Mamadou Koulibaly : le sens d'un retour
Je partage avec vous cette analyse du journaliste ivoirien Simplice Allard, relative au retour dans l'arène de Mamadou Koulibaly, président de l'Assemblée nationale et numéro deux de l'Etat ivoirien. Une analyse que j'ai aimé lire (Théophile Kouamouo)
Je partage avec vous cette analyse du journaliste ivoirien Simplice Allard, relative au retour dans l'arène de Mamadou Koulibaly, président de l'Assemblée nationale et numéro deux de l'Etat ivoirien. Une analyse que j'ai aimé lire (Théophile Kouamouo)
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Le Pr Koulibaly Mamadou est de retour, mardi 19 avril 2011, de son abri ghanéen. Information capitale, le président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire met fin à son exil en rentrant dans son pays, deux semaines après le coup d’Etat qui a enlevé le Président Laurent Gbagbo et déchu le régime Fpi, cerise sur le gâteau : par un avion spécial affrété par le tombeur, Alassane Dramane Ouattara. Que penser d’un tel acte de la part du président de l’Assemblée nationale, par ailleurs vice-président du Front populaire ivoirien (Fpi) ? Pour ma part, il s’agit d’une démarche très sage et d’une très grande lucidité politique, j'allais dire, une saine appréciation de la réalité du terrain comme le recommandent les stratèges politiques. Au demeurant, le retour de ‘’Koul’’ par un avion spécialement affrété par Ouattara prouve que le président par coup d'Etat, reconnu par la communauté internationale, est coincé et qu’aucune autre issue institutionnelle et légale ne s’offre à lui. Le fait que M. Ouattara n’a pas prêté serment devant le Conseil constitutionnel est, en effet, un gros handicap politique, un boulet qu’il traine au pied dont il en est véritablement conscient. D’où la négociation, car c’en bien une, entre le Fpi représenté (officiellement ou officieusement peu importe) par le Pr Koulibaly et le camp Ouattara qui a besoin de se faire entourer des compagnons – dont l’autre Professeur Paul Yao N’Dré président du Conseil constitutionnel -, de Laurent Gbagbo pour se faire une couverture légaliste.
On ne sort pas d’une guerre comme on sortirait d’un dîner gala, disait Laurent Gbagbo. Ouattara sait combien de plumes il a perdues dans son ambition présidentielle : les entreprises privées comme publiques sont pillées systématiquement ou rançonnées comme c’est le cas à San Pedro où les soldats pro-Ouattara exigent la somme de huit millions (8.000.000 Fcfa) à chaque société industrielle ; des crimes sont perpétrés par les mêmes soldats à sa solde, il y a destructions de biens publics et privés, pillages des domiciles privés partout dans le pays, les Forces républicaines de Côte d’Ivoire pro-Ouattara sèment mort et désolations dans presque tous les foyers ivoiriens. La ville de Duékoué à l’ouest de la Côte d’Ivoire avec plus de huit cent (800) morts en trois jours, en est le symbole le plus illustratif. C’est un Alassane D. Ouattara qui convoite le pouvoir ivoirien depuis des lustres et qui y est presque, mais dont l’ambition pourrait être contrariée par ses actes qui ne sont pas dignes de l’image d’aristocrate doublé de grand banquier reconnu comme tel dans la haute finance internationale qu’il donne de lui-même.
Il faut savoir qu'une République, pour son fonctionnement dans la stabilité doit être à l’image d’un carré. Dont les différents pieds institutionnels son t: la présidence de la République, l'Assemblée nationale, la défense et les médias d'Etat. Or, c’est de notoriété publique, pour le moment et deux semaines après le coup d’Etat militaire qui a enlevé Laurent Gbagbo, il n'y a toujours pas de présidence. Tout le monde le sait, Ouattara n'a pas encore prêté serment. Pour la défense, inutile de dire qu'il n'y a non plus pas d'armée nationale en tant qu’institution. Chaque parcelle du pays est « sécurisée » par une floraison de milices armées, les combattants de l’armée nationale : les Forces de défense et de sécurité de Côte d’Ivoire (Fds-Ci) se sont évanouies dans la nature sans prêter une oreille attentive à l’appel de la hiérarchie qu’ils soupçonnent d’être soucieuse de son avenir et de sa sécurité. La situation n’est pas non plus reluisante pour les médias, deux semaines après le coup d'Etat de Ouattara, l'Etat de Côte d'Ivoire ne dispose pas d'institutions médiatiques officielles pour porter sa parole. La radio diffusion télévision ivoirienne (Rti) et Fraternité Matin ont cessé toutes activités. Il reste l'Assemblée nationale, l’autre socle du carré d'as institutionnel. Et c’est une des principales raisons de la « magnanimité » d’Alassane Dramane Ouattara qui a mis à la disposition du président de l’Assemblée nationale un avion spécial qui l’a ramené du Ghana avec toutes les garanties sécuritaires que cela suppose.
Je dirais que le retour du Pr Koulibaly ouvre de nouvelles perspectives et donne un semblant de vie à la Côte d'Ivoire. Car, à sa sortie d’audience, mercredi 20 avril 2011, avec Ouattara, Koulibaly annonce la réouverture des travaux avec une prise de contact avec les députés responsables des groupes parlementaires le même jour, et éventuellement une adresse les jours prochains devant ceux-ci d’Alassane Ouattara. Sans oublier l’autre pan, celui de la garantie sécuritaire des députés, obtenue par le président Koulibaly de la part de l’homme fort du moment, Ouattara, et qui permet à la Côte d'Ivoire de revivre. L’acte du président Koulibaly Mamadou est très important en ce sens qu’il permet une détente dans le marigot politique ivoirien. Détente profitable à tous sans oublier au Fpi son parti politique qui pourra se donner des coudées franches et sortir de l'étreinte des Forces républicaines l’armée de Ouattara qui s’illustrent avec leur lot de pillages et d’exécutions physiques à relents d’épurations ethniques dont les Bété ethnie du Président Gbagbo sont les principales cibles. On pourrait espérer que ces tueries cesseront comme le promet Ouattara.
Koulibaly Mamadou desserre également l'étau et permet à son parti le Front populaire ivoirien (Fpi) de sortir la tête de l’eau, d’affiner et de dégager une stratégie pour reconquérir le pouvoir d’Etat perdu, non pas par élection mais par la force des armes. Le Fpi en a les ressources humaines et les instruments. C’est donc un geste que les cadres du Fpi doivent applaudir des deux mains, celui posé par le président de l’Assemblée nationale que le hasard a voulu qu’il soit du même bord politique que le président Laurent Gbagbo. Je puis dire que le Pr Koulibaly sauve des meubles, à commencer par ceux de la République dont il pourrait – en toute éventuellement en assumer l’intérim -, et partant, ceux de sa famille politique.
Simplice ALLARD
al08062317@yahoo.fr