Depuis la MACA - Un parachutiste burkinabé raconte son arrestation -Ce qu`il a fait au Burkina avant son incarcération en Côte d`Ivoire - . Son message à Gbagbo

Publié le jeudi 3 février 2011 | L'Inter - Commando-parachutiste de l'armée burkinabé, Flavient Thiombiaono séjourne depuis bientôt un an à la Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan (MACA), précisément au bâtiment dit blindé des grands

criminels. Qu'a bien pu faire cet adjudant-chef pour se retrouver ainsi au ''trou''? Lui seul connait la vérité sur son passé. Cependant dans cette lettre adressée à la rédaction de ''L'inter'', il lève un coin du voile sur les faits qui lui sont reprochés. Plaidoyer d'un prisonnier pas comme les autres.

Publié le jeudi 3 février 2011 | L'Inter - Commando-parachutiste de l'armée burkinabé, Flavient Thiombiaono séjourne depuis bientôt un an à la Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan (MACA), précisément au bâtiment dit blindé des grands

criminels. Qu'a bien pu faire cet adjudant-chef pour se retrouver ainsi au ''trou''? Lui seul connait la vérité sur son passé. Cependant dans cette lettre adressée à la rédaction de ''L'inter'', il lève un coin du voile sur les faits qui lui sont reprochés. Plaidoyer d'un prisonnier pas comme les autres.

