Danon Gohou Doctorant (Etudiant chercheur, PhD prevu pour 2012): "La Banque centrale de l’Uemoa (BCEAO) est aux ordres des représentants du trésor français"
Le 11 janvier 2011 par IvoireBusiness - La création de la monnaie nationale en Cote d’Ivoire fait l’objet d’un débat même au delà des frontières du pays. Certains nostalgiques
Le 11 janvier 2011 par IvoireBusiness - La création de la monnaie nationale en Cote d’Ivoire fait l’objet d’un débat même au delà des frontières du pays. Certains nostalgiques
trouve ici l’opportunité de distiller leur pessimisme légendaire qui les suit comme la peau des fesse. On peut lire dans certains journaux sur la place d’Abidjan qu’il faudrait 15 ans aux autorités d’Abidjan pour créer une monnaie. Disons tout simplement que ceux la soit, ignorent les mécanismes, soit sont de mauvaise foi et dans ce dernier cas, sont juste dans leur logique de désinformation. Il est temps que l’on s’arrête un moment pour se poser, économiquement parlant, les questions fondamentales à savoir: la Cote d’Ivoire se sent-elle bien? Si oui, tant mieux! Sinon, que faut-il faire pour vivre mieux? A travers ce document qui se veut pédagogique, nous essayons de souligner les atouts d’une monnaie nationale d’une part et la capacité de la Cote d’Ivoire à battre sa propre monnaie d’autre part. Pour commencer notre propos, nous vous présentons un bref historique du franc CFA, nous exposons ensuite le rôle d’une banque central avec celui de la BCEAO en prime avant de peindre les variables qui militent en faveur de la capacité de la Cote d’Ivoire de battre monnaie.
Le Franc CFA: historique.
Au 19e siècle, le continent africain dans son ensemble, a joué un rôle important dans l’économie internationale en sa qualité de pourvoyeur d’Or au système monétaire du globe. L’Afrique a ainsi aidé non seulement a monétiser l’économie méditerranéenne au moyen âge, mais aussi a maintenir la balance de paiement de ses économies. Malheureusement, l’effectivité de la participation des pays d’Afrique, particulièrement ceux d’Afrique de l’Ouest dans le système monétaire international est apparu seulement avec l’utilisation du franc français. L’environnement économique défavorable d’après guerre a vu le retrait du franc français et son remplacement par le franc CFA dans les colonies françaises d’Afrique. Cette nouvelle monnaie est introduite avec un taux de change fixe avec le franc français. Notons que le trésor français gère le franc CFA a travers un compte dit d’opérations et “garantie” la convertibilité du CFA avec d’autres monnaies. L’Afrique du franc CFA est scindée en plusieurs organes dont l’UEMOA (union monétaire oust africaine) qui est dotée d’une banque centrale (BCEAO). L’Uemoa regroupe huit (8) pays dont la Côte d’Ivoire et est censée faciliter le commerce sous régional avec une politique fiscal commune. Le trésor public français est représenté dans la région par les différentes banques centrales dont la Bceao. L’on se demanderait le rôle d’une banque centrale en général et celui de la Bceao en particulier.
Quel est le rôle d’une banque centrale et comment opère-t-elle?
Une banque centrale est chargée de gérer la politique monétaire d’un ou de plusieurs pays . Ce rôle lui est confié par un ou plusieurs chefs d’Etat. La banque centrale joue le rôle de banque des banques, elle émet la monnaie papier, elle fixe les taux d’intérêts et supervise ainsi les marchés financiers.
Nous venons de citer trios (3) points clés dans le fonctionnement d’une banque centrale. Pour simplifier les choses prenons un exemple concret. Mr. Konan va vers la BIAO (sa banque) pour avoir un prêt pour l’achat de sa voiture, de même la BIAO se tournera vers la BCEAO, la banque centrale (sa banque donc) pour de la liquidité afin de satisfaire Mr. Konan, d’ou le rôle de banque des banques de la Bceao (la banque centrale).
