La crise ivoirienne aurait pu être réglée plus rapidement si nous avions eu confiance en nos institutions et si ces institutions avaient été plus fortes
Après 4 mois de conflit, de morts inutiles, d’horreurs et de chaos, Laurent Gbagbo a été arrêté. Une nouvelle page est en train de s’écrire en Côte d’Ivoire. Pour le nouveau chef de l’Etat ivoirien,
Alassane Dramane Ouattara, la tâche ne sera pas de tout repos ! Il devra s’atteler à être le président de tous les Ivoiriens et faire comprendre à ses partisans comme à ceux, d’ailleurs, de son adversaire, que rien ne se fera sans les 45,9 % d’électeurs qui n’ont pas voté pour lui. Ses nouveaux maitres mots : Réunir, réconcilier, pardonner … reconstruire !
Après 4 mois de conflit, de morts inutiles, d’horreurs et de chaos, Laurent Gbagbo a été arrêté. Une nouvelle page est en train de s’écrire en Côte d’Ivoire. Pour le nouveau chef de l’Etat ivoirien,
Alassane Dramane Ouattara, la tâche ne sera pas de tout repos ! Il devra s’atteler à être le président de tous les Ivoiriens et faire comprendre à ses partisans comme à ceux, d’ailleurs, de son adversaire, que rien ne se fera sans les 45,9 % d’électeurs qui n’ont pas voté pour lui. Ses nouveaux maitres mots : Réunir, réconcilier, pardonner … reconstruire !
Nous sommes conscients de l’immense chantier à mettre en œuvre et du défi que cela représente pour le nouveau président mais aussi pour l’ensemble de la société ivoirienne ; et nous suivrons avec attention et vigilance les actes qui seront posés pour un retour définitif à la paix et au développement de notre Nation.
Il faut véritablement que nous sortions de la spirale infernale de la haine, du mensonge et de la guerre. Le vent de liberté, de démocratie et de transparence qui touche les pays arabes va et doit forcément atteindre les pays noirs africains, car c’est avec la liberté et la démocratie qu’on se développe.
Les crises et les guerres se traduisent inéluctablement en développement à rebours ; depuis les années 1990, le pays ne cesse de reculer, de s’appauvrir, de se dégrader. Seuls quelques politiques, irresponsables, y ont trouvé leur compte pendant que l’ensemble de la population souffrait. L’avenir des jeunes a été et est toujours compromis !!! Tout cela doit s’arrêter, ici et maintenant.
Désormais, nous devons mettre la Côte d’Ivoire et les ivoiriens au-dessus de tout ; surtout au-dessus des intérêts politiques et d’individus. Dans le combat armé, on n’obtient rien ; on prend plutôt du retard et on compromet notre avenir.
Bien évidemment, avec cette cohésion sociale qui est fragilisée et qui continue de se détériorer encore plus, la reconstruction risque d’être plus longue.
Le défi du développement va donc passer par la reconstruction morale des mentalités et par la nécessaire mise en place d’un pacte social qui permettra de faire émerger la véritable société civile, d’ancrer la paix, la justice, la cohésion sociale, l’équité, la citoyenneté dans les esprits. Aux côtés de la société civile, il va aussi falloir avoir une véritable armée, républicaine, au sein de laquelle il y aura des cadres bien formés.
Pour cela, toutes les compétences de la Côte d’Ivoire seront nécessaires, indépendamment des religions, des origines ethniques ou sociales…
Réunir, réconcilier, pardonner … reconstruire !
Il faut que toute la diversité ivoirienne se retrouve autour d’un projet unificateur que nous qualifions de pacte social. La bataille politique que s’est menée une génération ne doit surtout pas être répercutée sur la génération la plus jeune et les générations futures.
Il est impératif pour la Côte d’Ivoire, pour notre devenir à tous, que l’on se fédère et se réunisse autour d’un projet, pour nous les plus âgés bien sûr, mais surtout pour nos jeunes frères et sœurs, qui sont aujourd’hui sans repères, sans avenir ; et il le faut maintenant.
La Côte d’Ivoire est un pays qui a beaucoup de ressorts. Cette crise est la plus grave que la nation ait connue. Nous espérons que c’est la dernière ; nous espérons qu’elle n’en connaîtra pas d'autres, de cette ampleur. Il faut que nous en sortions et nous restons persuadés qu’on en sortira d’une manière ou d’une autre.
La Côte d’Ivoire a les capacités de rebondir et de faire face à son processus de développement, mais pour cela, il faudra véritablement que nous puissions, tous regroupés et unis autour d’un projet de société et d’un pacte social. Cela doit se faire avec des dirigeants, des leaders déjà connus, mais aussi avec une nouvelle classe de dirigeants politiques, engagés et de parole..., bref avec une classe politique ivoirienne, qui a pour seul souci le bien-être des Ivoiriens et l’intérêt général.
