Coup de tonnerre/Braquage BCEAO, Me Habiba Touré: "cette condamnation n'a jamais été signifiée au Président Gbagbo"

Par Ivoirebusiness- Coup de tonnerre/Braquage BCEAO, Me Habiba Touré révèle "cette condamnation n'a jamais été signifiée au Président Gbagbo".

La Commission Électorale Indépendante (CEI) maintient l’exclusion de l’ancien président Ivoirien de la liste des électeurs, publiée ce samedi 20 mai 2023. L’ex-chef de l’État ne pourra pas voter aux élections locales prévues le 2 septembre prochain. Si Laurent Gbagbo a été acquitté par la justice internationale de crimes contre l’humanité commis lors de la crise post-électorale de 2010-2011, il reste, selon la justice, sous le coup d’une condamnation à vingt ans de prison en Côte d’Ivoire pour le « braquage » de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) en 2011. Malgré la grâce accordée par le président Alassane Ouattara l’an dernier dans cette affaire, il reste déchu, toujours selon la justice de ses droits civiques et politiques. Invitée à un débat télévisé sur Life TV, ce lundi 22 mai 2023, Me Habiba Touré, après avoir fait un cour magistrale sur la procédure pénale en Côte d'Ivoire, a révélé que cette condamnation n'avait jamais été signifiée à Laurent Gbagbo.

« Cette condamnation du braquage de la BCEAO n'a jamais été signifiée au président Laurent Gbagbo. M Kuibiert-Ibrahime Coulibaly a l'air bien plus informé que l'intéressé lui-même. Mais maintenant, si lui, il dit que dans cette décision, il est marqué noir sur blanc que le président Laurent Gbagbo est déchu de ses droits civils et politiques, mais qu'il la publie. Je mets d'ailleurs au défi n'importe qui, détenteur de cette décision de la publier et que les Ivoiriens voient si dans cette décision, on a retiré au président Laurent ses droits civil et politique », a-t-elle lancé. Selon Me Habiba Touré, « dans un pays de droit, dans un pays qui a un code de procédure pénale comme la Côte d'Ivoire, quand on veut vous poursuivre, on doit vous en informer. Cet acte est remis par un commissaire de justice. On appelle cela la signification. En droit, on dit que la signification doit être faite à personne. C'est-à-dire, ce commissaire de justice doit venir vous voir vous-mêmes pour vous remettre l'acte. La signification à personne, comment ça se passe ? Avant toute procédure, par définition, vous n'avez pas encore un avocat puisqu'il n'y a pas de procédure. C'est quand on vous signifie, que vous êtes informés qu'il y a une procédure et que vous prenez un avocat. Quand on veut vous poursuivre, on vous envoie l'acte, que vous prenez attache avec votre avocat. Puis vous dites à votre avocat d'aller vous représenter éventuellement au civil ».

Me Habiba Touré précise par ailleurs que « au pénal, cette représentation est impossible. Autrement dit, au pénal, vous avez l'obligation de comparaître. Si vous ne comparaissez pas, on rend un jugement par défaut. Ça veut qu'on constate que vous n'êtes pas présents alors que vous avez été dûment convoqués. Voilà que l'État de Côte d'Ivoire a transféré le président Laurent Gbagbo à la CPI. Donc ils savent très bien où il est. Mieux, ils signent un accord de coopération judiciaire avec la CPI. Encore mieux, ils vont ratifier le statut de Rome. Ça veut dire qu'il y aura une coopération absolue entre la CPI et la Côte d'Ivoire. Donc, lorsque vous voulez poursuivre Laurent Gbagbo, c'est un droit. Il n'y a pas de problème avec cela. Étant qu'il y a des accords de coopération, vous saisissez la CPI en lui disant que vous souhaitez entendre Laurent Gbagbo, tel jour, à telle heure, pour tel motif. Comme on coopère, ramenez-le nous, et après le procès, vous le reprendrez. C'est comme ça que ça se passe dans un État de droit. Mais qu'est-ce-qu'il s'est passé ? Le président Laurent Gbagbo ne va pas être informé. C'est par voie de presse qu'il va apprendre sa condamnation. Il n'a même pas été informé de la convocation à plus forte raison de la condamnation. C'est ce qui est gravissime », a-t-elle conclu.

Selon Dakoury Tabley qui était gouverneur de la BCEAO à cette époque, le vrai braquage de cette institution a eu lieu en 2003. À l'en croire, ce procès n’aurait jamais dû avoir lieu, pour la simple raison que le délit n’est pas constitué. Il a expliqué que la BCEAO n’avait jamais été braquée en 2011 et encore moins par le Président Gbagbo et ces trois co-accusés. « Observons qu’on nous a parlé à profusion du "braquage", mais rien n’a jamais été dit sur le mode opératoire des "braqueurs". Comment les prétendus voleurs s’y sont-ils pris pour dévaliser l’Agence Principale de la BCEAO sis à Abidjan Plateau ? L’Accusation est curieusement évasive sur ce sujet, de la même façon qu’elle fait preuve d’une grande discrétion sur les montants dérobés. Mais la réalité la plus déroutante est que la Banque Centrale n’a jamais porté plainte après ce "braquage". Mieux, avant le procès, la BCEAO et les banques commerciales, que le Pouvoir a tenté d’embarquer dans ce coup tordu, ont fait connaître, par écrit, qu’elles n’ont subi aucun préjudice de la part de qui que ce soit. (...) Le vrai braquage de la BCEAO a eu lieu en 2003 et a concerné principalement les agences de Bouaké et Man. Malgré les plaintes de la Banque, les auteurs de ces forfaits, quoique connus, courent toujours et ont aujourd’hui pignon sur rue en Côte d’Ivoire », avait-il confié.

Yannick_LAHOUA
by Yannick_LAHOUA (via Opera News )