Réquisition des agences nationales Bceao - Les dessous d`une décision - Gbagbo prépare un coup
Publié le jeudi 27 janvier 2011 | Soir Info - La bataille pour la gestion nationale de la Banque centrale de l'Afrique de l'Ouest (Bceao) a pris une autre tournure, le lundi
dernier 25 janvier. Un décret signé de S.E. Laurent Gbagbo réquisitionne les agences pour... inventaire.
Publié le jeudi 27 janvier 2011 | Soir Info - La bataille pour la gestion nationale de la Banque centrale de l'Afrique de l'Ouest (Bceao) a pris une autre tournure, le lundi
dernier 25 janvier. Un décret signé de S.E. Laurent Gbagbo réquisitionne les agences pour... inventaire.
« La Direction nationale et les Agences de la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest en abrégé Bceao, sur toute l'étendue du territoire de la République de Côte d'Ivoire ainsi que le personnel ivoirien en activité dans ces agences sont requis pour compter du 25 janvier 2011, afin d'assurer les services ordinaires, y compris les opérations avec la Direction générale du Trésor et de la Comptabilité publique (Dgtcp), dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur ». Telle est la teneur du décret n°2011 -29 du 25 janvier 2011 pris le lundi dernier 25 janvier par le président Laurent Gbagbo (élu, selon le Conseil constitutionnel). Selon ce décret, pendant trois mois, la réquisition permettra de faire un inventaire dans toutes les agences sur le territoire ivoirien. Cela, en présence de témoins essentiels, notamment le requérant (l'État de Côte d'Ivoire) et un représentant de la Bceao qui auront
chacun une copie de cet inventaire ordonné. Des ministres de premier plan du Gouvernement Aké N'Gbo (Économie et des Finances, Défense et Service civique, Intérieur) sont tenus, chacun en ce qui le concerne, d'exécuter la décision présidentielle. Le fait que les ministres de la Défense et de l'Intérieur soient associés à l'exécution du décret portant réquisition de la Direction nationale ainsi que des agences nationales de la Bceao n'est pas anodin. En effet, si le premier responsable des finances publiques doit co-exécuter une décision présidentielle avec la première autorité de la politique militaire du pays ainsi que le patron de l’administration ivoirienne, du maintien et de la cohésion des institutions du pays, il y a forcément un problème de souveraineté qui se pose. Cela signifie que l'inventaire exigé des agences nationales Bceao est lié à une décision à venir mettant en jeu la souveraineté de l'État de Côte
d'Ivoire. Quand on sait ce que c'est qu'un inventaire (liste exhaustive d'entités considérées comme un patrimoine matériel ou une somme de biens afin d'en faciliter l'évaluation ou la gestion) et dans quel cadre il est généralement effectué (moments particuliers : début de bail / état des lieux; fin de vie / inventaire après décès ; saisie immobilière, etc.), il est évident que l'inventaire de la Bceao soulève des interrogations pertinentes. Quel est l'objectif de l'inventaire exigé par Laurent Gbagbo? Que se passera-t-il après cette opération? A moins d'être une menace ou un bluff du camp Gbagbo, l'inventaire des agences nationales vise, sans aucun doute, une gestion singulière du patrimoine Bceao en Côte d'Ivoire. Cela pourrait se faire d'une part par une gestion du Gouvernement Aké N'Gbo de ce patrimoine en ignorant simplement les signatures Alassane Ouattara (président élu, selon la Commission électorale indépendante) à
la Bceao ou d'autre part par une nationalisation des biens Bceao en Côte d'Ivoire. Pour le premier cas, cela suppose que contrairement à ce qui est exigé par le camp Ouattara quant à la fermeture des agences nationales, les agences Bceao fonctionneront sous haute surveillance (policiers, gendarmes, militaires, et autres.). Et, le Gouverneur intérimaire de la Bceao Jean Baptiste Compaoré qui a remplacé Dacoury-Tabley contraint à la démission le 22 janvier 2011 n'y pourra rien. Parce que le Trésor public continuera à travailler avec la Bceao nationale et poursuivra ses obligations aussi bien en Côte d'Ivoire que dans la sous région. Pour le second cas, cela suppose que l'État souverain de Côte d'Ivoire envisage de battre sa monnaie. Et, n'ayant pas de banque centrale, il réquisitionne les biens Bceao pour la cause. L'importance de l'inventaire des agences Bceao à ce niveau est qu'il établit officiellement les avoirs de la Banque
centrale avant cette transaction monétaire. Ainsi, le nouvel acquéreur (État de Côte d'Ivoire) pourra entrer en possession du patrimoine du cédant (Bceao) après que, de part et d'autre, chacun ait pris connaissance des biens réels. Cette opération a pour but d'éviter plus tard une sous-évaluation ou une surévaluation de la propriété et pour faire valoir ce que de droit aussi bien sur le plan national (banques, établissements financiers, etc.) que sur le plan international. En tout état de cause, quelle que soit l'option, il est certain que Gbagbo prépare un coup. Aussi bien contre Alassane Ouattara, l'Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) que la France dont le trésor public gère le franc Cfa. Et, ils sont nombreux les observateurs qui sont de plus en plus convaincus que la crise post-électorale accouchera d'une monnaie ivoirienne.
Hermance K-N