La pièce à conviction du procureur Ocampo dans le procès politique à venir de Laurent Gbagbo

Le 10 avril 2012 par IVOIREBUSINESS - Nous lisons et entendons ici et là nombre de propos qui analysent l’acte posé par le procureur Ocampo à l‘intention de son excellence M. SORO.
Nous respectons bien entendu tous ces écrits, parfois contradictoires

Laurent Gbagbo lors de l'audience de comparution initiale à la CPI, le 05 décembre 2011.

Le 10 avril 2012 par IVOIREBUSINESS - Nous lisons et entendons ici et là nombre de propos qui analysent l’acte posé par le procureur Ocampo à l‘intention de son excellence M. SORO.
Nous respectons bien entendu tous ces écrits, parfois contradictoires

, parfois léonins, à l’image des sentiments de tolérance et de respect toujours prônés par Laurent Gbagbo.
Certes le glaive judiciaire à ses subtilités, comme toute institution à son verbiage et ses us, mais comme le dit le proverbe « chat échaudé ne revient pas en cuisine » il convient donc, sans être ni paranoïaque ni convulsé de ne pas être naïf pour autant.
Ne tentons pas d’édulcorer cette lettre, de douceurs courtoises qu’elle n’aurait pas et sans passion, mais sans détour, essayons d’en tirer le bon grain de l’ivraie.