Le deuxième rôle comme nous l’avons dit est d’émettre de la monnaie, c’est cette action de la Bceao qui permet aux habitants d’Abidjan par exemple, de savourer les nouveaux billets « craquants » qu’on appelle aussi monnaie fiduciaire.
La banque centrale fixe enfin le taux d’intérêt directeur. En effet, tout prêt a un coût détermine en amont par le taux directeur banque centrale. C’est sur la base de ce taux que les banques commerciales reçoivent des prêts de la banque centrale et/ou de leur paires. On est donc en droit de se demander les bases sur les quelles la banque centrale fixe son taux directeur. C’est ici, que nous comprendrons les effets des décisions de la Bceao sur la vie de chaque individu depuis Koudougou au Burkina Faso jusqu’a Abidjan.
En effet, selon les techniques modernes de gestion d’une politique monétaire, outre l’injection de billets frais dans l’économie en vue d’en garantir la liquidité, la banque centrale dispose du maniement du taux d’intérêt directeur. Ce dernier levier permet à toute banque centrale de baisser ou de relever le niveau de monnaie en circulation dans un pays. Ainsi, quand la quantité de monnaie n’assure pas un fonctionnement normal de l’économie, la banque centrale y injecte une certaine quantité d’argent ou en limite sa circulation. Ce mécanisme se fait a travers la variation du taux d’intérêt directeur qui a un effet sur le niveau de l’inflation, c’est à dire la cherté de la vie. Qu’est ce que cela signifie?
En Clair, la banque centrale se fixe pour premier objectif de maintenir le taux d’inflation ( ou cherté de la vie) a un niveau d’équilibre prévu, soit 3% pour la BCE (banque centrale Européenne) et 2% pour la BCEAO (voir une étude de Amada Combey et Kako Nubukpo 2010, de l’université de Lomé). Si la banque centrale estime que la cherté de la vie a court terme est susceptible de dépasser le niveau d’équilibre requis, elle se donne le droit mais non l’obligation de remonter son taux d’intérêt directeur, pendant une session du comite de politique monétaire. Ceci se traduira par une réduction ou augmentation de la quantité de monnaie dans l’économie. On est tous d’accord que quand l’argent manque, la demande de biens baisse et partant les prix et vis versa. Notons que l’augmentation des prix peut être due, soit au fait qu’il y a trop d’argent dans le pays ce qui gonfle la demande de biens et donc les prix, soit que les prix des produits importés (qui viennent de France ou de chine par exemple) sont élèves. Notons que le prix du pétrole est souvent a la base de la croissance des prix des produits importés.
La dynamique du mouvement du taux d’intérêt de la banque centrale s’inverse quand l’inflation est projetée en deça de son niveau d’équilibre, c’est a dire quand le niveau d’équilibre des prix va décroissant. Cela signifierait que l’économie ne fonctionne pas a plein temps d’où le chômage rampant et partant la baisse des richesses a l’échelle nationale. Dans ces conditions, la banque centrale réduit son taux directeur pour rendre le loyer de la monnaie accessible aux consommateurs par le biais de leurs banques commerciales. En effet, quand le prix de l’argent baisse ainsi a la banque centrale, les banques sont censées faire des prêts qui a leur tour permettent aux entreprises d’investir plus et aux individus de créer d’autres entreprises. Ceci, à moyen terme devrait assurer la reprise économique.
Malheureusement il peut s’avérer que le levier du taux d’intérêt directeur soit inefficace et que l’économie continue de souffrir. C’est le cas aux USA et en Europe ou malgré un taux d’intérêt directeur avoisinant zéro pour cent, l’économie a eu du mal à redécoller. Dans ce cas précis, la banque centrale a un autre moyen, celui de faire appel a la planche a billets. C’est le cas en Europe et aux USA ou la FED (banque centrale américaine) a injecté et continue de fournir des milliards de dollars a son économie. Cela s’appelle le “ quantitative easing” pour les anglo-saxons. Ceci dit, la BCEAO fonctionne-t-elle selon les normes ci-dessus?
