Prétendu soutien des pro-Gbagbo à Ouattara le 11 avril 2011: Bertin KADET allume Mamadou Koulibaly
Par Ivoirebusiness - Bertin KADET interpelle Mamadou Koulibaly "Président Mamadou Koulibaly, parfois le silence est bon conseiller".
Le jeudi 12 septembre 2013, Pr Mamadou Koulibaly, ancien président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, ancien Vice-président du Front populaire ivoirien (FPI), et actuel président du parti politique Lider, était l’invité de la chaine de télévision camerounaise STV2, dans une émission intitulée, « Entretien avec » Au cours de cet entretien, le Président Mamadou Koulibaly a tenu les propos suivants : « J’ai fait lire ma déclaration de reconnaissance de Monsieur Ouattara comme président de la République par un Conseiller spécial du président Laurent Gbagbo, Kadet Bertin et par Koné Katinan à Accra et par Miaka Ouretto à Abidjan ».
Ce n’est pas la première fois que le Président Mamadou Koulibaly fait des déclarations dans les médias camerounais. Le 28 mai 2013, il a accordé une interview au journaliste Boris Berlot du quotidien camerounais Mutations où il parlait du rôle qu’il a joué dans « l’opération Dignité » en Côte d’Ivoire (nov. 2004).
Je tiens à dire ici que jamais je n’ai eu connaissance d’une telle déclaration émanant de Mamadou Koulibaly, et jamais je n’ai lu sa « déclaration de reconnaissance » ni en public ni en privé, avant qu’il l’adresse à M. Alassane Ouattara. Je ne suis pas le certificateur des déclarations de Mamadou Koulibaly qui, d’ailleurs, en a fait beaucoup depuis cette journée noire du lundi 11 avril 2011, en Côte d’Ivoire. Pourquoi, c’est une « déclaration de reconnaissance » destinée à M. Alassane Ouattara qu’il a besoin de faire valider par trois personnes seulement, en l’occurrence Kadet, Katinan et Miaka ? Qui suis-je et qui sommes nous pour lui donner un quitus ? En procédant de cette façon, Mamadou Koulibaly veut donner un semblant de crédit à ses sorties politiques hasardeuses, en essayant de diviser le FPI, dont il essaie vainement d’utiliser quelques cadres. C’est peine perdue.
La vérité est qu’en mai 2011, Mamadou Koulibaly a convoqué les cadres du FPI présents à Accra, à une réunion, pour les informer de sa décision de se rendre à la prestation de serment d’Alassane Ouattara, à Abidjan, en sa qualité de Président de l’Assemblée Nationale. A cette époque, au niveau du FPI, Mamadou Koulibaly était troisième Vice Président du Parti. Affi N’Guessan, Simone Gbagbo et Sangaré Aboudramane étant en prison, c’est à Mamadou Koulibaly qu’il revient statutairement de diriger temporairement le FPI. Quant à moi, j’étais Secrétaire National en exil, Koné Katinan n’était pas encore porte-parole du Président Gbagbo et Miaka Ouréto, Secrétaire général du FPI, n’était pas à Accra. L’opinion se posera ici la question de savoir ce que pouvaient bien valoir les avis des trois personnalités citées par Mamadou Koulibaly dans son interview à la télévision camerounaise puisque, dans l’ordre protocolaire au sein du FPI, nous n’étions pas les personnes habilitées à influencer la décision du Vice Président qu’il était ? D’autant plus qu’à cette réunion d’Accra, il y avait le Président du Comité de Contrôle Hubert Oulaye et d’autres hauts responsables du Parti. A l’échelle de l’Etat, Mamadou Koulibaly était la deuxième personnalité du pays, en sa qualité de Président de l’Assemblée Nationale ; Koné Katinan est un ex-ministre du budget et Miaka Ouréto n’avait aucun rôle dans le gouvernement Aké N’Gbo. Quant à moi, je suis conseiller du président Laurent Gbagbo. Alors, que vaut l’avis d’un conseiller, fut-il Kadet, d’un Président de la République qu’on vient d’enlever par un coup d’Etat, sur la décision bien mûrie à l’avance et prise par le Président Mamadou Koulibaly deuxième personnalité de l’Etat, de faire acte d’allégeance à un nouveau Chef d’Etat ? Et que valent les avis de Miaka Ouréto et Koné Katinan, à ces moments-là ?