En effet, la lettre en date du 27 mars 2012 que le procureur OCAMPO a adressé, en catimini, sur papier à entête de la CPI à SORO Guillaume, le félicitant pour sa nomination à la tête de l’assemblée nationale ivoirienne, peut être vue, en matière de naïveté servile, comme un cas d’école ! Des propos obséquieux et rampants avancés dans cette lettre, on se demande bien s’il faut en rire ou en pleurer ! Car dans ses élans « du cœur » le procureur aura oublié d’apposer sur cette lettre le cachet confidentiel, ce qui pourrait l’exposer à la vindicte de ses pairs, sinon plus.. Enfin on peut le supposer !
Cette lettre pourrait être savoureuse et hilarante, si elle ne nous mettait pas une nouvelle puce à l’oreille ! En effet nous clamons haut et fort depuis la déportation de Laurent Gbagbo à la CPI en Novembre 2011, que son procès sera un procès politique, ou ne sera pas et cette pièce attesterait selon toute vraisemblance, d’une collusion, au moins amicale, en tout cas d’une proximité inappropriée entre l’ex chef des rebelles en Côte d’Ivoire et un procureur sensé disposer d’un pouvoir discrétionnaire au sein d’une Cour Pénale Internationale sensée, elle promouvoir une droiture Internationale sans faille.
Certes le bureau du procureur au sein de la CPI est un organe indépendant de la Présidence et du Greffe de cette institution, certes charbonnier est maître chez soi, certes chacun doit s’assurer autant que faire se peut d’un parachute doré pour ses vieux jours, mais quand même ! Un brin de déontologie et de retenue, aurait pour vertu d’atténuer quelque peu une disgrâce qui pourrait se profiler, bref.
Cette lettre du procureur sera pour la défense de Laurent Gbagbo une pièce à conviction forte dans le procès politique qui s’annonce. Une pièce qui pourrait être une clef pour dévider l’écheveau d’une possible conspiration à charge, une pièce qui devrait faire saliver plus d’un avocat de la défense.
Mais au juste c’est quoi un procès politique ? De source universitaire, un procès politique serait « un procès qui réunirait un Etat persécuteur, des magistrats serviles ou partisans, des culpabilités incertaines et des condamnations pour l’exemple. La finalité d’un procès politique serait la recherche d’un bouc émissaire qui permettrait de déresponsabiliser un (ou plusieurs) Etat(s) engagé(s) dans la procédure » Alors la lettre de Monsieur le procureur ! Stratégie ? Courtoisie ? Acte manqué ? Provocation ? Ou impulsion dévoyée résultant d’une dérive comportementale ?
N’étant ni psychologue ni sorcier nous ne répondrons pas à cette question, cependant nous pouvons, au vu de la qualification de ce que sera ce procès, scénariser la guerre des tranchées qui va se mettre en place à partir du 18 Juin 2012 au sein de la CPI. Dans un procès politique l’instruction à charge et à décharge ne va pas reposer sur des débats contradictoires que nous pouvons supposer, dans une dialectique cohérente et courtoise d’un procès « normal »! Dans un procès politique les codes comportementaux des uns et des autres n’existent plus, nous en sommes là !
L’accusation, va ainsi avancer un postulat qui sera de dire que Laurent Gbagbo a perdu les élections Présidentielles de 2010, qu’il a de surcroit refusé de quitter le pouvoir et qu’il a en conséquence généré toutes les violences qui en ont suivi, donc il est responsable et coupable des exactions dont on l’accuse.
Un postulat, par définition n’est pas démontrable.
La Défense, va devoir démolir ce postulat à l’aide d’un raisonnement axiomatique, qui va prouver, de fait, qu’au vu d’un certain nombre d’actes, de textes de lois et de comportements Laurent Gbagbo n’a pas perdu les élections.
Ne voulant pas faire ici le lit de l’accusation, nous ne rentrerons pas dans les détails, qui nous amèneraient à mettre en évidence de possibles vices de formes et procédures, nous dirons simplement qu’il va falloir prendre en considération et faire se recouper l’ensemble des textes fondamentaux ci après :
/ La Constitution ivoirienne (entre autre les pouvoirs du chef de l’Etat et les prérogatives inaliénables du Conseil Constitutionnel)
/ La loi portant fonction et attribution de la CEI du 9 octobre 2001.
/ Le statut de Rome.
/ Le code électoral ivoirien.
/ La charte des Nations Unies.
/ Le traité de la haute cour de justice de la CEDEAO.
/ Les résolutions de Nations Unies attribuant pouvoirs ou non pour des interventions en Côte d’Ivoire.
Et dire, que Laurent Gbagbo, chef d’Etat boutant une rébellion coalisée était en situation de Légitime défense prévue aux articles 100 et 101 chapitre 2 section 1 du code pénal ivoirien du 31 Août 1981.
Dans ce procès politique il va donc falloir faire, comme nous l’avons déjà dit à de nombreuses reprises, du droit constitutionnel et de la rhétorique et trouver une passerelle juridico-sémantique, pour passer d’un type de défense imposé de fait par le montage initié par l’accusation à un autre type de défense choisie qui devra être à l’initiative de la défense.
Dans un procès politique le plus difficile étant de démonter, sur un temps très court des charges qui ont été alambiquées à dessein au fil des années, il conviendra de faire diversion et de surprendre l’accusation là où elle ne s’y attend pas !
Et dire que Laurent Gbagbo bénéficie d’une ordonnance de non-lieu et qu’à minima :
/ Il retourne en Côte d’Ivoire en recouvrant tous les avantages liés à sa fonction en siégeant, dans un premier temps, au conseil constitutionnel dont il est membre de droit à vie, en regard de l’article 89 de la Constitution Ivoirienne,
/ Tous ses sympathisants détenus illégalement ou réfugiés recouvrent leur liberté en étant dédommagés à hauteur de leurs souffrances,
/ Il (Laurent Gbagbo) soit lui-même dédommagé de lourds préjudices autant moraux que matériels et physiques,
/ Tous ses biens lui soient rendus et remis en état,
/ Il y ait, dans un laps de temps très court de nouvelles élections présidentielles.
Voilà le synopsis presque idéal qui devrait s’avérer, si la vérité qui est aujourd’hui au fond du puits se montre demain au grand jour. La vérité disait Jules Renard, vaut bien qu’on passe quelques années sans la trouver !
Bien entendu la lettre du 27 mars 2012 du procureur de la CPI au président de l’assemblée Nationale de Côte d’Ivoire devrait être une pépite pour les défenseurs de Laurent Gbagbo, pour peu que des expert en sémantique et en déontologie judiciaire se penchent sur les dits et les non dits perçus en filigrane de cette lettre et arrivent à conclure qu’une trop grande porosité d’un parquet à l’immixtion directe ou indirecte d’exécutifs, va à l’encontre des exigences d’indépendance et de réserves qui devraient être inhérentes à la nature autonome des magistrats.
Pour ôter tout le fiel de la suspicion qui plane au dessus du procès de Laurent Gbagbo qui va débuter ce 18 Juin 2012, il faudra cependant autre choses que des procédures purement mécaniques et procédurales, il faudra que la mémoire des hommes, à l’avenir se souvienne, pour ne pas que se reproduise encore et encore le type d’infamie dont est victime Laurent Gbagbo si tant est que cela soit possible !

Une contribution d'Alain Cappeau
Conseiller Spécial du Président Laurent Gbagbo.