Crise à l'UMP: Copé et Fillon se disent en tête et dénoncent des fraudes

Le 19 novembre 2012 par Libération - Récit Alors que Copé assure avoir été élu président du parti, Fillon annonce avoir une avance de 224 voix et prévient: «Je ne laisserai pas voler la victoire aux militants.»

François Fillon et Jean-François Copé sur le plateau de Des paroles et des actes le 25 octobre. (Photo Philippe Wojazer. Reuters)

Le 19 novembre 2012 par Libération - Récit Alors que Copé assure avoir été élu président du parti, Fillon annonce avoir une avance de 224 voix et prévient: «Je ne laisserai pas voler la victoire aux militants.»

Congrès de Reims, version droite. L'élection interne à l'UMP pour désigner le nouveau président du parti vire à l'énorme sac de noeuds. Tandis que toute la soirée, l'écart est resté extrêmement serré entre les deux candidats à la succession de Nicolas Sarkozy, voilà que chacun s'accuse mutuellement de fraudes et revendique la victoire pour Copé, et, pour Fillon, une avance qui serait désormais déterminante.

Il est 23h30 lorsque Jean-François Copé descend du dernier étage du siège du parti, rue de Vaugirard. «Les militantes et les militants de l'UMP viennent aujourd'hui de m'accorder une majorité suffisante et de m'élire comme président», annonce-t-il, exprimant sa «grande reconnaissance et [sa] grande émotion». Il va jusqu'à lancer un appel à son rival: «Je souhaite dès maintenant que l'on travaille main dans la main.» D'après son ami Christian Jacob, chef des députés UMP, son avance serait de 1058 voix si l'on écarte les bureaux de vote posant problème, ou de 508 si on les prend en compte.
«Je ne lâcherai rien»
Alors que les partisans de Copé, emballés, chantent la Marseillaise et crient victoire dans le hall, Laurent Wauquiez, lieutenant de François Fillon, est venu rencontrer la Commission d’organisation et de contrôle des opérations électorales de l'UMP (Cocoe). «A ce stade, 14 départements ont été validés. Personne ne peut prétendre avoir gagné, sauf à vouloir forcer la main du destin», freine le candidat à la vice-présidence de l'UMP. Wauquiez joue la modestie: «Compte tenu des résultats qui sont remontés, on considère qu'on est en avance.» Et appelle à patienter tranquillement: «Le score est serré, ce qui peut générer des tensions».
Vingt minutes après l'annonce de son concurrent, c'est François Fillon lui-même qui monte au créneau. Depuis le café du VIIe arrondissement de Paris où il passait la soirée entouré de ses proches, l'ex-Premier ministre, il proclame: «Nous avons remonté tous les résultats, il me donnent une courte victoire de 224 voix. Ils ne seront définitifs que lorsque la Cocoe les aura proclamés.» Fillon, qui dit «attendre avec sérénité» le dénouement de cette rocambolesque soirée, met en garde Copé: «Je ne laisserai pas voler la victoire aux militants. Je ne lâcherai rien.» Et ses proches se lamenter de la mauvaise manière de Copé, qui grille la politesse à la commission chargée de veiller au bon déroulé du scrutin.
«Procurations particulièrement surprenantes»
Avant ce surréaliste échange entre les deux belligérants, leurs proches avaient déjà fait monter la tension en dénonçant des «irrégularités» lors du vote. «Dans la première circonscription des Alpes-maritimes (une partie de Nice, ndlr), 1178 enveloppes ont été glissées dans l'urne alors que 500 signatures ont été relevées sur la liste d'émargement», rapporte Marc-Philippe Daubresse, depuis le siège. Le député proche de Copé annonce saisir la Commission d’organisation et de contrôle des opérations électorales (Cocoe) et demande «solennellement» à François Fillon qu'il «mette de l'ordre dans son équipe». Sont évidemment visés Eric Ciotti, directeur de campagne de l'ex-Premier ministre et député de la première circonscription des Alpes-maritimes, et Christian Estrosi, député-maire de Nice et autre soutien de Fillon.
Copé porte également réclamation auprès de la Cocoe – chargée de veiller au bon déroulement du scrutin – concernant les résultats du deuxième bureau de vote du XVIe arrondissement de Paris «où un écart de 40 voix a été constaté entre les enveloppes et les émargements», selon un proche de Copé qui précise : «Ce bureau était tenu par Monsieur Gaboriau qui ne compte pas parmi les soutiens de Jean-François.»
L'équipe de Fillon n'était pas en reste. Jérôme Chartier, porte-parole du candidat, a dénoncé des «procurations particulièrement surprenantes et distribuées de façon anormale» dans le départements des Bouches-du-Rhône et un nombre supérieur de votants sur le nombre d' inscrits sur les listes d'émargement à Toulouse. «Ce sont deux exemples parmi d'autres», prévient Jérôme Chartier.

Par LAURE EQUY