Relance économique/Jean Kacou Diagou (président du patronat ivoirien): “Les besoins des entreprises se chiffrent en des centaines de milliards”

Publié le mercredi 8 juin 2011 | Le Nouveau Réveil - Interrogé sur Onuci Fm, Jean Kacou Diagou, président du Patronat ivoirien, fait l'état des lieux des entreprises privées et se

prononce sur les 6 milliards débloqués par l'Etat pour soutenir les entreprises privées.

Quelle est la situation des entreprises privées après la crise qu'a traversée la Côte d'Ivoire aujourd'hui ?

Jean Kacou Diagou. De autre presse.

Publié le mercredi 8 juin 2011 | Le Nouveau Réveil - Interrogé sur Onuci Fm, Jean Kacou Diagou, président du Patronat ivoirien, fait l'état des lieux des entreprises privées et se

prononce sur les 6 milliards débloqués par l'Etat pour soutenir les entreprises privées.

Quelle est la situation des entreprises privées après la crise qu'a traversée la Côte d'Ivoire aujourd'hui ?

Les entreprises privées sont dans une situation très difficile qu'au lendemain des évènements d'octobre, novembre 2004. Parce que cette fois-ci, tous les secteurs ont été atteints par les pillages, par les vols, par des destructions. Beaucoup d'employés, de cadres supérieurs d'entreprises ont dû partir à l'extérieur et c'est maintenant qu'ils sont en train de revenir. Il y a eu des morts. C'est une situation catastrophique mais nous avons espoir. Nous allons essayer, avec le ministre, de mettre en place un mécanisme pour ressusciter les entreprises et le milieu économique pour que la pauvreté ne s'agrandisse pas.

Avant qu'on ne parle de renaissance des entreprises, le ministre vous a posé une condition, l'emploi des jeunes et puis pour vous aider, un fonds pour vous soutenir à hauteur de 6 milliards.

C'est un aspect. Tu ne peux pas embaucher si tu n'as pas d'outils de production. Tu ne peux pas embaucher si tu n'as pas mis de l'ordre dans tes finances.

Quand la mémoire de votre ordinateur a disparu, vous ne savez même pas comment faire une déclaration fiscale, vous ne savez même pas parfois l'adresse de vos fournisseurs, de vos clients. Tout cela est à reconstituer.

Ce fonds va venir en appoint. Ce n'est pas ce fonds-là qui va permettre de redémarrer les économies. Les besoins des entreprises, ce n'est pas 10 ou 8 milliards. Ce sont des centaines de milliards.

Certes, mais le gouvernement vous demande d'embaucher. Etes-vous aujourd'hui en mesure de le faire avec la situation que vous venez de traverser ?

Il faut d'abord restructurer, remettre en ordre de bataille les entreprises avant l'embauche. Il va falloir payer déjà ceux qui sont sur place, il faut retrouver ses clients, vendre, avoir des ressources et aller beaucoup plus loin, se développer. On embauche pour se développer. On n'embauche pas pour embaucher.

Les entreprises qui auront donc recours à ce fonds sont des entreprises en croissance et donc qui ont déjà fini la remise en ordre de leur entreprise. Je pense que ce fonds jouera un rôle mais dans une deuxième phase.

Vous avez aussi posé des préoccupations relativement à l'assurance. Qu'est-ce que vous voulez que l'Etat vous aide à faire concrètement ?

Dans un contrat d'assurance, normalement, quel que soit le pays, dans le monde entier, quand on est en état de guerre, les sinistres ne sont pas pris en charge. Mais celui qui définit la période de guerre, c'est l'Etat. C'est pourquoi nous demandons à l'Etat de définir le début de l'état de guerre et la fin de l'état de guerre. De telle sorte que les clients comme les compagnies d'assurance sachent exactement ce qu'il faut faire pendant la durée du contrat de leur client.

Autre doléance, vous avez parlé d'un guichet unique pour soutenir la création des entreprises.

Aujourd'hui, quand vous créez une entreprise, il faut passer d'une administration à une autre. Il y a la justice, il y a les impôts, la banque et ainsi de suite. C'est un parcours du combattant pratiquement pour créer les entreprises. Il vous faut plusieurs semaines, plusieurs mois parfois pour créer une entreprise. Cela décourage et certains préfèrent rester dans le secteur informel parce que c'est trop compliqué. Et ça coûte cher.

Avant même de commencer à travailler, on vous dit de payer une patente. Nous voulons que l'Etat réfléchisse avec nous sur la mise en place de ce que nous appelons le guichet unique.
Nous avons vu déjà dans des pays à certains secteurs en trois heures, l'entreprise est créée et peut démarrer.

Une autre requête que vous avez demandée au ministre de l'Economie et des finances.
Il y a des entreprises qui ne peuvent même pas faire de déclaration parce qu'elles n'ont plus de mémoire. Il n'y a plus d'archives. Les ordinateurs ont été détruits. Ces entreprises font quoi ? Quelles déclarations vont-elles faire ? Demain on va leur faire des pénalités parce qu'elles n'ont pas déclaré à temps. C'est tout cela que nous appelons moratoire fiscal pour éviter que la direction générale des Impôts applique des pénalités de redressement et autres, il faut que des mesures soient prises par le ministre dans tel secteur. Exemple : telle entreprise a eu tel dégât, les conséquences qui l'empêchent de faire telle chose, il n'a même plus de trésorerie, on a emporté son coffre donc il faut l'aider pour que son entreprise ressuscite, puisse redémarrer correctement, payer ses employés et peut-être en se développant, créer de nouveaux emplois.

Le ministre a annoncé l'atteinte du point d'achèvement dans l'initiative Ppte pour juin 2012. Est-ce que c'est long pour vous en tant qu'entreprise parce que cela pourrait emmener à avoir des retombées ou c'est acceptable ?

Pour nous, le plus court est le mieux parce que plus l'Etat a moins de charges pour l'extérieur, plus cet argent sert au développement économique du pays. Donc pour nous plus c'est court, mieux c'est, 2012, c'est déjà trop long. On aurait préféré que cela soit prévu pour décembre 2011.

Propos recueillis par CRA