Descente des FRCI à Tipadipa: Un témoin raconte le calvaire Le rôle joué par le préfet La réaction du commandant des FRCI

Le 17 septembre 2012 par L'INTER - Passé les moments de grands tumultes mêlés de grosses frayeurs, le village de Tipadipa, à 17 km de Gagnoa, connaît un calme plat. En

FRCI en descente dans un village de Gagnoa non précisé.

Le 17 septembre 2012 par L'INTER - Passé les moments de grands tumultes mêlés de grosses frayeurs, le village de Tipadipa, à 17 km de Gagnoa, connaît un calme plat. En

témoigne le silence que nous avons pu y observer à notre passage hier dimanche 16 septembre.
Les populations, encore sous le choc, digèrent leur douleur. Dans ce qui conviendrait de nommer l’affaire ''Frci–populations sur pied de guerre'', qui a malheureusement enregistré un mort de trop, un des survivants de la barbarie relate leur calvaire. Abega Constant, accusé par les populations d'avoir livré son ‘’frère’’ Zoably Kouadio Fidèle, décédé des suites de ses tortures, a dit sa part de vérité. «Jeudi dernier, je revenais d’une balade aux environs de 19 h quand j’ai rencontré un élément des FRCI (Forces républicaines de Côte d’Ivoire : NDLR) qui a pointé son arme sur moi. Et il m’a dit que son patron avait besoin de moi parce que ce dernier voulait me parler. Décision que j’ai exécutée sans résistance. Ils m’ont fait asseoir à leur poste jusqu’à 21 h. Après, ils ont envoyé un dozo acheter un cahier et un stylo. Puis, ils m’ont demandé de recopier un texte que leur chef Konaté avait écrit. C’est-à-dire que je devais dire que je possédais des armes. Mes bourreaux ne cessaient de dire que Fidèle, Olivier et moi avions des armes que nous avions cachées quelque part. Ils m’ont chicoté pendant longtemps et m’ont demandé de les accompagner chez les autres. Ils connaissaient déjà chez les uns et les autres. Ils nous ont obligés à porter des treillis dont ils disposaient. Fidèle leur a dit que c’était sacré, donc nous ne pouvons pas le faire. Ensuite, les éléments des Frci nous ont conduits au cimetière du village pour nous pendre. Mais les arbres étaient grands. C’est ainsi qu’ils ont appelé du renfort de Gagnoa. Un véhicule de type 4X4 est venu nous chercher pour nous conduire à leur camp, l’ex-Crs (Compagnie républicaine de sécurité) sis au quartier ‘’Soleil’’. Là-bas, ils nous ont chicoté puis ils nous ont aspergés d’eau et de sable. Fidèle et moi étions mal en point. Lui, ne pouvait plus tenir tellement ils l’ont frappé. Fidèle était presque mort lorsqu’ils ont appelé, le matin, le commandant Fofana. Lorsque ce dernier est arrivé, il a demandé qu’on l’emmène à l’hôpital. J’étais nu, ils m’ont habillé pour qu’on nous embarque pour l’hôpital. C’est là-bas que Fidèle est mort», raconte notre rescapé encore sous traitement dans une clinique de la ville, sur instruction du préfet de la Région.
La nouvelle de l’arrestation arbitraire des fils du village et surtout de la mort d’un des leurs, frère du sous-chef de village, Zoably Kouadio Vidal, a failli mettre le feu aux poutres. On était au bord d’un soulèvement des villageois de Tipadipa soutenus par les villages environnants, eux aussi exaspérés par l’attitude des hommes en armes. Mais, la promptitude des autorités de la ville évitera ce soulèvement.
De source proche des autorités administratives de la Région, c’est le sous-préfet central de Gagnoa qui a été coopté par le préfet N’zi Kangah Rémy pour mener toutes les démarches possibles afin d’amener les populations à opter pour le règlement pacifique de l’incident. Nos confidents nous apprennent que le sous-préfet Gauze Ignace, saisi du dossier, a joint le commandant de compagnie de la gendarmerie aux environs de 3h du matin. Ce dernier a aussitôt dépêché un détachement de la gendarmerie sur les lieux. Le représentant du chef de village a ensuite appelé le commandant des Frci, Diomandé Vassézé, qui a condamné les faits qu'il a mis sur le compte d’éléments incontrôlés de son équipe. Selon nos confidents, le préfet de Région, N’zi Kagan Rémy qui suivait de bout en bout l’affaire, a dépêché dans l’après-midi le sous-préfet central, accompagné du chef de Garahio, représentant le président de la conférence des chefs du département, le président des chefs des canton et le chef du canton Zabia auquel appartient le village de Tipadipa, pour calmer les esprits. Après ces échanges, les populations ont demandé le retrait des éléments des Frci de leur village, jusqu’à nouvel ordre.
Pour sa part, la hiérarchie des Frci, conduite par Diomandé Vassézé, a réagi à cet acte qu’il a qualifié de trop. Le patron des militaires répondant aux préoccupations d’un de nos confrères sur l’incident, a confié qu’il regrettait l’acte qui vient ternir leur image après qu’ils aient mené de bonnes actions allant dans le sens de la réconciliation depuis leur arrivée dans la localité. «Ce sont des soldats qui ont agi sans ordre de la hiérarchie, ils ont pris l’initiative d’eux-mêmes. Le coup malheureux est arrivé. C’est regrettable ! Voila pourquoi ils ont été mis aux arrêts, ils seront jugés parce que nous sommes dans un pays de droit. Nous regrettons que cette image vienne ternir nos bonnes actions de sensibilisation. Nous compatissons à la douleur des populations», a-t-il regretté. Notons que suite à cet incident malheureux de Tipadipa, les responsables de la police de l’Onuci ont été aperçus dans la famille éploré. Zoably Kouadio Fidèle, décédé à la suite de ses bastonnades, laisse derrière lui une veuve et 4 enfants.

Venance KOKORA à Gagnoa