TRIBUNE - Confirmation des charges du 19 février 2013 : La CPI, ce machin est –il crédible ?
Le 02 février 2013 par Correspondance particulière - La CPI, ce machin est –il crédible ?
La Cour Pénale Internationale (CPI) est une juridiction permanente chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crime contre l’humanité et de crime de guerre. Elle a été officiellement créée le 1er juillet 2002, date à laquelle le Statut de Rome est entré en vigueur. Le siège officiel de la CPI est situé à la Haye, aux Pays-Bas, mais les procès peuvent se dérouler en tous lieux(1). 121 états sur les 193 que reconnait l’ONU ont ratifié le statut de Rome. La Russie, l’Israël, les Pays Arabes, le Soudan et les Etats Unis ont signé le statut de Rome mais refusent de le ratifier(2). La Cour est conçue pour compléter les systèmes judiciaires nationaux : elle ne peut exercer sa compétence que lorsque les juridictions nationales n’ont pas la volonté ou la compétence pour juger de tels crimes (3). L’initiative en matière d’enquête et de jugement de ces crimes est donc laissée aux états (4). A ce jour, la Cour a ouvert une procédure d’enquête dans sept cas, tous en Afrique : L’Ouganda, la République Démocratique du Congo, la République de Centrafrique, le Darfour (Soudan), la République du Kenya, la Libye et la Côte D’Ivoire. Le premier procès de la CPI est celui du Congolais Thomas Lubanga pour crimes de guerre, débuté le 26 janvier 2009. Le 14 Mars 2012, Thomas Lubanga a été reconnu coupable de crimes de guerre. C’est le premier jugement de la CPI. Thomas Lubanga écope 14 ans de prison ferme.
Les peines applicables : La Cour peut prononcer une peine d’emprisonnement maximal de 30 ans ou une peine d’emprisonnement à perpétuité « si l’extrême gravité du crime et la situation personnelle du condamné le justifient ».
L’Argentin Luis Gabriel Moreno Ocampo a été élu sans opposition, premier procureur de la Cour le 21 avril 2003 et a prêté serment pour un terme de 9 ans en juin 2003. Il vient d’être remplacé par la Gambienne Fatou Bensouda en juin 2012.
La CPI est donc une jeune cour qui cherche ses repères et veut se tailler une réputation quelconque. Avec l’ancien procureur Luis Moreno Ocampo, la CPI s’est donnée une réputation pas trop envieuse à cause des pratiques extra judiciaires et les positions partisanes de ce dernier. Ce fut le cas en Côte D’Ivoire ou Luis Moreno Ocampo est réputé rouler pour Ouattara et son clan de criminels. Les preuves recueillies çà et là sont des ramassis de journaux pro-Ouattara, d’allégations et de rumeurs transformées pour la circonstance en preuves accablantes contre le président Gbagbo. Aucune enquête sérieuse n’a été faite ou diligentée par la CPI. Les témoins sont tous payés, corrompus et tous des militants du RDR. On a l’impression que seuls les nordistes étaient les victimes de la « barbarie » des FDS, comme si les effets collatéraux n’existaient pas. Les charges sont les suivantes : Responsabilité pénale en tant que co-auteur pour avoir élaboré et mis en œuvre une politique visant à se maintenir au pouvoir par tous les moyens, en tant que président de la Côte D’Ivoire notamment au travers d’attaques soutenues, minutieusement planifiées, meurtrières, généralisées et systématiques, lancées contre les civils qui s’opposaient à lui. » Ce torchon d’accusation est prévu à l’article 25-3-a du Statut de Rome.
Ce qui manque sérieusement à leurs preuves, ce sont les chiffres et les lieux de ces crimes, pour qu’ils puissent constituer des crimes de guerre voire génocide. De là à dire que le génocide Wê est du fait du président Gbagbo et des FDS, c’est travestir la vérité sous nos yeux. Aucun cas de génocide n’a été signalé ailleurs dans le pays. Donc d’où vient la charge de génocide contre le président Gbagbo ? Les centaines de patriotes tués par l’armée française dans l’enceinte de la résidence du président Gbagbo ne peuvent lui être attribué comme génocide. Donc de quel génocide parlons-nous ? Première fausse note de leurs preuves !
Quel était le statut du président Gbagbo pendant la crise post-électorale ? Etait –il président ou un imposteur ? Si le président Gbagbo était reconnu comme tel, alors cela justifie la force exercée par l’armée pour défendre l’intégrité du territoire. Les FDS ont accompli leur rôle régalien et ne doivent pas être sanctionnées de l’avoir fait. Par conséquent depuis le chef suprême des armées (le président Gbagbo) jusqu’au simple soldat, tous ont joué leur partition pour défendre le pays des attaques sauvages et répétées des forces rebelles pro-Ouattara.
