TRIBUNE: L'ÉCHEC POLITIQUE DE SARKOZY ET D'ALASSANE OUATTARA, Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)
Le 08 novembre 2012 par Correspondance particulière - Françoise Fressoz, éditorialiste au Monde écrit sur son blog: “Nicolas Sarkozy a gagné. Il a perdu la présidentielle mais il reste maître du jeu à l'UMP. Dans la bataille de succession, rien ne se fera sans lui, ni contre
Le 08 novembre 2012 par Correspondance particulière - Françoise Fressoz, éditorialiste au Monde écrit sur son blog: “Nicolas Sarkozy a gagné. Il a perdu la présidentielle mais il reste maître du jeu à l'UMP. Dans la bataille de succession, rien ne se fera sans lui, ni contre
lui”. Cette phrase de Fressoz résume assez bien la philosophie politique de Sarkosy dont le but est de demeurer le maître des événements voire du temps. L'un des pères spirituels de ce courant philosophique, Nicolas Machiavel, affirme en effet que les événements (la chance bonne ou mauvaise) dictent leur loi à ceux qui abdiquent et ne leur opposent rien: “Là où l'homme abdique, les événements portent leurs coups les plus efficaces”.
Machiavel précise qu'il est peut être vrai que la chance (bonne ou mauvaise) soit l'arbitre de la moitié de nos actions, mais aussi que l'autre moitié, elle la laisse gouverner par l'homme”. La conquête du pouvoir hante et aveugle certains hommes politiques qui finissent par ne plus tenir compte de ce jeu d'équilibre que nous imposent les événements, le temps; il n'est donc pas étonnant de voir de fins stratèges comme Louis XIV, le roi Soleil, l'artisan du «Grand siècle» affirmer qu'il était l'État. Sarkosy, pour avoir méconnu cet équilibre, connut un échec cuisant face à Hollande, un homme politique que le temps, les événements ont imposé à la France. Sa défaite face à Hollande marque en fait la fin d'une ère, de cette politique qui nous donne l'illusion d'être les maîtres du monde, des événements, du Temps. Contrairement à Hollande qui s'évertuait à proposer aux français un programme de société, Sarkosy s'acharnait à susciter des intrigues pour discréditer ses adversaires politiques: sa fameuse loi sur la négation du peuple arménien en pleine campagne électorale, l'intervention armée en Côte d'Ivoire n'étaient que des pièges politiques tendus aux socialistes. Leur éventuel refus de soutenir cette loi ou l'intervention armée en Côte d'Ivoire aurait fait d'eux des ennemis des droits universels de l'homme, ce qui lui aurait assuré sa victoire à la présidentielle. En Côte d'Ivoire, il avait organisé tout un scénario médiatique qui devait discréditer aux yeux du monde Laurent
Gbagbo et ses partisans. Les élections présidentielles ivoiriennes n'étaient qu'une couverture légale pour y établir de force “son filleul” Alassane Ouattara. Un porte-parole des jeunes du quartier d'Abobo (à Abidjan), considérés trahis par leur leader politique a dit tout haut sur une chaîne française qu'ils avaient pris les armes pour chasser du pouvoir Laurent Gbagbo. Au moment de la crise post-électorale, les ivoiriens ont fait un constat amer, ahurissant : leurs mécaniciens, leurs menuisiers, leurs voisins, certains de leurs artistes portaient des armes qui ne sont certainement pas arrivées aux mains de ces personnes au moment de la crise, il eut certainement tout un plan de déstabilisation du régime de Laurent Gbagbo qui avait été organisé durant une longue période. Alors que les ivoiriens, dans leur majorité, croyaient à l'existence d'un escadron de la mort qui enlevait et tuait des civils innocents, la présence au sein de l'armée d'Alassane Ouattara de civils, de partisans armés et les propos de Dogbo Blé nous ramènent à une amère réalité: “Je n'ai aucune dette de sang” affirma le général lors de son audience. Un des meilleurs officiers ivoiriens, sorti major de sa promotion de Saint Cyr, cette célèbre école militaire française, nous invite à prendre conscience d'une guerre froide entre les forces gouvernementales et celles d'Alassane Ouattara qui précéda celle conduite par l'armée française sous Sarkosy qui permit l'arrestation du président Laurent Gbagbo. Tout civil qui porte des armes est soumis à la Loi qui régit le métier des armes, et reste un ennemi potentiel de l'État, le vrai détenteur du monopole de la violence physique.
Il ne s'agissait pas en réalité de l'existence d'un escadron de la mort, mais plutôt d'une lutte souterraine entre les forces armées républicaines (le service d'espionnage et de contre-espionnage) contre l'armée d'Alassane Ouattara formée de toutes les couches sociales favorables à un gouvernement du Nord, d'où la présence de civils (mécaniciens, menuisiers, chanteurs...) au sein de leurs rangs. Ces personnes « innocentes, manipulées » ne savaient pas vraiment à quoi elles s'exposaient en prenant les armes aux côtés de militaires rebelles pro-ouattara, durant le long coup d'État préparé par la France dans notre pays, et parlent de manière erronée, jusqu'à ce jour, d'escadron de la mort. En France, dans tous les pays occidentaux, conserver à domicile des armes, c'est courir le risque d'être pris pour un terroriste. L'intervention quelque fois violente de la police au domicile des personnes suspectées de détenir de manière illicite des armes ne peut nous amener à faire allusion à l'existence d'escadrons contre nos libertés individuelles, car l'État se doit d'assurer la sécurité de tous ses citoyens.
