Hillary Clinton à Alassane Ouattara hier: Il « faut inclure toutes les tendances », toutes les «populations » dans le processus démocratique. Il reste « beaucoup de travail » à faire

Publié le mercredi 18 janvier 2012 | IVOIREBUSINESS - Hier à Abidjan devant la presse nationale et internationale, Alassane Ouattara et Hillary Clinton ont fait le point de leur entretien d’une heure, au Palais présidentiel d’Abidjan-Plateau.

La Secrétaire d’Etat américaine a trouvé que la paix revenait peu à peu en Côte d`Ivoire après la meurtrière crise post-électorale, mais qu’il restait « beaucoup de travail » à faire dans le sens du renforcement de la démocratie et du dialogue politique.

Hillary Clinton lors de son audience hier avec Alassane Ouattara. De autre presse.

Publié le mercredi 18 janvier 2012 | IVOIREBUSINESS - Hier à Abidjan devant la presse nationale et internationale, Alassane Ouattara et Hillary Clinton ont fait le point de leur entretien d’une heure, au Palais présidentiel d’Abidjan-Plateau.

La Secrétaire d’Etat américaine a trouvé que la paix revenait peu à peu en Côte d`Ivoire après la meurtrière crise post-électorale, mais qu’il restait « beaucoup de travail » à faire dans le sens du renforcement de la démocratie et du dialogue politique.

« Le moment est historique et de grande importance. Je voudrais exprimer mon admiration pour le progrès que votre pays fait pour la réconciliation et pour l’économie. Son retour progressif et porteur d’espérance à la paix et à la sécurité », a déclaré le secrétaire d'Etat Clinton.

« C’est une période excitante pour la Côte d’Ivoire comme pour l’Afrique de l’Ouest », a-t-elle ajouté faisant allusion aux dernières élections présidentielles en Guinée, au Nigeria, au Niger et au Liberia.

« La Côte d’Ivoire est le moteur de la croissance de l’Afrique. Le président Obama et moi-même, n’avons aucun doute que la Côte d’Ivoire va reprendre cette place », s’est-elle convaincu, remerciant Alassane Ouattara pour avoir visité 10 des 15 pays de l’Afrique de l’ouest depuis son arrivée au pouvoir.
Cette boulimie de voyage de Ouattara a fait de lui, le président d'une ONG imaginée par les ivoiriens et appelée "Voyageurs sans frontières".

Pour Hillary Clinton, il est important de « consolider le processus démocratique » en Côte d’Ivoire. Cela demande, a-t-elle ajouté, qu’il « faut inclure toutes les tendances », toutes les «populations ». « Il sera particulièrement important d’inclure toutes les voix, y compris celles qui sont discordantes, dans le dialogue politique », a insisté Mme Clinton exhortant les autorités ivoiriennes à intégrer aussi les femmes et à garantir la liberté de la presse.

Les récents emprisonnements des journalistes de "Notre voie" Cesar Etou, Didier Depri et Boga Sivori, bien qu'ensuite libérés, n'ont pas été du goût de l'administration américaine. De même que les accusations portées contre Hermann Aboa en direct sur CNN, par Alassane Ouattara, lequel accusait le journaliste d'être un chef milicien qui détenait des armes de guerre.

Répondant à une question sur « l’impartialité de la Justice », la collaboratrice de Barack Obama a déclaré qu’il est d’un intérêt capital que les populations se rendent compte que cette institution fonctionne. Elle a demandé que les autorités fassent en sorte que les auteurs des crimes et autres exactions, quels que soient les camps, soient poursuivis. La chef de la diplomatie américaine a promis l’aide de son pays à la Côte d’Ivoire pour l’atteinte de plusieurs objectifs voulus par les autorités ivoiriennes. Elle a évoqué la démobilisation et la réinsertion des « milices », les réformes du café et du cacao, le point d’achèvement de l’initiative Pays pauvre très endetté (Ppte), l’indépendance de la Justice…

Alassane Ouattara a quant à lui rappelé dans son intervention, son engagement à doter la Côte d’Ivoire « d’institutions fortes et crédibles ». Engagements pour l'instant plus théoriques que pratiques.

« Nous avons procédé aux élections législatives, le 11 décembre 2011 et le Conseil constitutionnel est en train de revoir les requêtes. Nous souhaitons que cela puisse se terminer dans les jours qui viennent pour nous permettre de reprendre les élections là où ce sera nécessaire. C’est donc la preuve de la vitalité de la démocratie dans notre pays », a indiqué M. Ouattara, soulignant sa « ferme volonté de construire un Etat de droit avec une justice impartiale bien sûr respectueuse des droits humains ».

Plusieurs analystes et observateurs de la vie politique ont noté "le désert électoral" dans lequel se sont déroulés les dernières législatives, dont le taux réel d'abstention a tourné autour de 83%.
Le FPI, le parti de Laurent Gbagbo, qui avait appelé à les boycotter, en est sorti comme le véritable bénéficiaire.

