Torture à l’échelle industrielle : Deux témoignages mettent en cause Chérif Ousmane et Koné Zakaria
Le 20 novembre 2012 par Le Nouveau Courrier - Plus les autorités ivoiriennes, les ministres Gnénéma Coulibaly et Paul Koffi Koffi notamment, s’évertuent à nier l’existence de la torture sur des civils dans les camps militaires, plus les victimes, sous leur vraie
Le 20 novembre 2012 par Le Nouveau Courrier - Plus les autorités ivoiriennes, les ministres Gnénéma Coulibaly et Paul Koffi Koffi notamment, s’évertuent à nier l’existence de la torture sur des civils dans les camps militaires, plus les victimes, sous leur vraie
identité, témoignent, preuves à l’appui, des pires sévices qu’elles ont subi des tortionnaires du régime Ouattara. Le Nouveau Courrier a enquêté sur de nouveaux cas. Deux victimes ont accepté de rendre témoignage, malgré les risques. Comme la plupart de leurs codétenus dont Le Nouveau Courrier a rapporté les récits traumatisants dans ses parutions antérieures, ces deux victimes de la furia des Forces républicaine de Côte d’Ivoire (FRCI) ont été enlevées à la suite d’un contrôle de routine, après les différentes attaques des camps militaires. Pour délit de faciès ou pour délit de coloration politique. Zéan Gnandé Appolinaire, maçon, né le 10 juillet 1982, originaire de Toulepleu
«Ils m’ont envoyé dans une forêt où ils ont tenté de m’égorger…»
J’ai été arrêté le 20 octobre dernier à Cocody-Angré par les éléments de Chérif Ousmane. J’ai été pris aux environs de 18 heures. Ils ont d’abord bandé mes yeux avant de m’assommer d’une brique sur la tête. S’étant érigés en véritable bourreau, ils ont ensuite pris une barre de fer pour me porter d’intenses coups sur mes genoux et mes tibias. La crosse des kalachnikovs n’a pas épargné ma colonne vertébrale. Après cela, ils m’ont embarqué dans leur pick-up pour me conduire dans une forêt où ils ont essayé de m’égorger. C’est à ce moment-là qu’ils reçoivent un coup de fil leur demandant de nous conduire, mes compagnons d’infortune et moi, à la base maritime de Locodjro. Nous pensions que notre calvaire allait prendre fin une fois sur palace. Hélas ! Une fois en ce lieu, mes bras ont été rudement attachés dans mon dos et mes pieds ligotés. Passée cette étape, les éléments de Chérif Ousmane me suspendent à un arbre à la renverse et me laissent tomber sur ma tête. Aux environs de 22 heures, ils décident de passer à une autre étape de la torture. La charge d’un fil électrique branché est directement mise en contact avec mon dos. On me fait asseoir de telle sorte que mes fesses ne touchent pas le sol pendant toute la nuit jusqu’à 17 heures. Le samedi 20 octobre 2012, nous avons été conduits à la Direction de la surveillance du territoire (Dst). 48 heures après notre séjour dans cet univers où nous avons trouvé de nombreuses personnes en peine, nous sommes conduits au camp «Génie» chez Koné Zakaria à Adjamé. Nous avons encore été repris pour être transférés à la Dst, ensuite dans une villa à Angré 7ème tranche, pour enfin atterrir à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca). Je voudrais préciser qu’à chaque étape correspond son lot de tortures. Nous étions l’objet de bastonnades, d’injures… Nous étions traités comme des animaux.
Tout le long des séances de torture, il nous était demandé de dire la vérité sur notre participation à l’attaque du camp d’Akouédo. Lorsque nous leur disions que nous sommes étrangers à cette attaque, c’est comme si nous ravivions la haine en eux et du coup, ils durcissaient leurs méthodes. Pour eux, il fallait que nous reconnaissions les faits d’implication dans l’attaque du camp pour que cessent les pires sévices que nous subissions.
Nioulé Liaysel Arsène, maçon, né le 22 décembre 1977, originaire de Toulepleu «Mon bras droit est mort, il ne fonctionne plus…»
J’ai été arrêté le 20 octobre 2012 à Cocody-Angré au même titre que Zéan Gnandé Apollinaire avec qui j’écume des chantiers de construction pour exercer mon métier de maçon. Les éléments de Chérif Ousmane m’ont fait coucher sur le ventre après avoir ligoté mes pieds et bandé mes yeux. J’ai également reçu des coups de crosse sur la tête parce que, selon eux, je suis le commanditaire de l’attaque d’Akouédo. C’est dans cette furia qu’ils exigent que je dévoile l’identité de toutes les personnes impliquées dans cette attaque. Pourtant, je n’en sais rien. Conduit à la base marine de Locodjro, j’ai été à nouveau ligoté (mes pieds et mes bras) sur deux poteaux de 22 heures jusqu’à 17h le lendemain, c’est-à-dire le dimanche. Ce n’est pas tout. Pendant ce temps, je suis régulièrement électrocuté pour m’amener à faire des aveux qu’ils veulent bien entendre. Au moment où je vous fais ce témoignage, mon bras droit est mort, il ne fonctionne plus. Nous avons été conduits à la Dst où nous avons été auditionnés quelques jours après, nos tortionnaires sont allés nous confier à Koné Zakaria au camp Génie. Avant de nous embarquer pour la Maca, nous avons à nouveau transité par la Dst.
Nouveau Courrier