Tribune: Le BéBé de la terreur
Le 07 février 2013 par Correspondance particulière - Le BéBé de la terreur.
Neuf mois déjà... Nous lui avons laissé le temps , le temps d'une grossesse, le temps d'accoucher de la dénonciation des méfaits de son prédécesseur; le temps de placer la France sur une autre orbite que celle des intérêts du grand capital et de l'exploitation éhontée des richesses des autres; le temps de tourner la page de la France charognarde, calculatrice, dissimulatrice et meurtrière. Il est vrai qu'à peine élu, encore tout auréolé de l'espérance que plaçaient en lui des dizaines de millions d'Africains -pas seulement ivoiriens- tout autour du globe, le nouveau Président s'était d'emblée montré disposé à franchir le Rubicon du déni de justice : de la nomination de Laurent Fabius – un "ami personnel" de Ouattara – à la tête du Quai d'Orsay, au refus d'intervenir pour que soit mis un terme à la détention arbitraire de Michel Gbagbo, coupable du seul "délit de patronyme" , et seul otage français privé du droit de figurer dans la liste régulièrement égrenée sur France 2 .
Nous avions dès lors très vite commencé à déchanter; le décor était planté : sous le "règne" de François Hollande, pas plus que sous celui de Nicolas Sarkozy, l'argent n'aurait d'odeur, si ce n'est celle de la raison de Wall Street, maquillée en raison d'État; l'odeur du sang, masquée par les désodorisants du "tout-ingérence-humanitaire". Et comment pourrait-il en être autrement, dans un pays passé du statut d'otage d'une droite vendue aux grands prédateurs de la finance internationale, à celui d'otage d'une "gauche caviar" pathétiquement coincée entre dogmatisme marxiste façon CIA et addiction financière à la prédation occidentale ?...
Et le voilà, notre Fanfan, plein d'une mâle assurance, longe de chameau à la main, le front nimbé des présages d'une gloire exotique autant que léonine: quelques paroles "fortes", prononcées sur le ton solennel de celui qui vient de "gagner ses galons de chef" – dixit le présentateur de France 2 –; il ne nous reste qu'à entonner le viril refrain de corps de garde qui berça nos jeunes années de cons-scrits : "il est des nô-ô-treueus, il a bu son verre comme les au-au-au-treus...". Il l'a donc bu, le verre de la tartufferie internationale, le verre de l'insurpassable virtuosité à dissimuler derrière l'arbre d'une hypothétique menace terroriste l'immense et ténébreuse forêt de ses propres crimes. Ce qu'il ignore, le pauvre Fanfan, c'est que l'on ne devient pas un lion en rongeant les os laissés par les hyènes.
Comment, chaussé des bottes ensanglantées de Sarko-la-mort, BHL – Brassard de l'Humanorreur-Livresque – au biceps, François Hollande serait-il en mesure d'accomplir le bien dont il se réclame? La justice ne se bâtit pas sur des cadavres, et la voix du droit ne se nourrit pas du silence des cachots.
La guerre au Mali, quelles qu'en soient à première vue les "bonnes" raisons, démagogiquement déclinées en termes de reconnaissance éperdue par des populations naïvement enthousiastes, "sauvées" de "l'ignoble oppresseur islamiste" par le héros du jour, Fanfan le casse-pipe; cette guerre au Mali, menée tambour battant au cœur d'une Afrique de l'ouest dont nul n'ignore qu'elle constitue le dernier coffre-fort d'une France d'ores et déjà ruinée; cette guerre au Mali ne pouvait et ne peut être que mauvaise : mauvaise, certes, en raison de l'inféodation du "chef" aux sordides calculs de l'hydre Aréva et de quelques autres monstres hexagonaux de la pétrochimie, de l'eau et du bâtiment – calculs, qui, à terme, n'en finiront pas de mettre à genoux tous les Africains de la région noirs ou non, en les vouant au Moloch de guerres interminables et de massacres sans fin, voulus et planifiés par Paris, Londres, New-York et Washington –; mais mauvaise surtout parce qu'elle s'adosse au double spectre de deux forfaits génocidaires non seulement inavoués et inexpiés, mais travestis en "opérations de secours et de restauration de la démocratie" : la sanglante conclusion du plus long coup d'État de l'histoire, le 11 avril 2011 en Côte d'Ivoire – dont le bilan, étalé sur dix ans, s'élève à des dizaines de milliers de victimes –, et la guerre en Lybie, où plus de cent-cinquante-mille civils ont trouvé la mort sous les bombes françaises, pour "éviter le massacre du peuple libyen par le colonel Kadhafi".
