Détention injustifiée de Simone Gbagbo à Odienné : Quand les avocats de Ouattara lui font la leçon

Par Le Nouveau Courrier - Détention injustifiée de Simone Gbagbo à Odienné. Quand les avocats de Ouattara lui font la leçon.

Simone Gbagbo dans les mains de ses bourreaux à l'aéroport d'Odienné. Image d'archives.

C’est une sorte de désaveu pour leur employeur. Les avocats de Ouattara à la Cour pénale internationale ( C PI) lui mettent la pression en lui demandant de juger Simone Gbagbo o u de la libérer car elle ne peut pas rester «indéfiniment » en détention.

Selon le droit international, les personnes doivent être jugées dans un délai de temps raisonnable, c’est-à- dire qu’à un moment donné, il faut décider de prendre une décision. Soit les personnes sont jugées, soit on abandonne les charges contre elles. Soit on les juge dans une juridiction en Côte d’Ivoire ou dans une juridiction internationale. C’est le droit international (…) De toutes les façons, il faut que Madame Gbagbo soit jugée. Si elle n’est pas jugée, elle ne peut rester en détention indéfiniment ; c’est le droit ». Ce n’est pas l’un des avocats de Simone Gbagbo qui parle encore moins ceux des nombreux détenus politiques mais Jean-Paul Benoit, avocat d’Alassane Ouattara à la Cour pénale internationale (CPI). Après avoir suivi la clôture de l’audience de confirmation des charges de Charles Blé Goudé le 2 octobre dernier, il a eu le courage, avec son collègue Jean-Pierre Mignard, de se confier à notre envoyé spécial à la Haye. Et c’est une leçon basique de droit que les avocats du locataire du palais présidentiel du Plateau donnent à propos de la détention injustifiée des centaines de pro-Gbagbo. Ceux qui conseillent Ouattara à la CPI dans les affaires Gbagbo et Blé Goudé lui demandent de libérer l’ex-Première Dame Simone Gbagbo s’il refuse de la juger. Mais dans sa logique de persécution de l’opposition en vue de régner sans contradiction, Ouattara persiste dans sa logique de maintenir les pro-Gbagbo en prison le plus longtemps possible. Sans les juger et sans les libérer non plus. « La justice a son rythme. Je suis pour l’Etat de droit. Je ne veux pas tout même remplacer le procureur, le juge, le ministre de la Justice », a déclarait-il le 29 septembre dernier à RFI. Un discours qui sonne pourtant faux. Puisque c’est le chef de l’Etat qui actionne la justice afin d’accorder la liberté provisoire ou de laisser en prison les pro-Gbagbo. En tout cas, face à la justice des vainqueurs qui règne en Côte d’Ivoire, l’agacement ne vient plus seulement des ONG de défense des droits de l’homme, mais aujourd’hui de ses propres conseils qui ne manquent pas jeter quelques pierres dans le jardin de Ouattara. Même si le chef de l’Etat a réitéré à la mi septembre dernier, lors de son périple de Daoukro, que Simone ne sera pas transférée à la CPI (cette Cour lui a donné jusqu’au 10 octobre pour clarifier sa position sur cette affaire) mais jugée en Côte d’Ivoire, sa détention prolongée dans une résidence surveillée à Odienné est incompréhensible. Le pouvoir n’a rien contre Simone Gbagbo (à l’instar de tous les prisonniers politiques) mais la maintient injustement en prison dans le nord du pays.

Anderson Diédri