Si le président Gbagbo s’était accroché au pouvoir donc pas reconnu comme président de la Côte D’Ivoire, alors qui confirme son statut ? Est-ce le Conseil Constitutionnel ou la communauté internationale ? Quel est le document soutenant la thèse selon laquelle la communauté internationale décide qui des candidats doit être reconnu et par quels critères ?
Selon l’argument avancé par le procureur et je cite : « Le second tour de l’élection présidentielle a commencé le 28 novembre 2010 et le scrutin a été clôturé le 1er décembre. Le 2 décembre, le président de la Commission Electorale Indépendante( ?) (CEI) a annoncé les résultats provisoires et déclaré que Ouattara avait remporté 54,1% des voix et Gbagbo 45,9%. Le 3 décembre, le président du Conseil Constitutionnel, un allié de Gbagbo, a invalidé la décision de la CEI et annoncé la victoire de celui-ci. Les 2 candidats se sont proclamés simultanément président de la Côte D’Ivoire. Cependant, le 3 décembre, le Conseil Constitutionnel a fait prêter serment à Gbagbo pour un nouveau mandat… »
Dans cette déclaration qui précède se trouvent des contre-vérités et entorses aux règles constitutionnelles. Le procureur reconnait au moins que les résultats étaient provisoires donc pas définitifs. Par conséquent, le président de la CEI ne pouvait pas constitutionnellement déclarer Ouattara vainqueur. Aussi, le procureur souffre d’une amnésie pathologique en omettant de dire aussi que la CEI était forclose au moment des résultats provisoires. Par conséquent, elle n’avait aucun droit de donner des résultats même provisoires. Le Conseil Constitutionnel est la seule institution à se prononcer sur les résultats définitifs. Il peut confirmer ou infirmer les résultats provisoires de la CEI. La décision du Conseil Constitutionnel est sans appel et s’impose à tous. Même si la décision est mauvaise, elle s’impose à tous et ne peut faire l’objet de critique. Le candidat Ouattara devait être au parfum du fonctionnement de cette institution pour un individu qui prétend vouloir diriger ce pays. Dire que le président du Conseil Constitutionnel est un allié de Gbagbo, c’est faire preuve de mauvaise foi, car le sieur Bakayoko est lui aussi un allié de Ouattara et de surcroit avait donné les résultats « provisoires » dans le fief de Ouattara. On ne peut pas vouloir d’une chose et son contraire. Ouattara ne peut pas pointer du doigt le président du Conseil Constitutionnel d’être partisan et protéger celui de la CEI comme étant indépendant.
Comme tout bon citoyen, le président Gbagbo s’est soumis aux lois de son pays, ce qui n’était pas le cas pour le candidat malheureux Ouattara. Ouattara a refusé de se soumettre aux lois de son pays, ce qui a entrainé la crise post-électorale. Par conséquent, tout ce qui s’est produit comme dégâts humains et matériels est du fait de l’entêtement de Ouattara à défier l’ordre constitutionnel de notre pays. S’il ya eu crimes de guerre, le président Gbagbo ne peut être responsable. Son statut était bel et bien celui de président de la Côte D’Ivoire selon les textes en vigueur. La constitution de 2000 lui donne tous les droits de défendre le territoire par la force. Donc le président ne peut être poursuivi pour avoir fait son devoir. Deuxième fausse note de leurs preuves !
Depuis le 28 janvier 2013, le cahier de charges pesant contre le président Gbagbo a connu une mutation de « co-auteur » a « auteur » de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Qu’est ce qui s’est donc passé entre temps ? La CPI a-t-elle des éléments nouveaux prouvant la participation effective du président Gbagbo aux crimes ? Ont-ils un témoin qui serait à même de confirmer un quelconque ordre provenant du président Gbagbo ?
