Au Gabon: Brice Clotaire Oligui Nguema « renonce à son traitement de président »

Par Jeune Afrique- Au Gabon, Brice Clotaire Oligui Nguema « renonce à son traitement de président ».

Le Comité pour la transition et la restauration des institutions (au pouvoir) a annoncé que le chef de l’État renonçait aux privilèges qu’offre son nouveau statut, et notamment au salaire présidentiel.

Visite de « travail et d’amitié » du président gabonais de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, au Tchad, le 09 octobre 2023. © Présidence de la République gabonaise
Visite de « travail et d’amitié » du président gabonais de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, au Tchad, le 09 octobre 2023. © Présidence de la République gabonaise

Jeanne Le Bihan
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Depuis qu’il a pris le pouvoir le 30 août dernier, le général Brice Clotaire Oligui Nguema a deux casquettes : celle de chef de l’État gabonais, et celle de militaire – qu’il a souhaité conserver –, à travers le ministère de la Défense et de la sécurité. Mais pas seulement : si un commandant en chef « en second », chargé de son « intérim » à la tête de la garde républicaine a été nommé, Oligui Nguema est toujours le détenteur officiel de la fonction qu’il occupe depuis le mois d’avril 2020.

« Furie criminelle »
Le général de brigade a cependant décidé de ne pas cumuler tous les privilèges de ses multiples fonctions et de se contenter de son salaire de militaire. D’après un communiqué publié par le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI, au pouvoir) le 18 octobre, le président de la transition a choisi « de renoncer à son traitement de président de la République en ne conservant que son traitement de commandant en chef de la garde républicaine ».

Cette décision s’explique, selon le porte-parole de la junte, par des nécessités financières. « Chaque jour qui passe permet au CTRI de réaliser un peu plus l’état de dégradation générale du pays et des finances publiques en particulier, victimes d’une véritable furie criminelle », a indiqué le colonel Ulrich Manfoumbi Manfoumbi dans une vidéo publiée sur les comptes officiels de la présidence. C’est donc « conscient des urgences sociales et des nombreuses attentes du peuple gabonais » qu’Oligui Nguema a fait ce choix, moins de deux mois après le coup d’État.

Sur les réseaux sociaux, l’annonce, immédiatement saluée par les Gabonais, a eu l’effet escompté. Une mesure similaire avait été prise en novembre 2022 par un autre putschiste du continent : le président de la transition burkinabè, Ibrahim Traoré, avait en effet annoncé ne vouloir conserver « que son salaire de capitaine ». Le général Oligui Nguema souhaite ainsi asseoir sa popularité au Gabon mais également à l’international, grâce à une tournée dans la sous-région qui l’a conduit chez plusieurs chefs d’États. Dans la charte de transition, le président n’a pas fermé la porte à une éventuelle candidature pour la future élection présidentielle, dont la date n’est, pour l’heure, pas connue.

Réduction de l’indemnité parlementaire

Un deuxième communiqué du CTRI est revenu dans la soirée sur la question des finances publiques. Le colonel Manfoumbi Manfoumbi a cette fois évoqué les indemnités des parlementaires. Les membres des deux chambres de la transition ont été désignés – 98 députés, et 70 sénateurs – le 7 octobre. Sans préciser de montant, le CTRI a annoncé « la réduction de l’indemnité des parlementaires », mais aussi « la suppression des fonds politiques », « la suppression de la prime de transport du 17 août » et « la réduction de moitié de l’indemnité de session ».

La fin de ces privilèges, accordés jusqu’à présent aux parlementaires, pourraient peser dans la balance financière du pays. D’après un rapport de Mays Mouissi – analyste nommé ministre de l’Économie début septembre –, l’indemnité parlementaire de référence serait comprise entre 1,7 et 1,8 million de francs CFA mensuels. À cela s’ajoutent 40 000 F CFA par jour de session à l’Assemblée nationale ou au Sénat, soit 7 millions de F CFA par an en moyenne, mais aussi jusqu’à 1 million de F CFA annuels de prime de transport… Et les nombreuses primes dont bénéficiaient les parlementaires faisaient plus que doubler leur indemnité, d’après ledit rapport, publié en 2018.

Le projet de loi des finances 2023 prévoyait des sommes importantes pour les dépenses totales associées à la présidence de la République – près de 16 milliards de F CFA – et aux deux chambres – 28 milliards pour l’Assemblée nationale, et près de 18 milliards pour le Sénat. Si le cas des ministres, qui bénéficient eux aussi de primes et de fonds politiques, n’a pas encore été mis sur le tapis, Brice Clotaire Oligui Nguema a également demandé aux députés et aux sénateurs « d’élaborer un règlement financier fixant les ressources des deux chambres et leur emploi pendant toute la période de la transition ». Les membres du cabinet présidentiel, le vice-président, ou le secrétaire général du Bord de mer ne sont pas concernés par ces mesures pour le moment.

Jeune Afrique