MEIWAY: Le sens d'un repentir! par César Etou
Par Notre Voie - En Pleine Voie par césar etou: Meiway !
Comme une trompette désormais bien réglée, l’artiste-musicien Frédéric Ehui alias Meiway a ajouté, le week-end dernier, une note inattendue de lui au refrain politique à l’ivoirienne. Une note stridente qui rompt avec le train-train musical pollué de la Côte d’Ivoire proclamée émergente à l’horizon 2020 : « Il faut que Laurent Gbagbo soit libéré un jour. C’est mon avis ».
C’était au détour de sa participation au festival Afrique 2013 à la Haye, aux Pays Bas, siège de la prison de Scheveningen où est injustement enfermé le Président ivoirien Laurent Gbagbo, depuis le 30 novembre 2011. C’est la radio néerlandaise, Radio Pays Bas International, qui a ouvert ses antennes au créateur du Zoblazo pour joindre sa voix à toutes celles qui, innombrables à travers le monde entier, ne cessent de réclamer la libération de Gbagbo. Le Professeur Awolowo semble particulièrement touché d’avoir été à la Haye, tout près de l’ancien président des Ivoiriens, Laurent Gbagbo, sans le voir : «C’est clair que pour un Ivoirien qui vient prester à la Haye, il y a toujours un pincement au cœur de savoir que quelque part, on a un frère, un père, un parent qui est interné ici, qui est enfermé ici ». Ici, l’émotion a dû prendre le dessus. Mais très vite, elle l’a cédé à la lucidité et à la raison dans l’esprit de la star ivoirienne: « Aujourd’hui, tous les interlocuteurs (Ndrl, opposants) sont en prison. On ne peut pas se réconcilier !». Et à l’artiste de réprouver, à son tour, la justice des vainqueurs : « Que certains paient et que d’autres soient en liberté, c’est injuste. J’espère que Laurent Gbagbo sortira de là. Il faut qu’il soit libéré un jour. C’est mon avis !»
Il est vrai que par ces paroles, le musicien aux multiples surnoms ne fait que reprendre un refrain «mondial ». La libération du président Gbagbo est de nos jours réclamée, publiquement, diplomatiquement, comme en silence, par des voix insoupçonnables. Elle a été amplifiée au dernier sommet de l’Union africaine où le Premier ministre éthiopien, président en exercice, a qualifié de « racistes » les poursuites de la Cpi contre les seuls dirigeants africains. Mais ce qui frappe dans la sortie de la star ivoirienne de la musique, c’est le constat qu’il dresse de la profonde division qui mine le pays sous Ouattara. Ce constat est décliné en motivation personnelle par Meiway lui-même : «Dans tous les camps politiques, il y a eu des morts. Il fallait réagir. Au moment où je suis arrivé pour entendre les deux parties, c’est à l’Hôtel du Golf qu’on a accepté de me recevoir. Je devais aller de l’autre côté, on a refusé de me voir. J’ai pris position… L’artiste dans ce cas divise forcement son fan club», confesse le Génie de Kpalêzo.
Meiway n’est pas le premier artiste ivoirien à constater l’amère « division des fan clubs », c’est-à-dire des Ivoiriens. A la fin de la pompeuse « Caravane de la réconciliation nationale » pilotée, l’année dernière, par Tiken Jah et Alpha Blondy, le rappeur Billy Billy n’a pu se retenir face au fiasco : « Alpha, Tiken Jah ou… Meiway, seuls en concert, remplissent des stades. Or, eux et nous ensemble, nous n’avons même pas pu remplir les espaces réservés à l’intérieur du pays. Ça ne va pas ! ». A son retour en France, Alpha Blondy a sorti un « single » dont la chanson, abondamment véhiculée sur internet, réclame vertement la libération de Gbagbo.
En vérité, en refusant de se soumettre au verdict du Conseil constitutionnel de « son » pays, Ouattara n’a pas fait que plonger la Côte d’Ivoire dans la guerre. Il l’a minée par la division. De plus, malade de la légitimité populaire ratée, l’actuel chef de l’Etat se sent obligé de régner par la terreur et par le manichéisme. On pouvait conjurer ces milliers de morts. Mais sous son régime, plus de 700 opposants, militaires et civils confondus, croupissent en prison ; des milliers d’autres sont en exil, leurs maisons occupées par des miliciens armées, leurs avoirs gelés, leurs familles disloquées, leurs enfants déscolarisés. Les partis politiques sont sevrés d’activité et même du financement public octroyé par la loi sous Gbagbo. Seuls, Ouattara et son clan de «rattrapés ethniques » se la coulent douce. Et dans le pays, rien ne va, les populations crient partout famine…
Meiway, en prenant position, à l’époque, pour les négateurs de la sacrée décision constitutionnelle, avait soutenu cette « division » du pays, c’est-à-dire de son propre « fan club ». Vivement que sa nouvelle voix soit entendue. Car, aujourd’hui, «on peut penser à la paix, mais la réconciliation (…) n’est pas possible tant que Laurent Gbagbo est à La Haye ». Signé l’artiste lui-même.
C.E cesaretou2002@yahoo.fr
NB: Le titre est de la rédaction.