Les graves révélations de Blé Goudé: «Le Président Laurent Gbagbo n’est pas en prison, mais en mission»

Le 21 juillet 2012 par Le Temps - Charles Blé Goudé, leader des jeunes patriotes, vit comme beaucoup d’Ivoiriens, en exil depuis l’arrestation du Président Laurent Gbagbo. De son refuge, il a décidé de s’exprimer sur la situation de la Côte

d’Ivoire. Dans cet entretien, il ne fait aucun cadeau aux nouveaux tenants du pouvoir. Par ailleurs, il rassure les Ivoiriens quant à l’avenir du Président Laurent Gbagbo.
Interview :

Guillaume Soro soutient ne pas être visé par la Cour pénale internationale. Qu’en dites-vous ?

Charles Blé Goudé.

Le 21 juillet 2012 par Le Temps - Charles Blé Goudé, leader des jeunes patriotes, vit comme beaucoup d’Ivoiriens, en exil depuis l’arrestation du Président Laurent Gbagbo. De son refuge, il a décidé de s’exprimer sur la situation de la Côte

d’Ivoire. Dans cet entretien, il ne fait aucun cadeau aux nouveaux tenants du pouvoir. Par ailleurs, il rassure les Ivoiriens quant à l’avenir du Président Laurent Gbagbo.
Interview :

Guillaume Soro soutient ne pas être visé par la Cour pénale internationale. Qu’en dites-vous ?

Je n’en sais rien. En tout cas pas plus que lui, sur cette question.

Il cite les personnes, dont vous, qui seront poursuivies par la Cpi.

Guillaume Soro est-il devenu le tout nouveau porte-parole de la Cpi ? Que voulait-il prouver par une telle déclaration, qui, à n’en point douter, met la crédibilité de la Cpi à rude épreuve ? Le plus important pour moi, c’est que la Cpi vient de rendre public un communiqué qui affirme le contraire des déclarations de la deuxième personnalité de notre pays. je m’en tiens à cela. j’invite par conséquent les observateurs de la vie politique en Côte d’ivoire et la Cpi elle même, à comprendre que les affirmations de Guillaume Soro au sujet des mandats d’arrêt qui viennent d’être démenties ne sont pas moins mensongères que les accusations que ces mêmes autorités répandent contre nous à travers le monde entier.

En quoi manipule-t-il cette cour ?

Je n’en sais rien. Après qu’il ait publié un courrier de félicitations à lui adressé par l’ex-procureur , Ocampo, et fait des révélations sur des prétendus mandats d’arrêt lancés par la Cpi contre des personnalités pro Gbagbo , Soro, manipule-t-il la Cpi, ou tente til, à dessein, de manipuler l’opinion? L’avenir nous situera.
N’y a-t-il pas une contradiction entre lui et Ouattara qui dit que la Cpi est impartiale et que son régime ne peut pas la manipuler ?
je ne crois pas. Soro dit certainement en public ce que Ouattara lui confie en privé. Et cela met, peut être, mal à l’aise l’actuel locataire du palais d’Abidjan. Sinon, le Premier ministre d’alors de Ouattara ne peut pas finir d’affirmer que “l’absence d’humilité du Président Laurent Gbagbo et son refus de saisir la main tendue de Ouattara l’ont conduit à la Cpi”, pour venir ensuite affirmer que le pouvoir de Ouattara ne donne pas de directive à la Cpi. un peu de respect pour notre intelligence et pour l’opinion. On a tout compris.

Comment voyez-vous le procès du Président Laurent Gbagbo le 13 août ?

Que voulez-vous dire?

Pensez-vous qu’il va s’en sortir ?

