Faible affluence aux élections locales ivoiriennes, boudées par le camp Gbagbo
Par AFP - Faible affluence aux élections locales ivoiriennes.
ABIDJAN - Deux ans après la fin d’une crise postélectorale sanglante, des Ivoiriens peu nombreux retournaient aux urnes dimanche pour des municipales et régionales marquées par le boycottage du parti de l’ex-président Laurent Gbagbo, symbole d’une réconciliation en panne.
A Abidjan comme dans l’intérieur du pays, les opérations de vote ont très
souvent démarré bien après l’ouverture officielle fixée à 07H00 (locales et
GMT), en raison d’importants retards dans l’installation du matériel ou des
agents électoraux.
Malgré quelques couacs, le scrutin se déroulait dans le calme mais l’affluence était faible, selon des sources concordantes. Aux commandes depuis la fin de la crise postélectorale de décembre 2010-avril 2011 ayant fait quelque 3.000 morts, le président Alassane Ouattara a souhaité que les Ivoiriens "puissent voter dans la paix". Ces élections sont "importantes pour la gestion décentralisée du pays", a-t-il déclaré en votant à Abidjan.
Après une campagne émaillée de quelques échauffourées, de dérapages verbaux
et d’actes d’intimidation dénoncés par l’ONU, quelque 5,7 millions d’inscrits
sont appelés à voter jusqu’à la clôture des bureaux à 17H00 dans la première
puissance économique d’Afrique de l’Ouest francophone.
A Bouaké, la grande ville du centre du pays, Robert Kouladé, chef
communautaire, a voté avec un espoir: que "les Ivoiriens tirent les leçons du
passé pour éviter tout dérapage afin qu’on puisse emprunter la voie de la
démocratie vraie".
A Adjamé, quartier populaire du nord de la capitale économique, Zakaria
Touré, un jeune chauffeur, a choisi le candidat du Rassemblement des
républicains (RDR) d’Alassane Ouattara. Ce partisan du pouvoir regrette
pourtant l’absence des fidèles de Laurent Gbagbo. "Il faut qu’on ait la
réconciliation, on n’a qu’à se parler, nous tous", a-t-il confié, las des
"palabres".
"mascarade" pour le parti de Gbagbo
Le Front populaire ivoirien (FPI), parti de l’ancien chef de l’Etat qui
avait déjà boudé les législatives fin 2011, a vu dans ces élections locales
une "mascarade".
Il exigeait une réforme de la commission électorale ainsi qu’une amnistie
pour les crimes commis durant la crise de 2010-2011 et la libération de ses
leaders emprisonnés, à commencer par Laurent Gbagbo, détenu à La Haye par la
Cour pénale internationale (CPI), qui le soupçonne de crimes contre l’humanité.
Le parti a toutefois dû annoncer la suspension de 15 de ses membres, dont
plusieurs maires sortants, qui ont participé à la campagne en dépit de ses
consignes.
En l’absence du FPI, la bataille électorale a surtout crispé les relations
entre les alliés au pouvoir, le RDR et le Parti démocratique de Côte d’Ivoire
(PDCI) de l’ex-chef d’Etat Henri Konan Bédié, qui concourent la plupart du
temps en rangs dispersés à ces locales.
Les craintes de troubles concernent notamment Abidjan et l’Ouest, région la
plus instable et de nouveau en proie en mars à des attaques meurtrières
d’hommes armés.
Selon une source onusienne, la mission des Nations unies dans le pays
(Onuci) s’est aussi inquiétée du fait que certains hauts cadres de l’armée
ivoirienne aient "soutenu de façon flagrante des candidats du RDR" ces
derniers jours.
Ces élections sont les dernières avant la présidentielle de 2015 à
laquelle, sauf surprise, Alassane Ouattara devrait se représenter.
Le chef de l’Etat se flatte d’avoir en deux ans replacé la Côte d’Ivoire
sur la scène internationale après une décennie de tourmente, fait largement
progresser la sécurité et redémarrer l’économie.
Mais la pauvreté tarde à reculer, l’ampleur de la corruption est
régulièrement dénoncée et le régime est accusé de privilégier une "justice des
vainqueurs", aucune figure du camp Ouattara n’ayant été inquiétée pour les
graves crimes commis durant la dernière crise.
La commission électorale estime pouvoir annoncer les résultats complets du
double scrutin d’ici le milieu de la semaine prochaine.
bur-tmo/aub