RETOUR DE GOUDE : FORMIDABLE NOUVELLE… mais non au syndrome de Stockholm !
Par Ivoirebusiness/ Débats et Opinions- FORMIDABLE NOUVELLE… LE RETOUR AU PAYS DE M. CHARLES BLE GOUDE ; mais non au syndrome de Stockholm !
Dans la lutte qui a été menée de manière intense, héroïque et
plurielle, l’Association des Amis de Laurent Gbagbo que j’ai eu
l’honneur de présider a fait un choix clair et sans fioriture. Nous avons
refusé d’emblée que la libération du Président Laurent Gbagbo et du
ministre Charles Blé Goudé soit regardée comme une utopie. D’autres
comme nous ont fait ce qui était en leur pouvoir pour que ces deux Ivoiriens
injustement détenus soient libres et surtout regagnent leur pays comme notre
constitution le mentionne explicitement dans le texte. Avec la restitution
de son passeport-et je dis bien la restitution-le ministre Charles Blé
Goudé voit une injustice absurde réparée. C’est cela la Vérité. La
liberté qui lui avait été volée et qui a mis entre parenthèse des
années importantes de sa vie est en passe de lui être restituée. Nous nous
réjouissons évidemment avec lui parce que c’est cela qui est humain et
que nous avons toujours réclamé.
Cela dit, nous refusons énergiquement cette sorte de déferlement absolument
irrationnelle d’épanchement et de sympathie soudaine à l’égard du
pouvoir d’Abidjan qui est pourtant à l’origine de cette détention aussi
inutile que sadique. Ce flot d’émotion qui transpire dans la presse se
confond de manière grotesque avec le syndrome de Stockholm. Que la haine
recuite qui était à l’évidence le seul moteur du maintien hors du pays
totalement injuste et injustifié d’un homme libéré et sans aucune
charge retenue contre lui se transforme en un fleuve de je ne sais quelle
reconnaissance est totalement irrationnel et parfaitement indécent.
Entendons-nous bien, je ne suis pas en train de dire que les remerciements de
M Charles Blé Goudé à l’égard de ceux qui détenaient son passeport ne
sont pas justifiés. En effet comment faire autrement que le fait de dire
merci, ne serait-ce que pour montrer la qualité de son éducation à celui
qui vous empêche de jouir de vos droits et qui visiblement a les moyens
matériels de prolonger votre supplice à sa guise? Même si ce n’est pas
ce que pense du tout le ministre Charles Blé Goudé, nous savons que la
route de son pays était obstruée illégalement pour lui. Il était placé
dans une espèce de prison psychologique terrible contre laquelle il
n’existait pas de procès mais qui pouvait être prolongée indéfiniment
sans qu’aucun avocat n’y puisse absolument rien. Le fait qu’il dise
merci à la restitution de son passeport me semble aussi humain que boire
pour étancher sa soif. Par ailleurs, je ne suis pas directeur de sa
conscience ni de celle de personne d’ailleurs mais au nom de la liberté
d’expression je revendique celle de mon analyse.
Comme nous n’avons eu de cesse de le dire et de l’écrire, le respect de
nos textes qui indiquent qu’aucun Ivoirien ne doit être contraint à
l’exil oblige que l’Ivoirien Charles Blé Goudé rentre chez lui en Côte
d’Ivoire après avoir été disculpé par la plus haute juridiction au
monde d’actes qu’ils n’a pas commis et dont on a tenté de l’affubler
(cf. toutes les publications sur le site de l’association des amis de
Laurent Gbagbo). Nous pensons qu’en dehors du ministre Charles Blé Goudé,
nous n’avons aucunement pas à verser dans une reconnaissance injustifiée
à l’égard de qui que ce soit pour avoir appliqué des textes qui auraient
d’ailleurs dû l’être depuis longtemps déjà.
Dans cette réconciliation qui commence enfin et que nous avons toujours
appelée de nos vœux, la Vérité doit éteindre l’hypocrisie comme la
lumière le fait de l’obscurité pour que la langue de bois et le mensonge
n’empêchent pas chacun de reconnaitre sa part de responsabilité dans la
sauvagerie sans nom qui a si profondément meurtri notre pays. Si nous
n’avons pas d’autre choix que de réapprendre à vivre ensemble sans
méfiance ni exclusion de toute sorte, nous avons le devoir de garder la
mémoire de cette part sombre de notre Histoire en restituant les faits sans
les travestir pour que chacun mesure bien sa part de cruauté afin que cela
serve de ligne rouge à ne plus jamais franchir.
Soyez le bienvenu M. le ministre Charles Blé Goudé dans votre pays !
C’est maintenant que se concrétise votre libération pour que s’engage
une réconciliation exigeante et définitive dans laquelle, à
l’évidence, demander ou dire pardon est une condition nécessaire mais
pas suffisante.
Raphaël DAGBO
Enseignant-chercheur en études stratégiques et politiques de défense