Le Président Laurent Gbagbo s’en est déjà sorti. Ceux qui considèrent le Président Laurent Gbagbo comme un prisonnier ne le connaissent pas assez et se méprennent sur son compte. Pour lui, la liberté d’un combattant ne se trouve ni dans la prison, ni en dehors, mais dans son esprit et sa philosophie. Il ne considère pas la Cpi comme une prison. La Cpi est, pour lui, une tribune pour qu’éclate la vérité qui permettra au monde entier de savoir le véritable vainqueur des élections en Côte d’ivoire. Contrairement à ses adversaires, le Président Laurent Gbagbo n’est pas dans une logique de prise de pouvoir, il est dans une logique de vision politique et de quête de vérité. il a déjà fait la prison pour le multipartisme et la démocratie dans notre pays. Beaucoup de partis politiques lui doivent leur création et leur existence, y compris le Rdr. Le Président Laurent Gbagbo n’est pas en prison, il est en mission. dans notre pays, ceux qui se croient libres sont enchaînés et sont en réalité les vrais prisonniers, car même s’ils sont libres de leurs mouvements physiques, ils sont enfermés dans leur esprit et dans leurs mouvements intellectuels. Contrairement à eux, le Président Laurent Gbagbo est entre quatre murs, mais il est libre dans son esprit.

Et pourtant Charles Taylor a été condamné ?

Est-il encore besoin de vous dire que Laurent Gbagbo n’est pas Charles Taylor. Ce sont deux personnalités différentes dont la conception et la philosophie de la politique sont diamétralement opposées. ils sont certainement voisins à la Cpi, mais ils sont l’un très loin de l’autre, dans leur parcours, leur combat, leurs méthodes et moyens de lutte.
Un commentaire sur la fameuse charge du procureur de la Cour pénale internationale contre le Président Laurent Gbagbo…
Parmi les nombreuses charges, une a retenu mon attention. il s’agit du slogan de campagne “Y a rien en face, c’est maïs!”. Ocampo poursuit le Président Laurent Gbagbo pour ce slogan. Et des menaces planent sur moi pour avoir conçu ce slogan. On a vraiment dépassé les limites du ridicule. Pour Ocampo, ce slogan signifierait qu’il faut tuer tous les opposants du Président Laurent Gbagbo. Vous voyez donc que ceux à qui on confie le jugement de ce qui nous oppose méconnaissent les dossiers. Si les slogans de campagne devaient conduire en prison, la plupart de tous ceux qui ont participé à la récente présidentielle en France seraient les voisins du Président Laurent Gbagbo. dans toutes les compétitions politiques ou sportives, on cherche toujours à montrer que l’adversaire est faible. C’est ce que voulait dire ce slogan. Franchement.

D’aucuns soutiennent que c’est une coquille vide…

Cela dépend de l’angle de regard. Pour moi la coquille n’est pas du tout vide. La coquille du dossier contre le Président Laurent Gbagbo est pleine de mensonges et de manipulations qui puent le règlement de comptes politiques.

Certaines personnes pensent que ce procès est politique ?

Plus qu’un procès politique, le procès contre le Président Laurent Gbagbo est un règlement de comptes politiques auquel ses adversaires tentent de donner une forme judiciaire. La Cpi sert malheureusement de cadre à cette mise en scène et se discrédite en se faisant complice d’une telle manoeuvre qui n’honore point la justice internationale. C’est dommage!

Quels conseils pouvez-vous donner à Fatou Bensouda qui vient de remplacer Ocampo ?

En bon Africain, je lui souhaite d’abord «la bienvenue». je la considère comme une fierté pour l’Afrique, car ce n’est pas toujours qu’un Africain ou une Africaine occupe une fonction aussi éminente. je souhaite qu’elle redonne à la Cpi sa crédibilité de justice impartiale. Son passage à ce poste pourra certainement donner tort à ceux qui pensent à raison que la Cpi est une justice pour ceux qui sont au pouvoir. Le dossier ivoirien dont elle vient d’hériter est truffé, je le répète de beaucoup de manipulation et de mensonges. Les vrais criminels sont encore en liberté et bénéficient de promotion tant au niveau civil que militaire en Côte d’ivoire. Si elle est juste et impartiale, Fatou Bensouda, de qui j’ai entendu dire beaucoup de bien, pourra éviter de se noyer dans le marigot ivoirien.

