Tribune: Ouattara chez les prix Nobel, par Shlomit Abel

Par Correspondance particulière - Ouattara chez les prix Nobel.

Ouattara une fois de plus se transforme en Magellan pour rejoindre le Libéria de Hélène Johnson Sirleaf. Nième voyage du président le plus éparpillé de la terre, jamais deux nuits de suite dans le même lit, toujours en chemin, éternel pèlerin voyageur en quête de magot pour relever la Côte d’Ivoire, pardon relever ses riches amis occidentaux de la finance et de la politique aux poches percées…

« C’est l’événement politique de cette semaine »nous affirme le Patriote, autrement dit une sortie médiatique qui sera relayée par tous les médias de France et de Navarre et qui n’intéressera aucun Ivoirien qui lui cherche à savoir quand il retrouvera un travail normalement payé, quand il pourra envoyer ses enfants en classe puis faire des études, quand les gens ne mourront plus comme les mouches, faute de médicaments et de soins abordables, quand la jeunesse ne sera plus livrée à la prostitution, faute de moyens de subsistance …

Le Patriote d’emblée nous situe l’emmergence des exilés lors de la décénie Gbagbo, nous voilà fixés, les Ivoiriens ont commencé leur exil pendant « la décennie de crise politico-militaire qui a martyrisé la Côte d’Ivoire » mais par le passé, ils sont rentrés en plusieurs vagues. Curieuse mer de l’Exil qui ne peut qu’empester à force de stagner! « C’est encore pour cet engagement à panser les plaies du passé, qu’il a réaménagé son emploi du temps hyper chargé, afin de pouvoir se rendre au Libéria, pour donner cet autre signal fort pour la réconciliation ».On en pleurerait presque.

Mais le journal reproche aux Ivoiriens de laisser Alassane porter seul le flambeau de la réconciliation, il court et personne ne le suit, pas de possibilité pour lui de transmettre la flamme de la réconciliation. Quel dommage d’autant que la «Côte d’Ivoire a su, en l’espace de deux années seulement, sortir du gouffre dans lequel les refondateurs l’avaient plongé pendant dix ans. Et force est de constater aujourd’hui que tout va bien ». Et suit l’énumération: croissance revenue, les chantiers fleurissent (mais on attend les fruits, la récolte) Une bonne partie des exilés est rentrée, -ce qui est plus que douteux, puisque si c’était vrai, le flux continuerait indépendamment des bakchichs jusqu’ici utilisés par le pouvoir - « Ceux, qui sont encore dehors, ont tout intérêt à regagner la Côte d’Ivoire pour prendre toute leur place dans le train de la réconciliation qui est en marche » cette phrase sous des dehors anodins est menaçante: « exilés vous avez intérêt à rentrer, sinon… » « Ceux qui sont rentrés vivent tranquilement, le ciel ne leur est pas tombé sur la tête » poursuit encore le journal. Faut-il en conclure que ces nombreux exilés ont trouvé leur maison et leur village rebati, leurs plantations intactes et non squattées, que Ouattara s’est même à Duékoué et Nahibly pour l’inauguration des batiments, que la comission CDVR a distribué des primes généreuses aux exilés qui ont tout perdu, que Dominique Ouattara s’est déplacée au Ghanna, Libéria, Togo, qu’elle a visité les camps et consolé les enfants serrés sur sa poitrine généreuse...

« Le train de la réconciliation est en marche ». Ce train est fantastique, tantôt train du progrès, tantôt train de la réconciliation, et curieusement, très peu d’Ivoiriens et d’exilés l’ont pris, et surtout Ouattara a oublié d’y monter lui-même, il se contente de courir sur le quai ou au dessus, dans les airs en tendant la main, une main vide, sans aucune assurance, aucun dédommagement, aucun engagement. ... Ce train circule sans s’arrêter, ne prend ni ne dépose aucun passager … Il est en route, mais on ne connaît ni sa provenance ni sa destination, il n’a ni voyageurs, ni marchandises à transporter, hormis les noms de tous les morts, de tous les disparus, de toutes les victimes de maladie qui seraient encore là si elles avaient pu se soigner, sinistre train fantôme......

Ce bavardage est destiné uniquement à donner des gages à l'Occident qui en a assez de cette situation ingérable, mais si les maisons étaient reconstruites, si les dozos n'étaient plus là, si les burkinabé n'occupaient pas les terres par milliers, les exilés rentreraient. La rencontre entre Sirleaf et Ouattara, c'est la rencontre médiatisée de deux créatures occidentales, même si la femme parait être meilleure administratrice du Libéria que Ouattara de la Côte d'Ivoire. Pourquoi alors faire rentrer des réfugiés quand on n'a rien à leur donner?

Le prix Nobel de la paix est tellement bradé, - nous l’avons vu avec le pitoyable appel aux Africains d’honorer la CPI, lancé par Koffi Annan et le prélat Desmond Tutu, tous deux détenteurs du même prix, qu’ils ont reçu pour services rendus, et Obama pour services à rendre, - que je me demande même si Ouattara n'est pas au Libéria pour demander à Sirleaf comment elle a fait pour le recevoir, et s'il a des chances de l'obtenir, maintenant que la situation est tellement ingérable que le retour de Gbagbo s’impose. Alors là, quel panache: Mr Ouattara devient le Boulon miraculeux qui a déboulonné et qui va re-boulonner Gbagbo. Quel meilleur gage pour la paix à l'occidentale? Vraiment Ouattara le mérite, ce prix Nobel de la paix !

Une ontributin de Shlomit Abel, 17 octobre 2013