Côte d'Ivoire : les victimes de l'attaque de Duékoué tiennent les "Dioulas" pour responsables
Le 24 juin 2012 par Jeune Afrique - les victimes de l'attaque de Duékoué tiennent les "Dioulas" pour responsables.
Les victimes en majorité guérés d'une attaque commise vendredi 20 juillet dans le camp de réfugiés de Duékoué, accusent les Dioulas, originaires du nord de la Côte d'Ivoire, d'être à l'origine du drame.
Pour les déplacés de l’ethnie guéré, pas de doutes sur l’identité des « tueurs » qui ont attaqué, vendredi 20 juillet, leur camp de Duékoué, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. D’après eux, ce sont les « Dioulas », nom générique donné aux ethnies originaires du nord du pays.
Cendres encore fumantes, tentes déchiquetées, bâches déchirées : le camp de Nahibly, qui accueillait quelque 5 000 personnes à l'entrée de Duékoué, est en ruines. Vendredi, une foule venue de la ville a attaqué et incendié ce site gardé par des Casques bleus de l’Onuci, en représailles à la mort de quatre personnes dans un quartier dioula de Duékoué. Au moins neuf personnes ont été tuées lors du raid.
Devant la mairie, une centaine de personnes, surtout des femmes et des enfants, se sont réfugiées après la flambée de violence. « Les Dioula sont rentrés, ils sont venus contre nous », raconte Dérothée Téhé, en tenant sa fillette dans les bras. « À Duékoué, ils ne veulent plus voir les Guérés », assure-t-elle.
Comme cette mère, la majorité des pensionnaires du camp étaient des autochtones guérés, qui entretiennent depuis longtemps des relations explosives avec les « Dioulas ». Ce contentieux historique, alimenté par des problèmes fonciers, a été aggravé par la crise postélectorale de 2010-2011 : les « Dioulas » sont considérés comme des partisans du président Alassane Ouattara, tandis que les Guérés sont vus comme favorables à l'ex-chef de l'État, Laurent Gbagbo.
Machettes, couteaux, haches... et FRCI
Les militaires ivoiriens des Forces républicaines (FRCI) sont aussi mis en cause. « Les FRCI ont tiré, ont tué des gens », tonne un déplacé, plein d'une colère froide. « Dites au président de la République que la population de Duékoué lui dit de changer l'armée de Côte d'Ivoire », lance de son côté Sebon Dakin, un lycéen de 21 ans. Pour lui, l'armée actuelle est surtout composée « de jeunes Dioulas ».
Les FRCI comptent beaucoup d'ex-rebelles pro-Ouattara venus du Nord. Ils avaient été déjà mis en cause lors des tueries de Duékoué en mars 2011, qui avaient fait des centaines de morts. Le lycéen n'épargne pas non plus les soldats de la paix marocains : « devant l'Onuci, on nous tue, on brûle des gens ». « Les Marocains ont fui pour nous laisser », dénonce aussi Dérothée. « Machettes, couteaux, haches, c'était la mort », se souvient cette mère, encore choquée.
De son côté, Ndolamb Ngokwey, coordonnateur humanitaire des Nations unies en Côte d'Ivoire, défend l'Onuci : la dizaine de Casques bleus présents au camp ont été « débordés » par « plus d'un millier de personnes ». Il s'en remet aux résultats de l'enquête à venir.
Quant à l’armée ivoirienne, elle a expliqué n'avoir pu contenir une « population en furie », malgré le déploiement en urgence de ses hommes. Son chef, le général Soumaïla Bakayoko, était sur les lieux dimanche. « Nous ne pouvons pas autoriser que des gens se fassent justice », jure-t-il, promettant de renforcer la présence des forces régulières et de limiter l'emprise des « dozos », chasseurs traditionnels redoutés devenus des forces supplétives des FRCI.
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Côte d'Ivoire : les FRCI et leurs supplétifs "dozos" impliqués dans l'attaque de Duékoué ?
La réconciliation ivoirienne est-elle un vain mot ou un voeu pieux ? De nombreuses sources, relayées par la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (Lidho), accusent les FRCI d'avoir participé à l'attaque contre un camp de déplacés près de Duékoué, le 27 juillet. Bilan : au moins sept morts, selon l'ONU, une dizaine, selon l'ONG.
Et si rien n’avait vraiment changé dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire avec l’arrivée de Alassane Ouattara au pouvoir - tout au plus une simple inversion des rôles ? Si la question est gênante, elle n'est sûrement pas dénuée de pertinence à l'heure d'évaluer la politique de réconciliation nationale que les autorités ont promise. De fait, près de Duékoué, vendredi 27 juillet, l’attaque du camp de Nahibly, plein de déplacés de la crise postélectorale de 2010-2011 et issus « en majorité de l’ethnie guéré », a fait au moins sept morts, selon l’ONU. Neuf, selon des sources locales consultées par l'AFP.
Le massacre s’explique par des représailles après la mort de quatre personnes dans un quartier malinké (ou dioula, ethnie originaire du Nord) de Duékoué. Le gouvernement et l’Onuci, dont les militaires ont dit avoir été débordés par la foule des assaillants, se rejettent la responsabilité du drame. Mais la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (Lidho) semble pencher vers la thèse de l’implication de militaires des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), donc du gouvernement.
"Éléments identifiés"
L’attaque a été menée par « des assaillants composés de jeunes Malinkés, avec le soutien des chasseurs traditionnels appelés "dozos" et d’éléments identifiés comme membres des FRCI », indique un communiqué de l’organisation écrit par son président, René Legré Hokou. La Lidho « est profondément indignée par la passivité coupable tant des soldats onusiens que des forces de sécurité ivoiriennes qui ont abandonné des populations civiles entre les mains des assaillants », poursuit le document, qui qualifie les faits de « barbarie ».
Selon la Lidho, l’attaque s’est en effet soldée par « au moins une dizaine de morts dont un homme brûlé vif, des dizaines de blessés, des personnes enlevées et plusieurs personnes réfugiées dans les forêts ». Des déplacés et d’autres sources locales interrogées par l`AFP ont confirmé que des FRCI ont pris part à l’assaut. L’ONG « interpelle » le président Alassane Ouattara et le chef de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci), Bert Koenders, sur « leur responsabilité de protection et de secours humanitaires ».
(Avec AFP)
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