Comment expliquez-vous la forte mobilisation autour du Président Laurent Gbagbo ?

Vous savez, quand la cause que vous défendez est noble, ni l’espace, ni le temps ne peuvent affaiblir la mobilisation autour de cette cause. C’est pourquoi les Sud africains sont restés debout pendant les 27 années que Mandela a passées en prison. Mandela est entré en prison, accusé d’être un poseur de bombes et un homme violent. Mais il en est sorti en héros international. Pour beaucoup d’Africains, le Président Laurent Gbagbo est une icône et son combat a dépassé les frontières ivoiriennes. Ses adversaires ont «la montre», le Président Laurent Gbagbo lui, à «le temps».

Que pensez-vous du refus de la Cpi d’accorder la liberté provisoire au Président Laurent Gbagbo ?

Nous savons que son procès a lieu le 13 août prochain. Nous attendons de nous prononcer après ce procès. Souffrez donc que nous n’en fassions pas un commentaire.

Croyez-vous en la réconciliation ?

il ne s’agit pas d’y croire, il faut y travailler par notre comportement et des actes concrets. La réconciliation doit se faire sur la base du respect des règles de la démocratie et sur l’acceptation des uns par les autres. En la matière, la responsabilité du pouvoir est grande. C’est pourquoi j’invite le pouvoir à poser des actes qui favorisent la réconciliation, en cessant la traque contre les pro Gbagbo, les enlèvements et arrestations arbitraires, les licenciements à relent de règlement de compte sur fond tribal, l’expropriation des pauvres paysans, le maintien, des cadres de l’opposition en prison et en exil, les exactions contre les opposants et les partisans de Gbagbo.
Tout cela ne participe pas à décrisper l’atmosphère politique dans notre pays. Le jour où le pouvoir acceptera de gouverner et non de régner, la réconciliation sera en marche. Plus qu’un simple slogan, la réconciliation doit être la conséquence des actes posés par les uns et les autres, surtout le gouvernement. j’ai malheureusement l’impression que le pouvoir a fait le choix de régner dans la terreur en bafouant et humiliant ses adversaires.

Allez-vous rencontrer Charles Konan Banny en Afrique…

Effectivement, j’ai souhaité rencontrer le président de la Cdvr pour qu’on parle de notre pays. Le régime lui a confié la lourde tâche de réconcilier les ivoiriens. C’est pourquoi cette rencontre me semble importante. Ma main reste toujours tendue pour la réconciliation, on ne se réconcilie pas seul. C’est pourquoi il faut écouter tout le monde. La vengeance et les règlements de comptes ne font qu’aggraver la situation.

Certains journaux soutiennent que vous forcez la main…

Ceux qui pensent ainsi n’ont pas encore pris la mesure du drame et le cauchemar que vivent les ivoiriens. ils sont encore attachés à leur petit orgueil. Mon insistance se justifie par le fait que je pense, qu’il est encore temps de sauver la Côte d’ivoire. L’atmosphère est trop lourde et j’ai peur pour mon pays.
D’aucuns disent qu’il serait disposé à vous rencontrer. On dit même que les préparatifs de cette rencontre vont bon train…
L’avenir nous situera. En tout cas, moi je suis prêt avec tous les autres leaders et personnalités qui partagent ma démarche.

Comment vivez-vous votre exil ?

