Côte d’Ivoire - Tête-à-tête Hollande-Affi: le sens d’une rencontre inédite
Par IvoireBusiness - Tête-à-tête Hollande-Affi. Le sens d’une rencontre inédite.
Le jeudi 17 juillet 2014, le Président français François Hollande, en visite d’Etat en Côte d’Ivoire, a accordé un tête-à-tête d’un quart d’heure à M. Pascal Affi N’Guessan, leader du principal parti de l’opposition, le FPI. Au-delà de la qualité et de la pertinence des sujets qui ont pu être abordés, cet entretien privé, loin des caméras et oreilles indiscrètes, renseigne sur certaines réalités que les laudateurs du régime et les abonnés au scepticisme se refusent à voir.
Un tête-à-tête entre le leader de l’opposition et un chef d’Etat étranger en visite officielle est, en soi, un fait rarissime dans les annales des relations diplomatiques. Car le programme officiel établi, dans un tel cadre, ne se limite en général qu’à l’institutionnel ; en dehors, bien entendu, des rencontres que l’hôte de marque peut s’autoriser avec les ressortissants de son pays qui vivent sur le territoire qu’il visite. François Hollande n’a pas dérogé à cette règle, en recevant en fin d’après midi de ce même jeudi, les Français vivant en Côte d’ivoire. L’inhabituel, c’est quand le chef d’Etat français décide de discuter avec l’opposition au régime d’Abidjan ; bien plus, quand il accorde un tête-à-tête au président du FPI, comme il en a fait avec son homologue ivoirien, quelques heures plus tôt.
Le premier décryptage que l’on peut faire est que cette rencontre, chargée de symboles, constitue le meilleur démenti à toutes les propagandes du pouvoir qui tente, tous les jours, de faire croire que le FPI est un parti impopulaire, qui n’aurait aucune emprise sur la marche de la vie politique nationale.
Or, les avis et prises de position du Front Populaire ivoirien, sur les questions d’intérêt national, impactent nécessairement l’environnement sociopolitique. Et le succès du récent mot d’ordre de boycott du Recensement Général de la Population et de l’Habitat(RGPH), dont Hollande a certainement entendu parler, en témoigne éloquemment. La portée de ce tête-à-tête peut donc apparaître comme un message politique adressé au régime Ouattara, afin qu’il tienne compte désormais de son opposition significative dans la gestion des questions qui relèvent de l’intérêt national. Le FPI est donc un parti qu’on ne peut ignorer ou mépriser.
Second décryptage : cette rencontre montre que la seule version du pouvoir sur la réalité de la situation sociopolitique nationale ne suffit plus. Sans doute parce que cette version prend trop de liberté avec la vérité. D’où la nécessité, pour le président français, de comprendre la lecture de l’opposition de la crise politique et de la crispation de l’environnement social. Notamment, les questions relatives aux droits de l’homme, à la sécurité et au jeu politique.
Le troisième décryptage, c’est la leçon politique que Hollande a voulu faire aux tenants du pouvoir en leur rappelant, par ses échanges avec l’opposition, que le dialogue et la négociation demeurent les seuls moyens de résolution des problèmes. D’autant plus que cet entretien intervient dans un contexte où le dialogue politique et le processus de réconciliation nationale sont bloqués, du fait des tergiversations du régime. Le président Hollande, en faisant volontairement une entorse à la tradition diplomatique, aurait voulu dénoncer le mépris et l’arrogance du pouvoir à l’égard de son opposition qu’il ne s’y prendrait pas autrement. En définitive, l’acte posé par l’hôte français traduit éloquemment le déficit de démocratie et des droits de l’homme auquel le pouvoir Ouattara nous a habitués depuis le 11 avril 2011, et qui s’est constamment traduit par : la déportation du président Gbagbo à La Haye, le harcèlement judiciaire des opposants, la répression ou l’interdiction des manifestations, la détention arbitraire de centaines de prisonniers politiques, la contrainte en exil de milliers d’ivoiriens et la confiscation illégale des biens d’une catégorie de citoyens qui ont le tort d’être des partisans du Président Laurent Gbagbo.
Franck Anderson Kouassi
Conseiller en Communication du Président Affi N’Guessan