Lettre à Alassane Ouattara: « OUI, JE VOUS DEMANDE PARDON MONSIEUR ADO pour la Côte d’Ivoire », par Mo-Sanby

Le 25 avril 2011 par IvoireBusiness - C’est pâques et après avoir tourné en rond autour de l’homme de neuf ans avec qui je vis depuis le même nombre d’années, il me fallait aller me recueillir ailleurs

que chez moi. En tant que femme, les déceptions remplissaient mon cœur et chaque jour je me demandais s’il allait éclater dans la seconde suivante ou l’autre. En tant que être humain, les images du pays de plus en plus réclamaient une certaine vengeance de moi. Comment est-ce possible que Duekoué ait brulé a ce point ? Ai-je perdu mon âme ? Qui a pu commettre cela ? Est-ce possible de dépasser cela un jour ? Et puis c’est la pâques…

Mon mari est définitivement parti mais j’ai décidé de porter les talons de 12 cm qu’il aimait, parce que je reprenais confiance en moi et pour la Cote d’Ivoire et pour le jeune homme de neuf ans qui désormais dormait dans mon lit. Je voulais plus mais il était galant et je trouvais cela charmant, même à cet âge. Comment vais-je retrouver le sourire après le torrent de sang sorti de mes yeux depuis deux semaines. J’ai vu les photos de LG, départ pour Korhogo en hélico sans Simone. Il parait qu’elle est à Odienné. Les autres photos dont celles de Kuyo Narcisse, ancien footballeur devenu collaborateur de Gbagbo en petit caleçon, attendant son tour pour la bastonnade quotidienne n’étaient pas plus encourageantes. L’on parle d’une prison au Golf hôtel d’Abidjan et d’un camp de concentration à Katiola. Wow ! Hitler est ressuscité !

Ma famille n’était pas plus à l’abri. Un chef du village qui avait déserté avec deux de ses frères égorgés à sa place, une grande sœur fonctionnaire qui me disait qu’elle vivait maintenant dans un village parce que les rebelles avaient pris possession de sa maison pour en faire un QG, un grand frère dont l’épouse a failli se faire égorger pour soupçon d’avoir un coffre-fort à la maison. Des cousins et neveux si traqués qu’ils préféraient se terrer au lieu d’émerger pour affronter l’ennemi. Mes nièces, elles, elles étaient au Ghana dans un campement remplis d’hommes, je parie encore virils. Elles n’ont pas un seul sou donc on devine de quelle monnaie elles paieront de ce foutou banane sauce claire qu’elles mangeront tous les soirs. Je ne connais pas d’homme qui ait bon cœur à part LG qui montait dans l’hélico avec ses assaillants un petit sourire au coin des lèvres qui en disait long… L’historien, SEM notre Chef d’Etat en compagnie de bandits armés. Ok !

Je suis levée tôt chaque jour alors j’ai envoyé mes vœux de Pâques assez tôt aussi. Je suis Américaine et chez nous, on peut tout manquer sauf le culte de pâques mais en même temps Dieu ne venait-il pas de briser un lien avec moi…mon mari me manquait, j’étais obligée de changer mes talons pour du 8 cm, mon pays d’origine était en feu et aux dernières nouvelles, les combats se passaient dans le quartier où j’avais grandi et ma mère n’était plus elle-même. Je n’avais pas encore décidé de l’église quand la Prophétesse Jeanne m’appela. Il faut que tu viennes ! Oui, j’y serai dis-je en souriant. Que voulait-elle me prouver ? Qu’après toutes ces années de gauloises, elle était subitement clean et avait une église pendant que je me servais encore du bourbon au petit déjeuner et je portais une canne pour ne pas tomber de mes talons que je n’abandonnais pas?