De la position de la BCEAO, la banque centrale de l’UEMOA.
Au vu des études jusque là menées par plusieurs chercheurs, il y a un doute sur le rôle de la BCEAO en termes de régulateur de l’économie au profit de ses mandataires. Il est même démontré sur la base des données fournies par la BCEAO, l’évidence que l’institution n’a pas forcement pour objectif d’apporter l’énergie nécessaire à la croissance économique de l’Uemoa. “La banque n’est pas gérée” comme le dirait l’autre, pas par manque de compétence mais plutôt par manque de pouvoir de décision. La banque centrale de l’Uemoa serait aux ordres des représentants du trésor français. La BCEAO suivrait ainsi l’évolution du taux d’intérêt de la BCE (la banque centrale européenne) ou le taux de change de l’euro par rapport au dollar et partant celui du Franc CFA contre le dollar américain. Ceci dit, face au dollar les problèmes de l’euro sont ceux de l’Uemoa. Ainsi des pays classés parmi les plus pauvres du monde partagent la galère en termes de commerce extérieur, avec l’Union européenne. L’Uemoa n’a pas le choix, il n’y a pas d’alternative. En termes de commerce extérieur, la Côte d’Ivoire qui pilote l’économie de la sous région, reste perdante car elle est membre de fait de la zone euro avec une monnaie trop forte.
D’après les données fournies par la BCEAO et la BCE (banque centrale européenne), il ressort que la banque centrale de l’UEMOA, suit presque point par point, les décisions de la BCE. Ce phénomène n’est pas linéaire sachant que les deux banques centrales n’ont pas les mêmes objectifs. Un exemple palpable et dramatique ici, c’est qu’en 2007-2008, pendant que les ivoiriens faisaient des marches de protestation contre la montée de l’inflation (ou cherté de la vie) qui avait court dans le monde entier, la BCE (banque centrale européenne), relevait tranquillement son taux d’intérêt directeur pour contrer la folie prix, comme le recommande la théorie économique. Pendant ce temps, nous constations sans surprise aucune, que la BCEAO n’avait pas d’autres moyens que de rester de marbre face a la débâcle des économies qu’elle est censée aider. Encore une fois la compétence interne en la matière n’a pas fait défaut mais plutôt le pouvoir de décision se faisait désirer vu que les représentants du trésor public français à Dakar disposent d’un droit de veto dans le comite de pilotage de la politique monétaire de l’institution ouest africaine.
En claire, la BCEAO ne ferait, non seulement pas usage d’aucun levier majeur à sa disposition pour procurer une nécessaire santé aux économies de l’Uemoa, pire, elle se serait trouvée une nouvelle vocation qui est au delà des limites de son mandat en voulant couper les vivres a l’un des pays les plus avancés de l’union. Ceci dit, le désir de concrétiser une volonté populaire qui est la création d’une monnaie nationale en Cote d’Ivoire, ne peut qu’être légitime et salutaire. D’ailleurs, la Cote d’Ivoire n’a pas d’autres choix que de chercher la croissance par les moyens légaux avec une banque centrale qui répondrait à ses besoins. Beaucoup de citoyens s’interrogent et à juste titre, sur la faisabilité d’un tel bond en avant étant donne que la Cote d’Ivoire, qui compte plus que 45 pour cent de PIB (ou richesse) de l’union, est dans une crise postélectorale majeure. Le pays croule en ce moment sous des pressions économiques et politiques en provenance du monde entier et principalement de la France et des USA.
Danon Gohou Doctorant (Etudiant chercheur, PhD prévu pour 2012) en modélisation de politique monétaire (Cas de la BCEAO),
Analyste quantitatif a Londres.
Maitrise d’Economie (Universite de Cocody)
MSc Financial Markets & Derivatives (London Metropolitan University).