Le fait qu’il y ait des ivoiriens qui comptent sur moi et pour qui je compte, constitue une raison suffisante pour que je tienne le coup. Pendant cette parenthèse de ma vie, je mets en avant la foi en dieu, la dignité, la constance, la fidélité à mes objectifs et la formation.
Il semble que beaucoup vous ont abandonné et que c’est la disette…
Même si c’est la disette comme vous dites, j’ai décidé de vivre dignement cet exil sans vendre mon âme. Tout est aussi valeur morale. Le reste fait partie de la vie de tout leader. il y en a qui entrent dans notre vie pour une raison, d’autres y entrent pour une saison, et la dernière catégorie y entre pour une conviction. je considère en ce moment que notre voiture est tombée en panne. Certains sont descendus pour faire de l’auto stop. Moi j’ai le devoir de réparer la voiture et continuer le chemin. En pareille période, le leader a le devoir de faire l’évaluation de la situation, à partir d’un bilan objectif, puis de servir de stimulateur à son équipe. Cela peut prendre du temps. Pour l’instant je laisse ceux dont vous parlez se rendre compte des limites de leur nouvelle option. Car quand vous donnez un verre d’eau à quelqu’un qui n’a pas soif, il n’en voit pas la valeur.

A quand votre retour au pays?

Mon retour n’est pour le moment pas à l’ordre du jour. Cela n’a rien à voir avec ma rencontre avec Banny comme le prétendent les mauvaises langues.

Quelles sont vos conditions pour revenir ?

il n’y a pas un cas isolé à régler.

Entre nous, la Côte d’Ivoire vous manque souvent non ?

Quelle question ! Mon âme est liée à la Côte d’ivoire, vous savez très bien. Mais il est des situations que les circonstances de la vie vous imposent souvent. Et que vous devez affronter et assumer avec responsabilité et dignité. Toute crise est toujours une occasion de bilan, de métamorphose et de projet. Cette situation que nous vivons fait partie de ce que j’appelle, un désordre organisé

Un mot sur le Ppte ? On se rappelle que le régime actuel avait vilipendé le Président Laurent Gbagbo lorsqu’il mettait en place le mécanisme pour son obtention…

je suis heureux que ceux qui, hier considéraient le Ppte comme une honte pour la Côte d’ivoire, sont ceux là mêmes, qui se réjouissent aujourd’hui. ils donnent raison à nous autres, qui pensons que les hommes passent, le pays demeure. Planter un arbre, et être heureux que d’autres puissent profiter de l’ombre et des fruits de cet arbre, tel est notre credo.

Dans les hommages aux personnalités ayant travaillé sur son obtention, nulle part les autorités n’ont cité le Président Laurent Gbagbo…

Les ivoiriens savent la vérité, c’est l’essentiel.

On assiste à un climat de terreur à Abidjan avec des arrestations des cadres et militants proches du Président Laurent Gbagbo ?

C’est certainement un choix. Mais je dois dire que ce n’est pas un bon choix. De telles pratiques ne font jamais bonnes recettes. Ça finit toujours par se retourner contre le pouvoir. C’est contre productif. il faut savoir lire le temps et la météo politique, sinon on se laisse toujours surprendre par les intempéries.

Comment vivez-vous la traque particulière contre vos collaborateurs du Cojep ?

Le Cojep continue de faire les frais de la crise post électorale. Nous ne sommes impliqués dans aucun projet de déstabilisation, mais chaque jour le pouvoir kidnappe et emprisonne les responsables du Cojep. je demande la libération des prisonniers politiques dont les responsables du Cojep. Tout comme Hitler n’a pas réussi à tuer tous les juifs, on ne réussira jamais à emprisonner tous les pro Gbagbo. j’invite le pouvoir à revoir sa copie.

Quel est votre regard sur le rôle de l’Onu en Côte d’Ivoire?

je salue le communiqué de l’Onuci s’inquiétant de la situation des droits de l’Homme en Cote d’ivoire. Le représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu doit davantage jeter un regard attentif sur la situation sécuritaire dans notre pays. je ne crois pas que l’Onu ait investi autant de moyens humains, matériels et financiers pour aider un régime qui bafoue les droits de l’Homme et ne garantit pas les libertés individuelles et collectives. La contradiction n’a plus droit de cité dans notre pays. Il faut interpeller le pouvoir sur sa responsabilité à créer les conditions d’une Côte d’ivoire unie.

