Défection de la Rti à l`aéroport, limogeage de Brou Aka Pascal : La présidence est-elle irréprochable ?
Publié le mardi 2 août 2011 | Le Nouveau Réveil - Quand le vin est tiré, il faut le boire.
Publié le mardi 2 août 2011 | Le Nouveau Réveil - Quand le vin est tiré, il faut le boire.
Mais pour la majorité des Ivoiriens qui n'ont pas cessé de réagir depuis l'annonce de la nouvelle du limogeage du directeur général de la Rti, la pilule semble trop amère à avaler. Même le communiqué signé du ministre de la Communication, Coty Souleymane Diakité, expliquant les raisons officielles de ladite décision, n'a pas réussi à évacuer les interrogations, voire les craintes. La sanction n'est-elle pas disproportionnée par rapport à la faute ? Brou Aka n'a-t-il pas été sanctionné pour couvrir certains dysfonctionnements dans l'entourage du chef de l'Etat ? Les services de la présidence de la République sont-ils vraiment exempts de tout reproche dans ce qui vient de se passer ? Pourquoi enfin le chef de l'Etat n'a-t-il pas pris soin de diligenter une enquête en bonne et due forme, établir les responsabilités avant de sanctionner ?
Passé le temps des émotions, il faut à présent regarder les faits, les interroger, pour essayer de comprendre ce qui n'a pas marché, ce qui est à l'origine du désagrément causé au chef de l'Etat et qui a entraîné le limogeage de Brou Aka Pascal.
A l'analyse des faits, l'on peut en effet s'étonner du fait que, primo, à l'instar de la Rti, aucun
journaliste n'était présent ce samedi matin à 9 heures pour assurer la couverture du retour de Ouattara des Etats-unis. Etait-il du ressort du directeur général de la Rti de convoquer les journalistes à cet effet à l'aéroport ? La réponse est, bien entendu, non. Le directeur général de la Rti a-t-il été régulièrement et formellement informé de l'arrivée du chef de l'Etat ou a-t-il négligé de prendre les dispositions nécessaires en connaissance de cause ? Au demeurant, qui devrait informer le Dg de la Rti puisque pour ce déplacement aussi important, pour ne pas dire historique, les collaborateurs du président de la République n'ont pas jugé nécessaire de prévoir, ne serait-ce qu'une place, pour un journaliste de la télévision ? En temps normal, lorsque le chef de l'Etat rentre d'une mission de ce genre et que ses collaborateurs savent qu'il a une déclaration importante à livrer, ce sont eux qui actionnent les services de la présidence ici à Abidjan à charge pour ces derniers d'informer les rédactions afin de prendre les dispositions subséquentes. Les collaborateurs d'Alassane Ouattara ont-ils fait le travail comme ils se devait ? La réponse ici est aussi non. Car aucun organe de presse n'a été en mesure de déplacer un journaliste à l'aéroport. Or, toutes les rédactions, même la presse bleue, aurait été heureuse de se rendre à l'aéroport pour poser des questions au chef de l'Etat. Cela veut dire que la défaillance ne se situe pas au niveau de la Rti seule ou de son seul directeur général. Toute la presse a été prise de court et cela est bien le fait de quelqu'un. Dans le cas d'espèce, si le chef de l'Etat a atterri à Abidjan à 9 heures, c'est qu'il a dû décoller des Etats-unis à un moment où les Ivoiriens étaient encore plongés dans le sommeil, à cause du décalage horaire.
Ses collaborateurs auraient donc dû, depuis vendredi après-midi, donner l'information précise sur l 'arrivée du chef de l'Etat afin de mobiliser les journalistes et tout le protocole d'accueil. Puisque, au- delà de la presse, ce n'était pas la grande mobilisation du côté des membres du gouvernement pour accueillir le chef de l'Etat qui rentrait de la mission la plus importante depuis son investiture. Etre reçu à la Maison Blanche n'est pas une chose qui arrive à tous les chefs d'Etat d'Afrique et du monde.
L'on se rappelle que Gbagbo avait mobilisé 10 journalistes, photographes et cameramen pour filmer sa poignée de main avec Obama en 2010.
Injustice, frustration
A entendre les Ivoiriens, dans leurs différentes réactions, l'on note un sentiment d'injustice, une frustration profonde. Ils sont choqués dans l'ensemble. Parce que, pour eux, si le chef devrait frapper pour corriger les dysfonctionnements, il n'a pas frappé juste, là où il faut. L'impression qui se dégage, c'est que Brou Aka a été sacrifié pour marquer les esprits. Il est une victime de ce qu'on appelle en droit, la responsabilité sans faute. Il paie pour ses collaborateurs en tant que chef de la télévision bien qu'au sein de la Rti, il y ait une chaîne bien précise des responsabilités.
Parce que dans cette affaire, il aurait été indiqué de faire un communiqué pour dénoncer
publiquement ce qui vient de se passer, ouvrir une enquête, situer toutes les responsabilités avant de couper les têtes des personnes fautives. On aurait aussi dû nous expliquer pourquoi après un séjour aussi chargé et un voyage de ces heures, la nuit de vendredi à samedi, on a contraint le Chef de l'Etat à patienter durant 30 minutes dans l'avion avant de mettre les pieds sur terre, avec tous les problèmes sécuritaires que cela aurait pu engendrer. Pourquoi au niveau du protocole d'Etat, n'a-t- on pas sévi avec la même force et la même promptitude ? Certes, notre intention n'est pas d'inviter le chef de l'Etat à faire la chasse aux sorcières mais si tant il est vrai que c'est l'entourage qui fait
souvent le chef Ouattara serait bien inspiré de mettre un peu d'ordre autour de lui.
Parce qu'il y a encore trop d'improvisation, trop de laisser-aller. La présidence de la République, c'est la plus grande vitrine de la Côte d'Ivoire. Et-ceux qui y travaillent doivent le savoir.
Akwaba Saint-Clair