Ce procès est hautement politique et politisé. Le bureau du procureur se substitue en politiciens et partisans de Ouattara. Le complot politico-juridique saute désormais à l’œil nu. Tout est fait de sorte à maintenir Ouattara au pouvoir et maintenir son rival loin de la politique. Ce n’est un secret pour personne que Ouattara malgré ses 54,1% a des sérieuses difficultés à gérer le bateau ivoire. L’économie est sérieusement grippée malgré les promesses de pluie de milliards. La réconciliation quant à elle est reléguée aux calandres grecques. Les grèves et autres revendications sont devenues notre quotidien. L’insécurité est galopante et bat son plein. Le chômage a triplé sous Ouattara. Les PME/PMI ne sont plus aussi performantes qu’auparavant donc payent moins de taxes. L’école est sérieusement en danger avec ces analphabètes comme ministres de tutelle. L’inflation est incontrôlable. La cherté de la vie impose la malnutrition aux ménages etc. Tout ceci est une recette pour un soulèvement populaire. Il faut donc arrêter ou éloigner les « trouble fêtes » de la population afin que Ouattara puisse gérer les intérêts occidentaux. Un changement brusque de régime pourrait freiner leurs investissements. La CPI est par excellence l’arme idéale pour anéantir les récalcitrants et fauteurs de troubles. Avec la CPI, on règle le compte de certains dirigeants africains qui se veulent souverainistes ou nationalistes. On peut les garder en prison soit pour 30 ans ou à perpétuité sans choquer l’opinion internationale. Pour cela, une campagne de diabolisation est mise sur pied à l’effet de s’attirer le soutien de la communauté internationale. C’est cela le cas du président Gbagbo, accusé de crimes qu’il n’a jamais commis. Les vrais criminels sont en liberté et jouissent de promotions dans l’administration et l’armée.
Le président Gbagbo est le seul homme d’état dans l’Afrique de l’ouest, à avoir beaucoup ménagé ses opposants. Il les a fait rentrer d’exil. Le président Gbagbo leur a offert des résidences et tous autant qu’ils étaient, margeaient à la présidence. Il leur a laissé le choix de leurs gardes rapprochées. En ce qui concerne Ouattara, le président Gbagbo a usé de l’article 48 de notre constitution de 2000 pour lui permettre de participer aux présidentielles. Comment comprendre qu’un tel homme puisse assassiner son peuple pour se maintenir au pouvoir ? Il aurait pu assassiner ses opposants directs en faisant l’économie de la vie des autres. Il ne l’a pas jamais fait. Au contraire, il était victime d’attaques verbales, militaires et d’insurrection de la part du RHDP. En bon démocrate, il a usé de ses talents de négociateur et de rassembleur pour amener ses opposants à la raison. Cela n’a pas empêché le RHDP et ses soutiens occidentaux à diaboliser un homme intègre, innocent et démocrate afin de justifier la guerre contre son pouvoir.
La CPI n’est pas une fatalité ou un mouroir. C’est une cour comme toute autre, seulement avec un habit international. Donc elle respecte les procédures judiciaires qui sont les juges, le procureur et la défense. Par conséquent, elle prononce des verdicts comme toutes les autres cours. Elle dit le droit et rien que le droit s’appuyant sur les textes du Statut de Rome. Même si cette cour est dite politique à cause des relations et prises de positions partisanes du bureau du procureur, il se soumet aux règles de la cour. Le procureur doit apporter des preuves et argumenter au-delà de toute passion politique et doute la culpabilité du détenu. La défense aura quant à elle une copie des mêmes preuves et présentera une défense pour réfuter les arguments du procureur. Enfin, les juges décideront qui du procureur ou de la défense a présenté un argument solide. Même si le prévenu se trouve devant les juges pour des raisons politiques comme c’est le cas du président Gbagbo, les preuves contre lui ne doivent souffrir d’aucun doute. C’est ce qui explique le procès préliminaire appelé confirmation des charges. Ce procès va examiner le cahier de charges contre le président Gbagbo et soit confirmer ou infirmer les preuves contre lui. Si les preuves sont confirmées, alors il y aura un procès et une date sera arrêtée. Si les preuves sont rejetées par les juges, le président Gbagbo sera relâché purement et simplement. Même si les charges contre lui sont confirmées, cela n’est pas non plus une fatalité. Cela peut simplement dire que les juges ne se sont pas accordés sur les charges ou voudraient que les charges soient épuisées entièrement devant eux afin de se prononcer. Dans ce cas de figure, les juges ayant tous les éléments à leur portée ou connaissance, peuvent soit condamner ou acquitter le prévenu. Ce fut le cas du leader rebelle Congolais Mathieu Ngudjolo Chui de la RDC, acquitté pour faute de preuves suffisantes, le 18 décembre 2012. Comme vous le constatez, la CPI n’est pas une fatalité ou un mouroir. Elle fonctionne comme toutes les autres juridictions nationales.
