France- FAITS DIVERS : AFFAIRE"ABOU BAKARI TANDIA" du nom d'un jeune immigré malien disparu dans des conditions jamais élucidées
Le 20 février 2013 par IVOIREBUSINESS - AFFAIRE"ABOU BAKARI TANDIA".
Suite à une interpellation et une garde vue au commissariat de COURBEVIOIE .Vous qui êtes secrétaire de l'association de soutien Vérité et Justice pour Abou Bakari Tandia,
Quel est votre sentiment personnel sur cette affaire qui a duré 7 ans?
(JOELLE PARIS): En fait ! C'est terriblement long, surtout pour la famille qui se trouve confrontée depuis des années à des rappels cruels de son deuil, au gré des faibles avancées de l'instruction. Pour les associatifs Courbevoisiens ou alto sequanais qui ont décidé d'accompagner cette famille, au nom des droits de l'homme, pour le jeune avocat pénaliste Maitre Bouzrou qui ne ménage pas sa peine, c'est long aussi.
Bien sûr la justice doit prendre son temps, nous en sommes convaincus, mais pas au risque de l'effacement des mémoires des protagonistes de cette terrible affaire.
Mon sentiment personnel est que sans doute au départ personne n'imaginait que la mort d'un jeune homme africain, tombé dans le coma lors d'une garde à vue pour défaut de papiers en règle, "intéresserait" les citoyens, les médias, et étayerait les recherches d'une grande ONG comme Amnesty International sur les violences policières en France. Je suis à la fois horrifiée que dans mon pays des personnes meurent aux mains de la police, et fière que ce type d'affaires ne soit pas instantanément oubliées et que des gens d'horizon très divers se battent pour qu'on finisse par apprendre ce qui s'est réellement passé au commissariat de Courbevoie cette nuit du 5 décembre 2004 et surtout, pour que cela ne se reproduise plus. Même si hélas, de très nombreuses affaires similaires soient arrivées depuis fin 2004, comme en témoigne le collectif "Vies Volées". Maintenant, accident, erreur d'appréciation, blessures intentionnelles ? Je n'ai personnellement aucune idée de ce qui a bien pu se passer et c'est justement le but de l'association, contenu dans son intitulé : Vérité et Justice.
"IVOIREBUSINESS": Selon des éléments factuels entre notre possession, il y a eu quatre expertises médicales réalisées par différents
médecins légistes, Ne pensez-vous que cela est de trop dans un pays reconnu pour son expertise médicale?
(Joelle PARIS): En réalité, s'il y a eu 4 expertises en effet, il y a eu 3 premières expertises réalisées par la même équipe : un collège de 3 experts médecins légistes très qualifiés et reconnus, incluant Madame Dominique Leconte, Directrice de l'institut médico-légal de Paris. Pourquoi 3 expertises ? Tout simplement parce que le corps de la victime n'étant plus disponible, il s'agit d'expertises de dossier médical. Il s'agit de confronter les données contenues dans le dossier médical (Abou Bakari a été transporté dans le coma à la Pitié Salpetrière à Paris où il a subi un scanner puis à l'hôpital Louis Mourier de Colombes en réanimation où il est mort le 24 janvier 2005 sans être sorti du coma) aux témoignages des policiers présents au commissariat ce soir-là.
Or dans les premières années de cette affaire, le dossier médical était "égaré". Puis incomplet. Des pièces ont progressivement ressurgi, parfois de façon assez rocambolesque. La menace de l'avocat de porter plainte pour vol de preuves a permis de compléter le dossier...
Evidemment, l'analyse du dossier complet a permis au collège des médecins légistes de préciser leurs conclusions, lesquelles ont donc varié entre la 1ere expertise (sur dossier très incomplet) et la 3e expertise (sur dossier complet). Ce qu'il faut retenir, c'est que ces 3 expertises mettaient en évidence des contradictions entre les témoignages policiers et les pièces du dossier médical. Ces experts ont conclu au coma survenu par privation d'oxygène : incompatible avec la version policière qui supposait qu'une fois la porte de sa cellule refermée, Abou Bakari Tandia s'était lui-même heurté la tête contre le mur au point de tomber dans le coma.
Et en tout dernier lieu, en 2012, une ultime expertise a été confiée sur demande de la 4e juge d'instruction à un nouveau médecin légiste agissant seul et non inscrit dans la liste des experts de justice. Ce médecin n'a pas relevé d'incohérence entre la version policière des faits et le dossier médical. La juge d'instruction a choisi de privilégier les conclusions de ce médecin au détriment de celles du collège des experts légistes.
"IVOIREBUSINESS": L'on se rend à l'évidence qu'après un non-lieu (absence de preuves suffisantes), il y a eu un autre rebondissement dans
,
cette affaire, car il y a eu un appel à la cour d'appel de VERSAILLES LE MARDI 12 FEVRIER DERNIER pour la même affaire!
Selon vous, y-a-t-il toujours des étincelles d'espérance pour que la vérité puisse éclater un jour dans cette affaire de violences policières ?
L’appel n'est pas un rebondissement mais la suite logique. Pour la famille du jeune malien qui est partie civile, il était impensable de vivre avec une décision de justice qui peut signifier qu'il ne s'est rien passé. Or la mort a bien eu lieu. Comment ? La famille n'est pas convaincue par les récits à géométrie variable des policiers, seuls témoins du drame. Oui, la famille et les associatifs espèrent plus et mieux de la justice. Les conclusions de l'appel seront communiquées par la cour d'appel de Versailles le 12 mars.
(PROPOS RECUEILLIS PAR YVES T BOUAZO)