Débats et Opinons: L'Installation pérenne de l'armée française en Côte d'Ivoire et la Terra Nullius

Par Correspondance particulière - L'Installation pérenne de l'armée française en Côte d'Ivoire et la Terra Nullius.

L’INSTALLATION PÉRENNE DE L’ARMÉE FRANÇAISE EN CÔTE D’IVOIRE ET LA TERRA NULLIUS

Lors de sa visite officielle le vendredi 9 mai en Côte d’Ivoire, Jean Yves
Le Drian a fait cette déclaration importante : « Nous avons une
coopération forte qui va faire l’objet d’un nouvel accord, qui a été
voté et ratifié par l’Assemblée nationale et récemment par le Sénat en
France ». Il a ajouté que ce réaménagement devrait en outre permettre de
« transformer » la présence à Abidjan de la force Licorne en une « base
opérationnelle avancée et qui prendra effet à partir du premier janvier
prochain » en vue d’un « renforcement pérenne de (la présence de la
France) pour une relation de qualité » dans le domaine militaire. Pour la
mémoire collective, il nous faut préciser que parler d’accords militaires
supposerait que nous avons en présence deux nations souveraines (la France
et la Côte d’Ivoire), tel n’est pas le cas. Des traités dans le domaine
militaire ont été signés, durant l’époque coloniale, avec des chefs
traditionnels qui ne savaient ni lire ni écrire, puis avec des Chefs
d’État africains qui ne disposaient d’aucune armée. Signés pour durer
une cinquantaine d’année : de 1960 en 2010 (ou 2014), ces traités se
devaient d’être révisés avant d’être reconduits, en tenant compte de
certaines réalités politiques, sociales, économiques de notre pays, qui
regorge désormais d’officiers compétents formés dans les écoles
occidentales. L’armée, comme tous les autres secteurs d’activités,
permet à tout État digne, de donner du travail à ses jeunes. C’est au
moment où le président Ivoirien Laurent Gbagbo s’apprêtait à réviser
tous ces contrats, en tenant compte des besoins de notre pays, afin de donner
du travail à des jeunes ivoiriens autochtones et allogènes, que la France
est intervenue militairement, dans le but d’installer Alassane Ouattara, un
fonctionnaire international à ses ordres. Cette précision historique est
fondamentale, si nous tenons sincèrement à comprendre la crise ivoirienne.
La déclaration du ministre français de la défense est assez claire ; ce
n’est pas Alassane Ouattara, qui exprime officiellement le besoin d’avoir
des soldats supplémentaires sur la terre ivoirienne, puisque tous ces
accords ont été déjà ratifiés par le Parlement et le Sénat français.
Les accords sont donc unilatéraux et non bilatéraux. Alassane ne peut,
officiellement, introduire, en effet, une telle requête, parce que le FPI de
Gbagbo et l’opposition ivoirienne les ont vaincus dans le champ des idées.
