Mort de l`Ivoirien Mahé: le colonel Burgaud met en cause le général Poncet
Publié le vendredi 30 novembre 2012 | AFP PARIS - Le colonel Eric Burgaud, jugé à Paris avec trois anciens subordonnés pour la mort en 2005 de Firmin Mahé, a affirmé jeudi au procès, comme durant
l`enquête, que le général Henri Poncet avait donné l`ordre implicite de tuer cet Ivoirien considéré par l`armée française comme un criminel.
Publié le vendredi 30 novembre 2012 | AFP PARIS - Le colonel Eric Burgaud, jugé à Paris avec trois anciens subordonnés pour la mort en 2005 de Firmin Mahé, a affirmé jeudi au procès, comme durant
l`enquête, que le général Henri Poncet avait donné l`ordre implicite de tuer cet Ivoirien considéré par l`armée française comme un criminel.
Le général Poncet avait été mis en examen au début de l`instruction pour complicité d`homicide volontaire, mais il a fermement démenti avoir donné un tel ordre et a bénéficié d`un non-lieu. Il est attendu comme témoin au procès le 4 décembre.
A l`époque des faits, le colonel et ses trois co-accusés, dont l`adjudant-chef Raugel qui a reconnu avoir tué sur ordre Firmin Mahé, étaient membres de la force Licorne déployée en soutien de l`ONU en Côte d`Ivoire. Le général Poncet était le commandant de Licorne.
Le 13 mai 2005, les militaires français avaient interpellé, blessé par balle à la jambe puis arrêté Firmin Mahé, qu`ils tenaient pour un "coupeur de route", dépouillant et terrorisant les populations. La famille de Mahé conteste, affirmant que les militaires se sont trompés d`homme.
Alors qu`il était transporté dans un blindé français, Mahé avait été étouffé avec un sac plastique par Guy Raugel. "J`assume pleinement de lui avoir donné l`ordre illégal disant que Mahé devait ariver mort" à destination et "je l`ai laissé se débrouiller tout
seul", a déclaré à la cour le colonel Burgaud.
"Je n`avais pas eu le courage moral de m`opposer au général Poncet", a ajouté le colonel, répétant à la cour que son supérieur lui avait dit que le véhicule devait "rouler doucement" et avait conclu sa phrase par: "Vous me comprenez".
Pour le colonel, cela voulait dire qu`"il fallait que Mahé arrivât mort à Man et qu`il ne s`échappât pas".
Devant la cour d`assises, le colonel a admis qu`il n`avait "pas toujours fait preuve de dignité dans cette affaire", n`ayant reconnu que tardivement avoir transmis cet ordre "illégal". "J`ai été lâche, quelquefois j`ai été indigne...", a-t-il dit.
"En tout état de cause, le général Poncet n`admet pas avoir donné cet ordre, mais l`indignité maintenant est dans son camp", a ajouté l`ancien colonel, devenu cadre en entreprise.
AFP
L'ADJUDANT-CHEF RACONTE COMMENT IL A EXÉCUTÉ L'ORDRE ILLÉGAL DE TUER UN HOMME
Publié le vendredi 30 novembre 2012 | AFP
PARIS - "Bon alors, mon capitaine, on fait quoi? il faut le tuer?" L`adjudant-chef Guy Raugel a raconté jeudi à la cour d`assises de Paris comment il avait achevé en 2005 l`Ivoirien Firmin Mahé, tout en sachant qu`il exécutait "un ordre illégal".
"Je savais que ce qu`on allait faire, c`était pas bien, je ne me suis pas engagé pour ça...", a dit d`une voix assurée cet homme de 48 ans qui se dit "militaire dans l`âme".
Il comparaît depuis lundi avec deux de ses anciens subordonnés et un colonel pour le meurtre de Mahé, qu`il a décrit jeudi comme un "coupeur de route" dépouillant et terrorisant les populations.
Les quatre accusés appartenaient à la force Licorne déployée en Côte d`Ivoire, pays alors coupé en deux par une guerre civile. L`adjudant-chef Raugel et ses hommes étaient chargés de surveiller la "zone de confiance", entre le nord tenu par la rébellion et le sud loyaliste.
Plusieurs militaires ont expliqué à la cour qu`il s`agissait de fait d`une zone de "non-droit", où plus aucune police ni justice ne fonctionnait.
"On était écoeurés, on en avait marre, marre, marre, de voir des coupeurs de route qu`on arrêtait revenir en toute impunité recommencer leurs saloperies", a dit l`adjudant-chef.
Sa famille le conteste, mais les militaires restent convaincus que c`est bien un chef de bande qu`il ont interpellé le 13 mai 2005 en la personne de Firmin Mahé.
Le matin, il était blessé par balle à la jambe et s`enfuyait, avant d`être rattrapé et amené au cantonnement du "peloton de reconnaissance et d`intervention antichar" (PRIAC) commandé par Guy Raugel, à Bangolo.
C`est là que l`adjudant-chef a dit avoir reçu l`ordre par téléphone du colonel Eric Burgaud de conduire le blessé vers la ville de Man et de le tuer en route.
indignité
Dans un premier appel, il s`agissait de "rouler doucement". L`adjudant-chef a demandé s`il s`agissait que Mahé n`arrive pas vivant à destination. "Vous m`avez bien compris", lui a répondu le colonel.
Dans un deuxième temps, l`ordre serait devenu explicite, selon l`accusé, pour qui le colonel lui a demandé de tuer Mahé par balle en prétextant d`une tentative d`évasion.
Ce procédé n`a pas semblé "cohérent" à Guy Raugel, parce que le blessé était inconscient. Finalement, c`est avec un sac plastique qu`il étouffera Mahé.
Selon l`adjudant-chef, un capitaine a lui aussi parlé au téléphone avec le colonel et aurait "acquiescé, de la tête et du regard", quand Raugel dit lui avoir demandé si la mission était bien de tuer Mahé.
Guy Raugel a gardé l`allure et le parler d`un sous-officier de terrain, parlant de l`armée comme d`une famille, de ses hommes comme de ses enfants, de son colonel comme d`un père.
Amer, il dit qu`il était convaincu que ses "chefs allaient tout assumer".
Interrogé après lui, le colonel Burgaud, admettant n`avoir pas toujours fait preuve de "dignité" dans cette affaire, concédant même de la "lâcheté", a dit qu`il assumait maintenant "pleinement de lui avoir transmis l`ordre illégal" selon lequel "Mahé devait arriver mort" à destination.
Et "je l`ai laissé se débrouiller tout seul", a déclaré le colonel qui, lui, dit ne pas avoir proposé de "mode opératoire".
Le colonel a aussi réaffirmé avoir tenu l`ordre de "rouler doucement" du général Henri Poncet, alors commandant de Licorne.
"L`indignité, maintenant, est dans son camp", a estimé Eric Burgaud.
Le général, attendu comme témoin le 4 décembre, a fermement démenti durant l`enquête avoir donné l`ordre de tuer Mahé et a bénéficié d`un non-lieu.
AFP