A l'heure où niais, couards et menteurs sont les derniers à douter encore de l'innocence du Président Gbagbo et de l'abyssale culpabilité d'Alassane Ouattara, de Guillaume Soro, de Nicolas Sarkozy, de François Fillon, d'Alain Juppé et de Gérard Longuet dans la perpétration de ces meurtres de masses, aux péripéties abjectement jalonnées d'innombrables mensonges; à l'heure où la preuve est maintenant établie, de la non-implication de Mouammar Kadhafi dans l'attentat de Lockerbie, et de l'inexistence des massacres qui lui furent imputés pour justifier la mise à mort d'une nation prospère et l'assassinat de son chef, peut-être serait-il temps pour nous, Africains et Français, de nous poser ensemble quelques questions :
- Combien de millions de morts accepterons-nous qu'à nos dépens ou en notre nom, nos grands et petits maîtres, tous frères en confréries de ténèbres et de sang, continuent à sacrifier sur l'autel du dieu-profit ? Ce dieu cruel au culte et à l'esclavage duquel les parrains de nos “élus” soi-disant “politiques” en charge de l'anéantissement progressif de nos patries respectives – banquiers, marchands de canons, de semences, de drogues et d'énergies sales –, se sont juré de vouer par étapes l'humanité entière, Afrique en tête ?
- Jusques à ferons-nous mine d'ajouter foi aux gesticulations de ces faux vertueux, ceux-là mêmes dont les atours impeccables habillent des cœurs dont la cynique noirceur rendrait jaloux les plus grands manipulateurs de l'histoire? Philanthropes, les concocteurs de législations favorables aux homosexuels ? Allons donc! Eux dont l'unique souci est d'obéir aux consignes de leurs patrons, en recouvrant d'un vernis d'humanité les grandes manœuvres visant à mettre en place les structures pan-totalitaires du nouvel ordre mondial, dont l'une des priorités sera le contrôle absolu de la démographie planétaire ?
- Jusques à quand accepterons-nous que la “liberté démocratique”, cette bannière à l'ombre de laquelle serpente le chemin chaotique et terrifiant de toutes les aventures guerrières de ces soixante dernières années – de l'Indochine à l'Afghanistan, de l'Algérie à la Syrie, en passant par le Vietnam, l'Irak, la Côte d'Ivoire et la Libye –, continue à servir de cache-sexe aux deux derniers “Bijoux de famille” de l'Occident, ce BB qui, à en croire nos gouvernants, vaut bien la mise à mort de tout ce qui n'est pas lui : le double B de la Bouffe et de la Baise, derniers vestiges de ce qui leur reste à défendre, en fait de “valeurs”, pour le compte de puissants commanditaires aux yeux rivés sur l'abîme.
- Les masques étant aujourd'hui tombés, qu'attendons-nous, Africains et Français, chrétiens, musulmans, juifs ou athées, pour crier ensemble que cette France du tout-mort-nucléaire, du tout-pharmacie, du tout-Elf-Total, du tout-Bouygues et du tout-Dassault, cette France du tout-porc et du tout-lupanar, cette France-là, qui rêve de remodeler à son image, et manu militari, toute l'Afrique de l'ouest, cette France otage de la macabre fantaisie des deux sinistres compères qui, se succédant à sa tête, se sont donné le mot pour l'aider à s'enliser durablement dans l'ornière des crimes perpétrés, justifiés et assumés en son nom; qu'attendons-nous pour faire savoir et sentir à ces bouffons dominateurs que cette France-là, non seulement nous n'en voulons plus, mais qu'elle a vécu ? Paix, donc, à ce qui lui reste d'une âme depuis longtemps bradée au plus offrant.
Aujourd'hui, en assumant le front haut l'innommable héritage de la bande à Sarko, en situant ouvertement la politique internationale de la France dans le sillage de la triple forfaiture ivoirienne, libyenne et syrienne , et tout immaculée que puisse apparaître son armure de chevalier blanc, François Hollande crache à son tour au visage de ce que notre récente histoire de France recèle de plus noble : Jean Jaurès, Philippe Leclerc, Mendès France. Ne nous y trompons pas : l'intervention de l'armée française au Mali, contre des bandes sciemment armées par l'ancien locataire de l'Élysée à la faveur des parachutages destinés à la rébellion libyenne, dans le triple but d'obtenir, à terme, la partition du Mali, le déstabilisation de l'Algérie et la prise de contrôle des énormes ressources naturelles du Sahara, n'est qu'un épisode de plus dans l'interminable saga de l'asservissement de l'Afrique de l'Ouest aux intérêts mafieux de la Françafrique; ou, pour rester optimiste, le franchissement de l'une des dernières étapes de la descente au enfers de la France en Afrique.
Quoi qu'il en soit, cette intervention condamne objectivement le roi du jour – ce "roi d'un jour" – et ses comparses à tenir compagnie, le moment venu, au gang mafieux de l'administration Sarkozy devant le tribunal de l'histoire.
Neuf mois déjà… Le bébé est là, bébé de la terreur : non, pas celle des épouvantails "AQMI" ou "Ansar Dine" – commodes alibis médiatiques de dérives authentiquement fascisantes au cœur de la société française –, mais bébé de la vraie terreur; celle qui; sous couvert de vertu démocratique, étend son ombre malfaisante sur tant de peuples à l'agonie…
Il ne tient qu'à nous, Français et Africains, pour que la peur change de camp; pour que l'Afrique, fêtant la naissance d'un autre bébé, celui de la fin de son asservissement multiséculaire, se résolve enfin à devenir la terreur de la "France" et de l'Occident, le Lion terrassant la hyène, avant de l'aider à se relever des ruines de sa déchéance. Pour le plus grand bien de tous.
Une contribution d'Eliahou Abel, le 6 février 2013