Leurs actions politiques pacifiques ont démontré, à la face du monde,
qu’ils ne sont ni des terroristes, ni des extrémistes, mais des
combattants politiques aux mains nues, capables de contrôler leur électorat
pluriethnique (les foules qui adhèrent à leur mot d’ordre), et
d’éviter le désordre qu’attendait fébrilement l’armée française,
pour justifier sa présence pérenne dans notre pays, bien avant la
présidentielle de 2015. Lorsque le fauve à l’affût voit s’éloigner sa
proie, il finit par sortir de son refuge pour se lancer ouvertement à la
poursuite de sa victime potentielle. C’est ce que fait la France, à
travers la visite officielle en Côte d’Ivoire de son ministre de la
défense, alors que rien ne nécessite dans notre pays le renforcement de
l’effectif de leurs troupes. Pour ne pas paraître ridicule aux yeux du
monde, on accorde une interview à un officier à la retraite issu du RDR,
parti politique d’Alassane Ouattara qui se rend subitement compte que les
habitants de l’Ouest ont été dépossédés de leurs terres par des
allogènes venus des pays voisins. Il menace d’organiser une rébellion
contre Alassane Ouattara. Si le ridicule pouvait tuer ! Sachons que de
nombreux soldats républicains qui ont défendu sincèrement la terre
ivoirienne (autochtones et allogènes), sont, aujourd’hui, dans les goulags
de la France installés en Côte d’Ivoire. Tous les plans politiques
machiavéliques, en vue d’enclencher une nouvelle guerre fratricide en
Côte d’Ivoire, ayant échoué, la France a choisi d’entamer sa course de
vitesse pour installer, de nouveau, à la tête de la Côte d’Ivoire un
président de son choix, et non de celui du peuple ivoirien. Elle prend tout
de même soin d’assurer ses arrières, sur le plan international,
d’éviter une Crimée aux portes de l’Afrique, en vendant, en
définitive, au grand dam des États-Unis et des Ukrainiens de Kiev, les
navires français MISTRAL à la Russie qu’elle combat, paradoxalement, de
toutes ses forces en Ukraine. Ces décisions apparemment contradictoires de
l’Élysée ne s’inspirent que de la maxime de Nicolas Machiavel : « La
fin justifie les moyens ». Peu importe donc les vies ivoiriennes ou
ukrainiennes, la France protège, avant tout, ses intérêts, même si
doivent périr nos
populations. Dans notre pays, les urnes peuvent être truquées, bourrées,
Alassane peut tout se permettre, raser la Côte d’Ivoire, pourvu que soient
préservés les intérêts de la France. La présence pérenne de l’armée
française en Côte d’Ivoire s’inscrit dans les pensées politiques de
Carl Von Clausewitz qui affirme que « la guerre n’est qu’un prolongement
de la politique par d’autres moyens et qu’elle n’est qu’un acte de
violence dont l’objectif est de contraindre l’adversaire à exécuter
notre volonté». Installer de force un président à la tête de la Côte
d’Ivoire qui reconduit, de manière tacite, tous les traités signés
durant l’époque coloniale et à l’aube des « indépendances » est un
affront fait au peuple ivoirien, une sorte de déclaration de guerre qui
confirme la thèse de la « Terra nullius (un territoire qui n’a pas de
maître) ». Les hommes politiques français qui s’évertuent à contrôler
le temps et les événements ne vont pas de main morte, quand ils nous
transmettent un message particulier à travers l’apparente révolte de
l’officier de l’Ouest qui tient en main, sur Ivoirebusiness.net, cet
écrit : "Bring back our Gbagbo ". Ayant constaté que le FPI et
l’opposition ivoirienne sont loin de toute action violente, la France
décide de susciter des rébellions fictives au sein des partisans
d’Alassane Ouattara qui se feront certainement passer pour des combattants
pro-Gbagbos, dans le but d’arrêter ses partisans, et de décapiter son
Parti politique. Que renferme, en fait, la notion de « Terra nullius (du
territoire qui n’a pas de maître) » ? C’est en fait un mode juridique
par lequel un État (la France) peut s’approprier la souveraineté d’un
autre état (la Côte d’Ivoire) avec l’accord de la Cour internationale
de justice, s’il est démontré que le territoire concerné est sans
maître. C’est ce à quoi nous assistons déjà en Centrafrique. C’est ce
principe, qui a donné un caractère légal à la colonisation, et dont la
France a décidé de se servir pour donner une légitimité à l’occupation
pérenne de la Côte d’Ivoire et d’autres pays africains par son armée.