Parmi les ingrédients qui ont fait la force de la Côte d’Ivoire depuis 1960, il y a toujours eu le dialogue, tant prôné par le président Félix Houphouët Boigny. La première des choses, c’est de promouvoir ce dialogue, lui redonner ses lettres de noblesse ; ce concept a tellement été dévoyé ! C’est du dialogue que nous pourrons, ensemble, trouver des solutions à nos problèmes, nous réconcilier et nous pardonner, pour ensuite bénéficier d’une relance sociale et économique, et nous préparer un avenir que nous rêvons meilleur.
Lorsque le processus annoncé va démarrer et que tous les enfants de Côte d’Ivoire, les leaders d’opinion pourront se réunir pour dialoguer, mettre balle à terre, prendre en compte l’opinion des minorités, faire en sorte que les forts n’écrasent pas les plus faibles, déterminer ensemble, cette fois, le type de société que l’on souhaite pour les générations futures, on pourra dire que la paix est en marche. Il s’agit tout de même aujourd’hui de préparer nos enfants à un avenir meilleur au lieu de le compromettre, comme c’est le cas actuellement.
Le dialogue va aussi permettre de libérer la parole, à travers des structures d’appui, bien sûr, mais aussi les médias. Les 4 mois de silence que nous venons de vivre parce que nous étions tous muselés, menacés, parfois tués pour nos simples conseils ou pensées, sont la meilleure expérience que les ivoiriens ont pu vivre à ce jour. Mais libérer la parole, dialoguer ne veut pas dire outrepasser les règles de vivre-ensemble, de respect et de démocratie. Il faudra se dépasser, il faudra mettre de côté les discours partisans ou engagés et ne penser qu’à sauver la patrie, dans le vrai sens du terme.
Se réunir, se réconcilier, se pardonner, ce sera aussi passer par tous les stades de l’expiation de nos fautes, à tous. Là encore, au travers de structures idoines, comme cela s’est déroulé notamment en Afrique du Sud, après l’apartheid, les crimes de sang, les crimes contre l’humanité, les crimes de mal-gouvernance, les crimes économiques, tous les crimes devront jugés et sanctionnés. Car aucun pardon, aucun nouveau départ ne peut se faire sans que les victimes sachent que justice et équité ont prévalu dans le vaste chantier de la réconciliation et du pardon.
Enfin reconstruire, reconstruire la Côte d’Ivoire, reconstruire notre Nation, notre Patrie. Nous sommes intimement, viscéralement, convaincus que la reconstruction passera par le respect de notre devise : Union-discipline-travail.
Une fois l’union retrouvée, il faudra consolider la paix et la cohésion sociale. Et pour cela, les anciens comme les nouveaux dirigeants devront travailler avec toutes les forces vives de la nation : société civile, chefferies traditionnelles, chefs religieux, les jeunes, les femmes, le secteur économique, les militaires, bref, toutes les couches sociales. Il le faudra pour qu’on puisse retrouver cette cohésion sociale, hors des clivages politiques, idéologiques ou religieux.
En outre, la reconstruction ne se fera pas sans la revue de tous les aspects conflictuels de notre Constitution et le renforcement de nos institutions.
Dans un état de droit, laïc et démocratique, il faut éviter, à l'avenir, que les hommes soient plus forts que les institutions, il faut éviter que la folie humaine dépasse les fondamentaux institutionnels mis en place pour et par le peuple.
La crise ivoirienne qui a de nombreuses origines, aurait pu être réglée plus rapidement si nous avions eu confiance en nos institutions et si ces institutions avaient été plus fortes.
Les systèmes doivent survivre aux hommes et nous espérons qu’on saura reconstruire la Côte d’Ivoire dans son ensemble en s’appropriant le renforcement et la crédibilité de nos institutions.
Avant de conclure mon message, je voudrais adresser mes condoléances les plus attristées à toutes les familles qui ont perdu un proche dans cette crise, à tous ceux et à toutes celles qui ont été meurtries dans leur chair ! Nous vivons leur douleur ensemble.
Je voudrais aussi leur dire, que pour et en l’honneur de tous nos frères et sœurs qui, du nord au sud, de l’est à l’ouest, notamment où les pires atrocités ont été commises, ont payé de leur vie, depuis près de 10 ans, la folie de quelques hommes, nous leur devons de nous ressaisir et de revenir à la réalité, celle où chaque citoyen, quel qu’il soit et d’où qu’il vienne prend son destin en main, dans un état de droit.
Moshe Dayan