A propos de « Deuxième épitre à Laurent Gbagbo » de Tiburce Koffi: Contradictions et dérives (2)
Le 19 novembre 2010 par Autre presse - Suite et Fin.
...Alors,question : M. Tiburce Koffi est-il révisionniste, amnésique ou simplement malhonnête ?
Un héros cornélien ?
Le 19 novembre 2010 par Autre presse - Suite et Fin.
...Alors,question : M. Tiburce Koffi est-il révisionniste, amnésique ou simplement malhonnête ?
Un héros cornélien ?
Par ailleurs, nous savons que, depuis 1999, M.
Tiburce Koffi n’est pas en odeur de sainteté
avec M. Henri Konan Bédié. Mais, le fait est
que M. Tiburce Koffi est, malgré tout et par
concession, Directeur de la maison d’édition
du « Nouveau Réveil » appartenant à M. Henri
Konan Bédié. Il est aussi un collaborateur
privilégié de M. Charles Konan Banny. Un
simple syllogisme permet de comprendre ce
qui se passe : M. Tiburce Koffi est le Conseiller
de M. Jean Konan Banny. Or, M. Charles
Konan Banny, soupçonné, à tort ou à raison,
par les partisans de Bédié d’être le
commanditaire d’une tentative de sabordage
du PDCI, a fait allégeance à M. Henri Konan
Bédié. Donc, M. Tiburce Koffi se doit de faire
allégeance à M. Henri Konan Bédié. Et, pour
cela, M. Tiburce Koffi avait besoin d’un signal
fort pour tourner la page, pour effacer
l’opprobre, sauver l’honneur ; il fallait, à M.
Tiburce Koffi, poser un acte cornélien, à
l’image du Cid (Corneille), ou jouer à Antigone
face à Créon (Anouilh)... Telle est la motivation
profonde ou le mobile de ce prophétique
« courrier offert à la curiosité du public » que, M.
Tiburce Koffi a fait publier, précisément à la
veille du scrutin, augurant de la fin inéluctable
de Laurent Gbagbo, au soir du 31 octobre
dernier, « comme l'étreinte dernière que se
donnent ceux qui partent pour ne plus se revoir ni
plus revenir… ». D’ailleurs, il le dit très
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explicitement et énergiquement dans son
épitre : « A l'approche de ce jour fatidique, je te
souhaite d'avoir le temps (après le ballet des
flagorneurs de la cour), de repasser rapidement dans
ta mémoire le film de tes 10 années de règne
anarchique et criminel pour comprendre ceci :
aucun peuple sérieux ne peut se permettre de
reconduire un dirigeant improductif et dangereux
comme toi. Un conseil donc : accepte de partir du
palais présidentiel dans l'élégance du grand
perdant. Accepte la défaite évidente qui t'attend.
C'est la dernière porte que l'Histoire t'ouvre pour
te permettre une possible réhabilitation après la
tourmente que nous a servie ton régime nocif. Fin
de règne donc pour toi, Gbagbo Laurent, fils de
Mama ! La Côte d'Ivoire est en route pour la IIIème
République ». Sans commentaire !
Que recherche Tiburce Koffi ?...
Cette déclaration à caractère divinatoire
montre que M. Tiburce Koffi avait cru ne plus
jamais rien attendre de Laurent Gbagbo. Il
pensait, en astrologue, en « devin » ou en mage
politique, dire l’oracle (épitre est un terme
biblique) et en même temps, en sacristain,
sonner le glas, et en même temps, être des tout
premiers à crier : « Vive le Roi ! », bien entendu
le nouveau, c'est-à-dire M. Henri Konan Bédié.
Voilà pourquoi, à quelques heures du scrutin,
il prophétise, sur un ton fort pathétique : « Fin
de règne donc pour toi, Gbagbo Laurent, fils de
Mama ! La Côte d'Ivoire est en route pour la 3ème
République. Ce sera, inévitablement, l'oeuvre des
vrais héritiers d'Houphouët. Ceux du RHDP. Le
grand jour est donc proche pour la réhabilitation de
la Mémoire du Grand homme que tu as salie. Et ce
sera ainsi, pour que soit rétablie la légalité
républicaine rompue imprudemment un mauvais
jour du 24 décembre 1999, sous tes soins ».