J’ai tenu à être présent à cette rencontre présidée par la seule légitimité qui nous restait encore, après l’éviction de Laurent Gbagbo à coups de bombes, alors que je souffrais terriblement des douleurs dues à mon accident du 25 mars 2011 et que j’avais l’humérus fracturé dans une sangle. Dans sa déclaration liminaire, Mamadou Koulibaly a dit que M. Alassane Ouattara ayant défié toutes les règles de la légalité constitutionnelle pour parvenir au pouvoir d’Etat, la présence du Président de l’Assemblée Nationale à la prestation de serment du nouveau Chef d’Etat ivoirien amènerait ce dernier à inscrire dorénavant son action à venir dans un cadre constitutionnel.
Le débat qui a été engagé à cette réunion n’a pas dégagé une position commune autorisant Mamadou Koulibaly à se rendre à ladite cérémonie de prestation de serment. Nous nous souvenons encore que chaque fois que les intervenants s’opposaient à son idée, le Président Mamadou Koulibaly se lançait dans des explications pour essayer de les convaincre, chose tout à fait normale. Malgré cela, la grande majorité des intervenants s’est opposée à la proposition de Mamadou Koulibaly. Au Front Populaire Ivoirien, c’est cette règle de fonctionnement qui détermine la position du groupe. Il n’y a plus eu d’autres rencontres jusqu’à ce que Mamadou Koulibaly se rende à Abidjan comme il l’a prévu, et devienne ce qu’il est devenu aujourd’hui. Alors, d’où vient ce refrain qu’il enfourche, chaque fois qu’il se trouve devant des journalistes Camerounais ?
Même en essayant de raisonner sur la base d’une hypothèse pessimiste selon laquelle Kadet, Katinan et Miaka auraient lu une « déclaration de reconnaissance » rédigée par Mamadou Koulibaly, la seule question qui mérite d’être posée à ce dernier est celle-ci : Qu’a fait Mamadou Koulibaly de la confiance que ses amis ont placée en lui ? Une fois à Abidjan, Mamadou Koulibaly n’a jamais eu comme centre d’intérêt la libération de Laurent Gbagbo et de ses amis incarcérés ; il ne s’est jamais préoccupé du retour des exilés. Au contraire, il vilipende le Président Laurent Gbagbo dès que les médias lui en donnent l’occasion ; il s’attèle à changer l’orientation doctrinale du FPI. N’ayant pas eu de succès dans ses tentatives, Mamadou Koulibaly quitte finalement le FPI pour créer son parti, le Lider. Lorsque des camarades de parti te donnent une feuille de route, que tu mets de côté pour faire autre chose, c’est que tu as échoué. Ne pas reconnaître sa faute politique devant les médias camerounais et chercher à en faire porter la responsabilité par d’autres personnes, c’est la meilleure façon d’exprimer son immaturité politique. On a beau être un harangueur de foule, il est parfois mieux de se taire surtout quand on n’a rien à dire de sérieux et de vrai.
Les camerounais ont soutenu la légalité constitutionnelle en Côte d’Ivoire. Ils sont dans toutes les manifestations de la diaspora ivoirienne. Leurs intellectuels écrivent l’histoire de la Côte d’Ivoire en produisant des ouvrages de qualité qui retracent les évènements qui se sont passés dans notre pays ces dix dernières années. Les avocats camerounais sont les défenseurs des Ivoiriens injustement incriminés par le régime ivoirien. Je demande à Mamadou Koulibaly qui a l’occasion d’aller souvent dans ce pays, de dire des choses sérieuses et responsables à nos amis et frères Camerounais, au lieu de leur exposer ses états d’âme. Le débat sur nos états d’âme respectifs est dépassé.
La Côte d’Ivoire a trop de problèmes qui méritent une lecture en profondeur, avec humilité et responsabilité. La situation sécuritaire de notre pays est grave, les droits de l’homme y sont constamment violés, plus de 700 prisonniers politiques croupissent toujours dans les prisons et des milliers d’Ivoiriens sont en exil forcé. Les nouvelles lois sur le foncier rural et la nationalité sont sources de potentielles tensions.
Les acquis démocratiques engrangés par les Ivoiriens depuis 1990 ont connu un coup d’arrêt brutal le 11 avril 2011. Nous avons donc un pays à reconstruire. Dans cette perspective, nous retenons de Mamadou Koulibaly qu’il a été un haut responsable de l’Etat et du Front Populaire Ivoirien. Nous lui avons fait confiance et l’avons soutenu à un moment où notre formation politique commune et ses militants avaient le plus besoin de ses services et de ses compétences. Mais, il a choisi d’abandonner la barque en pleine eau. Nous lui souhaitons le bonheur qu’il espère dans la voie qu’il a choisie. Toutefois, qu’il cesse pour de bon d’impliquer gratuitement ses anciens camarades dans ses déclarations.
Fait à Accra, le 17 septembre 2013
Bertin G. KADET
Ancien Ministre,
Ancien Conseiller spécial du Président L. Gbagbo