«Ce problème, qui date de depuis 2005, a conduit le lion du Gourma en prison dans la République de Côte d'Ivoire. L'adjudant en chef Flavien Thiombiaono ex-commando,ex garde du corps des 4 mètres carrés du président Blaise Compaoré, reste incarcéré depuis le 19 avril 2010 à la Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan (MACA) sans suite à son dossier, accusé en tant que mercenaire sur le territoire ivoirien pour un délit d'association de malfaiteurs. Abandonné par la justice ivoirienne, il lance un appel au président de la République S. E Laurent Gbagbo pour lui venir en aide afin de recouvrer sa liberté. L'histoire remonte à l'arrivée au pouvoir du capitaine Blaise Compaoré en 1987, après la chute du capitaine Thomas Sankara, lui-même successeur de l'ex président Maurice Yaméogo. Jusqu'à l'avènement de Blaise Compaoré en 1987, le Burkina a été dirigé par des régimes issus de coups d'Etat militaires depuis 1966, année de la déchéance de Yaméogo suite à une gigantesque révolte populaire motivée par les syndicats. L'armée devait simplement assurer la transition. En 1980, le Gal Lamizana est remplacé par le colonel Saye Zerbo, balayé à son tour par le commandant Jean Baptiste Ouédraogo. En 1982,une année plus tard c'est au capitaine, Thomas Sankara d'accéder au pouvoir. Le tour sera à l'un de ses plus proches collaborateurs, le capitaine Blaise Comparoé de lui choper la place après son assassinat en Octobre 1987. Certes, Blaise Comparoé a, depuis, été élu plus de 5 fois au suffrage universel. Mais, ses rapports avec l'armée demeurent cruciaux et controversés. En 2003, le capitaine Ouali Luter Diapagri, à la tête du coup d'Etat manqué contre le régime Comparoé, a causé beaucoup de dégâts. Personnellement, je faisais partie de ce groupe, car j'ai été trahi par un proche, le lieutenant Minougou. Je suis ''Sankarariste'' et cet engagement s'est davantage déclenché en moi depuis la mort de Norbert Zongo. J'ai été frappé par l'injustice dans notre pays, le pays des hommes intègres. Après une formation en Israël, je suis reparti en Afrique du Sud où j'ai passé deux mois pour une mission très bien accomplie. A mon retour au pays, j'ai été interpelé par l'aide de camp du président Compaoré avant de rejoindre un bataillon de commandos parachutistes de Pô. Quelques mois plus tard, j'ai rejoint le Régional de Sécurité Présidentielle (RSP). Ainsi, je suis fait garde du corps dans les quatre mètres carrés du président de la République. C'est en Janvier 2003 que le capitaine Ouali m'a contacté pour une mission que je devais effectuer à Bobo Dioulasso avec la complicité de mon chef de hiérarchie. En réalité, le capitaine Ouali est un oncle maternel détaché au ministère du Commerce, et cette mission était confidentielle. Après la rencontre, j'ai demandé une audience auprès du chef d'Etat-major des Armées Burkinabé, qui m'a aussi dit que je devais effectuer une mission secrète hors du pays. C'est là que tout va commencer. A mon retour de la mission accomplie 5/5, le capitaine Ouali m'a contacté pour un coup d'Etat en préparation. J'ai bien réfléchi et j'ai donné mon avis favorable. J'ai accepté la mission, tout simplement parce que j'en avais marre de ce pouvoir. J'ai décidé de participer au coup sans arrière-pensée. Or, un adage dit que ''quand tu souhaites le bonheur, il faut aussi prévoir le malheur à côté''. Le coup a échoué par manque de confiance et un mois plus tard le capitaine Ouali est arrêté avec ses hommes . Trois mois plus tard, j'ai été arrêté, jugé et condamné à 5 ans d'emprisonnement avec sursis. Ma résidence a été surveillée de 2005 à 2007. Je ne pouvais ni sortir de chez moi, ni voyager. Ma fuite du pays a été possible dans les nuits du 19 au 21 Décembre2007, au moment où le président Comparoé, lui-même, vivait une fin d'année des plus agitées, avec un capitaine-président littéralement pris en otage par des centaines de soldats de la caserne du camp Guillaume. Des évènements survenus en plein préparatifs du sommet de la communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) prévu à Ouagadougou. Des soldats ont été blessés lors des altercations avec la police et pendant des affrontements qui ont suivi. Deux policiers ont été tués. La réplique de la police a été instantanée et deux soldats ont été abattus en retour. Le pire a été évité de justesse. On a été à deux doigts d'une guerre généralisée. Les affrontements ont gravement endommagé les grilles des portes de la maison d'arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) permettant à environ 614 prisonniers de s'évader. C'est ainsi que ma promotion s'est rendue à mon domicile pour m'aider à quitter le pays. Après notre départ, le capitaine Ouali Luter Diapagri a été arrêté au Bénin et relâché 48 h plus tard. C'est au tour de l'adjudant chef commando Flavien Thiombiano de tomber dans le filet des Ivoiriens. Arrêté le 22 février 2010, à l'hôtel président de Yamoussoukro. Ce jour, il était 16 h30mn quand trois hommes dont un officier et deux gendarmes, en compagnie du Préfet de police de Yamoussoukro, se présentent à moi. J'ai été conduit à la préfecture de police de Yamoussoukro et auditionné le même jour. On m'a demandé quel était l'objet de ma présence en Côte d'Ivoire. J'ai répondu honnêtement aux questions qui m'ont été posées. A ma grande surprise, j'entends dire que je suis un mercenaire et que c'est le Gal Mangou qui m'a fait venir pour préparer un coup d'Etat. Je ne sais pas si c'était une question piège, mais cela m'a paru bizarre. C'est alors que j'ai fait sortir mes griffes. Après l'audition, le lendemain 23 février 2010, j'ai été conduit à Abidjan à la Direction de surveillance du territoire (DST) où l'enquête a pris deux mois. Après le séjour à la DST, c'est le 14 Avril 2010 que j'ai été conduit au tribunal de Toumodi où le procureur de cette institution a refusé de me recevoir. Car, il avait entendu parler de moi et ne voulait pas que je vienne mélanger sa prison et qu'en plus mon dossier était neutre .De retour d'Abidjan, c'est le 19 Avril 2010 que j'ai été reconduit au Parquet du Plateau, au 2ème cabinet du juge d'instruction Cissé Losséni. Cela fait 10 mois que mon dossier est sans suite. Je lance un appel aux autorités ivoiriennes, plus précisément au président de la République SEM Laurent Gbagbo, car beaucoup de gens sont loin de son Palais et se meurent dans le secret avec leurs doléances. Car j'ai été conduit dans le bâtiment le plus dangereux de la MACA, le célèbre bâtiment ''C'' des grands criminels, depuis 9 mois. Surnommé ''le bâtiment de l'enfer'', aucune visite n'est autorisée à Thiombiano Flavien en ces lieux. Je n'ai aucun parent en Côte d'Ivoire et surtout l'état de ma santé se détériore au fil des jours. J'ai même demandé une mise en liberté provisoire avec un certificat médical faisant foi de l'urgence de ma situation. Hélas, elle a été rejetée par la justice ivoirienne. M. le président, sans vouloir porter atteinte à l'indépendance des institutions, je voudrais pouvoir bénéficier d'une intercession auprès des procureurs et de mon juge. Qu’ils veillent et pourvoient à mes besoins. Je veux recouvrer ma liberté. Car j’ai reconnu tous les faits qui me sont reprochés depuis le Burkina Faso, et je demande clémence à celui à qui j’ai tenté de faire du mal et qui m’avait même demandé de regagner le pays pour me remettre au travail. J'ai été ivre de joie de revoir cette même personnalité œuvrer pour la paix en Côte d’Ivoire. Car j’ai pêché contre vous et contre ma nation. J’ai fait le rêve que les hommes, un jour se lèveront et comprendront enfin, qu’ils sont faits pour vivre ensemble comme des frères. Je fais encore le rêve, ce matin, qu’un jour, chaque Noir de ce continent, tous les hommes de couleur dans le monde entier, seront jugés sur leur valeur personnelle plutôt que sur la couleur de leur peau. Tous les hommes respecteront la dignité de la personne humaine. Je fais encore le rêve que la fraternité sera un peu plus que quelques mots à la fin d’une prière, qu’elle sera, bien au contraire, le premier sujet à traiter dans chaque ordre du jour législatif. Je rêve qu’un jour la justice ruissèlera comme l’eau et la droiture comme un fleuve puissant. Je rêve encore que dans toutes les hautes sphères de l’Etat et dans les municipalités entreront des citoyens élus qui rendront justice, aimeront la pitié et marcheront humblement dans les voies de Dieu. Je rêve qu’un jour la guerre prendra fin, que les hommes transformeront leurs épées en socs de charrue et leurs lances en faucilles, que les nations ne s’élèveront plus les unes contre les autres et qu’elles n’envisageront plus jamais la guerre. Je fais encore le rêve qu’un jour l’agneau et le lion s’entendront l’un près de l’autre, que tous les hommes s’asseoiront sous leur treille et leur figuier, et que personne n’aura plus peur. Que la gloire de Dieu sera révélée et que nous serons capables de repousser au loin les tentations du désespoir et de jeter une nouvelle lumière sur les ténèbres du pessimisme. Oui, grâce à cette foi, nous serons capables de hâter le jour où la paix règnera sur l’Afrique. Ce sera un jour merveilleux où les fils de Dieu pousseront des cris de joie. Que Dieu bénisse la Côte d’Ivoire, que Dieu bénisse l’Afrique».

L’adjudant-chef Thiombiano Flavien
Depuis la MACA, Bâtiment "C" cellule 106
MD: 19/04/2010 Plateau 2ème cabinet