Guerre des clans au Pdci - 12e Congrès du parti: La fronde anti-Bédié prend de l'ampleur. Tout s'écroule autour de Bédié

Par Le Temps - Bédié surpris par l'ampleur de la fronde contre son maintien.

Quel accueil douchant pour le Phoenix de Daoukro ! Après deux mois et deux jours en France, et à deux semaines du conclave préparatif du 12e Congrès du Pdci-Rda, Henri Konan Bédié, président du parti, a foulé le sol natal dans l’humiliation. Certes l’allié le plus sûr d’Alassane Ouattara, dans le Rhdp, a été accueilli à l’Aéroport Félix Houphouët-Boigny par une foule de partisans enthousiastes. Mais le scandale est ailleurs. Le jeune audacieux, Kouadio Konan Bertin dit Kkb, président national de la jeunesse du parti, qu’il avait négligemment qualifié de «soldat perdu» , est en train de tout «démolir» autour de lui. Ce, avec une intelligence époustouflante. En effet, 25 députés Pdci, avec à leur tête, la non moins audacieuse Ouégnin Yasmine, député de Cocody, ont produit une déclaration de ralliement aux thèses de Kkb, candidat déclaré contre Bédié à la tête du parti. Le «soldat perdu» ne dort donc pas. Comme une force-liquide agissant par capillarité, il envahit et annexe les cellules du corps, pour se rendre maître des lieux. non seulement Kkb est candidat à la présidence du Pdci, mais il s’oppose énergiquement, et à l’appui des textes, à la candidature illégale de Bédié qui annonçait dans Jeune Afrique , il y a un mois : «Je ne vous donnerai pas la date (Ndr, de mon départ à la retraite). Aussi longtemps que je serai en bonne santé, je serai attaché à la bonne conduite des affaires du parti et à rendre service à mon pays». Mais les 25 parlementaires qui viennent de prendre position, se montrent très sérieux, prévenant que si Bédié s’entête à se présenter au Congrès malgré sa forclusion, le Pdci risque d’être traduit devant les tribunaux : «Le Pdci est (…) une personne morale. A ce titre, il peut être assigné devant le juge des référés par n’importe lequel de ses militants voire n’importe quel citoyen ivoirien constatant ou considérant que le parti a violé ses propres statuts». La position suivante de Yasmine Ouégnin et ses camarades fait écho à celle de Kkb sur le sujet : «Le constat que nous faisons aujourd’hui est que le président du parti, âgé de plus de 75 ans, ne peut plus prétendre à un renouvellement de ses fonctions, les statuts actuels situant cruellement l’âge du candidat à la présidence entre 40 et 75 ans (article 35). L’acte que viennent de poser ainsi les députés pro-Kkb, devrait refroidir les partisans zélés de Bédié, prêts à faire du 12e Congrès, un «référendum pour ou contre sa candidature» . Entre autres, Kobénan Kouassi Adjoumani (député), Kamagaté Brahima (Secrétaire général de la Jpdci), qui le poussent dans le dos, à une candidature qui le décrédibilise plus qu’elle ne l’honore. Ce dernier avait promis : «Nous allons tout faire pour que Bédié soit candidat au Congrès. Nous allons également nous battre pour qu’il soit élu» . Quant à Adjoumani, il déclarait (In le nouveau Réveil du 16 juillet 2013), sur la base de la dictature et non des textes : «La candidature de Kkb peut être rejetée», «avant lui, Fologo et Fadiga ont essayé, ils ont échoué». Mais le camp de Kkb a aussi en mémoire tous ces faits malheureux, c’est pourquoi ils frappent plus fort, en brandissant le spectre de la justice, de la loi.