Malheureusement, M. Tiburce Koffi a tout
faux, lui qui entendait, de cette façon, en
fanfare, redorer son blason, autrement dit,
convaincre solennellement M. Bédié et
s’installer définitivement dans ses grâces et
dans son estime. Mauvais calculs ! M. Tiburce
Koffi perd de vue qu’il faut toujours et
beaucoup réfléchir avant de poser certains
actes, et que M. Henri Konan Bédié ne lui
pardonnera jamais ce gros coup de massue
fatal sur sa nuque, je veux parler de l’opprobre
de la « Lettre Ouverte » publiée par M. Tiburce
Koffi dans le journal Le Jour n° 1270 du 30 avril
1999, où il témoigne publiquement de
l’incapacité notoire et irréfutable de cet homme
à gérer intelligemment notre pays… Pour ceux
qui ignoreraient l’existence et la teneur de cette
autre « épitre offerte, (en 1999), à la curiosité du
public, comme l'étreinte dernière que se donnent
ceux qui partent pour ne plus se revoir ni plus
revenir», en voici un extrait : « … Monsieur le
Président (Henri Konan Bédié), vous et vos amis et
partenaires du pouvoir politique, seuls élus au
banquet de l’abondance et de la jouissance, n’avez
pas le sens du sacrifice. Vos préoccupations
essentielles semblent être les suivantes : continuer
dans la culture du gaspillage et du clinquant,
sacrifier le peuple, bloquer les salaires, hausse sans
cesse et fantaisiste des prix, absence d’une politique
sociale réelle du logement… Ici, en Côte d’Ivoire, on
ne pense plus, on mange et on cherche à manger,
car le savoir ne donne plus accès ni au respect ni au
travail… ».
Pourquoi M. Tiburce Koffi procède-t-il
toujours ainsi ?
Dans ma quête de réponse à cette interrogation
et au regard de ses sentiments contradictoires,
parfois inconvenants, je me suis intéressé, audelà
des mots, à l’état de santé moral et
psychologique de M. Tiburce Koffi. Je ne
reviens plus sur cette affaire de « dépendance »
qui, comme je l’avais dit hier, est la raison
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fondamentale de son « dérèglement ». Ce
dérèglement, qu’on nomme, en psychologie,
paranoïa, appartient au groupe des psychoses et
se caractérise, entre autres, par un délire
systématisé sans affaiblissement des capacités
intellectuelles, par un orgueil démesuré ou une
hypertrophie du MOI mêlée de susceptibilité,
d’angoisse de persécution, de jugement faux
ou mensonge, de rigidité du psychisme,
d’agressivité, de désir de vengeance, etc. De ce
point de vue, on note ici que le langage de M.
Tiburce Koffi est caractérisé par une réelle
surestimation de lui-même, une autoproclamation,
un orgueil anormalement
développé et associé à l’agressivité, un
raisonnement apparemment logique mais
reposant sur des illusions, des erreurs, des
postulats faux et parfois grossiers, comme par
exemple sur Houphouët Boigny ou sur
Laurent Gbagbo, selon qu’il veut présenter une
image méliorative de l’un et une image
péjorative de l’autre, selon qu’il veut diaboliser
ou louanger.
Il faut savoir que le dérèglement naît, bien
souvent, soit d'un conflit psychologique et
affectif, soit d’une affectivité anormale ou
manquante ; ce qui suppose que, pour
comprendre les propos et les agissements de
l’individu concerné, il faut faire une
investigation dans son enfance et dans sa
jeunesse, c'est-à-dire interroger son milieu
familial et ethnique, ses relations avec ses
parents et ses collègues ; il faut détecter ses
frustrations, ses ambitions inassouvies, ses
désirs insatisfaits, etc., lesquels, il faut le
savoir, génèrent de la souffrance et influencent
l’élaboration du sens de la réalité et de la
vérité.
M. Tiburce Koffi souffre énormément de ce
mal qu’il reconnaît lui-même, en ces termes :
« Je continuerai à écrire pour dire mon mal ».
Malheureusement, trop souvent, ce mal le
dessert. Il lui fait faire de mauvais choix et des
dérives, comme cela a, à juste titre, été relevé et
souligné ci-dessus par notre ami.
Un exemple parmi tant d’autres, c’est sa vision
de la fuite, voire de l'exil, révéré par André
Breton et autres surréalistes comme étant «
l'acte surréaliste par excellence lié aux
turbulences politiques et sociales défavorables
à la quiétude, à l'action politique, à la création
artistique, à la production littéraire… ». L’exil
ou la fuite dans une situation de menace se
mue, aux yeux de Tiburce Koffi, en fait de
traîtrise, de trahison et de couardise : « Le
courage, ton fameux courage, parlons-en, Laurent.
Dis-moi un peu : pourquoi as-tu fui, en 1982, pour
aller te cacher en France pendant près de sept ans ?
''Pour des raisons sécuritaires, car ma vie était en
danger'', as-tu dit. Moi, je te réponds : pendant que
tu te terrais en France, hors de portée de la colère
d'Houphouët, n'y avait-il pas d'opposant ici, en
Côte d'Ivoire ? Oui, Laurent, oui, il y en avait. Tu
sais leurs noms (j'en fais partie), et j'épuiserais mes
pages à les citer, tous. Si toi, le fuyard, se qualifie
aujourd'hui de courageux, de quels qualificatifs
désignera-t-on ceux d'entre nous (dont moi) qui
sommes restés ici, sur place, pour résister au
pouvoir d'Houphouët ? Lequel d'entre nous a-t-il
été tué par le régime d'Houphouët ? Aucun. Voistu
donc Laurent, quand on a fui une colère aussi
terrible que soit celle d'un Houphouët (qui fut
pourtant loin d'être un chef criminel), quand on a
abandonné le champ de combat et qu'on s'est tenu
loin, très loin de la répression, pendant sept ans,
pour écrire quelques livres au ton dénonciateur, on
ne se targue pas d'être un homme courageux ! Le
courage, ce fameux courage ! Voyons, Laurent : où
t'a-t-on capturé, en février 1992 ? Dans l'entrepôt
d'un immeuble, au Plateau, dit-on. Que faisais-tu
en cet endroit, toi le preux, le courageux, le brave ?
