Coup de tonnerre: Une femme élue pour la 1ère fois présidente de l'Assemblée nationale française
Par La Croix- Coup de tonnerre. Une femme élue pour la 1ère fois présidente de l'Assemblée nationale française.
Candidate de la majorité, Yaël Braun-Pivet devient la première femme de l'histoire à présider l'Assemblée nationale. Novice en politique en 2007, elle a gagné ses galons à la tête de la commission des Lois.
Par Isabelle Ficek
Publié le 28 juin 2022 à 18:51Mis à jour le 28 juin 2022 à 19:14
Arithmétique oblige, elle était favorite. Yaël Braun-Pivet, la candidate de la majorité pour le Perchoir, a été élue ce mardi soir présidente de l'Assemblée nationale avec 242 voix (majorité absolue des suffrages exprimés à 232 voix), devenant, à 51 ans, la première femme à occuper le poste de quatrième personnage de l'Etat. Elle a été élue dès le second tour, après le retrait du RN, ce qui a déclenché une polémique à gauche.
C'est en tout cas une belle revanche pour celle qui avait déjà été candidate à ce poste contre Richard Ferrand en 2018 avant de se retirer. De longue date, elle se préparait pour le Perchoir, sans pour autant imaginer qu'elle y accéderait dans une configuration aussi inédite, avec une majorité loin d'être absolue et des groupes d'oppositions qui de LFI à LR en passant par le RN, vont vouloir peser de tout leur poids. Elle aura la mission difficile de veiller au bon déroulement des débats et des travaux dans ce potentiel chaudron.
Novice en 2017
Mais dans sa courte expérience politique, Yaël Braun-Pivet a rapidement pris de l'assurance, après des débuts chaotiques. Rien dans son parcours n'a jamais été donné, pour celle qui n'a jamais voulu entrer dans les cases ou respecter des codes qui lui sont étrangers. A son arrivée à l'Assemblée en 2017 à la faveur de la vague Macron, elle était largement novice en politique, typique de ces représentants de la société civile. Elle-même avait alors détrôné dans les Yvelines un vieux grognard, l'actuel maire LR de Maisons-Laffitte Jacques Myard.
Adhérente à En Marche en 2016, venue du PS, avocate pénaliste, mère de cinq enfants ayant suivi son mari cadre dans ses expatriations à l'étranger, elle avait, avant de sauter à pieds joints dans le bain de la politique, rejoint les Restos du coeur et monté un centre d'accueil à Sartrouville, dans sa circonscription, ainsi que des consultations gratuites d'avocate.
Celle qui a évoqué, dans son discours de présidente de l'Assemblée nationale, des femmes qui ont compté dans son parcours, est aussi, dans sa famille la première à avoir décroché le bac et fait des études supérieures. Elle descend de juifs allemands et polonais du côté de son grand-père paternel, médaillé de la Résistance et alors naturalisé français ; enfant de la DASS du côté de sa mère.
Une cheville ouvrière incontournable du Parlement
En 2017, elle n'était pas la candidate favorite du gouvernement pour prendre la présidence de la prestigieuse commission des Lois à l'Assemblée, d'habitude dévolue à un député très expérimenté. Contre toute attente, elle l'avait pourtant emporté et était devenue une cheville ouvrière incontournable du Parlement, après des débuts chahutés et raillés. Le fiasco de la commission d'enquête sur l'affaire Benalla lui avait valu des inimitiés et des critiques, sans l'empêcher d'être réélue par ses pairs à mi-mandat.
« Yaël a été, lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron, une chouette collègue, aussi enthousiaste que travailleuse.
Elle a su apprendre, très vite, les rouages de l'Etat. Ce serait une erreur de sous-estimer son sens politique car elle ne manque ni d'intuition, ni de détermination », relève l'ancien député LR Guillaume Larrivé, jugeant qu'elle saura, au Perchoir « incarner une autorité souriante mais ferme ».
« Nouvelle méthode de travail, faite d'écoute »
« J'ai tenu la barre face aux crises, du terrorisme à la pandémie », sujets de sa commission, a-t-elle plaidé auprès de l'AFP en mettant en avant sa « nouvelle méthode de travail, faite d'écoute », de « coconstruction ».
Yaël Braun-Pivet a aussi tenu à imprimer sa marque à la tête de cette commission, lançant notamment, en début de quinquennat, des visites dans les prisons. Ardente défenseure du renouvellement des pratiques politiques et de la rénovation de la vie démocratique - elle estime que le premier quinquennat n'a absolument pas tenu ses promesses sur le sujet -, elle avait publié en décembre 2021 un « plaidoyer pour un Parlement renforcé », avec le soutien de la Fondation Jean-Jaurès.
Celle qui, en défense du Parlement, avait, avec succès, rué dans les brancards contre la réécriture de l'article 24 de la loi sécurité globale par
une commission ad hoc, y proposait « 25 mesures concrètes pour rééquilibrer les pouvoirs ». Ephémère ministre des Outre-mer , Yaël Braun-Pivet n'a pas, loin s'en faut, la proximité avec Emmanuel Macron qu'avait Richard Ferrand. Mais elle a désormais la mission de conduire, en évitant le blocage, cette nouvelle Assemblée élue par des Français qui semblent avoir voulu « rééquilibrer les pouvoirs ».
«J'ai conscience d'être élue à un moment particulier de notre histoire, a notamment déclaré la présidente dans son discours, saluant une Assemblée qui «a le visage de la France» et assurant que les Français, en l'élisant, ont enjoint les députés de «travailler ensemble». Elle devra «débattre», a souhaité Yaël Braun-Pivet, plutôt que «se battre».
Isabelle Ficek
Nb: Le titre est de la rédaction.