Dieu, merveilleux Dieu, malgré mes espoirs vains, je fus au rendez-vous. Oui, essuyez vos larmes femmes. J’entrai morte dans ce tabernacle et j’en ressortis vivante. Noirs, blancs, femmes, hommes, enfants tous attendaient la prophétesse et quand je l’approchais, mes yeux se remplissaient de larmes. Nous n’avions plus 20 ans et elle avait cet éclat que seul le tout puissant peut te donner. Je baissai la tête, je m’inclinai et je m’entendis dire avec respect et humilité ‘’Pasteur Jeanne’’…
Marcelline, Geneviève et d’autres femmes me reconnurent dans la salle mais j’avais vu Zolie et elle ne me reconnut pas tout de suite. Son jolie corps était maintenant tordu par la maladie et elle pouvait à peine dire les mots alors elle les écrivait. Elle portait une canne, non pas pour les mêmes raisons esthétiques que moi mais par nécessité. Elle avait eu la paralysie et se soignait à cette église de l’espoir. Chez la Prophétesse Jeanne qui a aussi le don de guérison. Je serrai Zolie très fort dans mes bras et je lui murmurai à l’oreille que c’était moi. Zahouri. La fille aux jambes galbées. Que je ne portais plus mon nom depuis le 11 Avril 2011. Que Tagro était mort une balle tirée dans sa bouche malgré le drapeau Ivoirien en main et que l’on l’avait laissé agoniser au sous sol de leur hôtel avant de l’emmener à l’hôpital pour annoncer sa mort. Que si elle Zolie était vivante je rendais gloire à Dieu parce que j’avais appris sa mort. Je ne savais plus pourquoi je pleurais mais quand le temps vint de démontrer notre amour du prochain, je courus vers ce frère dans la chaise roulante et je lui dis que je l’aimais. Qu’il était beau et je le pensais et je l’embrassai tres fort sur la joue. C’était René un martiniquais.

Je vous pardonne monsieur Sarkozy, vous et vos semblables. Je vous pardonne vous monsieur le nouveau Président de Côte d’Ivoire mais dites-moi, pouvons-nous gouverner un pays ensanglanté juste parce que l’on est spécialiste en économie et que l’on a de bonnes relations avec ceux-là même par le biais de qui les enfants de Côte d’Ivoire sont en train de mourir ? Vous voyez, l’on peut tout pardonner. Je vous souhaite monsieur de faire un bon mandat mais surtout de faire attention à vous car ces voyous que vous avez fait sortir des prisons se retourneront contre vous. Vous savez, ce n’est pas de votre faute. J’accuse même LG et ce rire qu’il affichait comme si de rien n’était, faisant confiance à tous. Oui, je vous demande pardon monsieur le Nouveau Chef d’Etat de Côte d’Ivoire, de libérer LAURENT GBAGBO et de le laisser vieillir ensemble avec SIMONE dans leur village. Je vous demande pardon. Vous avez déjà gagné. Dites à la jeunesse d’arrêter de s’entretuer. Faites entrer les prisonniers, les vrais en prisons et libérer ceux que vous avez pris en otages. Nos hommes, car Tagro est mort et il n’y a personne pour payer de ce crime. Je vous demande pardon parce que la CÔTE D’IVOIRE vous a sous-estimé, vous un homme, un frère aussi intelligent. Je vous demande pardon pour les miens et à cause des miens. Je vous demande pardon monsieur Alassane Ouattara Nouveau Président de CÔTE D’IVOIRE. Pardon, que l’on arrête ! Que l’on cesse le feu. Je suis convaincue que vous ferez un travail formidable et je vous le souhaite d’ailleurs mais faites libérer la Côte d’Ivoire de ces petits bandits que vous appelez vos partisans et le pays tout doucement commencera à panser ces blessures inoubliables affligées au nom du pouvoir mais que nous vous pardonnons. Prenez contrôle, ressaisissez-vous, la guerre doit s’arrêter maintenant. Cessez le feu. C’est mieux ! Vous êtes un enfant de Dieu et je vous aime en son nom mais je vous en prie, faites ce qui est juste et non ce qui vous est imposé. Amen !

MO-SANBY
Femme Fantôme