Le numéro 1 ivoirien a fait savoir qu’il a mis en place une commission nationale d’enquête sur les crimes commis pendant et après les présidentielles passées et qu’il attendait ses conclusions pour les remettre à la Justice. Dès lors, a-t-il soutenu, ceux qui devront être jugés le seront. M. Ouattara a prié son hôte de transmettre ses « sincères remerciements au président Barack Obama pour son engagement personnel et son soutien pendant la grave crise post-électorale » que la Côte d’Ivoire a traversée. Et de remercier les Etats-Unis pour tous « les efforts inlassables déployés pour la promotion et le renforcement du processus de démocratisation en Côte d’Ivoire, en Afrique et dans le monde ».

Jusqu'à présent, seuls les pro-Gbagbo sont inquietés par la justice ivoirienne et internationale, ce qui fait dire à beaucoup d'ONG comme Amnesty international, Human rigtht watch et la Croix rouge, qu'on a pour l'instant affaire en Côte d'Ivoire, à une justice des vainqueurs.

Il a expliqué que d’importants efforts étaient déployés pour consolider la paix et ramener la sécurité en Côte d’Ivoire, reconnaissant que « ce n’est pas une chose facile ».

Tout le monde reconnait, Ouattara en tête, le rôle néfaste des FRCI, récemment qualifiées par l'Onuci comme "Force mortelle", tuant les populations civiles aux mains nues et s'adonnant à des actes de grand banditisme.
Il y a quelques semaines, après l'attaque de Vavoua, qui avait fait 6 morts originaires du Nord, Alassane Ouattara avait donné 48H afin que les FRCI regagnent leurs casernes. Jusqu'à aujourd'hui, l'opération n'est pas encore terminée.

« Nous renforçons actuellement nos relations militaires et sécuritaires afin de lutter contre le banditisme transfrontalier, la piraterie maritime, le trafic de drogue et de stupéfiants, la prolifération des armes et le terrorisme. Nous souhaitons la reprise et le renforcement de la coopération militaire avec les Etats-Unis », a plaidé l’ex-Directeur général-adjoint du Fonds monétaire internationale (Fmi), réaffirmant son engagement à « lutter contre les pires formes du travail des enfants ». Alassane Ouattara a confié à la presse qu’il y a « une totale convergence de vues concernant les questions diplomatiques internationales » entre les autorités ivoiriennes et américaines.

Arrivée à Abidjan, lundi 16 janvier 2012, en provenance de Monrovia, Hillary Clinton a quitté la capitale économique ivoirienne, hier après-midi, pour le Togo et le Cap vert.
Elle n’a rencontré aucun parti de l’opposition, dont le FPI-CNRD, qui avait pourtant des choses importantes à lui communiquer pour la bonne marche de nation. Cela restera le point faible de la visite d'Hilary Clinton sur les bords de la lagune ébrié.

Nous y reviendrons.

Patrice Lecomte

Les vérités d’Hillary Clinton à Ouattara, par JEUNE AFRIQUE

Le tête-à-tête à Abidjan entre la secrétaire d’Etat américaine Hilary Clinton et le président ivoirien Alassane Ouattara commence à livrer quelques secrets. (…)
Au cours de la conférence de presse suivant la rencontre Hillary Clinton - Alassane Ouattara, mardi 17 janvier à Abidjan, la langue de bois diplomatique a été bien respectée, l’envoyée de Barack Obama se disant satisfaite des derniers progrès enregistrés en Côte d'Ivoire, avec notamment l’organisation des élections législatives pacifiques du 11 décembre dernier. Mais en privé, la chef de la diplomatie américaine n’a pas hésité à employer son franc-parler habituel avec son interlocuteur.
De sources diplomatiques américaines, il a été fortement recommandé au chef de l’État ivoirien de former un gouvernement de réconciliation nationale avec, à la clé, le départ de l’actuel Premier ministre. « Les États-Unis souhaitent que Guillaume Soro et tous les proches du pouvoir qui auraient pu commettre des crimes et exactions comparaissent devant la Cour pénale internationale (CPI), même en qualité de simples témoins. Ce message très clair a été passé au président ivoirien », confie une source américaine consultée par Jeune Afrique.
L’instauration d’un État de droit, avec moins d’immixtions d’hommes politiques et de militaires dans les affaires de la justice semble être une priorité pour les Américains. Lesquels conditionnent l’octroi de leurs aides dans plusieurs domaines, notamment dans la santé, l’éducation, la sécurité, l’économie et l’agriculture, à des progrès dans la bonne gouvernance. Une position qui rejoint celle de la France, qui doit également envoyer des émissaires de haut rang cette semaine.

Baudelaire Mieu, à Abidjan
Source : JeuneAfrique