Tu fuyais la répression policière suite aux actes
posés par tes militants hystériques que tu avais
gonflés à bloc pour cette marche insurrectionnelle.
Tu avais donc abandonné l'armée de tes militants ;
et, après avoir détalé comme un forban pourchassé,
tu es allé te cacher en cet endroit…».
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C'est à croire qu'il faut clouer au pilori nos
compatriotes Francis Wodié, Ahmadou
Kourouma, Yao Ngo Blaise, Sokoury Marcel,
Pascal Kokora, Marcel Amondji, Pascal Koffi
Téya, Nicolas Agbohou, Bernard Doza, Sylvain
de Bogou, Paulin Djité et bien d'autres (dont
un certain Léandre Katouho Sahiri) qui,
sachant d’Esope que « face à plus fort que soi,
rivalité ou résistance ne sont pas de mise » et
mettant en avant ou observant que " « dans un
pays où le bon sens ne protège plus, la sagesse
enseigne et commande de fuir », ont pris,
courageusement, de gré ou de force, le chemin
de l'exil et ont, dans leurs pays d’accueil,
réalisé de grandes choses (études, publications,
diplomatie, etc.) qui font honneur à la Côte
d’Ivoire...
C'est aussi à se demander si André Breton
n'aurait pas eu tort de lancer, en 1922, cet appel
célèbre : « Lâchez tout…/ Lâchez votre femme…/
Lâchez vos espérances et vos craintes / Semez vos
enfants au coin d'un bois / Lâchez la proie pour
l'ombre…/ Lâchez au besoin une vie aisée, ce qu'on
vous donne/ Pour une situation d'avenir… » ?...
C'est à s'arracher les cheveux que de croire que
les Mongo Béti, Wole Soyinka, Voltaire, Emile
Zola, Samuel Beckett, Luis Mizon, André
Siniavski, Mario Goloboff, Salman Rushdie,
Fernando Arrabal et tant d'autres sont des
lâches, des couards pour avoir, à un moment
donné de leur vie, opté pour l'exil en vue
d’éviter d'être emportés par le tourbillon des
turbulences politiques et sociales de leurs pays.
Et, l'on sait que, en général, en leurs terres
d'exil, les exilés ne perdent en rien leur dignité
(sauf s'ils se comportent mal), et souvent
posent des actes déterminants qui font
honneur à leurs pays d'origine. D’ailleurs, l’on
sait que la révolution roumaine qui a emporté
la dictature de Ceausescu est, d'abord et avant
tout, l'oeuvre des exilés roumains en France.
Alors !…
Et, je suis fort aise d'en parler, parce que c'est
ce que j'ai dû, moi aussi faire, en 1987, c'est-àdire,
n’en déplaise à Tiburce Koffi, fuir mon
pays qui puait l'injustice et l'arbitraire et où, au
mépris des Droits de l'Homme, M. Houphouët
Boigny se disait avoir la paix comme religion
et, contradictoirement, chérissait l'injustice et le
clamait, en se frappant la poitrine, comme s'il
ne s'agissait pas d'un vice, comme s’il ne faisait
pas ainsi mal à des êtres humains... En effet,
Houphouët Boigny claironnait « Je préfère
l'injustice au désordre », contrairement à Paul
Claudel qui affirme que « le désordre est le délice
de l’imagination et de la création », contrairement
à Colette Becker qui soutient que « L'injustice et
le mal viennent de l'ignorance ». Et moi, en
accord avec Claudel et Becker, j'avais fui
l'ordre et l'injustice d'Houphouët Boigny,
quoique les soi-disant Houphouétistes, toute
honte bue, l’en vénèrent et l’en encensent et
revendiquent la « réhabilitation de la Mémoire du
Grand homme » dont ils se réclament
pompeusement.
Laurent Gbagbo n’est pas Créon
M. Tiburce Koffi, au risque de finir un jour
dans un asile et de peur d’écourter inutilement
son espérance de vie, se devrait, comme je le
lui avais déjà conseillé, très amicalement, de
sortir des sentiers battus de la dépendance,
prendre réellement conscience de son
dérèglement et chercher à en guérir, pour
pouvoir mettre sa plume, sa belle plume, sa
très belle plume, (et ce serait malhonnête et
indécent de ma part de ne pas le lui
reconnaître) désormais au service de causes
plus nobles que celles qui le desservent
inopportunément. Ne serait-ce, d’abord et
avant tout, que pour lui-même. Car, certes,
Laurent Gbagbo n’est pas Créon et ne lui fera
pas subir le sort d’Antigone. Mais, attention !
Tout le monde n’est pas Laurent Gbagbo...
C’est ce que je pense.
Léandre Sahiri, Directeur de publication de Le Filament.