Les civils de tout parti politique en Côte d'Ivoire se doivent de s'éloigner des armes, et de se servir seulement de la politique comme moyen légitime de conquête du pouvoir. Les armes sont le privilège de ceux qui ont choisi comme profession le métier des armes. Sous Alassane Ouattara, le filleul de Sarkosy, “défenseur des droits de l'homme”, nous pouvons nous permettre de parler de dette de sang puisque la société civile est écrouée, torturée parce qu'elle ne partage pas ses points de vue. A Duékoué, et dans d'autres villes du pays, les femmes, les enfants, et certains hommes sont-ils tués parce qu'ils détenaient illicitement des armes? Nous assistons ahuris à une dérive totalitaire dénoncée par Amnesty International, et par d'autres organisations humanitaires. Un des officiers supérieurs de l'Armée d'Alassane Ouattara, face aux attaques répétées de forces militaires opposées à son régime, parlait de ver dans le fruit (au sein de l'armée). On vient de nous annoncer qu'Alassane a échappé à un attentat à l'Aéroport d'Abidjan. La mesure urgente prise par les officiers d'Alassane Ouattara est le désarment d'une partie de l'armée ivoirienne. Quel est le critère en Côte d'Ivoire qui permet de désarmer un soldat et d'armer un autre? Certaines enquêtes ont-elles été diligentées pour identifier les “vers de l'armée” qui ne partagent certainement pas leur conception de l'armée, et de la nation ivoirienne? N'assisterons-nous pas au massacre de gendarmes désarmés avec leurs familles comme en 2002, qui seront une fois assassinés accusés d'être les auteurs des attaques répétées du Commando invisible en Côte d'Ivoire? La dernière décision de la Haye qui juge Laurent Gbagbo apte à assister à son procès met en évidence l'échec politique d'Alassane Ouattara prêt à susciter de nouveau la violence en Côte d'Ivoire, à travers des mesures qui discriminent une partie de la population ivoirienne, et de son armée.
Dans un procès juste équitable, il se verra obligé de faire comparaître ses officiers accusés eux-aussi de crimes contre l'humanité, puisque Amnesty International dénonce des tortures subis par des pro-Gbagbo. Il nous faut savoir lire à travers les lignes, car les décisions de la Haye ne sont pas contraire à la volonté de Laurent Gbagbo qui a, dès sa première comparution, exprimé sa volonté d'aller au bout de son procès parce qu'il tient à démontrer à la face du monde, bien avant le général Dogbo Blé, qu'il n'a, visà-vis des ivoiriens, aucune dette de sang. Il se devait d'assurer la sécurité des ivoiriens, contrairement au régime d'Alassane Ouattara qui n'assure la sécurité des personnes, et des étrangers qui ne soutiennent que sa politique du rattrapage ethnique, cette doctrine qui fait de l'ivoirien un étranger dans son propre pays, puisque dépossédé par les partisans d'Alassane qui considèrent avoir accusé du retard sur les autres. Sarkosy a échoué face à Hollande parce qu'il s'est retrouvé face à une colombe à qui l'on n'avait rien à reprocher; aucun dossier ne pouvait être ficelé pour le discréditer aux yeux des français, n'ayant rien de concret à proposer aux français, comme Hollande ou Louis Gallois, il disparut de la scène politique pour rester le maître du jeu à l'UMP, en passant son temps à concevoir des intrigues, à tirer, dans l'ombre, des ficelles. Alassane a échoué parce qu'il ne peut au moyen de la force éliminer tous ses adversaires politiques; Sarkosy n'est plus à même de rendre légal tous les crimes commis par ses soldats armés (y compris ses dozos, ses chasseurs traditionnels) opposés volontairement et, à dessein, aux gendarmes désarmés au service de la nation ivoirienne. Après s'être débarrassé des hommes politiques ivoiriens, il s'en prend à l'armée ivoirienne. La nation ivoirienne est un concept qu'ignorent jusqu'à ce jour ses partisans et lui. Laurent Gbagbo soucieux de construire la nation ivoirienne avait grâce à une amnistie, après les crimes de 2002, jeté les bases d'une véritable réconciliation. La politique de Sarkosy et d'Alassane Ouattara qui consiste à élaborer des intrigues dans le but d'éliminer leurs adversaires politiques atteint ses limites face à tout peuple éclairé qui aspire à la liberté. La volonté affichée d'Alassane d'éliminer physiquement les intellectuels ivoiriens est aujourd'hui neutralisée par une politique française qui prône la diplomatie et non la force brutale, violente, aveugle, favorable à toutes formes d'injustice, d'abus.
Une contribution par Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)