Exclusif/ Belgique: Comment le Président Gbagbo vit son confinement; son agenda; ses inquietudes sur la Côte d'Ivoire, son adieu à Mattei
Par Le Temps - Exclusif/ Belgique. Comment le Président Gbagbo vit son confinement; son agenda; ses inquiétudes concernant la Côte d'Ivoire, son adieu à Mattei et à tous ses amis disparus. Son porte-parole, le ministre Koné Katinan, dit tout.
1-Vous êtes le porte-parole du Président
Laurent Gbagbo. Avec la situation de crise sanitaire. Avez-vous ses nouvelles ?
Bien sûr. J’ai des nouvelles quotidiennes du Président Laurent GBAGBO. Il va bien physiquement, intellectuellement et moralement. Je voudrais sur ce point rassurer vos lecteurs et l’ensemble de la population ivoirienne, ses amis et ses admirateurs à travers le monde.
2-Comment arrivez-vous à travailler ?
Comme nous le faisons depuis 9 ans, c’est-à-dire en en mode télé travail pour rester dans l’air du temps (rires). De Korhogo, à Bruxelles en passant par la très longue étape de la Hayes, nous travaillons ainsi. Par la force des choses nous sommes habitués à ce mode de travail
3-Selon les informations, chaque matin vous échangez avec lui pour faire un tour d’horizon sur le coronavirus en Afrique…
Bien avant le covid-19, nous le faisons pour toutes les questions d’actualité qui concernent notamment la Côte d’Ivoire et l’Afrique et qui rentrent dans le cadre de ma mission. Lorsqu’il le juge nécessaire, le Patron m’appelle soit pour me faire l’honneur de demander mon humble avis sur tel sujet, soit pour me donner des instructions sur tel autre sujet. Il est aussi régulier que je soumette à son jugement une question sur laquelle j’aimerais avoir ses orientations. Evidemment depuis que la pandémie du covid-19 a éclaté, elle constitue le point central de nos échanges quasi-quotidiens.
4-Quelle est sa réaction par rapport à cette pandémie ?
Il faut comprendre la réaction du Président à un double niveau. En tant qu’humain il est touché de diverses formes par cette pandémie. Même s’il se félicite du peu de cas de décès en Côte d’Ivoire et en Afrique, il ne peut ignorer la souffrance physique et morale qu’endurent tous ceux qui y sont malades ou qui l’ont été. En plus Il est informé des cas de décès de nos compatriotes ou des grandes figures africaines de la culture et de l’art en Europe. Par exemple, il ne peut pas rester insensible à la disparition de Manu Dibango.
De nombreux de nos compatriotes anonymes sont décédés en Europe. Il pense notamment à toutes ces personnes de la diaspora qui ont porté d’une façon ou d’une autre son combat. En moins de 48 heures, il vient de perdre l’épouse de l’un de ses plus proches amis de très longue date et François Mattéi qui a permis, grâce à son livre, au monde découvrir une grande partie de la vérité sur ce qui lui arrive.
Humainement cela pèse beaucoup sur lui surtout qu’il se trouve dans l’incapacité physique, indépendamment de sa volonté, de partager cette douleur avec tous ceux avec qui il aurait dû le faire s’il n’en était pas empêché. Néanmoins, il présente sa compassion à toutes et à tous. Aux familles éplorées il présente ses condoléances, aux malades et aux convalescents un prompt rétablissement.
En tant qu’homme politique et homme d’Etat, le Président est très inquiet par rapport à cette crise sanitaire dont l’impact pluridimensionnel sur le monde entier en fait certainement une grande menace pour l’humanité. C’est d’ailleurs pour cette raison, que dès le début, il a instruit le Secrétaire général du parti à observer une trêve au niveau politique et disposer le parti à travailler avec le gouvernement à combattre ce virus. Il vit par contrainte actuellement en Belgique et tout le monde sait que l’Europe reste le foyer le plus touché par la pandémie.
Il est témoin des souffrances des populations belges et européennes et surtout des efforts herculéens que les différents gouvernements de ces pays-là mettent en œuvre pour sauver leurs populations aussi bien au niveau sanitaire qu’au niveau économique. Toute chose qui le rend davantage inquiet pour le sort de ses compatriotes ivoiriens et africains dont les ressorts à la fois économiques et sociaux ne sont pas assez solides pour contenir le choc que le covid-19 cause à l’Europe. Il est conscient que la tâche n’est pas facile pour les gouvernements africains.
