Comment Sarko a appuyé l’offensive anti-Gbagbo: Retour sur la guerre de la France à la Côte d’Ivoire

Le 18 juin 2011 par Notre voie - Pour l’histoire, pour les archives de notre pays et pour nos mémoires, nous vous proposons de lire ce que la presse française a

Nicolas Sarkozy, Président de la République française.

Le 18 juin 2011 par Notre voie - Pour l’histoire, pour les archives de notre pays et pour nos mémoires, nous vous proposons de lire ce que la presse française a

relaté sur la fin de la crise en Côte d’Ivoire. Un document exceptionnel qui met en lumière le travail du metteur en scène Sarkozy qui distribue les rôles avec comme acteur principal le candidat du RHDP. Vous verrez surtout comment la hiérarchie militaire française a organisé les forces pro-Ouattara avec des conseils, des armes neuves et…
En contact téléphonique permanent avec Ouattara, Sarkozy, qui prétendait le
soutenir au nom de la protection des civils, devra ramer dur pour faire oublier
les exploits de certains chefs de guerre.
Le Canard enchaîné (6/4)
L'entrée en guerre de la France contre les forces de Gbagbo, le 4 avril, a sonné comme une revanche personnelle de Sarkozy. Avec la bénédiction de l'ONU, Paris n'a laissé à personne d'autre le soin de bombarder la présidence ivoirienne ainsi qu'un camp militaire qui abritait aussi des familles. Depuis plusieurs semaines, en Conseil des ministres comme en privé, le chef de l'Etat ne décolérait pas contre Gbagbo, « le dictateur sanglant de Côte d'Ivoire ». Au point de s'avouer, le 5 avril, « à bout de patience ».
Outre les nombreuses et violentes exactions de ses partisans, Gbagbo avait aussi
ridiculisé Sarko. En décembre 2010, après la victoire, proclamée par l'ONU, de son ami Ouattara, le président français, impérial, avait donné « quarante-huit heures » au vaincu pour quitter le pouvoir. Un oukase superbement ignoré pendant plus de trois mois...
Or Sarko avait beaucoup misé sur ce scrutin pour rehausser une cote fort dévaluée sur le continent. N'était-il pas accusé de perpétuer la « Françafrique », ce système affairiste favorisant des groupes amis tels que Bouygues, Bolloré, Veolia ? Mais, après l'échec de son ultimatum ivoirien, le Président révise subitement ses positions et adopte un profil bas. Affirmant à la presse que « l'ancienne puissance coloniale n’était pas la mieux placée » pour intervenir.
En janvier, devant l'Union africaine, il ose même affirmer : « La France ne veut donner de leçons à personne. » Il faut dire que les événements de Tunisie, d'Egypte ou de Syrie n'ont guère fait briller la diplomatie tricolore.
La campagne (aérienne) de Libye, pour laquelle Sarko a obtenu le droit d'ouvrir le feu le premier, a réveillé ses ardeurs belliqueuses. Selon plusieurs témoignages d'officiers supérieurs au « Canard », la France a appuyé la conquête du sud du pays par les forces de Ouattara. L'un d'eux, proche de l'Elysée, se félicite de « notre efficacité dans l'organisation de la descente sur Abidjan ». Il est vrai qu'en moins de quatre jours les Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI) ont parcouru, sans grande résistance, la moitié du pays. Un autre galonné, membre des services de renseignement, confie : «On a fourni des conseils tactiques aux FRCI », mais aussi « des munitions et des Famas (fusils d'assaut). »
Barbouzes aux premières loges
De son côté, le contingent militaire français est porté, le 4 avril, à 1 700 hommes. Les 900 hommes du dispositif permanent Licorne ont été notamment renforcés par des Rambo de la Direction des opérations (ex-Service action) de la DGSE et des Forces spéciales.
Quelques-uns, parmi ces derniers, se sont retrouvés en contact direct avec l'entourage de Ouattara. A 19 h 30, quatre hélicos Puma, soutenus par des MI 24 de l'Onuci, commencent leur pilonnage, frappant au passage des objectifs aussi stratégiques que le CHU et un supermarché du quartier de Cocody. Pour la seconde fois en sept ans, «l'ancienne puissance coloniale » bombardait des soldats et des populations ivoiriennes.
Armement à prix d'or
Cet héroïque canardage, qui, selon l'Elysée, laissait entrevoir une reddition rapide de Gbagbo, risque pourtant de laisser des traces profondes. Et une situation difficilement gérable à Abidjan. D'abord parce que Ouattara pourrait pâtir, dans cette ville majoritairement acquise à Gbagbo, de son image de protégé de la France et des pays riches. L'armement de ses troupes, son équipement tout neuf ont suscité l'étonnement des Ivoiriens. Si l'aide du Burkina et du Nigeria est reconnue, d'autres pistes de financement apparaissent. Selon des témoignages et des documents obtenus par « Le Canard », des proches de Ouattara ont monnayé en 2009 et en 2010 d'importantes quantités d'or extraites des mines du Nord. Plusieurs tonnes ont été acheminées au Ghana voisin sous couvert de véhicules de... l'ONU. Puis envoyées, par petites quantités, à Anvers (Belgique) pour y être transformées. A l'état de poudre, cet or a été négocié à plus de 15 000 euros le kilo.