Ouattara peut-il remettre le pays sur les rails ?

On verra

On assiste à des licenciements tous azimuts…

je considère injuste et cruel de licencier des fonctionnaires qui ont servi le pays pendant des années. Et cela sur la base de leur appartenance politique et ethnique. J’espère que tout cela sera un jour un mauvais souvenir et que les différents leaders qui aspirent diriger notre pays finiront par comprendre que la Cote d’ivoire est composée de soixante ethnies qui font sa richesse. Tous les ivoiriens ne vivent pas de la politique. Notre pays regorge de cadres compétents qui ne sont pas politiquement marqués mais qui, hélas, sont victimes.

La politique de rattrapage…

j’ai peur pour mon pays.

Comment jugez-vous l’ an 1 de Ouattara au pouvoir ?

Tant que le crapaud n’est pas tombé dans de l’eau chaude, il ne sait pas qu’il existe deux sortes d’eau. je préfère laisser les ivoiriens en juger.
Il soutient avoir «fait plus que Gbagbo en un an».
En deux ans il dira certainement avoir fait plus que Houphouët. Je constate simplement que, même en prison, Gbagbo demeure au centre de leur action gouvernementale. ils ont décidé d’être esclaves de Gbagbo.

La vie est devenue très chère ?

Peut être moins chère que lorsque Gbagbo était aux affaires. Peut être que c’est une bonne expérience pour nous tous. Seulement il nous faudra en tirer les leçons.

Et la sécurité ?

Selon l’Onu, la situation sécuritaire est très préoccupante. Les libertés individuelles et collectives, les droits de l’Homme, une opposition que l’on musèle ou que l’on cherche à contrôler. Là où ils ont eu droit aux honneurs, ils humilient. Là où ils ont eu droit aux indemnités, ils gèlent les comptes. Ce qui cause la mort de plusieurs cadres de l’opposition. Personne ne peut plus parler. Même le zouglou (ndlr: musique urbaine ivoirienne très populaire en Côte d’ivoire) que l’on connaît pour ses critiques, est muselé. Par peur de représailles, les chanteurs assistent, impuissants, aux violations des droits. C’est le retour de la pensée unique.

Un mot sur le racket

La pratique est maintenant officielle. Peut être que cela fait aussi partie de ce qui a été fait plus que Gbagbo.

François Hollande vient d’être élu. Votre commentaire ?

je salue l’arrivée de la Gauche au pouvoir. L’histoire personnelle de Hollande est une source de motivation. Personne ne vendait sa peau cher, mais il a cru en son rêve et l’a réalisé.

Qu’est-ce que vous attendez de lui ?

Que ce soit à la tête d’une simple direction, d’une région ou d’un pays, tout changement constitue une opportunité. En politique, il est conseillé de plus juger les actes. je souhaite qu’il soit différent de Sarkozy. je crois que ça veut tout dire.

Pourtant il n’a pas été tendre avec le Président Laurent Gbagbo.

Ça peut arriver. Mais d’autres faits peuvent démontrer à l’avenir qu’il avait eu tort. il faut y travailler car toute réalité politique est une denrée périssable.

On a vu des Africains français battre campagne pour Hollande…

Non seulement ils en avaient marre de Sarkozy, mais ils se sont reconnus dans les différents thèmes de campagne de Hollande. En fait, ils se sentaient plus proches de lui. Les Africains Français attendent d’aller aux funérailles de certaines pratiques qui humilient et infantilisent l’Afrique. Hollande est pour eux un espoir. Tout comme Sarkozy était aussi un espoir pour le parti au pouvoir qui a fait campagne pour lui. Cela changera t-il grande chose dans la politique française en Afrique en général et en Côte d’ivoire, en particulier? Est- ce un enthousiasme naïf que les Africains affichent? L’avenir nous le dira.