C’est pourquoi il salue tous les efforts que ceux-ci déploient pour sauver le contient de cette crise sanitaire. Il se félicite de l’attention qui est portée aux couches sociales les plus vulnérables qui constituent malheureusement la part la plus importantes de nos populations.
En ce qui concerne le cas particulier de la Côte d’Ivoire, il encourage le gouvernement à libérer le maximum des prisonniers notamment ceux liés à des querelles politiques comme la crise post-électorale de 2011 et toutes les autres querelles politiques qui ont suivi jusqu’aux plus récentes. Il appelle également à créer les conditions du retour des exilés et autres réfugiés. Cette crise sanitaire doit donner l’occasion à la Côte d’Ivoire de réconcilier avec elle et de montrer l’image d’une nation unie face au péril collectif du covid-19.
5-Est-ce que qu’il vous a confié des missions ?
Oui. En direction des réfugiés et des exilés notamment. Le Président nous a instruits de rester encore plus proches d’eux surtout en cette période particulièrement difficile dont la vie précaire dans les camps les expose davantage à la pandémie. Il ne parle pas seulement des réfugiés du Ghana mais de tous ceux qui sont ailleurs.
Rappelons-nous qu’il y a des camps de réfugiés au Ghana, au Togo et au Libéria. Il y a aussi les autres que l’on appelle réfugiés ou exilés urbains qui ne sont pas dans les camps mais qui vivent aussi difficilement. IL craint qu’ils ne soient abandonnés par les gouvernements des pays qui font déjà face au défi de soulager leurs propres citoyens. Dès que les mouvements des populations seront libérés, le Président nous a instruits autant que nous pouvons de leur rendre visite pour leur apporter sa compassion.
Mais le plus important pour lui c’est d’œuvrer pour le retour de ces Ivoiriennes et Ivoiriens dans au pays.
6-Il se raconte que vous faites partie d’une équipe qu’il a mise en place pour travailler sur des stratégies sur le pendant et l’après du coronavirus…
Rien ne peut finalement rester caché longtemps dans ce monde (rires). Bien que préparant de façon rigoureuse avec ses avocats l’audience que la chambre d’appel de la CPI a convoquée le 11 mai 2020, le patron reste préoccupé, comme je l’ai dit tantôt, par la pandémie du coronavirus.
Conscient que cette crise aura des conséquences sur l’ordre mondial, il a initié une réflexion anticipative et prospective sur l’avenir de l’Afrique. Il a instruit une haute personnalité ivoirienne scientifiquement respectée au plan africain et mondial de créer un comité d’experts africains à l’effet de conduire une réflexion pluridisciplinaire sur l’Afrique d’après pandémie. Permettez-moi que je n’en dise pas plus. Au moment opportun cette haute personnalité à la fois politique et intellectuelle vous en donnera plus de détails.
7-A part la question du Covid-19 parlez-vous d’autres sujets
Je suis son porte-parole largement bien avant le covid-19. Donc il y a de nombreux autres sujets qu’il me fait l’honneur de partager avec moi. Avec lui on ne chôme jamais et on ne s’ennuie pas. L’épreuve de la prison n’a nullement altéré son extraordinaire capacité de réflexion. Le Président Laurent GBAGBO demeure la grosse machine de production d’idées qu’il a toujours été. Je pense que sa constitution génomique doit attirer la curiosité des chercheurs. Pour parler ivoirien, c’est pas l’homme lui-là.
8-Vous a-t-il confié un message à livrer aux Ivoiriens ?
Bien que préoccupé par la crise sanitaire et tous ses implications, le Président appelle ses compatriotes à la sérénité et à l’espérance. L’humanité, la Côte d’Ivoire avec, sortira de cette crise. Pour en ressortir plus forts, il en appelle à l’unité nationale synonyme de notre patriotisme.
L’on se souvient qu’il a donné des instructions au secrétaire général du parti, le Dr Assoa Adou et à l’ensemble de la haute direction d’inscrire le parti dans la réconciliation inclusive. Plus que jamais cette épreuve du covid-19 doit nous aider à aller à cette réconciliation. Dès que possible il se fera un grand honneur de s’adresser aux populations ivoiriennes et africaines. Il a foi que ce sera très bientôt."
In LE TEMPS DU LUNDI 20 AVRIL 2020