L'image du camp Ouattara - présenté par certains comme 1'« axe du bien » - restera également entachée par les massacres commis ces derniers jours. A Duékoué, par exemple plusieurs centaines de morts seraient, selon l'ONU et diverses organisations internationales, surtout imputables aux FRCI, les forces de Gbagbo se voyant aussi accusées d'atrocités.
En contact téléphonique permanent avec Ouattara, Sarkozy, qui prétendait le soutenir au nom de la protection des civils, devra ramer dur pour faire oublier les exploits de certains chefs de guerre. Et pour transformer cette intrusion meurtrière en victoire de la démocratie.
Jean-François Julliard
© Le Canard enchaîné.
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Réactions ce mardi 5 avril à l'assemblée nationale française
Fillon, Premier ministre
« Je forme à l'instant même le voeu que cette journée [mardi 5 avril] marque la fin de 4 mois d'efforts de la communauté internationale pour faire respecter la démocratie en Côte d'Ivoire et je veux rappeler l'engagement de la France au premier jour et en particulier l'engagement du président de la République pour mobiliser la communauté internationale et pour faire en sorte qu'en Côte d'Ivoire comme par la suite partout en Afrique que les droits de l'homme et la démocratie soient respectés (...) Je pense que la France peut être fière d'avoir participé à la défense de la démocratie et des droits de l'homme en Côte d'Ivoire » xxxx
Didier Mathus, député socialiste
« Monsieur Sarkozy joue avec le feu en Côte d'Ivoire. Il s'agit d'un réflexe post colonial (..) Les nouvelles sur les massacres par les forces de Monsieur Ouattara ne sont pas de bonne augure ».
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Noël Mamère, député Les Verts
« Nous aurions dû intervenir beaucoup plus tôt. Non pas de manière militaire avec des armes lourdes mais comme forces d'interposition avec la Nations unies et l'Union africaine ».
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Jean-Paul Lecoq, député communiste
« En faisant intervenir les forces armées françaises pour bombarder le Palais
présidentiel de Laurent Gbagbo, la France, loin de vouloir protéger les civils, agit pour installer au pouvoir par la force son poulain et son ami. (...) Aujourd'hui, le camp Ouattara fait l'objet d'accusations graves de crimes de guerre (...) Ce soutien inconditionnel a sans douté été interprété comme un blanc-seing pour agir dans l'illégalité et commettre des exactions ».
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Paris exige que Gbagbo signe un document de renonciation au pouvoir
Gbagbo ayant jusque-là refusé de céder à une telle humiliation, les forces pro-
Ouattara donnent l'assaut contre la résidence d'un homme presque désarmé
par les bombardements français et onusiens.
Lu dans le quotidien français " Le Monde " (5/4).
A Gbagbo " La France et l'ONU demandent, selon Paris, de signer un document dans lequel il renonce au pouvoir en Côte d'Ivoire et reconnaisse son rival comme président du pays ".
Et sur RFI : " Paris exige que Gbagbo signe un document de renonciation au pouvoir "....
Oui, vous avez bien lu : ce ne sont pas les Ivoiriens qui le demandent mais la France. En quelle qualité ? De quel droit ? Pourquoi ? Bien entendu Gbagbo a jusqu'ici refusé de signer une telle reddition en forme d'humiliation, de capitulation devant une puissance étrangère. C'est évidemment du pain béni pour les forces pro-Ouattara qui s'emploient en ce moment à donner l'assaut à la résidence où se terre un Gbagbo (1) presque désormais sans défense, les
bombardements français et onusiens ayant ouvert la voie en détruisant les engins des forces favorables à ce dernier.
Laurent Gbagbo en voie d'être livré, mort ou vivant, à Ouattara rien à présent ne
s'oppose, comme l'écrit le quotidien français " Libération " (6/4) à ce que ce dernier prenne " ses fonctions grâce aux bombardements de l'Onu et de la France ". Il ne sera ni le premier ni le dernier.
(1) Gbagbo, comme l'écrit " Le Monde " (6/4) est toujours " entouré de son épouse, Simone, et de ses filles, comme il l'a expliqué sur RFI, non sans relever qu'il n'avait pas fait partir sa famille à l'étranger comme certains dignitaires du régime. " Nous ne fuyons pas, nous ", a conclu, non sans grandeur, Laurent Gbagbo.
NV