai pas touché tous ces aspects parce que je ne suis pas responsable du FPI, ni représentant du ministre Koné Katinan. Donc je n’ai pas abordé ces sujets.
IvoireBusiness : Récemment, Laurent Gbagbo était au centre de l’actualité, surtout par IvoireBusiness qui a évoqué l’imminence de son empoisonnement à La Haye. En avez-vous parlé ?
Abel Naki: Lorsqu’on discutait et que je lui posais des questions sur sa santé, il me disait qu’il était en bonne santé et qu’il était bien traité. L’imminence de cet empoisonnement, je n’en ai pas parlé pour ne pas entrer dans des situations qui risquent peut-être de fâcher la CPI. Parce qu’il ne faut pas ignorer que là où nous sommes assis, il y a peut-être une camera qui nous regarde ou des micros. Donc j’ai pris sur moi de ne pas parler de ces choses-là, parce que c’est quand même de la CPI qu’il s’agit dans ce cas précis. J’ai eu le réflexe de ne pas en parler.
IvoireBusiness : Comment le Président Laurent Gbagbo appréhende t-il l’ouverture de son procès le 18 juin prochain ?
Abel Naki: Le Président compte d’abord sur lui-même, sur ses avocats qui font un travail excellent et il compte sur la mobilisation de la diaspora et de tous les ivoiriens. Alors il a insisté pour que nous la diaspora, surtout nous en France, parce que c’est nous qui sommes allés le voir, nous mettions en place un comité central pour la mobilisation, pour qu’il n’y ait pas plusieurs organisateurs, et qu’il n’y ait pas différents prix pour décourager bon nombre d’ivoiriens,et bon nombre d’africains qui ont envie de participer à ce procès. Alors nous allons mettre en place un comité central d’organisation avec toutes les sensibilités et tous les différents mouvements, toutes les plateformes et coalitions. Pour que tous les ivoiriens, on ait un seul langage et un seul moyen de transport pour aller à La Haye le 18 juin prochain.
IvoireBusiness : Comment avez-vous trouvé le Président, a-t-il récupéré ?
Abel Naki : Il a récupéré, il m’a même accompagné jusqu’à la sortie.
IvoireBusiness : Comment était habillé le Président ?
Abel Naki: Le Président avait porté une tunique, mais je peux dire que sous l’émotion, je n’ai même pas remarqué la couleur de son pantalon, je n’ai même pas remarqué les chaussures qu’il avait portées. C’est pour vous dire que c’était pour moi un honneur de voir celui pour qui nous avons lutté depuis 2002 jusqu’aujourd’hui en 2012. C’était un grand jour, je n’avais jamais vu le Président Laurent Gbagbo face à face. On l’a toujours vu à la télévision ou de passage dans un cortège présidentiel. Mais imaginez-vous, moi Abel Naki, assis dans une petite salle d’audience seul à seul avec le Président de la République et sans témoin. C’était très émouvant et je peux vous dire il était lui aussi très content de me voir. Quand il m’a vu, il a grandement ouvert ses bras. En tout cas, c’était une visite d’un fils à un père. C’est comme ça que je qualifie ma visite à Laurent Gbagbo.
IvoireBusiness : Quel appel avez-vous à lancer ?
Abel Naki: Je voudrais lancer un appel aux ivoiriens d’être sereins, parce que le Président Laurent Gbagbo compte sur toute la Côte d’Ivoire. Il est informé sur tout ce qui se passe en Côte d’Ivoire et hors de la Côte d’Ivoire, c’est-à-dire dans la diaspora. Et il compte sur nous pour pouvoir gagner son procès. Et le 18 juin, il faut que tous les ivoiriens du monde entier et toute la diaspora, puisse se rendre à La Haye, afin que nous allions soutenir notre Président.
IvoireBusiness : Merci Abel Naki
Propos recueillis à Paris par Christian Vabé