Pour y arriver il faut simplement démontrer que les Institutions politiques
de ce pays ne peuvent plus exercer une autorité politique. L’absence de
cette souveraineté justifie sa conquête légale par un autre État qui
démontre qu’il a, sur ce territoire, des intérêts particuliers à
protéger. Alassane Ouattara fut l’instrument de la France pour arriver à
cet objectif final. Son installation a permis à la France de créer des
précédents en Afrique (cas de jurisprudence). En rejetant la proclamation
des résultats électoraux par la Cour Constitutionnelle ivoirienne, et en
envoyant à la CPI des personnalités politiques ivoiriennes dont un
président de la République (Laurent Gbagbo), la France démontre, aux yeux
du monde, l’incapacité de nos institutions politiques, administratives,
juridiques, à gérer les affaires courantes de notre pays. L’intervention
violente et dévastatrice de l’armée française à Abidjan a permis
ensuite à l’Élysée de conquérir le monopole de la violence physique
légitime qui est, en réalité, un privilège qui ne revient qu’aux forces
armées nationales, gardiennes de la République et de son intégrité
territoriale. Le dernier rempart reste, en définitive, le peuple ivoirien,
l’électorat pluriethnique du président Laurent Gbagbo que l’on veut
affaiblir, décimer, en suscitant des crises fratricides, ethniques. Nous en
voulons pour preuve cet officier à la retraite qui veut indirectement
raviver à l’Ouest de notre pays les tensions entre autochtones et
allogènes, en évoquant la formation d’une rébellion armée. De nombreux
étrangers en Côte d’Ivoire ont en effet compris que la France, après
s’être servie des fils du Nord, veut aujourd’hui sacrifier leur vie et
celle de leurs enfants pour assurer son bien-être matériel. Pour inciter
ces étrangers à défendre au moyen des armes le fruit de leur dur labeur,
et leur vie, il faut simplement, les effrayer et faire de nouveau planer le
spectre d’une guerre civile en Côte d’Ivoire, afin de les pousser ainsi
à prêter main-forte aux soldats français qui, de leur vie et de leurs
biens, n’en ont cure. Les Ivoiriens, les Allogènes (les Burkinabés, les
Maliens, les Guinéens, les Sénégalais), qui résident en Côte d’Ivoire
se doivent de comprendre que si la France réussit à faire de la Côte
d’Ivoire « un territoire sans maître (une "Terra nullius") viendra le
tour de leurs pays respectifs. Voilà pourquoi il faut absolument que tous
les Africains soient unis derrière la personne de Laurent Gbagbo, qui a
vaincu la France, en la poussant à se découvrir. Il nous est aujourd’hui
donné de constater, en effet, que dans l’intellect des hommes politiques
et des soldats français les peuples africains sont des éternels asservis,
des sujets. La France est libre de choisir son candidat, et de le financer
avec nos propres ressources, mais elle n’a pas le droit d’empêcher le
peuple ivoirien (les peuples africains) de choisir ses propres
représentants, en demandant, expressément, au président Laurent Gbagbo, de
se retirer de la vie politique, s’il tient à être un homme libre. Est-ce
la CPI qui dit le droit ou les hommes politiques français, occidentaux ?
Adhérer à leur voeu, ce serait créer un précédent qui leur permettra de
tuer dans l’oeuf l’aspiration de nos peuples à la démocratie. Les
soldats français venus éliminer les obstacles, qui empêchent l’Élysée
de gouverner directement la Côte d’Ivoire, n’ont pas hésité, dans le
passé, à tirer sur les soldats de Thiaroye qui avaient versé leur sang
pour défendre la Patrie française. Cela doit servir de sujet de réflexion
à leurs ex-alliés, car il n’y a rien de nouveau sous le ciel. Pour la
France, la fin justifie les moyens, c’est cela la realpolitik. Accorder une
tribune à son adversaire politique, dans l’intérêt de nos peuples
respectifs, n’est pas de la naïveté politique. Nous avons démontré
notre bonne foi, mais constatons, jusqu’à ce jour, que la politique
africaine de la France, sous un gouvernement socialiste, continue de bafouer
les droits des peuples africains à disposer d’eux-mêmes. L’armée
française en Côte d’Ivoire prétend lutter contre des terroristes. Les
Ivoiriens démontreront, aux yeux du monde, que les véritables terroristes
sont ceux qui donnent des armes aux affamés, afin qu’ils deviennent leur
bras armé.

Une contribution par Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)