Plus d’un an après la crise postélectorale, Zasso Patrick dit ‘’ Englobal ‘’ rompt le silence: « Je n’ai pas de regret » « Ouattara agace les autorités ghanéennes »

Le 25 octobre 2012 par l'INTER - Patrick Zasso est l’ex-porte-parole de la jeunesse proche d’Alassane Ouattara, qui a rejoint le camp de Laurent Gbagbo au deuxième tour de

Zasso Patrick dit ‘’ Englobal ‘’ rompt le silence.

Le 25 octobre 2012 par l'INTER - Patrick Zasso est l’ex-porte-parole de la jeunesse proche d’Alassane Ouattara, qui a rejoint le camp de Laurent Gbagbo au deuxième tour de

l’élection présidentielle de novembre 2010. Affublé du pseudonyme ‘’ Englobal ‘’ suite à une émission télévisée pendant la campagne électorale, il avait vu sa cote de popularité prendre du volume, avant de se retrouver en exil suite à la crise postélectorale. Dans cet entretien réalisé via internet, M. Zasso parle de l’exil, de ses souffrances, du régime Ouattara et de la réconciliation.
Où se trouve Zasso Patrick, dit "Englobal" en ce moment ? Il parait que vous avez quitté le Ghana ?
Je me trouve là où je dois me trouver
Pourquoi avez-vous quitté le Ghana alors ? Avez-vous peur que les autorités ivoiriennes mettent la main sur vous ?
Monsieur le journaliste, qui vous a dit que j’ai quitté le Ghana, je suis là où je dois être. Et cela, pour ma sécurité.
Qu'est-ce que vous vous reprochez véritablement pour ne pas revenir au pays, dans la mesure où aucun mandat d'arrêt n'a été lancé contre vous ?
Il faut savoir qu’on a tenté de m’assassiner juste après l’arrestation du président Laurent Gbagbo. Ma petite maison a été criblée de balles de kalachnikov et saccagée par des individus. Ils sont venus à bord de plusieurs véhicules pour m’assassiner, sur ordre de certaines personnes. Ma voiture a essuyé des tirs, mais grâce à la vigilance de mes gardes, j’ai été sauvé. Donc je suis assez lucide pour comprendre que lorsqu’on frappe le margouillat, le lézard doit s’apprêter, parce que cela veut dire que son tour est proche. N’oubliez pas que des cadres tels que Jean-Jacques Bechio, transfuge du RDR, le gouverneur Dacoury Tabley, et d’autres, ont été sauvagement bastonnés et emprisonnés pour avoir soutenu Laurent Gbagbo. Ceux qui n’ont pas eu la chance, ont été tout simplement assassinés. Ma famille et moi avons reçu beaucoup de menaces et subi des tentatives d’assassinat. Demandez donc aux auteurs de tous ces actes ce qu’ils me reprochent, et permettez que je sois en vie.
Certains jeunes leaders pro-Gbagbo, dont Yaké Evariste, sont pourtant rentrés et vivent tranquillement en Côte d’Ivoire, sans être inquiétés. Alors pourquoi pas vous ?
Ne mélangeons pas les choses, je respecte la décision de ceux se sont ralliés, mais ces gens n’ont pas la même histoire que moi.
En restant à l’extérieur, n'est-ce pas un moyen pour vous de jouer les martyrs et profiter de votre situation d'exilé politique auprès des organismes internationaux ?
Moi, je ne suis pas un martyr et les Ivoiriens savent qui est Zasso Patrick dit ‘’ Englobal ‘’. Et tout le monde sait quel rôle j’ai joué dans ce pays pour la victoire du président Gbagbo à l’élection présidentielle. Je voudrais aussi dire que la Côte d’Ivoire a eu assez de martyrs du fait de cette sale crise qui depuis dure environ 20 ans. Le sang des innocents continue de couler, sous prétexte qu’ils sont pro- Gbagbo. Donc pour faire la politique, il faut être en vie et je suis en vie.
Quel commentaire faites-vous de la détention de Koné Katinan au Ghana?
Cette affaire est devenue un problème d’orgueil pour Ouattara. Sinon si un pays devrait traquer les personnes qui font l’objet d’un mandat d’arrêt tel que le fait Ouattara, lui-même ne serait pas là où il est actuellement. Je note que son attitude agace les autorités ghanéennes, mais je ne sais pas s’il le réalise.
Cette détention de Koné Katinan n’est-elle pas le signe qu’aucun exilé n’est à l’abri d’une arrestation ?
Vous savez, je suis un démocrate et un partisan de la non-violence, convaincu que seul le respect des institutions, des droits de l’homme et le retour à la démocratie vraie peuvent faire avancer une nation. Quant à savoir si l’arrestation de Koné Katinan est une menace pour les exilés, seul ceux qui traquent les exilés pourront y répondre. Pour ma part, je reviendrai en Côte d’Ivoire lorsque les conditions de démocratie, de sécurité, d’Etat de droit seront réunies.
Blé Goudé, votre mentor, a souhaité qu’une loi d’amnistie générale soit prise pour permettre aux exilés de revenir au pays. Etes-vous de son avis ?
Absolument ! Pour permettre un climat apaisé, en son temps, le président Gbagbo avait fait voter une loi d’amnistie en faveur des combattants de Guillaume Soro. Ce climat avait permis aux Forces nouvelles de vivre à Abidjan sans être inquiétées. Ouattara peut aussi le faire.
Vous étiez avec le RDR et vous avez ensuite viré à LMP dont le régime est tombé le 11 avril 2011, au profit de vos anciens camarades qui sont aujourd’hui au pouvoir. Avez-vous des regrets ?
Je n’ai pas de regret, je suis un homme de conviction. Dieu seul sait ce qui allait se passer après mon ralliement au camp de Gbagbo. Mais moi, je suis en paix avec ma conscience ; je ne me reproche rien du tout. Mon ralliement a été la volonté de Dieu, je me soumets donc à cette volonté jusqu’à ce qu’il décide un jour de mon retour.
Cela fait plus d’un an que le président Ouattara est au pouvoir ; quel regard jetez-vous sur sa gestion ?
Je constate que les droits de l’Homme, la sécurité et les libertés n’ont plus droit de cité sous Ouattara. Le rattrapage ethnique est devenu la norme, les opérateurs économiques constatent que l’économie, dans une Côte d’Ivoire divisée, se portait mieux qu’aujourd’hui, alors que les bailleurs de fonds soutiennent Ouattara. Les populations souffrent de la cherté de la vie. C’est donc une triste réalité depuis qu’il est au pouvoir.
Le pays subit, depuis le mois d’août, des attaques tous azimuts menées par un commando non encore identifié. Comment appréciez-vous cette situation ?
Selon Ouattara, ces attaques sont le fait d’individus désespérés. Je lui demande donc de cesser de créer le désespoir. Cela mettra fin aux attaques et au traumatisme causé aux Ivoiriens.
Est-ce que les pro-Gbagbo préparent des projets de déstabilisation du régime, depuis l’exil, comme le pensent les tenants du pouvoir à Abidjan ?
Il faut laisser toutes ces suppositions et accusations pour aller à des discussions sincères qui accoucheront d’une paix durable.
Comment pensez-vous qu’on peut parvenir à la réconciliation et à la paix véritables en Côte d’Ivoire ?
La réconciliation et la vraie paix passent par la libération des prisonniers, en commençant par Laurent Gbagbo lui-même. Ce geste pourra rassurer tout le monde et les exilés rentreront. La réconciliation, ce ne sont pas les déclarations et les mises en scène.

Entretien réalisé par Hamadou ZIAO