Les preuves contre le président Gbagbo sont faibles, nulles et font l’objet d’irrégularités et entorses à notre constitution. Ces preuves- là seront démontées et balayées du revers de la main comme j’ai tenté de le faire plus haut. J’ai foi en ce que Me Altit, en expert des procédures juridiques de la CPI et ne souffrant pas de connaissance du dossier ivoirien, pourra rejeter tous ces tissus de mensonges appelés charges contre le président Gbagbo. Si les preuves sont et demeurent les mêmes, alors il n’ya pas lieu de s’inquiéter pour notre champion. Aussi depuis la capture du président Gbagbo le 11 avril 2011, sa détention à la Haye et son procès ont été tellement médiatisés que les juges ne peuvent plus jouer les politiques. Si c’est le cas, ils se ridiculiseront et confirmeront le complot politico-juridique dans cette affaire. Leur crédibilité déjà sujette de débats dans certains milieux diplomatiques, ouvrira grande la porte pour sa mort naturelle.
L’UA a pris la décision de créer dès l’année dernière sa propre cour à elle, afin d’éviter toutes formes d’humiliation aux dirigeants africains coupables de crimes contre l’humanité. L’Afrique veut se doter d’une juridiction propre à elle, afin de préserver la dignité de ses fils et filles. Toutes les activités de la CPI sont concentrées exclusivement sur l’Afrique, ce qui donne un caractère sélectif à cette juridiction. Le financement de cette institution internationale provient en grande partie des grandes puissances de ce monde. Aussi ce sont ces mêmes puissances qui financent les rebellions sur notre continent, instrumentalisent la CPI, jouent les gendarmes et donneurs de leçons. Partant de cet argument, l’on peut déduire que la CPI n’est pas indépendante, objective et équitable. Il s’impose dès lors aux africains de se soustraire du Statut de Rome et de créer leur propre organe. Avec l’arrivée de la présidente de l’UA, le Docteur Nkosazana Dlamini Zuma de l’Afrique du Sud, Cette institution juridique sera une réalité dans peu de temps. Les africains se sont réveillés et ont compris le jeu trouble des occidentaux. L’UA se donne les moyens de se prendre en charge donc d’explorer voies et moyens aboutissant à l’indépendance économique, financière, politique et même culturelle de l’Afrique. Cette action de l’UA est à saluer et à encourager. Cela démontre que les africains ne veulent plus être à la merci des occidentaux.
Comme vous le constatez, la CPI est prise en otage par ses propres créateurs. Sa crédibilité souffre aux mains de ces puissances et cette jeune cour créée il y a dix ans perd de sa notoriété et réputation. L’idée initiale de créer cette cour était louable et noble mais dans la pratique la CPI est vue comme l’arme juridique pour intimider certains dirigeants africains. C’est en cela qu’elle n’est plus crédible, indépendante, impartiale et équitable. Cependant, il ne faut pas désespérer pour le cas du président Gbagbo. Comme je l’ai dit plus haut, la CPI n’est pas une fatalité.
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(1)Le procès du président Gbagbo pouvait se tenir sur sa terre natale, selon les textes de la CPI. Le choix de son transfert était en partie dû à Ouattara qui voyait l’ombre du président Gbagbo plané sur le pays, l’empêchant de gouverner tranquillement. Il fallait donc éloigner son rival et l’astuce trouvée était que le président Gbagbo passait pour le véritable problème et obstacle à la réconciliation.
(2) Certains pays ont catégoriquement refusé de ratifier le Statut de Rome pour diverses raisons. La raison générale est qu’ils préfèrent juger leurs propres citoyens et de ce fait ont soit voté des nouvelles lois ou amendé leur constitution pour se donner les moyens de le faire. Cela veut aussi dire qu’ils n’ont aucune confiance en cette cour. Si ces états refusent de ratifier le Statut de Rome, cela peut à la longue conduire d’autres états à se retirer, entrainant sa mort subite. Son financement pose aussi problème. La CPI est essentiellement financée par l’ONU. Certains de ses membres financent des rebellions en Afrique, jouent les gendarmes et procureurs auprès de la cour. La CPI est instrumentalisée pour mater et punir les dirigeants africains qui refusent toute ingérence des occidentaux dans leurs affaires. C’est ce qui fâche beaucoup d’états africains à opter pour une cour véritablement indépendante : Une juridiction africaine.
(3) Il n’a jamais été question de l’incompétence des juridictions nationales dans le cas de la Côte D’Ivoire. Le président Gbagbo a passé 9 mois dans les goulags de Ouattara, ce qui est suffisant pour mettre sur pied une cour spéciale pour le juger. Il y avait aussi la volonté des autorités à se faire justice.
(4) Les enquêtes et preuves ont été fournies par le gouvernement de Ouattara afin de constituer le cahier de charges contre Gbagbo. Le bureau du procureur Ocampo n’a fait que transcrire ces allégations sans même les vérifier sur le terrain.
Une contribution par Nick De Bessou
Juriste
Ex Vice-Président du Cojep-UK