Quels sont vos rapports avec les autres leaders de la galaxie patriotique ?

je ne suis qu’en exil, je vis une vie de clandestinité. Ce qui rend difficile les rapports avec les camarades qui, il faut le dire, me manquent beaucoup. j’aimerais bien les voir, parler avec eux. Hélas! Mais ça va venir.

Avez-vous leurs nouvelles ?

Quand je peux, je prends des nouvelles. Mais c’est difficile

Qu’est-ce que vous préparez dans votre cachette ?

je cogite, je lis, surtout je prie pour les ivoiriens. Tout ce que notre pays vit en ce moment n’est pas dans leurs habitudes.

Le pouvoir parle de coup d’Etat…

Les coups de force sont aux antipodes de la philosophie qui fonde mon entrée en politique. C’est quand on doute de ses idées et ses objectifs qu’on prend des raccourcis. Je ne ferai jamais partie des déstabilisateurs de mon pays. Chacun de nous est de passage. On commet souvent l’erreur de confondre le pays à nos petites personnes. dans notre pays, tout le monde raisonne au présent. Malheureusement!

Qu’est-ce qui explique la frilosité du régime Ouattara ?

je l’ignore. Vous êtes avec eux en Côte d’ivoire, je vous conseille de leur posez la question.
Un mot sur votre livre ?
je l’ai écrit par devoir.
Comment se comporte-t-il ?
Bien. En ligne comme en librairie, il a été bien accueilli.
Est-il interdit au pays ?
Comme son auteur. Mais il circule bien. Vous savez, l’interdit suscite des envies. une oeuvre littéraire ne meurt jamais, elle résiste au temps. Les ivoiriens l’auront un jour.
Toutes les manifestations de présentation ont été dispersées dans la violence…
Malheureusement! Mais je n’en veux à personne. On ne lance pas de pierres dans un arbre qui ne produit pas de bons fruits.
Un message pour rassurer les Ivoiriens…
Il faut que nous restions nousmêmes. C’est à dire un peuple qui ne laisse pas place à la vengeance et qui cultive le pardon et l’amour. C’est ce qui nous caractérise. C’est ce que nous sommes et c’est ce que nous devons papillons politiques. Acceptons cette traversée de désert avec dignité et honneur. Pour la réconciliation, chacun doit accepter de perdre un peu de ce qu’il a, afin que la Côte d’ivoire gagne. Ceci est aussi valable pour le pouvoir que pour l’opposition. C’est le devoir des survivants à tout conflit. Ce sont les survivants allemands qui ont réconcilié et unifié les deux Allemagnes (Est-Ouest). Et l’Allemagne est aujourd’hui le poumon de l’économie de l’union européenne. Ce sont aussi les survivants aux atrocités de l’apartheid qui ont réconcilié les Noirs et Blancs sud africains. Et l’Afrique du sud compte aujourd’hui dans le concert des nations, au point que ce pays jadis piétiné a eu l’honneur d’organiser la prestigieuse Coupe du monde de football. La Côte d’ivoire peut le réussir. Tout dépend du choix des autorités actuelles du pays. Agir pour plaire à son clan et rester chef d’un clan, ou agir pour bâtir une conscience nationale constructive ? un choix mérite d’être fait. Que dieu bénisse et protège les ivoiriens du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest en passant par le Centre.
Une Sud africaine, Mme Zuma, vient d’être élue à la tête de la commission de l’Ua. Votre commentaire.
Cela faisait plusieurs mois que l’ua était en panne sèche à cause de ce problème qui opposait deux visions différentes. je suis heureux que le vote ait pu départager les deux candidats. C’est tout à l’honneur de l’Afrique. Mais je me réjouis surtout du fait que c’est une militante des droits de l’Homme et une combattante de la liberté qui ait pu l’emporter.
Interview réalisée par :

Yacouba Gbané in Le Temps
yacou06336510@yahoo.fr