Côte d’Ivoire : « La crise ivoirienne », par Emmanuel N’Kunzumwami

Il y a plus de sept ans, depuis le 11 avril 2011, Laurent Gbagbo et Simone Gbagbo étaient capturés par les Forces Spéciales dans leur résidence présidentielle. Ils ont ensuite été incarcérés. Mme Simone Gbagbo a été maintenue en Côte d'Ivoire pendant que son mari Laurent Gbagbo est transféré au centre de détention de la Cour Pénale Internationale (CPI) de La Haye. La mobilisation des Africains, devant un procès à la fois pénal et politique, aura été molle, voire timide ou inexistante. La résignation dans le silence.

Sans être ni juges d'instruction, ni spécialistes des affaires criminelles, ils pouvaient s'interroger sur les faits allégués, ouvrir un fonds pour conduire des investigations sur le terrain, s'interroger sur le déroulement des faits depuis 2002 jusqu'à l'élection présidentielle de 2010 et ses suites en 2011, ouvrir des débats contradictoires sur les acteurs de la crise ivoirienne et nourrir les analystes politiques afin de prévenir contre des crises à forte dose d'interventions extérieures.

Les Africains ont donc démontré qu'ils ne savent même pas se mêler des affaires qui les regardent ! Quelle tristesse. Ouvrir un fonds pour accompagner des actions visant la connaissance, ce n'est pas difficile. Entre 2€ par mois pour les plus modestes, jusqu'à des contributions plus conséquentes, aurait pu générer quelques centaines de milliers d'euros pour constituer un centre de documentation. L'indépendance suppose des capacités à prendre en charge son intelligence et sa dignité. Non, ce ne sont pas les amis extérieurs à l'Afrique qui développeront les consciences africaines.

Toutes les occasions seront bonnes pour maintenir les turbulents dans les chaînes de la dépendance. Et alors, les mouvements féministes se sont-ils penchés sur la situation de Simone Gbagbo et ses codétenues ? Soyons sérieux... Quelle coordination des femmes africaines a-t-on entendue s'indigner ? Chanter l'Afrique, c'est bien. Défendre la dignité des Africains, c'est nettement mieux. Avocats de Simone Gbagbo, avez-vous son dossier ? Elle est maintenant attendue à La Haye, après plus de sept ans de détention. Quels sont Véritablement les chefs d'accusation, en dehors du bruit de botte de la fédération de droits de l'homme, habile en manipulation et collusion d'intérêts. En fait, il paraît que les pays africains disposent également des juridictions !

Mais, les puissants ont décidé que la mieux adaptée est en Europe, aux Pays-Bas, pour juger les criminels présumés africains. Nous savons que le droit pénal ne collectivise pas le crime. Chacun est jugé selon son implication directe et personnelle dans la commission de crimes identifiés.

La main de Simone Gbagbo aurait-elle pris la machette ou la kalachnikov pour mettre à mort des personnes identifiées ? Avait-elle une milice armée connue et identifiée qu'elle commandait pour aller commettre des crimes ? Qui, où, quand et comment ? Il appartient au juge de démontrer la culpabilité par des faits précis, personnels, avérés et attribuables avec des preuves à l'accusée. Je refuse qu'une personne soit présumée coupable en raison de ce qu'elle est ou de qu'elle a été. Je hais l'injustice, à moins de me démontrer par des preuves la culpabilité de la prévenue. Je remercie Alassane Dramane Ouattara (ou ceux qui le lui ont conseillé ),d'avoir exercé son droit de grâce en faveur des 800 Ivoiriens, dont Mme Simone Gbagbo. Il a été long à se décider (ou à exécuter) ce droit.

Seuls les Ivoiriens peuvent se pardonner entre eux pour rebâtir leur propre pays. Qu'ils n'écoutent pas les bruits extérieurs destructeurs de leur avenir commun, quels que soient leurs habillages militants, et qu'ils s'embrassent pour reconstruire leur demeure ensemble.

La réconciliation et la fraternité des Ivoiriens ne seront pas décidées à La Haye. Mesdames les sœurs ivoiriennes, Messieurs les amis ivoiriens, Mme Simone Gbagbo est parmi vous, elle est des vôtres, c'est votre sœur ou votre mère. Recevez-la et fermez la porte aux prédateurs qui défendent leurs propres intérêts. L'avenir des Ivoiriens appartient d'abord aux Ivoiriens eux-mêmes. Nous ne pouvons que les accompagner dans cette reconstruction. Amitiés

Une contribution de EMMANUEL NKUNZUMWAMI

"Diplômé d'HEC, Paris"

Publications: 10 essais, dont : La tragédie rwandaise -Historique et Perspectives (1996);

La Nouvelle dynamique politique en France (2007);

Le Partenariat Europe-Afrique dans la mondialisation (2013);

La conquête de l'extrême droite en France (2014);

La France inquiète face à son avenir (2016);

La Relance de l'Afrique (2017).

Autres activités : Préside l'organisation "Future Afrique Notre Avenir" qui accompagne et soutient les jeunes entrepreneurs en Afrique.
Groupe Orange: dirige le cabinet Neres Conseil http://www.nouvelle-dynamique.org/