Côte d’Ivoire : à Daoukro, le PDCI esquive la bataille entre pro et anti-RHDP
Par Jeune Afrique - Côte d’Ivoire. A Daoukro, le PDCI esquive la bataille entre pro et anti-RHDP. Par Vincent Duhem - Envoyé spécial à Daoukro.
Réuni lundi 24 septembre en bureau politique à Daoukro, le fief d'Henri Konan Bédié, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) a officiellement quitté le processus de création du parti unifié, RHDP, qu'il affrontera aux élections municipales et régionales du 13 octobre.
En jouant à domicile, dans son fief de Daoukro, Henri Konan Bédié (HKB) avait décidé de verrouiller le 8e bureau politique du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). L’événement sentait le souffre, il s’est finalement déroulé sans encombre pour l’ancien président ivoirien.
À l’issue de plus de trois heures de débats filmés, sous les yeux d’un huissier de justice, les quelques 500 participants rassemblés sous la coupole de l’hôtel de la Paix ont décidé de prolonger le mandat de Bédié et des instances du parti, qui devait s’achever le 6 octobre, jusqu’au prochain congrès, dont l’organisation a été reportée à après l’élection présidentielle de 2020.
La rupture avec la coalition au pouvoir entérinée
Ces résolutions, déjà votées le 17 juin dernier, avaient été suspendues le 19 septembre par la justice ivoirienne. « Ceux qui souhaitaient affaiblir la direction de notre parti ont échoué », se réjouit un quadra du PDCI.
Comme le craignait Alassane Ouattara, qui avait fait porter la veille un message d’apaisement auprès de son aîné, le PDCI a entériné son retrait du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, parti unifié). L’accord politique signé le 12 avril par HKB est « dénoncé » par l’ancien parti unique, qui quitte dans le même temps le groupement politique RHDP et donne mandat à son président pour négocier « la mise en place d’une plateforme de collaboration avec les forces vives de la nation et les partis politiques ». Scellée le 8 août lors d’un tête-à-tête entre Alassane Ouattara et Bédié, la rupture avec la coalition au pouvoir est ici entérinée.
Parmi le membres du PDCI partisans du RHDP, seuls le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani et le secrétaire général de la présidence, Patrick Achi, ont assumé publiquement leur position. Lors de son intervention, le premier s’est opposé au retrait du parti unifié, demandant que la décision soit prise lors d’un congrès extraordinaire. De son côté, Achi est resté plus mesuré, s’interrogeant sur la nécessité de dénoncer l’accord politique du 12 avril et préférant s’abstenir lors du vote.
S’il faut que je meure, ce sera un grand sacrifice pour la cohésion de la Côte d’Ivoire
Sous les huées
« Je suis bel et bien militant du PDCI. J’ai reçu mon badge et j’ai ma carte de militant. Le PDCI a pris des décisions importantes. Nous disons que, pour prendre de telles décisions, il faut nécessairement que nous allions au congrès. Il y a beaucoup de militants qui ne sont pas venus à ce bureau politique et qui observent. Quand nous serons sur le terrain, nous déciderons de la marche à suivre. Nous ne remettons pas en cause le choix du président Bédié, mais nous estimons que le PDCI a besoin de faire sa mue. Ce n’est pas les cris, les huées et autres qui vont nous faire taire. On a dit qu’Adjoumani ne pouvait pas venir, j’ai prouvé que je suis militant. S’il faut que je meure, ce sera un grand sacrifice pour la cohésion de la Côte d’Ivoire », a réagi Adjoumani, l’ancien porte-parole du PDCI, sous les huées de plusieurs dizaines de militants chauffés à blanc.
Les élections locales du 13 octobre étaient l’autre enjeux important de ce bureau politique. Alors que le chef de l’État a refusé de procéder à la réforme de la Commission électorale avant ce scrutin – une demande du PDCI et de l’opposition -, Bédié a finalement refuser de mener son parti vers un boycott des élections.
Il était sans doute trop tard pour ne pas aller aux élections, nos candidats n’auraient pas respecté ce choix
L’ancien chef de l’État avait pourtant chargé plusieurs vice-présidents du PDCI, dont l’ex-Premier ministre Charles Konan Banny, de plancher sur la question. Cette commission avait plaidé pour une position ferme. D’autres cadres du parti, dont Jean-Louis Billon, auraient souhaité voir le PDCI conditionner sa participation au processus électoral à la réforme de la CEI.
« Le 19 septembre, lorsque Henri Konan Bédié a réuni son secrétariat exécutif, la question de la participation aux élections n’a pas fait l’unanimité. Il était sans doute trop tard pour ne pas aller aux élections, nos candidats n’auraient pas respecté ce choix. Nous ne pouvions pas risquer de mettre à mal notre unité », explique un baron du PDCI.
Ce lundi, Bédié a notamment justifié son choix d’aller aux élections en évoquant l’importance d’être présent dans les municipalités et les régions du pays pour pouvoir « avoir un œil sur l’état civil » dans la perspective de 2020.
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