Laisser les divergences d’opinion s’exprimer au sein du parti

25 députés qui s’écartent officiellement de Bédié. Le coup est dur. Parce que la dynamique va croissant. Et personne ne sait qui ou combien d’autres élus et cadres les suivront dans le camp du désormais adulte Kkb. Récemment, Bédié a cédé en laissant cet adversaire tenir sa conférence de presse au siège du parti, au moment où peu de personnes pouvaient parier sur cette ouverture tout de même bien inspirée. Aujourd’hui, non seulement 25 parlementaires soutiennent Kouadio Konan Bertin dans la défense des textes de leur parti, mais leur ton vise à décourager les faucons prêts à broyer, à la déloyale, tous ceux qui veulent exprimer leurs différences dans leur appareil politique. Qui veut empêcher Kkb d’aller au pré-congrès ou conclave de Yamoussoukro ? «Ses» députés mettent en gardent : «Partout où se tiennent des acti - vités intéressant la préparation du congrès, toutes les personnes dont il vient d’être mention doivent en principe être les bienvenues, y compris celles dont les opinions dérangent», dit la décla - ration qui compare le parti à un corps vivant qui se nourrit, respire, bouge et se fortifie par l’ex - pression de vues divergentes de ses membres. Elle poursuit en ces termes : «Cela signifie que, contrairement aux rumeurs dont la presse s’est fait parfois l’écho ces jours-ci, les assises préparatoires du 12e congrès qu’on annonce pour cette mi-août à Yamoussoukro, ne doivent normalement être fermées à aucune des personnes citées ci-dessus» Et ces personnes sont le président du parti, le secrétaire général, le Conseil politique, le Bureau politique, le Grand conseil, les secrétaires généraux de section et les délégués régionaux. Or, Kkb est au moins membre du Bureau politique. Pourquoi devrait-il donc être interdit au conclave ? Parce qu’il rappelle à Bédié les statuts de leur parti commun ? Parce qu’il s’est porté candidat à la présidence du parti? Yasmine Ouégnin et ses amis, on le voit, veulent étouffer l’imposture de l’homme qui veut mourir au pouvoir, mais qui n’a eu de pouvoir, après celui qu’il a laissé filer entre ses doigts en 1999, que la présidence du pauvre Pdci-Rda. Cette lettre ouverte est l’occasion pour ces militants intello, d’analyser à froid, l’alliance entre le Pdci et le Rdr et de pointer sans concession ses faiblesses. «L’alliance avec le Rdr au sein du Rhdp n’a pas davantage rapproché les deux partis lors de la désignation des têtes de listes, à la veille des échéances électorales. L’alliance n’a en effet fonctionné qu’au Sud de la Côte d’Ivoire, dans les bastions Pdci, pas une seule fois au Nord, dans les bas - tions Rdr. Cette situation doit- elle continuer ?» Quel égoïsme ! Et les questions du genre, embarrassantes et même déstabilisatrices pour Bédié dont on sait l’aliénation à Ouattara et au Rdr, il y en a eu d’autres dans cette lettre publique. Le choix d’un candidat Pdci à l’élection présidentielle de 2015, sujet non à l’ordre du jour chez Bédié, préoccupe les députés de Kkb : «Notre parti doit-il vraiment, à cette échéance, se priver de cette dynamique qu’un scrutin de ce niveau insuffle toujours à une formation politique?» Persuadés que le parti, «orphelin d’un chef tourné vers le futur, risque de s’exposer à la tragédie d’une décapitation» , ces élus se désolidarisent de l’actuel président de leur parti, engagé à soutenir Alassane Ouattara aux présidentielles 2015. Le disant, on se rend compte que ce «chef tourné vers le futur» tant recherché, la Coordination des députés que dirige le député de Cocody l’a trouvé, en la personne de Kouadio Kouassi Bertin (Kkb). Quel est l’avantage d’avancer avec lui ? «Le choix qui se présente actuellement devant nous, c’est de faire du Pdci-Rda de demain, un astre qui brille au firmament ou une étoile au fond d’un trou.» Qui représente le firmament et qui le trou ? Qui représente la vitalité et qui la fatigue de l’âge ? A chacun d’apprécier. Pour nous, le constat est clair : tout s’écroule autour d’Henri Konan Bédié. Il éviterait l’humiliation en s’abstenant de présenter sa candidature à sa propre succession.

Germain Séhoué

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NB: Le titre est de la rédaction.